La ZNIEFF des bois et prairies du Bassigny et de la vallée de la Meuse entre Harréville-les-Chanteurs au nord et Meuvy au sud occupe un territoire de 11 930 hectares, dans le département de Haute-Marne. Elle est incluse dans la Z.I.C.O. n°10 (portant sur le Bassigny) de la directive Oiseaux. Un projet de ZPS est en cours d'élaboration. Elle comprend cinq ZNIEFF de type I qui reprennent en détail certaines de ses richesses naturelles.
Elle représente surtout un vaste ensemble de milieux prairiaux (61% de la superficie totale ), des forêts (37%), des cultures enclavées (10%) et ponctuellement des marais, des plantations résineuses et des pelouses calcaires.Plusieurs villages font également partie de la ZNIEFF.Ils ont un intérêt avifaunistique important (notamment huppe fasciée, espèce anthropophile de la liste rouge, effraie, hirondelles, martinet) et mammalogique (colonie de reproduction du petit rhinolophe à Bourmont).
Le réseau hydrographique est constitué par la Meuse et ses affluents (rivière du Mouzon, ruisseaux du Flambart, de la Hourie, du Grand Etang, des Vaux, de la Ville, de Malincourt, etc). Certains ruisseaux, très carbonatés, sont à l'origine de formations tufeuses très ponctuelles avec cascades et goures (Combe de l'Ermitage Saint-Jean).
La végétation prairiale des vallées est restée typique. La gamme des groupements est très étendue en fonction de la nature du sol, de l'inondation ou du traitement (fauche, pâture ou traitement mixte) : dans les zones peu ou pas inondées, les prairies de fauche relèvent de l'Arrhenatherion elatioris, les prairies pacagées du Cynosurion cristati. Les prairies appartenant au Bromion racemosi (fauché ou pâturé) et à l'Oenanthion fistulosae occupent les secteurs humides.
Les prairies sont riches en graminées (avoine élevée, fétuque rouge, vulpin des prés, houlque laineuse, flouve odorante) et en légumineuses (trèfle rampant, trèfle des prés, gesse des prés, lotier corniculé, ray-grass anglais, agrostis vulgaire). Elles sont accompagnées par la cardamine des prés, le plantain lancéolé, le crépis bisannuel, la renoncule âcre, la renoncule rampante, la centaurée jacée, le trèfle blanc, l'oseille sauvage, l'orchis bouffon... Dans les zones plus humides, les prairies sont souvent alternativement fauchées et pâturées : la flore s'enrichit en espèces hygrophiles telles que l'œnanthe fistuleuse, le séneçon aquatique, le léontodon d'automne, le lychnis fleur de coucou, l'achillée sternutatoire, le myosotis cespiteux, le colchique des prés, la laîche aiguë, la succise des prés, l'orchis à larges feuilles...
Deux espèces inscrites sur la liste rouge des végétaux de Champagne-Ardenne s'y observent : le vulpin utriculé et l'œnanthe à feuilles de peucédan (espèce d'origine subatlantique, en limite d'aire de répartition en Champagne).
Localement se rencontre dans les secteurs les plus inondés de la vallée un groupement très hygrophile, avec une prédominance des laîches (notamment la laîche des renards, la laîche des rives, la laîche bleuâtre, la laîche aiguë...) accompagnées par l'œnanthe fistuleuse, la véronique scutellaire, le gaillet des marais, la lysimaque nummulaire, la canche cespiteuse, le populage des marais, le jonc aggloméré.
Les types forestiers sont très représentatifs de la région est du département de la Haute-Marne : chênaie-charmaie-hêtraie calcicole (largement dominante), chênaie-charmaie mésotrophe à acidiphile au niveau du plateau (très ponctuelle, sur placages limoneux), chênaie pubescente localisée dans les secteurs les plus chauds et secs des pentes sud (avec des végétations associées de lisières thermophiles et de pelouses), érablière sur les gros éboulis, hêtraie froide sur pente mieux stabilisée et d'orientation nord, chênaie pédonculée-frênaie-érablaie de fond de vallon et aulnaie-frênaie dans les dépressions. Plusieurs ZNIEFF de type I plus détaillées correspondent à des secteurs boisés (Bois Saint-Joseph et du Coteau Gillot à Harréville-les-Chanteurs, combe boisée de l'Ermitage Saint-Jean à Goncourt, Bois de Gonaincourt, Bois de la Sergente à Chaumont-la-Ville…). De nombreuses espèces végétales protégées ou inscrites sur liste rouge régionale ou encore rares au niveau départemental s'y observent, notamment la corydale bulbeuse (trois stations haut-marnaises actuellement connues pour cette espèce habituée des montagnes), la vesce à feuilles de pois, espèce continentale, rare en France (où elle ne se rencontre qu'en Champagne, Bourgogne et Lorraine) et protégée régionalement, l'arabette glabre, espèce eurasiatique rare dans la région et en régression (sauf dans l'est de la Haute-Marne où elle se maintient encore), la potentille à petites fleurs, méditerranéenne en limite d'aire (localisée dans les lisières de la chênaie pubescente), la cynoglosse germanique (originaire des montagnes d'Europe centrale, localisé sous certaines falaises et gros rochers éboulés) l'épipactis pourpre (assez rare dans la région), la stellaire des bois (montagnarde en limite d'aire en Haute-Marne), le cerisier à grappes (rare dans la région, localisé ici dans l'aulnaie-frênaie), la violette blanche (en limite d'aire), la pulmonaire obscure…
La rivière et les ruisseaux possèdent çà et là une végétation aquatique ou de bord des eaux constituée par le nénuphar jaune, le potamot à feuilles flottantes (inscrit sur la liste rouge régionale), le potamot à feuilles crépues, la glycérie flottante, la renoncule à feuilles capillaires, le rubanier rameux, le jonc fleuri, l'œnanthe aquatique, la petite berle la prêle des eaux, la véronique mouron d'eau, le cresson de fontaine, etc. Ponctuellement dans la vallée, au niveau de certaines noues se sont installées des végétations marécageuses surtout constituées par des mégaphorbiaies (à reine des prés, épiaire des marais, iris faux-acore, cirse des marais, épilobe hirsute, salicaire...), des cariçaies à grandes laîches (laîche distique, laîche des rives, laîche des marais, laîche vésiculeuse) et des roselières (à phragmite, typhe à larges feuilles et baldingère).
L'entomofaune, et plus particulièrement les libellules, présente la même tonalité biogéographique montagnarde qu'une partie de la flore, notamment le cordulégastre annelé, le cordulégastre bidenté et le gomphe vulgaire pour ne citer que les espèces de la liste rouge régionale.
Les amphibiens sont bien représentés ici avec le crapaud accoucheur et le sonneur à ventre jaune : ils sont inscrits tous les deux à l'annexe II et/ou IV de la directive Habitats, à l'annexe II de la convention de Berne, dans le livre rouge de la faune menacée en France et, de même que la salamandre tachetée, sur la liste rouge régionale. On y rencontre également le triton alpestre (lui aussi inscrit sur la liste rouge nationale, catégorie "vulnérable"), le triton palmé, le triton ponctué, le crapaud commun, les grenouilles vertes et rousses. Les reptiles sont représentés par la couleuvre verte et jaune (inscrite sur la liste rouge régionale), le lézard vivipare et la couleuvre à collier
Le Bassigny est d'un grand intérêt avifaunistique avec, sur les 125 espèces inventoriées, treize espèces nicheuses inscrites sur la liste rouge régionale des oiseaux menacés en Champagne-Ardenne. Les herbages accueillent ainsi le courlis cendré, le tarier des prés et le vanneau huppé. Ils constituent en plus un territoire de chasse essentiel pour le faucon hobereau, le milan noir et le milan royal. Ce dernier, en régression spectaculaire (baisse de 90% des effectifs en moins de 15 ans) fait l'objet d'une attention particulière dans la ZICO du Bassigny qui représente le dernier "bastion" régional pour ce rapace, dont la population est régulièrement étudiée depuis 1996.
La bonne présence des haies permet la reproduction des trois espèces de pies-grièches : la pie-grièche écorcheur est la moins rare des trois, bien quelle soit, elle aussi, en régression ; on trouve encore quelques couples de pies-grièches à tête rousse (situés en limite nord-est de répartition en Champagne-Ardenne), alors que la pie-grièche grise est au bord de l'extinction. Les villages accueillent quelques couples de huppe fasciée (c'est une des espèces d'oiseaux qui a le plus reculé ces dernières années en Champagne-Ardenne), notamment à Bourmont, Brainville-sur-Meuse, Clefmont, Huilliécourt, Nijon et Soulaucourt-sur-Mouzon.
Dans les forêts, les vieilles chênaies sont le domaine des pics et notamment le pic mar, mais aussi du gobemouche à collier (re)trouvé en 2002 dans les bois de la Voivre et Banal (6 chanteurs) : ce dernier, très rare en France, est situé, en Haute-Marne, à sa limite sud-ouest de répartition mondiale. Il existe aussi une petite population de grimpereau des bois, également en limite de répartition occidentale en Champagne-Ardenne.
Les herbages constituent des zones de chasse privilégiées pour de nombreux rapaces (milan royal, faucon crécerelle, buse variable, autour des palombes, épervier d'Europe, bondrée apivore…). D'autres espèces plus communes fréquentent assidûment les prairies, comme par exemple le tarier pâtre, le pipit farlouse, l'alouette des champs, l'hypolaïs polyglotte, le bruant proyer, le bruant jaune…
Les zones marécageuses abritent les nids du bruant des marais et de la rousserolle effarvatte. Le martin pêcheur et la bergeronnette des ruisseaux nichent aussi dans la ZNIEFF.
Les bois sont habités par de nombreux pics (vert, noir, épeiche, mar, épeichette), grives (musicienne, litorne, draine), par le pigeon ramier, l'accenteur mouchet, le rougequeue à front blanc, le roitelet huppé, le grosbec casse noyaux, la sittelle torchepot, ainsi que par de nombreux pouillots, mésanges et fauvettes.
Les vallées de la Meuse et du Mouzon sont très importantes au niveau des stationnements migratoires, particulièrement en fin d'hiver et début du printemps lorsque les vallées sont inondées, notamment pour les anatidés (canard siffleur, ,canard chipeau, sarcelle d'hiver, canars pilet, sarcelle d'été, canard souchet), les rapaces (busard des roseaux, busard Saint-Martin, busards cendrés, faucon pèlerin), la grue cendrée, certains limicoles (pluvier doré, bécasseau variable, combattant varié, chevalier gambette, chevalier aboyeur), le traquet motteux, la grive mauvis, le tarin des aulnes, le gobemouche noir, etc.
De nombreux mammifères fréquentent la zone, notamment dans les milieux humides la musaraigne aquatique (protégée) et le putois, inscrits tous les deux sur la liste rouge régionale, le blaireau, le sanglier, le chevreuil, le renard, l'hermine, la belette, la fouine et le chat sauvage. Il est à signaler ici la présence d'une colonie de reproduction de petit rhinolophe installée dans la mairie de Bourmont : protégé depuis 1981 en France, il est inscrit à l'annexe II de la convention de Berne, aux annexes II et IV de la directive Habitats et dans le livre rouge de la faune menacée en France (catégorie vulnérable).
Les réelles qualités paysagères de la ZNIEFF sont appréciées par les promeneurs et les touristes qui la fréquentent. Localement (ZNIEFF I de Gonaincourt) on observe une particularité géologique intéressante due à la présence d'un site karstique avec une petite grotte de diaclase. Elle possède aussi un intérêt ethnologique en liaison avec le souvenir de l'Ermitage Saint-Jean dont il subsiste quelques ruines.
La ZNIEFF est dans un bon état général.
La ZNIEFF englobe la partie la plus typique et la plus riche de ce secteur du Bassigny et de la vallée de la Meuse qui lui est rattachée depuis Harréville-les-Chanteurs au nord jusqu'à Meuvy au sud ; à l'est, la ZNIEFF est limitée par la "frontière" interdépartementale Vosges/ Haute-Marne.