ZNIEFF 220005030
MARAIS DE LA SOUCHE

(n° régional : 02CHP102)

Commentaires généraux

DESCRIPTION

Les marais de la Souche occupent un élargissement de la vallée de la Souche et la partie aval de petites vallées adjacentes. La très faible pente des fonds de vallée a conduit à l’apparition de vastes marais.

Le contexte géologique extérieur au site se résume principalement aux limons du plateau marlois (au nord) et aux sables de Sissonne (au sud), qui recouvrent la craie blanche sénonienne. Le site proprement dit repose sur des alluvions modernes tourbeuses et sur de la tourbe, dont les gisements atteignent, localement, plusieurs mètres de profondeur.

Les marais présentent une grande variété d’habitats aquatiques et amphibies (seuls les groupements les plus intéressants ou les plus structurants des paysages de la Souche sont cités) :

- herbiers à Characées du Charion asperae ;

- herbiers flottants du Lemnion gibbae ;

- herbiers flottants du Riccio-Lemnion trisulcae ;

- herbiers flottants de l’Hydrocharition morsus-ranae (Lemno trisulcae-Utricularietum vulgaris) ;

- herbiers du Scorpidio-Utricularion minoris (Sparganietum minimi) ;

- divers herbiers submergés (Ceratophyllum demersum groupement, Zannichellietum palustris,…) ;

- herbiers submergés du Potamion pectinati (Potametum berchtoldii-Najadetum marinae, Potametum trichoidis, Potametum colorati,…) ;

- herbiers hélophytiques des eaux courantes du Glycerio maximae-Sparganion ;

- herbiers à Nénuphars du Nymphaeion albae (Myriophyllo-Nupharetum, Nymphaetum occidentalis) ;

- tremblants pionniers à Thélyptéride des marais (Thelypteris palustris) ;

- tremblants acidophiles à Laîche lisse (Carex lasiocarpa*), du Junco subnodulosi-Caricion lasiocarpae ;

- roselières du Phragmition (Schoenoplectum lacustris, Solano dulcamarae-Phragmitetum) ;

- roselières du Caricion rostratae (Thelypterido-Phragmitetum, Lathyro palustris-Lysimachiatum, Caricetum appropinquatae) ;

- cladiaies turficoles (Cladietum marisci) ;

- diverses cariçaies rivulaires (Caricetum ripario-acutiformis, Caricetum paniculatae, Caricetum pseudocyperi) ;

- végétation pionnière des rives tourbeuses du Cyperion flavescenti-fusci (Cyperetum flavescenti-fusci) ;

- bas-marais alcalins de l’Hydrocotylo-Schoenion (Cirsio-Schoenetum, Hydrocotylo-Juncetum subnodulosi) ;

- prairies humides, oligotrophes du Molinion (Selino-Juncetum subnodulosi), auxquelles il faut ajouter certaines d'entre elles se rapprochant du Caricion davallianae (Orchio palustris-Shoenetum) ;

- prairies mésotrophes mésophiles à Colchique des prés (Colchicum autumnale) ;

- prairies pacagées eutrophes du Cynosurion cristati ;

- mégaphorbiaies turficoles du Thalictro flavi-Filipendulion ulmariae ,

- mégaphorbiaies eutrophes du Calystegion sepium ;

- bétulaies à sphaignes, assimilées à des tourbières boisées (Dryopterido cristatae-Betuletum pubescentis) ;,

- saulaies-aulnaies tourbeuses de l’Alnion glutinosae ;

- aulnaies-frênaies médio-européennes de l’Alno-Padion (Pruno padi-Fraxinetum).

Les nombreux étangs qui ouvrent le site sont issus de l’exploitation ancienne de la tourbe, pour la plupart, mais aussi du creusement d’étangs de pêche, depuis quelques années.

Les groupements aquatiques et hélophytiques sont particulièrement bien représentés dans le « Marais Saint-Boétien », tandis que les groupements des roselières et des gouilles tourbeuses sont bien exprimés dans la réserve naturelle de Vesles-et-Caumont. Les quelques prairies, qui persistent dans les marais de la Souche, sont situées près de Chivres-en-Laonnois et, jusqu’à une période proche, près de Sissonne. On les retrouve de façon très éparse ailleurs.

La périphérie des marais accueille quelques groupements xérophiles en étroite liaison fonctionnelle :

- les pelouses calcaro-sableuses (« Ferme de Bernicourt », « Punisimont »), rattachées en partie au Koelerio-Phleion ;

- les pelouses acides, très fragmentaires, du Corynephorion du « Bois de Liesse » ;

- les ourlets calcicoles du Geranion sanguinei, situés en lisière du « Bois de Liesse » ;

- les landes relictuelles du Calluno-Genistion pilosae (« Bois de Liesse »).

En fond de vallée, des peupleraies, des fourrés denses de saules et des mégaphorbiaies eutrophes complètent le site.

INTERET DES MILIEUX

Milieux rares en Europe et inscrits, à ce titre, à la directive "Habitats" de l'Union Européenne :

- herbiers à Characées du Charion asperae ;

- végétation pionnière des rives tourbeuses du Cyperetum flavescenti-fusci, groupement qui a perdu de sa richesse floristique sur le site ;

- tremblants acidophiles à Laîche lisse (Carex lasiocarpa*), exceptionnels en Picardie ;

- herbiers aquatiques du Riccio-Lemnion trisulcae, de l’Hydrocharition morsus-ranae, du Nymphaeion albae et du Potamion pectinati, tous en grande régression en Picardie et pour lesquels la vallée de la Souche représente un réservoir très important en terme de conservation ;

- roselières du Caricion rostratae (Thelypterido-Phragmitetum, Lathyro palustris-Lysimachiatum), rares à l’échelle nationale ;

- cladiaies subatlantiques, rares en Picardie ;

- bas-marais alcalins de l’Hydrocotylo-Schoenion (Cirsio-Schoenetum) ;

- prairies humides oligotrophes du Molinion (Selino-Juncetum subnodulosi), en grande régression ;

- mégaphorbiaies turficoles du Thalictro flavi-Filipendulion ulmariae, qui sont, en Picardie, principalement localisées en vallée de la Somme ;

- tourbières boisées du Dryopterido cristatae-Betuletum pubescentis, très rares en France ;

- systèmes boisés hygrophiles de l’Alno-Padion (Pruno padi-Fraxinetum) et de l’Alnion glutinosae (représenté ici surtout par le Filipendulo ulmariae-Alnetum), très menacés par la régression généralisée des zones humides, par la plantation de peupliers et par l’absence de régénération des milieux ;

- pelouses calcaro-sableuses, rattachées en partie au Koelerio-Phleion. Ces dernières, entourant la « Ferme de Bernicourt », sont particulièrement originales et probablement non décrites d’un point de vue phytosociologique ;

- ourlets calcicoles du Geranion sanguinei, surtout représentés dans le Laonnois en Picardie ;

- landes relictuelles du Calluno-Genistion pilosae.

Milieux d’intérêts régional à national :

- herbiers du Sphagno-Utricularion minoris, exceptionnels et menacés en Picardie ;

- herbiers du Scorpidio-Utricularion minoris (Sparganietum minimi), cantonnés aux zones tourbeuses de la région ;

- divers herbiers submergés (Ceratophyllum demersum groupement Zannichellietum palustris,…) ;

- tremblants pionniers à Thélyptéride des marais (Thelypteris palustris), formation pionnière en régression ;

- roselières du Phragmition (Scirpo lacustris-Phragmitetum, Solano dulcamarae-Phragmitetum), remarquables pour l’avifaune et les odonates ;

- bords d’étang du Caricetum appropinquatae, très rares en Picardie ;

- Hydrocotylo-Juncetum subnodulosi, très rare en Picardie ;

- Caricion davallianae (Orchio palustris-Shoenetum), remarquable au niveau national, mais disparu du site ;

- pelouses acides très fragmentaires, du Corynephorion du « Bois de Liesse ».

Grande diversité des milieux aquatiques et amphibies, remarquable dans cette région agricole.

Roselières permettant la reproduction d’espèces animales rares.

Etangs constituant une halte migratoire et hivernale importante pour les oiseaux d’eau.

INTERET DES ESPECES

Dans les zones humides :

- le Mouron délicat (Anagallis tenella*), présent sur les rives exondées ;

- la Laîche puce (Carex pulicaris*), très rare en Picardie ;

- le Comaret des marais (Comarum palustre*), retrouvé récemment ;

- le Dactylorhize négligé (Dactylorhiza praetermissa*), présent dans les prés tourbeux ;

- le Dryoptéride à crête (Dryopteris cristata*), dont les principales populations françaises se trouvent en Picardie ;

- la Gesse des marais (Lathyrus palustris*), bien représentée dans la réserve naturelle de Vesles-et-Caumont ;

- le Ményanthe trèfle-d’eau (Menyanthes trifoliata*), en danger de disparition ;

- la Pédiculaire des marais (Pedicularis palustris*) ;

- le Peucédan des marais (Peucedanum palustre*), rare, surtout présent dans la vallée de la Somme ;

- le Potamot rougeâtre (Potamogeton coloratus*), qui préfère les gouilles et les fossés tourbeux ;

- la Renoncule langue (Ranunculus lingua*), qui croît dans les roselières ;

- le Saule à feuilles étroites (Salix repens ssp. angustifolia*), dont presque toutes les stations françaises se trouvent dans l’Aisne ;

- le Séneçon des marais (Senecio paludosus*), hôte des roselières tourbeuses ;

- le Rubanier nain (Sparganium natans*), rare en Picardie ;

- l’Utriculaire naine (Utricularia minor*), exceptionnelle en Picardie ;

- l’Utriculaire commune (Utricularia vulgaris*), exceptionnelle en Picardie ;

- le Blongios nain (Ixobrychus minutus), en danger en Europe et inscrit à la directive "Oiseaux" ;

- le Butor étoilé (Botaurus stellaris), en danger de disparition en France ;

- la Rousserolle turdoïde (Acrocephalus arundinaceus), inscrite sur la liste rouge des oiseaux nicheurs de Picardie ;

- le Triton crêté (Triturus cristatus), inscrit à la directive "Habitats" ;

- la Rainette arboricole (Hyla arborea), espèce thermophile rare en Picardie ;

- la Leucorrhine à gros thorax (Leucorrhinia pectoralis*), menacée d’extinction en Europe et inscrite à la directive "Habitats" ;

- la Leucorrhine à large queue (Leucorrhinia caudalis*), qui compte moins de vingt stations en France ;

- le Sphinx de l’Epilobe (Proserpinus proserpina*), au statut précaire en France ;

- la Phalène sagittée (Perizoma sagittata), très rare en France.

Sur les lisières du bois de Liesse, on trouve :

- l’Anémone sauvage (Anemone sylvestris*), rare en France ;

- la Gentiane croisette (Gentiana cruciata*), en grande régression ;

- l’Azuré de la Croisette (Maculinea alcon rebeli*), dont les chenilles se nourrissent de l’espèce précédente.

Sur l’ensemble de la zone, ont également été notés :

- l’Aigle botté (Hieraaetus pennatus), dont les marais de la Souche furent l’unique site de nidification de Picardie pendant quelques années ;

- la Huppe fasciée (Upupa epops), dont la Souche accueille l’un des derniers couples de Picardie ;

- la Pie-grièche grise (Lanius excubitor), qui trouve ici des conditions favorables au maintien de l’un de ses plus gros noyaux de population picards.

Le marais a, aujourd’hui, perdu beaucoup de son intérêt patrimonial, comme en témoigne la disparition probable des espèces suivantes : Coenonympha tullia*, Armeria arenaria*, Carex diandra*, Carex lasiocarpa*, Dactylorhiza incarnata*, Erica tetralix*, Eriophorum latifolium*, Eriophorum polystachion*, Galium boreale*, Gentiana pneumonanthe*, Gentianella campestris, Limosella aquatica, Inula salicina*, Pinguicula vulgaris*, Rubus saxatilis*, Sium latifolium*, Veronica scutellata* ...

Ces espèces étaient, pour la plupart, encore notées dans les années 1975-1980.

FACTEURS INFLUENCANT L’EVOLUTION DE LA ZONE

- Mise en place d’un programme européen de préservation des tourbières (Life), qui permettra de gérer quelques sites remarquables en faveur de la faune et de la flore.

- Création d’une réserve naturelle d’ Etat dans le marais de Vesles-et-Caumont, dans le but de préserver les roselières turficoles du site.

- Eutrophisation des milieux aquatiques, accélérant le processus d’envasement des étangs et éliminant la flore des eaux oligotrophes, au profit d'espèces nitrophiles banales.

- Baisse généralisée du niveau des nappes, due, en partie, aux prélèvements agricoles périphériques.

- Abandon de l’utilisation des marais à des fins de production, faisant disparaître certains milieux dérivant des activités humaines (roselières, cariçaies pionnières,...).

- Modification des usages agricoles, délaissant les prairies humides, phénomène qui conduit à leur abandon ou à leur conversion (maïs, peuplier).

- Envahissement des roselières par les saules.

- Plantation massive de peupliers dans les prairies périphériques du marais, processus achevé aujourd’hui avec la disparition quasi-totale de ces milieux.

- Plantation des roselières en cours d’atterrissement, et souvent complétée par un drainage des sites.

- Remblaiement des marais, parfois à l’aide de gravats et de déchets ménagers.

- Mitage des milieux par les habitations légères, fractionnant les milieux vitaux des vertébrés à grand territoire et générant une pollution diffuse des eaux.

- Recreusement d’étangs, avec extraction de tourbe, générant des plans d’eau très profonds et peu favorables à la faune et à la flore.

N.B. : les espèces dont le nom latin est suivi d’un astérisque sont légalement protégées.

Commentaires sur la délimitation

Le site comprend l'ensemble du lit majeur de la Souche entre Sissonne et Vesles-et-Caumont. Les prairies et boisements intéressants périphériques sont inclus mais les cultures sont évitées au maximum.