ZNIEFF 220013566
LA HOTTÉE DU DIABLE

(n° régional : 02TAR112)

Commentaires généraux

DESCRIPTION

La zone comprend un site aux caractères écologique, historique et social remarquables : le chaos de grès (Auversien) de la "Hottée du diable", encore appelé "le Géant". Cette curiosité géomorphologique attire de nombreux promeneurs, le week-end. Elle a également été une grande source d'inspiration pour les Claudel.

L'ensemble de la zone est installée majoritairement sur une couche de sables de Beauchamp (Auversien). Un fragment de structure tabulaire de calcaire de Saint-Ouen (Marinésien) couvre les sables, au nord du chaos. Cette structure géologique est typique du Tardenois. Au sud, les marnes et gypses du Bartonien supérieur affleurent au niveau du haut de versant du bois de Chalmont, soulignant ainsi le passage à la région naturelle de la Brie.

Les groupements végétaux, qui occupent la zone, s'inscrivent en majorité dans un système acidophile xérophile à hygromorphe. La teneur en bases et en eau des sables, ainsi que leur taille, conditionnent différents types de pelouses :

- la pelouse sur sables acides fins et très mobiles, à rattacher au Spergulo morisonii-Corynephoretum canescentis ;

- la pelouse à Thérophytes, sur sables acides moins mobiles, avec, notamment, la Canche printanière (Aira praecox) et la Petite Oseille (Rumex acetosella), à rattacher à l'Airetum praecocis ;

- un complexe de pelouses à Thérophytes sur sable acide, enrichi en bases par l'influence du calcaire de Saint-Ouen. Deux associations sont présentes :

- une association sur sols peu tassés, à rattacher à l'Airo caryophyllae-Festucetum ovinae ;

- une association à caractère atlantique, sur sols tassés humides, à rattacher au Crassulo tillaeae-Aphanetum inexspectatae ;

- la pelouse vivace, sur sables fixes, très originale et fragmentaire, à Armérie des sables (Armeria arenaria*) et Véronique en épis (Veronica spicata) est à rattacher au Koelerio-Phleion phleoidis ;

- la pelouse acidophile hygrophile vivace fragmentaire, du Juncion squarrosi, avec le Jonc squarreux (Juncus squarrosus*).

La végétation des rochers de Grès du chaos présente différents groupements bryophytiques, typiques des grès humides ou secs. Les espaces interstitiels aux rochers, ainsi qu'une partie des sables périphériques, sont occupés par les landes subatlantiques à subcontinentales à Callune, à rattacher au Calluno vulgaris-Genistetum pilosae.

Les groupements forestiers s'inscrivent dans des potentialités nettement acides. La teneur en eau et en éléments nutritifs dans le sol détermine plusieurs ensembles de groupements :

- Les forêts acidophiles hygrophiles :

. au niveau de battement de la nappe, se développe une chênaie pédonculée-bétulaie à Molinie, typique du Querco-Molinietum ;

. dans les zones les plus engorgées, c'est une aulnaie à sphaignes du Sphagno-Alnion glutinosae qui est présente.

- Les forêts acidophiles mésophiles :

. dans les zones situées sur sables acides non pollués, le groupement forestier présent est la chênaie à Muguet et le Chèvrefeuille (Lonicero-Carpinenion) ;

. dans les parties nettement enrichies de bases (calcaires de Saint-Ouen), le groupement forestier est une chênaie-frênaie-charmaie sur sol brun eutrophe (Fraxino-Carpinion).

- Les forêts acidophiles xérophiles :

. le premier stade véritablement forestier est une chênaie-bétulaie claire (Querco roboris-Betuletum pubescentis), colonisant la lande et les ourlets acidophiles ;

. le stade ultime, actuellement présent, est une chênaie sèche à Callune et Leucobryum glaucum (Fago-Quercetum petraeae) avec des potentialités de développement du Hêtre.

INTERET DES MILIEUX

Six habitats sont inscrits à la directive "Habitats" de l'Union Européenne :

- la pelouse du Spergulo morisonii-Corynephoretum canescentis, milieu exceptionnel en Picardie, menacé de disparition ;

- la pelouse du Crassulo tillaeae-Aphanetum inexspectatae, très originale, car marquée par de nettes influences atlantiques ;

- la pelouse à Armérie des sables (Armeria arenaria*) et Véronique en épis (Veronica spicata), du Koelerio-Phleion phleoidis, groupement très menacé actuellement ;

- la pelouse hygrophile du Juncion squarrosi (Nardo-Juncetum squarrosi), en nette régression en Picardie ;

- la lande sèche du Calluno vulgaris-Genistetum pilosae, dans laquelle était anciennement présente la Bruyère cendrée (Erica cinerea), dont le site constituait la limite est d'aire de répartition en Picardie ;

- la chênaie du Querco roboris-Betuletum pubescentis, bien structurée.

Les groupements bryo-phytiques très originaux, sur blocs de grès, montrent des affinités submontagnardes très nettes, dues à une multitude de microclimats (différence d'exposition des blocs, d'ombrage, d'humidité...).

INTERET DES ESPECES

De nombreuses plantes, remarquables en Picardie, sont présentes sur le site :

- l'Alisier de Fontainebleau (Sorbus latifolia*) ;

- l'Osmonde royale (Osmunda regalis*), dont une touffe est vieille de plusieurs dizaines d'années ;

- l'Armérie des sables (Armeria arenaria*) ;

- le Jonc squarreux (Juncus squarrosus*) ;

- la Mousse fleurie (Crassula tillaea), espèce atlantique exceptionnelle en Picardie ;

- la Spargoute printanière (Spergula morisonii).

Une espèce naturalisée, la Mulgédie de l'Oural (Cicerbita macrophylla), dont on ne connaît que deux stations en Picardie, forme une belle population sur un talus.

De nombreuses espèces, citées dans les années cinquante par BOURNERIAS, RIOMET et JOVET, ont actuellement disparu, mais elles existent peut-être encore dans la banque de semences du sol ; il s'agit, entre autres, de la Bruyère à quatre angles (Erica tetralix), du Genêt poilu (Genista pilosa), du genêt d'Allemagne (Genista germanica),...

Le site abrite aussi un reptile intéressant, le Lézard vert (Lacerta viridis), présent ici dans l'une de ses populations les plus septentrionales de France.

FACTEURS INFLUENCANT L'EVOLUTION DE LA ZONE

La surfréquentation actuelle doit être canalisée, afin de stopper la dégradation des milieux les plus sensibles, due au piétinement, à l'eutrophisation des sols et à la pratique de certains sports mécaniques (moto-cross et 4x4). Des actes de vandalisme (incendies volontaires) sont, par ailleurs, très préjudiciables aux landes et aux espaces boisés.

La régulation de la fréquentation, liée à la mise en place d'une signalétique adéquate, devrait permettre une prise en compte, par les promeneurs, de l'intérêt patrimonial exceptionnel du site.

La prise d'un Arrêté Préfectoral de Protection de Biotope, actuellement en projet, devrait permettre une protection efficace des milieux les plus exceptionnels.

La gestion entreprise par le Conservatoire des Sites Naturels de Picardie va dans le sens de la conservation de la partie du site la plus remarquable, en l'occurrence la "Hottée du diable".

N.B. : Les espèces dont le nom latin est suivi d’un astérisque sont légalement protégées.

Commentaires sur la délimitation

Le contour de la zone englobe la Hottée du Diable et les bois et lisières situés à l'est et au sud.