ZNIEFF 220013576
MASSIF FORESTIER DE FERE, COTEAU DE CHARTEVES ET RU DE DOLLY

(n° régional : 02BRI106)

Commentaires généraux

DESCRIPTION

La zone se compose de la forêt de Fère, du coteau de Chartèves, du ru Dolly et des étangs de la Logette et de Boutache. Ces milieux variés entretiennent entre eux d’étroites relations écologiques et fonctionnelles. Cet ensemble géomorphologique, bien marqué dans le paysage de la Brie, est situé sur la rive droite de la Marne, en amont de Château-Thierry.

La forêt de Fère, qui occupe une colline et ses versants est et ouest, s’étend, au nord, sur le plateau meulier de Brie, recouvert de limons. Les versants montrent une toposéquence géologique typique de la Brie, avec de haut en bas : meulière de Brie et argiles à meulière (Sannoisien) ; marnes supragypseuses et gypses (Ludien) ; calcaires de Saint-Ouen (Marinésien) ; sables de Beauchamps (Auversien) ; calcaires du Lutétien et argiles sparnaciennes.

Cette grande diversité de substrats, liée à des expositions variées et à un fort relief, notamment sur les versants, entraîne une grande hétérogénéité des milieux. L’altitude du massif forestier (224 m) induit des influences submontagnardes relativement nettes, tant au niveau des cortèges animaux que des cortèges végétaux.

Au niveau forestier, les principaux groupements présents sont :

- la frênaie à Laîche espacée (Carex remota), du Carici remotae-Fraxinetum, dans les parties fraîches ;

- la hêtraie à Jacinthe des bois (Hyacinthoides non scripta), du Hyacinthoido-Fagetum, sur substrat mésotrophe mésophile de versant ouest ;

- la chênaie-charmaie fraîche à Ornithogale des Pyrénées (Ornithogalum pyrenaicum), sur sol calcicole mésotrophe, du Fraxino-Carpinion ;

- la chênaie-charmaie acidocline, du Lonicero-Fagetum, dans les parties acidoclines du plateau meulier ;

- la charmaie neutrophile calcicole à Mercuriale pérenne (Mercurialo-Carpinenion).

Des habitats connexes intraforestiers de layons et de coupe complètent cet ensemble remarquable :

- les ourlets calcicoles thermophiles du Trifolion medii ;

- les mares de meulière, sans végétation pour la plupart, mais constituant des sites de reproduction de nombreux batraciens ;

- les fondrières acidoclines à Laîche espacée (Carex remota) et Laîche maigre (Carex strigosa), du Caricion remotae.

Les étangs sont entourés de ceintures de végétations de grand intérêt pour la Picardie, avec, de l’intérieur vers l’extérieur :

- herbier du Nymphaeion albae (Myriophyllo-Nupharetum) et herbier du Riccio-Lemnion trisulcae ;

- ceinture à Scirpe des lacs (Scirpus lacustris), du Phragmition ;

- ceinture de roseaux à Massette (Typha latifolia), du Phragmition ;

- ceinture de l’Eleocharo-Oenanthetum fistulosae (Carici distichae-Oenanthion fistulosae), puis prairie du Mentho-Juncion inflexi, dans les parties pâturées ;

- ceinture de Sphaignes et d'Hydrocotyle commune (Hydrocotyle vulgaris) de l’Hydrocotylo-Baldellion, puis fourrés de saules humides à sphaignes (Salicion cinereae), dans les parties non pâturées.

Lors des périodes d’assec, une végétation thérophytique exceptionnelle, de l’Eleocharetum ovatae, se développe sur les milieux exondés.

Les blocs de meulière dans les rus intermittents, qui occupent les ravins encaissés, sont occupés par des groupements bryophytiques remarquables des Brachythecietalia plumosi.

Le ru de Dolly sillonne une vallée très encaissée à l’ouest de la zone. De morphologie torrentueuse et aux pentes assez accusées, ce ru est favorable à l’existence d’un peuplement salmonicole.

Les pelouses calcicoles, encore appelées "savarts" en Champagne, sont relictuelles du fait de la plantation de vignes sur les coteaux classés en AOC Champagne. Il en existe encore une sur les abords sud de la forêt. Plus ou moins embroussaillé, ce savart conserve une grande originalité et est le témoin de milieux quasiment disparus et fortement menacés actuellement.

Les milieux principaux de ce savart sont respectivement :

- la pelouse rase marnicole, typique des coteaux picards de la Marne, du Carici tomentosae-Festucetum lemanii ;

- l’ourlet en nappe du Coronillo-Brachypodietum, encore riche du point de vue patrimonial, qui précède l’installation des ligneux ;

- les fourrés de recolonisation, du Tamo-Viburnetum (Berberidion), qui forment transition avec des habitats de caractère nettement forestier.

INTERET DES MILIEUX

Ensemble de groupements forestiers inscrits à la directive "Habitats" de l'Union Européenne :

- la hêtraie du Hyacinthoido-Fagetum, en limite est de répartition ;

- la chênaie-charmaie fraîche à Ornithogale des Pyrénées, du Fraxino-Carpinion, typique de la Brie picarde.

Ensemble de milieux connexes rares ou en régression en Picardie :

- herbier, du Nymphaeion albae et du Riccio-Lemnion trisulcae en régression en Picardie ;

- ceinture du Phragmition de caractère oligotrophe, en régression en Picardie ;

- ceinture de l’Hydrocotylo-Baldellion, inscrite à la directive "Habitats" ;

- groupement de l’Eleocharetum ovatae, exceptionnel en Picardie et en voie de disparition, également inscrit à la directive "Habitats".

- prairie humide de fauche à Rhinanthe et Succise des près du Succido pratensis – Silaetum silai

- prairie maigre de fauche sur argiles à meulière de la Brie septentrionale du Bromion racemosi : Silao silai – Festucetum pratensis, avec une diversité floristique élevée

La forte pente et la température fraîche du ru de Dolly sont favorables à un peuplement salmonicole. De plus, la forte diversité des substrats et des courants constitue autant d’habitats colonisables par la faune d’invertébrés. Le tri granulométrique ménage des zones de frayères de Truite intéressantes et fonctionnelles. La zone aval du ru de Brasles présente un fort intérêt pour les populations de poissons de la Marne qui viennent s’y réfugier, en cas de perturbations hydrauliques majeures.

Ensemble d’habitats des pelouses calcicoles, inscrits à la directive "Habitats" :

- la pelouse rase marnicole, du Carici tomentosae-Festucetum lemanii, en voie de disparition en Picardie ;

- l’ourlet en nappe du Coronillo-Brachypodietum.

INTERET DES ESPECES

Cortège de plantes remarquables :

- l’Eleocharide à inflorescences ovoïdes (Eleocharis ovata*), exceptionnel et menacé de disparition ;

- la Stellaire des marais (Stellaria palustris*), rare et vulnérable en Picardie ;

- la grande Douve (Ranunculus lingua*), rare et vulnérable en Picardie ;

- la Scutellaire naine (Scutellaria minor), très rare en Picardie ;

- Sphagnum recurvum var. mucronatum, très rare en Picardie.

- l’Orchis brûlé (Orchis ustulata *)

- l’Orchis bouffon (Orchis morio)

- l’Orchis grenouille (Coeloglossum viride *)

- la Scorzonère humble (Scorzonera humilis)

- la Véronique en écusson (Veronica scutellata *)

Cortège de plantes de savarts, dont de nombreuses orchidées :

- l’Ophrys araignée (Ophrys sphegodes*) très rare en Picardie ;

- l'Herminie à un seul bulbe (Herminium monorchis*), espèce exceptionnelle en Picardie ;

- l’Inule à feuilles de saule (Inula salicina*), assez rare en Picardie ;

- la Germandrée des montagnes (Teucrium montanum*) ;

- le Tabouret perfolié (Thlaspi perfoliatum), assez rare et localisé dans la région.

Présence du Sonneur à ventre jaune (Bombina variegata), petit crapaud, en limite nord-ouest de répartition, inscrit à l'annexe II de la directive "Habitats". Présence des quatre espèces de tritons connues en Picardie, dont le Triton crêté (Tritutus cristatus), inscrit à l'annexe II de la directive "Habitats" et le Triton ponctué (Triturus vulgaris), assez rare en Picardie.

Cortège avifaunistique remarquable dont plusieurs espèces inscrites à la directive "Oiseaux" :

- la Bondrée apivore (Pernis apivorus) ;

- le Pic noir (Dryocopus martius) ;

- le Pic mar (Dendrocopos medius) ;

- la Marouette ponctuée (Porzana porzana), nicheuse irrégulière ;

- le Martin-pêcheur d’Europe (Alcedo atthis) ;

- la Pie-grièche écorcheur (Lanius collurio).

Cortège entomologique de grand intérêt :

- la Petite Violette (Clossiana dia), papillon très localisé en Picardie ;

- la Cigale des montagnes (Cicadetta montana).

La Truite fario est présente dans les rus et se reproduit localement.

FACTEURS INFLUENCANT L’EVOLUTION DE LA ZONE

Gestion sylvicole en taillis sous futaie, compatible avec le maintien de la biodiversité.

Plantation de peupliers, notamment sur le sommet de la colline.

Abandon de la gestion par pâturage des derniers savarts, dommageable pour les habitats et les cortèges floro-faunistiques associés.

Plantation de vignes sur les dernières pelouses calcicoles.

Importants traitements phytosanitaires sur les vignes, produits entraînés par les vents sur les derniers espaces pelousaires, très préjudiciables au maintien de la biodiversité de ces pelouses.

Nécessité d’une protection forte des dernières pelouses, occupant de petites surfaces, véritables vestiges et témoins des anciens parcours à ovins des coteaux de la Marne.

N.B. : les espèces végétales dont le nom est suivi d’un astérisque sont légalement protégées.

Commentaires sur la délimitation

Les contours de la zone englobent le massif boisés, les rus et ravins ainsi que le coteau de Chartèves. Les cultures sont exclues.

Les contours incluent également les prairies de fauche qui se situent à l’ouest du massif forestier de Fère et au nord de l’étang de la Logette. Elles sont limitées par les boisements d’une part et les cultures d’autre part.