DESCRIPTION
La Haute Vallée de l'Automne est située en limite septentrionale du Valois, mais appartient plutôt, d'un point de vue géomorphologique et biogéographique, à la région naturelle du Soissonnais.
Cette vallée, profondément inscrite dans le plateau tertiaire, suit une direction est-ouest. Son fort festonnement génère une diversité élevée de conditions microclimatiques, en fonction des expositions des versants, de la raideur des pentes et des affleurements géologiques.
La structure géologique est typique du sud-est de l’Oise avec, de bas en haut :
- des alluvions en fond de vallée, localement tourbeuses (tourbières alcalines, par exemple vers Feigneux) ;
- les argiles sparnaciennes ;
- les sables cuisiens, comprenant ponctuellement des argiles de Laon ;
- les épais calcaires lutétiens, qui définissent le plateau ;
- quelques placages sableux de l'Auversien, ou limoneux, en rebord de plateau.
On note la présence des milieux suivants :
- des pelouses calcicoles (Festuco lemanii-Anthyllidetum vulnerariae), alternant avec des groupements ponctuels de l'Alysso-Sedion sur dalles et cailloutis calcaires dans les carrières inutilisées ;
- des ourlets calcicoles thermophiles (Geranion sanguinei) ;
- des lisières thermophiles du Berberidion et bois thermocalcicoles du Cephalanthero-Fagion, mêlés d'éléments du Quercion pubescenti-petraeae ;
- des boisements de pente nord à Hêtre, à Frêne, à Erable, à Tilleul (proches du Lunario redivivae-Acerion pseudoplatani), accompagnés, sur la corniche lutétienne, de fougeraies (Phyllitido-Fraxinetum) ;
- quelques étangs (anciens viviers médiévaux pour certains, creusés récemment pour d'autres) en fond de vallée ;
- de rares prairies humides sur alluvions, essentiellement dans ce qui reste du marais du Berval ;
- des petites aulnaies-peupleraies à grandes herbes (Alno-Padion), mêlées de saulaies (Salicion cinerae), de mégaphorbiaies (Thalictro-Filipendulion) et de plantations de peupliers,
- le cours d'eau de la Vaumoise (affluent de la vallée de l'Automne) qui s'oriente selon un axe nord-est/sud-ouest.
Quelques petits vergers, pâturés ou fauchés, parfois abandonnés à la friche, subsistent à proximité des villages et des fermes.
INTERET DES MILIEUX
Parmi les éléments les plus remarquables, les forêts thermophiles, les lisières et les pelouses calcicoles, sont des milieux menacés en Europe, et sont inscrits à la directive "Habitats" de l'Union Européenne. Il en est de même pour les bois de pentes, abritant notamment des fougeraies importantes dans les cavées.
Ces habitats abritent de nombreuses espèces végétales et animales rares et menacées. Ils sont, intrinsèquement, de plus en plus rares et dégradés dans les plaines du nord-ouest de l'Europe.
Par ailleurs, les pelouses calcicoles constituent également un héritage ethno-botanique de pratiques séculaires de pâturage ovin, comme en témoignent des textes anciens du XVIème siècle, lesquels réglementaient les parcours à moutons sur les larris de Morcourt.
Les coteaux exposés au sud connaissent des influences méridionales autorisant la présence de nombreuses espèces végétales thermophiles rares et/ou menacées. Ils accueillent une diversité entomologique et herpétologique élevée.
Les anciennes carrières souterraines creusées dans le Lutétien, assez nombreuses dans la vallée, sont favorables à la présence d'importantes populations hivernantes de chauves-souris, rares et menacées en Europe.
Les vastes surfaces boisées permettent également la présence de mammifères à grand territoire.
Ce complexe de milieux forestiers comportant toutes les expositions (contraste entre les pentes nord et les pentes sud, par exemple) et des ourlets calcicoles relictuels, permet globalement l'expression d'une biodiversité particulièrement élevée pour la Picardie.
Les fortes pentes et les températures fraîches du ru de la Vaumoise sont favorables à la vie piscicole et invertébrée. Le tri granulométrique ménage des zones favorables pour la reproduction salmonicole. La diversité des zones de courant et la présence de végétation aquatique sont déterminants dans la diversification des peuplements de macroinvertébrés benthiques.
INTERET DES ESPECES
De nombreuses espèces assez rares à exceptionnelles (et menacées pour la plupart) en Picardie sont présentes.
Faune :
Parmi les oiseaux remarquables figurent :
- la Bondrée apivore (Pernis apivorus) ;
- le Pic noir (Dryocopus martius), dans les grandes hêtraies ;
- le Busard Saint-Martin (Circus cyaneus) ;
- le Martin-pêcheur (Alcedo atthis), sur l'Automne ;
- le Pic mar (Dendrocopos medius), dans les vieilles chênaies.
Tous sont inscrits à l'annexe I de la directive "Oiseaux" de l'Union Européenne.
On note également la présence du Rougequeue à front blanc (Phoenicurus phoenicurus), de la Bécasse des bois (Scolopax rusticola) et du Râle d'eau (Rallus aquaticus) dans les marais, ainsi que de la Pie-grièche grise (Lanius excubitor), dans les ultimes prairies humides de la vallée, vers le Berval. Ces espèces sont menacées en Picardie.
L’herpétofaune comprend :
- la Grenouille agile (Rana dalmatina), proche ici de sa limite d’aire septentrionale ;
- le Lézard vert (Lacerta viridis) ;
- le Lézard des murailles (Podarcis muralis) ;
- la Coronelle lisse (Coronella austriaca).
Mammalofaune
Le Cerf élaphe (Cervus elaphus) fréquente cette partie de la vallée, de même que le Chat forestier (Felis silvestris), le Muscardin (Muscardinus avellanarius) et la Martre des pins (Martes martes).
Les populations hivernantes de Chiroptères comprennent, entre autres, les espèces suivantes, menacées en Europe (inscrites en annexe II de la directive "Habitats" de l'Union Européenne) :
- le Vespertilion de Bechstein (Myotis bechsteini),
- le Vespertilion de Natterer (Myotis nattereri),
- le Vespertilion à oreilles échancrées (Myotis emarginatus),
- le Grand Murin (Myotis myotis ),
- le Petit Rhinolophe (Rhinolophus hipposideros),
- l'Oreillard roux (Plecotus auritus).
Les lépidoptères remarquables sont nombreux :
- le Fluoré (Colias australis) ;
- l’Azuré bleu-céleste (Polyommatus bellargus) ;
- l’Azuré bleu-nacré (Polyommatus coridon) ;
- la Petite Violette (Clossiana dia) ;
- le Zygène de la Coronille (Zygaena ephialtes) ;
- le Nacré de la Reine des prés (Brenthis ino) ;
- le Thécla de l’Orme (Satyrium w-album), lépidoptère diurne rare ;
- le Petit Mars changeant (Apatura ilia) ;
- la Phalène ornée (Scopula ornata) ;
- la Funèbre (Tyta luctuosa) ;
- le Sphinx de l'Epilobe (Proserpinus proserpina*) ;
- la Phalène de la Pulsatille (Horisme aquata) ;
- le Dragon (Harpya milhauseri) ;
- la Noctuelle de la Brouille (Sedina buettneri)...
Plusieurs autres insectes rares et menacés ont été notés, notamment la Mante religieuse (Mantis religiosa), certains orthoptères, comme le Criquet de la Palène (Stenobothrus lineatus) et la Decticelle bicolore (Metrioptera bicolor)...
Dans le ru de la Vaumoise, l'intérêt des espèces repose essentiellement sur la présence de peuplements de macroinvertébrés benthiques riches traduisant la diversité des habitats.
La flore comprend notamment :
Sur les pelouses, ourlets et lisières :
- le Fumana couché (Fumana procumbens*), sur les pelouses calcaires rases ;
- le Cynoglosse d'Allemagne (Cynoglossum germanicum*) ;
- la Laîche humble (Carex humilis) ;
- la Germandrée des montagnes (Teucrium montanum*) ;
- la Chlore perfoliée (Blackstonia perfoliata) ;
- la Pulsatille vulgaire (Pulsatilla vulgaris) ;
- la Globulaire ponctuée (Globularia bisnagarica) ;
- le Chêne pubescent (Quercus pubescens), sur les lisières thermocalcicoles ;
- l'Ophrys araignée (Ophrys sphegodes*) ;
- la Céphalanthère à grandes fleurs (Cephalanthera damasonium) ;
- l’Orchis militaire (Orchis militaris) ;
- l'Orchis singe (Orchis simia) ;
- la Néottie nid-d'oiseau (Neottia nidus avis) ;
- le Dompte-venin officinal (Vincetoxicum hirundinaria) ;
- la Germandrée botryde (Teucrium botrys) ;
- l'Anacamptis pyramidal (Anacamptis pyramidalis) ;
- les Orobanches de la Germandrée, du Gaillet et sanglante (Orobanche teucrii, O. caryophyllea, O. gracilis)... ;
- l’Epipactis rouge foncé (Epipactis atrorubens) ;
- l'Hellébore fétide (Helleborus foetidus) ;
- le Séséli annuel (Seseli annuum) ;
- le Limodore à feuilles avortées (Limodorum abortivum*), d’affinités subméditerranéennes, ici en limite nord d’aire de répartition ;
- le Lin à feuilles ténues (Linum tenuifolium) ;
- le Marrube (Marrubium vulgare) ;
- l’Armoise champêtre (Artemisia campestris) ;
- le Bugle petit-pin (Ajuga chamaepytis) ;
- le Bugle de Genève (Ajuga genevensis) ;
- l'Alysson calicinal (Alyssum alyssoides) ;
- la Véronique de Scheerer (Veronica prostrata susbp. scheereri) ;
- le Tétragonolobe siliqueux (Tetragonolobus maritimus ;
- l'Aigremoine odorante (Agrimonia repens)...
Dans les milieux boisés :
- la Laîche digitée (Carex digitata), sur le calcaire des pentes nord ;
- le Buis (Buxus sempervirens) ;
- le Fragon petit houx (Ruscus aculeatus) ;
- la Platanthère à deux feuilles (Platanthera bifolia) ;
- le Polystic à aiguillons (Polysticum aculeatum) ;
- le Polystic à soies (Polysticum setiferum) ;
- l'Orge des bois (Hordelymus europaeus)...
Dans les zones humides :
- la Dorine à feuilles opposées (Chrysosplenium oppositifolium),
- le Populage des marais (Caltha palustris),
- le Laiteron des marais (Sonchus palustris),
- le Saule à oreillettes (Salix aurita),
- le Lyciet (Lycium barbarum),
- la Pesse d'eau (Hippuris vulgaris),
- le Pétasite officinal (Petasites officinalis),
- la Cardamine amère (Cardamine amara),
- la Guimauve officinale (Althaea officinalis),
- le Myriophylle en épi (Myriophyllum spicatum),
- le Potamot coloré (potamogeton coloratus*),
- l'Orme lisse (Ulmus laevis*),
- l’Ail des ours (Allium ursinum),
- le Cassissier (Ribes nigrum)...
FACTEURS INFLUENCANT L’EVOLUTION DE LA ZONE
L’absence d’entretien des pelouses entraîne la fermeture progressive du milieu par boisement spontané. Cet embroussaillement est très peu contrecarré par l’action des rares lapins et des cervidés.
Il en résulte une banalisation, à la fois biologique et paysagère, de ces anciens espaces ouverts originaux et précieux. Des coupes circonstanciées des buissons envahissants seraient nécessaires, en dehors de la saison de reproduction. Dans l'idéal, une restauration d'un pâturage ovin extensif serait souhaitable là où celà s’avérerait encore possible.
Dans les bois, le maintien d’un réseau de vieux arbres sénescents ou morts (quelques-uns à l’hectare au minimum), est très favorable à la présence de populations d’insectes, de mammifères (chiroptères) et d’oiseaux cavernicoles rares et menacés.
Le boisement et le drainage des derniers hectares de prairies humides et de marais seraient à éviter autant que possible : les zones humides ont quasiment disparu de la vallée de l'Automne et du sud de l'Oise.
La fermeture des carrières souterraines les plus importantes pour les chauves-souris, à l'aide de fortes grilles empêchant les intrusions humaines mais laissant un accès libre aux chiroptères, permettrait de préserver ces mammifères, très sensibles au dérangement en hiver.
Le manque d'entretien léger des cours d'eau ainsi que les pratiques agricoles favorisent l'envasement et le colmatage des substrats. Ceci est préjudiciable, notamment au niveau des zones de frayères potentielles. Le cloisonnement du cours d'eau, par des embâcles essentiellement, limite les migrations piscicoles vaers les zones de frayères potentielles et favorise l'accumulation des sédiments.
N.B. Les espèces dont le nom est suivi d'un astérisque sont légalement protégées.
La délimitation de la ZNIEFF englobe les milieux abritant les habitats, la flore et la faune les plus remarquables.