ZNIEFF 220013921
LARRIS DE LA VALLÉE DE LA BRESLE ENTRE SÉNARPONT ET SAINT-GERMAIN-SUR-BRESLE, FORÊT D'ARGUEL ET FORÊT DE BEAUCAMPS-LE-JEUNE

(n° régional : 80VIM113)

Commentaires généraux

DESCRIPTION

Entre Sénarpont et Saint-Germain-sur-Bresle, le contrefort situé à l'est de la vallée de la Bresle et le sommet du plateau portent un vaste ensemble de milieux boisés et pelousaires. Plusieurs petites vallées sèches, attenantes à la vallée de la Bresle et à la vallée du Liger, entaillent le plateau et offrent un relief marqué et de multiples oppositions de versants. Les versants s'inscrivent dans la craie argileuse du Turonien, tandis que le plateau est couvert de limons et d'argiles rouges à silex.

Les principaux espaces pelousaires (Mesobromion erecti), qui se maintiennent sur le site, se trouvent au niveau des lieux-dits "Grande Côte" (en lisière ouest de la forêt d'Arguel), "les Gâtes" (au sud de la forêt d'Arguel), ainsi qu'au sud du « Bois de Neuville ». La majorité de ces pelouses se rattachent à l'Avenulo pratensis-Festucetum lemanii. Signalons qu'au niveau du lieu-dit "les Gâtes", l'emploi d'amendements a entraîné une évolution de la pelouse calcicole originelle vers une végétation davantage de type prairiale, du Thymo-Cynosurion (prés mésotrophes calcicoles pâturés).

Les peuplements forestiers sont relativement diversifiés et comprennent des chênaies-hêtraies-charmaies du Carpinion betuli (Mercurialo-Carpinenion et Lonicero-Carpinenion), des hêtraies calcicoles atlantiques du Daphno laureolae-Fagetum sylvaticae, des hêtraies acidophiles à Houx (de l'Ilici aquifolii-Fagion sylvaticae), sur le plateau, ainsi que des frênaies-acéraies, sur les pentes à caractère frais. Plus ponctuellement, des fragments de forêts de ravin à Fougères (« Bois de la Commanderie ») peuvent être observés. Par certains aspects floristiques, la série de végétation calcicole paraît glisser vers le Cephalanthero-Fagion sylvaticae, comme le souligne l'abondance de plantes à optimum à la fois submontagnard et montagnard.

Quelques vergers et des prairies mésophiles pâturées (Cynosurion cristati) sont présents autour des villages de Beaucamps-le-Jeune, de Neuville-Coppegueule et au nord-est de la forêt d'Arguel.

INTERET DES MILIEUX

Le site accueille des milieux, une flore et une faune de très haute valeur écologique, de niveaux régional à européen. Les pelouses, boisements, ourlets et fourrés présentent un caractère thermocontinental, teinté d'influences submontagnardes, particulièrement remarquables à l'échelle de la Picardie. Le site donne une représentation optimale des potentialités d'habitats calcicoles du plateau picard. Il abrite des peuplements remarquables d'orchidées, une importante richesse floristique, avec diverses plantes méridionales en limite d'aire, ainsi que de nombreuses espèces végétales protégées, rares et menacées.

Plusieurs habitats relèvent de la directive "Habitats" de l'Union Européenne :

- les pelouses de l'Avenulo pratensis-Festucetum lemanii, groupement végétal rare et menacé, du fait de la disparition de l'élevage ovin en Picardie, qui permettait, par le passé, d'entretenir ces milieux herbacés ;

- les hêtraies-chênaies subatlantiques à Jacinthe des bois, du Hyacinthoido non-scriptae-Fagetum sylvaticae ;

- les hêtraies calcicoles atlantiques, du Daphno laureolae-Fagetum sylvaticae ;

- les hêtraies acidophiles à Houx, de l'Ilici aquifolii-Fagion sylvaticae ;

- les frênaies-acéraies neutrocalcicoles de pente (Mercuriali perennis-Aceretum campestris).

INTERET DES ESPECES

Flore :

Parmi les nombreuses espèces remarquables, signalons la présence sur les pelouses de :

- l'Alchémille glauque (Alchemilla glaucescens*), espèce continentale, en disjonction d'aire en Picardie (les rares stations les plus proches sont soit anglaises, soit mosanes belges). Le site accueille l'unique station, actuellement connue de cette espèce, pour la Picardie ;

- le Coeloglosse vert (Coeloglossum viride*), orchidée exceptionnelle en Picardie, très menacée sur le site (station relictuelle) ;

- la Gymnadénie odorante (Gymnadenia odoratissima*), orchidée qui n'est présente qu'en vallée de la Bresle pour le département de la Somme ;

- l'Ophrys araignée (Ophrys sphegodes subsp. sphegodes*) et l'Ophrys litigieux (Ophrys sphegodes subsp. araneola*), respectivement rare et très rare en Picardie ;

- la Phalangère rameuse (Anthericum ramosum*), espèce thermophile rare en Picardie ;

- la Céphalanthère à longues feuilles (Cephalanthera longifolia*), orchidée thermophile très rare en Picardie ;

- l'Orobanche élevée (Orobanche major*), dont on connaît, actuellement, moins de dix stations dans le département de la Somme ;

- l'Orchis brûlé (Orchis ustulata*), espèce subméditerranéenne en limite septentrionale de son aire de répartition, a été observée sur le site dans les années 1980 ;

- l'Herminion caché (Herminium monorchis*) a probablement disparu du site (dernière observation datant de 1966).

En plus de ce cortège important d'espèces protégées, d'autres espèces remarquables ont été observées dans les pelouses et dans les bois : le Polystic à aiguillons (Polystichum aculeatum), le Polystic à soies (Polystichum setiferum), la Laîche maigre (Carex strigosa), l'Ophrys frelon (Ophrys fuciflora), l'Orchis bouffon (Orchis morio), l'Actée en épi (Actea spicata), la Benoîte des ruisseaux (Geum rivale), la Pulsatille commune (Pulsatilla vulgaris),...

Faune :

Pour l'avifaune, signalons la nidification de deux espèces inscrites à la directive "Oiseaux" de l'Union Européenne : le Busard Saint-Martin (Circus cyaneus) et la Bondrée apivore (Pernis apivorus). Le Faucon hobereau (Falco subbuteo), nicheur assez rare en Picardie, est présent sur la zone. La Chouette chevêche (Athene noctua), espèce menacée au niveau national, se reproduit dans les vergers (Neuville-Coppegueule et Beaucamps-le-Jeune).

L'entomofaune du site est très riche, particulièrement en ce qui concerne les lépidoptères avec, notamment, le Damier de la Succise (Euphydryas aurinia*), espèce protégée au niveau national, et la Lucine (Hamearis lucina).

L'Alyte accoucheur (Alytes obstetricans), assez rare en Picardie, est présent sur le site.

FACTEURS INFLUENCANT L'EVOLUTION DE LA ZONE

- Les forêts d'Arguel et de Beaucamps-le-Jeune ont fait l'objet d'enrésinements, peu compatibles avec une richesse écologique optimale.

- Certains larris abandonnés ont tendance à être envahis par des herbes hautes et des broussailles, risquant, à terme, de faire disparaître les espèces héliophiles remarquables.

- Au niveau du lieu-dit "Les Gâtes", la problématique est différente. A cet endroit, ce sont les intrants, utilisés pour engraisser les pâtures, qui ne permettent pas le maintien de la flore oligotrophe des pelouses.

- A l'est de ce larris, une décharge importante est présente.

- Certaines pelouses originelles ont été transformées en cultures sur certains secteurs peu pentus.

N.B. : les espèces végétales et les espèces d'insectes dont le nom latin est suivi d'un astérisque sont légalement protégées.

Commentaires sur la délimitation

Le contour intègre les milieux boisés et pelousaires occupants le versant exposé à l'ouest de la vallée de la Bresle et le plateau, entre Sénarpont et Saint-Germain-sur-Bresle. Les milieux prairiaux, bocagers et les fourrés arbustifs de recolonisation sont également pris en compte de par leur intérêt fonctionnel. Les cultures ont été exclues du site autant que possible.