ZNIEFF 220320038
MARAIS DE BOVES, DE FOUENCAMPS, DE THÉZY-GLIMONT ET DU PARACLET

(n° régional : 80SAN101)

Commentaires généraux

DESCRIPTION

Le site correspond à un vaste ensemble marécageux percé d’anciens étangs de tourbage. Le paysage se compose d’une mosaïque d’étangs et de végétations palustres, comprenant des boisements humides couvrant de vastes superficies. Les roselières, bas-marais tourbeux et prés tourbeux sont très localisés dans l’espace.

Un grand nombre de groupements végétaux s’expriment dans le fond et sur les versants de la vallée. On trouvera la liste des principaux groupements ci-après.

--> Les milieux aquatiques et amphibies sont très diversifiés. On note la présence dans les étangs et les fossés :

- des herbiers pionniers à Characées (Charion asperae),

- des herbiers flottants de l'Hydrocharition morsus-ranae (dont le Lemno trisulcae-Utricularietum vulgaris, l'Hydrocharitetum morsus-ranae),

- des herbiers du Scorpidio scorpioidis-Utricularion minoris (Sparganietum minimi),

- des herbiers à nénuphars du Nymphaeion albae (dont le Myriophyllo verticillati-Nupharetum luteae),

- des herbiers submergés du Potametalia (Potametum colorati, groupement à Myriophyllum verticillatum, Zannichellietum palustris...),

- des herbiers sciaphiles de l’Hottonietum palustris,

- des végétations pionnières des rives tourbeuses du Cyperion flavescenti-fusci.

--> Les végétations terrestres du fond de vallée comprennent :

- des roselières tourbeuses du Thelypterido palustris-Phragmitetum,

- des roselières du Phragmition australis (dont Solano dulcamarae-Phragmitetum),

- des roselières du Scirpo lacustris-Phragmitetum,

- des mégaphorbiaies turficoles du Thalictro flavi-Filipendulion ulmariae,

- des mégaphorbiaies eutrophes du Calystegion sepium,

- des cariçaies rivulaires du Caricetum elatae, du Caricetum ripario-acutiformis, du Caricetum paniculatae et du Caricetum pseudocyperi,

- des bas-marais tourbeux alcalins de l'Hydrocotylo-Schoenion (Cirsio dissecti-Schoenetum nigricantis),

- des bas-marais tourbeux alcalins du Junco subnodulosi-Caricion lasiocarpae,

- des prairies hygrophiles du Mentho aquaticae-Juncion inflexi (Pulicario dysentericae-Juncetum inflexi),

- des prairies hygrophiles surpâturées du Lolio-Potentilion,

- des prés inondés de l’Oenanthion fistulosae (Eleocharo palustris-Oenanthetum fistulosae),

- des prairies oligotrophes du Molinion (Selino carvifoliae-Juncetum subnodulosi),

- des prairies mésophiles du Lolio-Cynosurion cristati,

- des aulnaies-frênaies de l'Alno-Padion (Filipendulo ulmariae-Alnetum glutinosae),

- des boulaies à sphaignes du Dryopterido cristatae-Betuletum pubescentis, habitats acidophiles ombrogènes,

- des fourrés de Saules cendrés du Salicion cinerae,

- des ourlets eutrophes de l'Aegopodion podagrariae.

--> Les groupements végétaux représentés sur les coteaux calcaires sont les suivants :

- des pelouses calcicoles rases thermophiles de l'Avenulo pratensis-Festucetum lemanii subass. seselietosum montani,

- des ourlets calcicoles du Trifolion medii (Centaureo nemoralis-Origanetum vulgare), parfois sous faciès de brachypodiaies denses,

- des fourrés de recolonisation du Rubo-Prunetum mahaleb laburnetosum,

- des bois de pente du Carpinion betuli et du Fraxino-Carpinion.

INTERET DES MILIEUX

De nombreux milieux présents sont reconnus d’intérêt communautaire et inscrits à la directive « Habitats » :

- des herbiers pionniers à Characées (Charion asperae),

- des herbiers aquatiques du Myriophyllo verticillati-Nupharetum luteae, présent uniquement, en Picardie, dans les grandes vallées tourbeuses,

- des herbiers du Lemno trisulcae-Utricularietum vulgaris,

- des herbiers nageants de l’Hottonietum palustris,

- des herbiers nageants de l’Hydrocharietum morsus-ranae,

- des herbiers des vasques tourbeuses du Potametum colorati,

- la végétation pionnière de rives exondées du Cyperetum flavescenti-fusci,

- les bas-marais tourbeux du Junco subnodulosi-Caricion lasiocarpae,

- les bas-marais tourbeux alcalins de l’Hydrocotylo-Schoenion (Cirsio-Schoenetum),

- les roselières tourbeuses du Thelypterido palustris-Phragmitetum, dont les localités picardes sont les mieux conservées de France,

- les mégaphorbiaies tourbeuses du Thalictro flavi-Filipendulion ulmariae,

- les prairies tourbeuses du Selino carvifoliae-Juncetum subnodulosi,

- les aulnaies-frênaies du Filipendulo ulmariae-Alnetum glutinosae,

- les bétulaies à Sphaignes du Dryopterido cristatae-Betuletum pubescentis, très rare et en danger de disparition en Picardie,

- les pelouses calcicoles relevant de l'Avenulo pratensis-Festucetum lemanii, groupement végétal rare et menacé en Picardie.

Une des originalités du site est la juxtaposition de deux voies évolutives des systèmes tourbeux. Ainsi, le système le plus répandu est alcalin, tandis qu’un système acidiphile ombrotrophe ne se développe que localement. Ce dernier système correspond au développement de milieux flottants où l'alimentation par les eaux de pluies (légèrement acides) l'emporte sur l'alimentation par les eaux de la nappe (alcaline). Ce type de milieu est favorable au développement des sphaignes.

Par ailleurs, la diversité et la qualité des milieux permettent la nidification d’une avifaune remarquable, ce qui a justifié l’inscription de ce site en Zone d’Importance Communautaire pour les Oiseaux. De manière générale, la faune, la flore et les habitats présentent un intérêt de niveau européen.

INTERET DES ESPECES

Flore et bryoflore :

* Les bas-marais tourbeux alcalins hébergent de nombreuses espèces remarquables :

- la Renoncule langue (Ranunculus lingua*), rare en France,

- le Ményanthe trèfle d'eau (Menyanthes trifoliata*), en danger en Picardie

- la Pédiculaire des marais (Pedicularis palustris*), très rare en Picardie,

- le Peucédan des marais (Peucedanum palustre*), rare en Picardie,

- le Potamot coloré (Potamogeton coloratus*), typique des gouilles tourbeuses aux eaux alcalines,

- le Mouron délicat (Anagallis tenella*), espèce pionnière rare en Picardie,

- la Laîche puce (Carex pulicaris*), très peu présente sur le site,

- la Linaigrette à larges feuilles (Eriophorum latifolium*), très rare en Picardie,

- la Gentiane pneumonanthe (Gentiana pneumonanthe*), espèce exceptionnelle en Picardie,

- la Dryoptéride à crêtes (Dryopteris cristata*), espèce liée aux tourbières boisées,

- la Laîche paradoxale (Carex appropinquata), rare en Picardie,

- la Fougère des marais (Thelypteris palustris), abondante sur le site,

- le Cladion marisque (Cladium mariscus), espèce rare et vulnérable en Picardie,

- l’Epipactis des marais (Epipactis palustris), orchidée palustre rare en Picardie,

- la Scorsonère humble (Scorzonera humilis), espèce en danger en Picardie.

Signalons la présence ancienne d’Huperzia selago, fougère rarissime en plaine française, disparue en 1973.

* Les milieux aquatiques et amphibies permettent la présence de :

- le Rubanier nain (Sparganium natans*), rare en Picardie,

- l'Utriculaire commune (Utricularia vulgaris*), espèce exceptionnelle et en danger en Picardie,

- l’Utriculaire naine (Utricularia minor*), exceptionnelle en Picardie,

- l’Eléocharide épingle (Eleocharis acicularis*), très rare en Picardie.

* Dans les prairies humides, se développent :

- le Dactylorhize négligé (Dactylorhiza praetermissa*), typique des prairies humides non amendées,

- le Dactylorhize incarnat (Dactylorhiza incarnata*), rare et vulnérable en Picardie,

- l’Ophioglosse commune (Ophioglossum vulgatum*), fougère prairiale particulièrement menacée.

* Sur les pelouses calcicoles relictuelles :

- le Lin à feuilles ténues (Linum tenuifolium), assez rare en Picardie,

- la Globulaire ponctuée (Globularia bisnagarica), espèce thermophile,

- la Digitale jaune (Digitalis lutea), assez rare en Picardie,

- la Pulsatille commune (Pulsatilla vulgaris), vulnérable en Picardie,

- le Vinettier commun (Berberis vulgaris), arbuste thermophile exceptionnel dans le département de la Somme,

- le Polygala d’Autriche (Polygala amarella), rare en Picardie.

Les bryophytes remarquables sont bien représentés sur le site, avec notamment Aulacomnium palustre, Ricciocarpus natans, Scorpidium scorpioides et 8 espèces de sphaignes : Sphagnum fimbriatum, S. palustre, S. squarrosum, S. subnitens, S. contortum, S. teres, S. papillosum var. laeve et S. fallax.

Avifaune :

Parmi les espèces nicheuses les plus remarquables, signalons :

- Le Blongios nain (Ixobrychus minutus), espèce inscrite à l’annexe I de la directive « Oiseaux » de l’Union européenne, en danger au niveau national. Le site héberge régulièrement plusieurs couples nicheurs.

- Le Butor étoilé (Botaurus stellaris), également inscrit à la directive « Oiseaux » et menacé de disparition en Picardie. Sur le site, l’espèce a été contactée pour la dernière fois en 1996.

- Le Busard des roseaux (Circus aeruginosus), rapace inscrit à la directive « Oiseaux », profite des roselières pour se reproduire.

- Plusieurs passereaux paludicoles nichent dans les marais : la Rousserolle turdoïde (Acrocephalus arundinaceus), vulnérable en France, la Gorgebleue à miroir blanc (Luscinia svecica), inscrite à la directive « Oiseaux », la Bouscarle de Cetti (Cettia cetti), assez rare en Picardie et la Locustelle luscinioïde (Locustella luscinioides), qui semble en régression sur le site.

- Une importante héronnière de Hérons cendrés (Ardea cinerea) est présente. Il s’agit d’une des colonies les plus importantes du département pour cette espèce assez rare en Picardie.

- le Hibou des marais (Asio flammeus), rapace exceptionnel en Picardie, s’est déjà reproduit sur le site, à la faveur de proliférations de campagnols qui constituent l’essentiel de son alimentation. Cette espèce ne niche que de manière occasionnelle en Picardie, et avec des faibles effectifs.

La Pie-grièche grise (Lanius excubitor), espèce en danger en Picardie qui a été notée sur le site jusqu’en 1991, a probablement disparu.

Entomofaune :

* Odonates :

Parmi les espèces les plus remarquables, signalons la Cordulie à taches jaunes (Somatochlora flavomaculata), très rare en Picardie, le Gomphus à pinces (Onychogomphus forcipatus), exceptionnel en Picardie, le Sympétrum noir (Sympetrum danae), très rare en Picardie, le Sympétrum vulgaire (Sympetrum vulgatum), assez rare à rare en Picardie, l’Agrion délicat (Ceriagrion tenellum), rare en Picardie et le Caloptéryx vierge (Calopteryx virgo), qui trouve ici une de ses rares localités pour le département de la Somme. Trois autres espèces remarquables étaient connues dans les années 1980 mais n’ont pas été revues récemment : l’Anax napolitain (Anax parthenope), la Cordulie à deux taches (Epitheca bimaculata) et l’Orthétrum brun (Orthetrum brunneum).

* Lépidoptères :

Pour les rhopalocères, citons le Fluoré (Colias australis), inféodé aux pelouses calcaires.

Pour les hétérocères, citons la Cidarie sagittée (Perizoma sagittata), la Noctuelle des roselières (Arenostola phragmitidis), la Nonagrie du Phragmite (Chilodes maritimus), inféodée aux roselières, la Nonagrie rubanée (Archanara dissoluta), la Topaze (Diachrysia chryzon), la Fidonie favorite (Stegania cararia), très rare en France et la Litosie obtuse (Pelosia obtusa), également très rare en France.

* Orthoptères :

Citons la présence du Conocéphale des roseaux (Conocephalus dorsalis), inféodé aux prairies humides et du Tetrix des vasières (Tetrix ceperoi), espèce très disséminée dans le nord de la France (hors littoral).

Icthyofaune et macro-invertébrés :

Le Barbeau fluviatile (Barbus barbus), trouve des conditions favorables pour sa reproduction et son grossissement. L’Anguille (Anguilla anguilla) et le Chabot (Cottus gobio) sont bien représentés.

Les macro-invertébrés benthiques sont relativement diversifiés sur les secteurs d’Hailles et de Boves. Les Philopotamidae témoignent de conditions de milieu assez favorables malgré une qualité de l’eau plutôt mauvaise.

Mammalofaune :

Plusieurs chiroptères remarquables ont été répertoriés en hibernation dans des petits souterrains à flanc de coteau : le Grand Murin (Myotis myotis) et le Vespertilion à oreilles échancrées (Myotis emarginatus), inscrits à l’annexe II de la directive « Habitats », le Vespertilion de Natterer (Myotis nattereri) et le genre Oreillard (Plecotus sp.), rares en Picardie. Parmi les micromammifères, citons la Musaraigne aquatique (Neomys fodiens), assez rare en Picardie.

Herpétofaune :

Le Lézard des murailles (Podarcis muralis), rare en Picardie, a été observé sur des talus crayeux aux abords des voies de chemine de fer.

FACTEURS INFLUENCANT L’EVOLUTION DE LA ZONE

- La Réserve Naturelle de l’Étang Saint-Ladre a été créée en 1979 et couvre environ 13 hectares de marais tourbeux propriété de la commune de Boves. Sa gestion est assurée par le Conservatoire des Sites Naturels de Picardie.

- Le marais du Paraclet est classé en Réserve de chasse. La présence de sources garantit le maintien de zones aquatiques qui ne gèlent jamais.

- Les plantations de peupliers réalisées dans la vallée entraînent un assèchement des milieux et une banalisation de la flore et de la faune.

- L’abandon de l’entretien de certains marais entraîne une évolution spontanée de la végétation vers les boisements humides. Certaines espèces remarquables liées aux milieux ouverts ont ainsi tendance à régresser.

- Le manque d'entretien léger du cours d'eau ainsi que les pratiques agricoles environnantes favorisent les apports de matières en suspension et le colmatage des substrats (ruissellement, piétinement). La pollution diffuse accroît les risques d'eutrophisation.

- La route D116 entre Boves et Cottenchy est le siège d'une importante mortalité nocturne de batraciens issus du Bois de Boves et se rendant dans les marais pour se reproduire au printemps.

N.B. : les espèces végétales dont le nom latin est suivi d’un astérisque sont légalement protégées.

Commentaires sur la délimitation

Le site comprend deux unités tourbeuses de la basse vallée de l'Avre, séparées par la ville de Boves. Le fond de la vallée de l'Avre et la confluence avec la vallée de la Noye comprennent des habitats aquatiques, amphibies et hygrophiles de forte valeur patrimoniale. Plusieurs talus hébergeant une végétation de pelouses et de boisements calcicoles sont également intégrés à cette zone.