La côte d’Albâtre est un littoral exceptionnel : plus de 120 kilomètres de falaises crayeuses dont la hauteur atteint à son maximum 120 m, entrecoupées de « valleuses », ces petites vallées sèches suspendues ou brèches plus ou moins encaissées débouchant sur la mer, et de quelques basses vallées côtières drainées (Bresle, Yères, Arques, Scie, Saâne, Dun, Durdent). C’est une frange encore très sauvage, le relief imposant ayant préservé la côte de l’urbanisation dense (mais pas de quelques grands aménagements).
Les milieux naturels sont déterminés par des facteurs physiques prépondérants : les marées, une muraille de craie (apparemment homogène mais en fait très variée) surmontée d’argile à silex (due à la décarbonatation), des vents et des embruns entraînant des particularités dans la végétation (adaptations morphologiques pour supporter le vent, le sel ou la sécheresse, endémisme), un relief abrupt ou vallonné, des cavités et des drains souterrains et apparents, une érosion ancienne et contemporaine déterminée par les infiltrations pluviales, la fragilité des roches et la houle. De l’estran au sommet des falaises, la diversité des conditions de vie engendre une grande richesse floristique et faunistique. Les habitats terrestres les mieux représentés sont les pelouses aérohalines, supportant les vents et les embruns salés. Les valleuses abritent des formations arbustives, boisées et prairiales originales et variées dont quelques bois frais de ravin à fougères. Le platier héberge une flore et une faune marines spécifiques : algues, mollusques, crustacés, anémones de mer, etc. Les corniches des falaises sont l’habitat d’une avifaune riche, parfois exceptionnelle, permanente ou de passage.
Le littoral cauchois, c’est aussi un paysage unique du aux remarquables formes d’érosion dont les plus connues sont les arches et les aiguilles d’Etretat.
Ce patrimoine naturel est fragilisé par le recul inéluctable du front de falaise, très variable d’un site à l’autre, la pollution diffuse, l’aménagement lourd de sites industriels, la surfréquentation (Etretat).
Ce littoral est classé en Site d’Importance Communautaire n°FR2300139 « Littoral cauchois » du réseau Natura 2000.
Cette vaste znieff s’étend sur 792 ha et comporte, du sud au nord, divers sites remarquables ou exceptionnels et complémentaires. La falaise remodelée en terrasses du port pétrolier d’Antifer abrite des pelouses aérohalines et calcicoles remarquables (à Armérie maritime, Chou maraîcher, Euphraise à quatre angles, Chlore perfoliée, Orchis pyramidal, Ophrys abeille), des fruticées de genêts, d’ajoncs et d’argousiers, des sources où se développe une flore hygrophile calcicole pionnière particulièrement riche (Orchis à fleurs lâches, Orchis ignoré, Samole de Valérand). Les milieux humides des terrasses, le port et la digue longue de plus de 3 km présentent un grand intérêt ornithologique pour des hivernants, des migrateurs et des nicheurs rupestres ou marins (Bruant des roseaux, Pipit maritime, canards, Tadorne de Belon, grèbes, sternes, Pingouin torda, Guillemot de Troïl, Mouette tridactyle, cormorans, goélands, Fulmar boréal, liste non exhaustive).
La valleuse de Bruneval est caractérisée par divers boisements (chênaies à bouleaux et châtaigniers, chênaie à fougères et frênaie-érablière à Mercuriale) ; à l’aval, les pelouses aérohalines et calcicoles sont riches en espèces : Orobanche à petites fleurs, Pavot cornu, Armérie maritime, Chou maraîcher, Bette maritime, Crithme maritime etc..
Dans ce secteur, le platier est très riche en algues, parmi lesquelles sont présentes deux espèces de laminaires (Laminaire digitée, L. saccharine). Ces ceintures de grandes lanières brunes, partiellement découvertes uniquement lors des basses mers exceptionnelles, abritent de nombreuses espèces de mollusques, crustacés et jeunes poissons.
Les falaises du Cénomanien du Cap d’Antifer sont caractérisées par de nombreuses fissures, de grands entonnoirs de dissolution mettant en relief les pinacles, des voûtes, des corniches et des gradins dus à des bancs crayeux plus ou moins durs mis en saillie par l’érosion. Ces différents escarpements et replats permettent le développement des pelouses aérohalines (à Armérie maritime, Anthyllide vulnéraire, Trèfle velu, Chou maraîcher etc.). Le Séneçon blanc (Senecio helenitis subsp. candidus), espèce endémique normande, très rare et protégée est aussi présent. Ces divers gradins et corniches accueillent de nombreuses espèces nicheuses d’oiseaux rupestres et marins : Faucon pèlerin, Pigeon colombin, Choucas des tours, Etourneau sansonnet, Bergeronnette grise, Rougequeue noir, Hirondelle des fenêtres, Mouette tridactyle, Grand Cormoran, Cormoran huppé, Goéland argenté, G. brun et G. marin. Pour certaines espèces, ces populations locales sont d’intérêt national. De nombreuses autres espèces marines fréquentent le site en hivernage et lors d’étape migratoire.
La petite valleuse du Fourquet, caractérisée par des pelouses aérohalines, des prairies calcicoles et mésophiles, des ronciers et des buissons d’ormes et de sureaux, attire de nombreux passereaux lors des migrations d’automne ou de printemps. Le Cap d’Antifer est une réserve ornithologique (du Groupe Ornithologique Normand) et une réserve de chasse et de faune sauvage.
La valleuse d’Antifer, propriété du Conservatoire du Littoral, est exempte d’habitations et interdite à la circulation. Elle présente une bonne diversité d’habitats boisés et ouverts dont plusieurs sont d’intérêt communautaire : chênaies-charmaies, châtaigneraies, frênaie-érablières à Jacinthe des bois et fougères, fruticées de sureaux, landes à Fougère aigle, Ajoncs et ronciers, prairies mésophiles, pelouses calcicoles à Serratule des teinturiers (très rare) et Orchis pyramidal, pelouses aérohalines, un réseau de mares, des grottes. La faune y est particulièrement variée et comporte des espèces rares parmi les oiseaux (dont des espèces sylvatiques), les batraciens (quatre espèces de tritons dont le Triton crêté, trois espèces de grenouilles, quatre espèces de crapauds), les mammifères, dont des chauves-souris (parmi celles-ci, il faut souligner le Petit Rhinolophe, rare et vulnérable), et les insectes. Classé en Espace Naturel Sensible, ce patrimoine naturel est accessible au public par le biais d’animations nature.
Les célèbres falaises découpées d’Etretat entre le Cap d’Antifer et la Porte d’Aval, comportent les « monuments suivants » : la Pointe du Fourquet, la Pointe de la Courtine, la Manneporte, l’Aiguille et la Porte d’Aval. C’est le karst et l’érosion différentielle qui sont à l’origine de ces pointes (avancées), arches et aiguilles, derniers vestiges très résistants d’anciennes falaises plus en avant. Les pelouses aérohalines sont ici les plus étendues et les plus riches du littoral. Elles occupent largement toutes les pentes argileuses et crayeuses des pinacles des avancées et du front des falaises. Les diverses espèces plus ou moins rares se mêlent : Armérie maritime, Trèfle velu, Anthyllide vulnéraire, Chou maraîcher, Séneçon blanc (endémique), Serratule des teinturiers, Crithme maritime, Cochléaire du Danemark, etc.
Ces falaises abritent également l’unique station haut-normande d’une petite fougère littorale exceptionnelle et menacée d’extinction régionale, la Doradille maritime (Asplenium marinum).
Ces falaises découpées sont aussi propices à l’avifaune et aux insectes. De multiples espèces s’y nourrissent, y vivent, et s’y reproduisent.
Le périmètre de la znieff inclut également des terrains plats, prairiaux ou cultivés environnant largement ces valleuses et ces falaises remarquables.
L’intérêt écologique, paysager, géologique et géomorphologique de cette vaste entité littorale est exceptionnel du fait d’une grande richesse naturelle (présence d’espèces rares) et d’une importante diversité floristique et faunistique.
Cette znieff est incluse dans la Zone de Protection Spéciale du Littoral seino-marin (n°FR2310045). De Bruneval à Vaucottes, et ce paysage exceptionnel est classé au titre de la loi de 1930.