ZNIEFF 250002602
MASSIF FORESTIER D'ECOUVES ET SES MARGES

(n° régional : 00030000)

Commentaires généraux

La forêt d'Ecouves est considérée depuis toujours comme la plus grande forêt normande. Elle s'étale en effet sur plus de 12 000 ha, dont environ 8 200 ha d'emprise domaniale.

Sur le plan géologique, elle constitue l'une des dernières pénétrations orientales du Massif armoricain. Les crêtes sont constituées de grès armoricain de l'Ordovicien inférieur ; le reste du massif contient des phyllades du Précambrien, des grès cambriens et de May de l'Ordovicien moyen supérieur, des schistes d'Angers, des rhyolithes du Cambrien moyen.

Le climat régnant sur la zone est l'un des plus humides de Normandie (environ un mètre de précipitations par an), l'un des plus froids (plus de soixante jours de gel par an), et aux températures les plus contrastées. Ainsi, Ecouves est une petite montagne qui s'échappe déjà de l'influence atlantique.

Selon la nature des roches-mères, les sols varient, mais sont surtout siliceux pauvres, souvent superficiels et filtrants ; la forêt peut ainsi devenir assez sèche lors de périodes peu arrosées. Inversement, les argiles provenant de l'altération des schistes et ampélites créent des sols lourds et gras, plus riches mais hydromorphes, engorgés l'hiver ou par longues et fortes pluies.

De nombreux ruisseaux et petits cours d'eau parcourent Ecouves et quelques étangs se trouvent en lisière. Cette richesse hydrographique a fait qualifier Ecouves de "véritable château d'eau".

Composée actuellement d'environ 70% de feuillus et 30% de résineux, la futaie représente 80% de la surface générale en traitement et l'aspect général est celui d'un milieu "jardiné".

La nature du sol, le climat, le réseau hydrographique dense sont à l'origine de la diversité des milieux observés dans ce massif, et de la richesse biologique qui le caractérise, révélée par un grand nombre d'espèces animales et végétales rares.

A noter la désignation en ZSC de la partie de cette Znieff correspondant à la vallée du Sarthon et ses affluents (FR2502015) au titre de la Directive Habitats de Natura 2000, et également en APPB sur la même zone mais de façon plus large.

FLORE

Un grand nombre d'espèces végétales sont recensées dans cette zone, dont beaucoup sont rares et/ou protégées au niveau national (**) ou régional (*).

Du fait de l'imperméabilité des sols, des landes tourbeuses et des tourbières se forment dans les dépressions ou sur des pentes à la faveur de résurgences. On y trouve notamment les Rossolis à feuilles rondes (Drosera rotundifolia**) et intermédiaire (Drosera intermedia**), la Linaigrette vaginée (Eriophorum vaginatum*), le Jonc raide (Juncus squarrosus), l'Ossifrage brise-os (Narthecium ossifragum*), la Cicendie filiforme (Cicendia filiformis), la rare Orchis de Fuchs (Dactylorhiza fuchsii), et des mousses, dont Polytrichum strictum et Sphagnum molle.

Dans les fonds de vallée, des prairies humides plus ou moins tourbeuses renferment le Vulpin roux (Alopecurus aequalis), la Renouée bistorte (Polygonum bistorta), la Violette des marais (Viola palustris)...

La présence d'étangs permet le développement d'espèces amphibies comme le Scirpe ovale (Eleocharis ovata*), les Joncs des marécages (Juncus tenageia*) et nain (Juncus pygmaeus*), la Littorelle uniflore (Littorella uniflora**), la Pilulaire à globules (Pilularia globulifera**) et l'Utriculaire citrine (Utricularia australis).

Les secteurs forestiers abritent le Genêt anglais (Genista anglica), la Prêle des bois (Equisetum sylvaticum*), la petite Pyrole (Pyrola minor*) et une mousse sur les berges des ruisseaux : Hyocomium armoricum. Signalons l'existence dans le bois de Goult d'une station à Lycopode en massue (Lycopodium clavatum*).

Depuis 2000, plusieurs espèces sont en raréfaction en raison de l'eutrophisation des étangs : le Flûteau nageant (Luronium natans**), la Boulette d'eau (Pilularia globulifera*,**), la Scirpe épingle (Scirpus acicularis).

Notons la présence de pierriers remarquables, à l'origine de la présence d'une flore cryptogamique exceptionnelle dont Cladonia rangiferina* et Leptodontium flexifolium.

Parmi les champignons, citons la Poule des bois (Grifola frondosa) et le Bolet de Quélet (Boletus queletii), deux espèces inscrites sur la liste rouge européenne.

FAUNE

Les diverses recherches entomologiques effectuées dans ce vaste ensemble forestier ont permis d'en apprécier sa valeur élevée, au regard de la diversité et du nombre d'espèces remarquables présentes.

Parmi les libellules survolant le site, on citera les rares grande Aeschne (Aeshna grandis), Agrion nain (Ischnura pumilio) et Leste dryade (Lestes dryas).

Dans l'ordre des Orthoptères, on retiendra la présence de quelques espèces intéressantes : le Criquet des clairières (Chrysochraon dispar), le Criquet palustre (Chorthippus montanus), le Criquet ensanglanté (Mecostethus grossus), l'Ephippigère des vignes (Ephippiger ephippiger), le Criquet vert échine (Chorthippus dorsatus), la Courtillière (Gryllotalpa gryllotalpa), le Criquet verdelet (Omocestus viridulus), et enfin une espèce déterminante pour la région, le Criquet de la palène (Stenobothrus lineatus).

Une espèce intéressante d'Hétéroptère aquatique typique des eaux acides a été observée ici : Hesperocorixa castanea.

Les coléoptères inventoriés sont très nombreux et leur diversité particulièrement élevée. Signalons quelques espèces parmi les plus rares : le Carabe doré (Carabus auratus), le Carabe à chaînons (Carabus cancellatus), le Calosome des bois (Calosoma inquisitor), Carabus monilis, Carabus coriaceus, le Cychre effilé (Cychrus attenuatus), l'endémique normand Chrysocarabus auronitens normannensis qui produit ici une rarissime variation, la forme letaqui, et quelques intermédiaires hémi-mélanisants...

Les papillons sont également très nombreux et comptent quelques espèces rares, le plus souvent inféodées aux milieux tourbeux. Notons le Miroir (Heteropterus morpheus), le Gazé (Aporia crataegi), la Sylvine (Triodia sylvina), l'Hépiale de la fougère (Phymatopus hecta), la grande Naïade (Geometra papilionaria), la Truie (Idaea biselata), l'Impolie (Idaea aversata), la Philobie effacée (Semiothisa liturata), l'Ennomos illustre (Selenia tetralunaria), la Métrocampe verte (Hylaea fasciara), le Crête-de-coq (Ptilodon capucina), la Lichénée bleue (Catocala fraxini), la Cosmie roussâtre (Xanthia icteritia), la Noctuelle de la Primevère (Diarsia mendica), la Noctuelle de la Belladone (Xestia baja), le Damier de la Succise (Euphydrias aurinia) -protégé au niveau national-, la Cidarie du peuplier (Eulithis populata), l'Echiquier (Carterocephalus palaemon), Photedes pygmina, Schrankia costeatrigalis, Schrankia taenialis, Cymatophorima diluta, Hemaris fuciformis, Mythimna comma...

En hyménoptères, le rare Bombus magnus est à signaler.

Enfin, nombre d'araignées ont été recensées dans cette zone. On en retiendra quelques unes parmi les plus rares : Micrommata roseum, Pirata hygrophilus, Tibellus oblongus, Dolomedes fimbriatus, Misumena vatia...

L'omniprésence de l'eau est favorable à la présence de nombreux amphibiens. Parmi les espèces les plus intéressantes, citons le Triton marbré (Triturus marmoratus), le Triton crêté (Triturus cristatus), le Crapaud accoucheur (Alytes obstetricans), le Crapaud calamite (Bufo calamita)...

Les reptiles sont également nombreux et comptent quelques espèces intéressantes comme le Lézard vert (Lacerta viridis), le Lézard des murailles (Podarcis muralis), la Coronelle lisse (Coronella austriaca), et la Vipère péliale (Vipera berus).

D'autre part, la présence de nombreux cours d'eau de première catégorie aux eaux de bonne qualité biologique est favorable à la présence de belles populations d’Écrevisses à pieds blancs (Austropotamobius pallipes) et de Truite fario (Salmo trutta fario).

Au niveau ornithologique, ce site, par la diversité et la qualité des milieux naturels qu'il offre, est d'un grand intérêt.

Parmi les espèces nicheuses les plus intéressantes, citons le Hibou moyen-duc (Asio otus), les Busards Saint-Martin (Circus cyaneus) et cendré (Circus pygargus), l'Alouette lulu (Lullula arborea), le Grèbe huppé (Podiceps cristatus), la Fauvette pitchou (Sylvia undata), le Faucon hobereau (Falco subbuteo), le Rossignol philomèle (Luscinia megarhynchos),...

Enfin, la superficie et la quiétude des divers massifs forestiers sont propices à la présence de belles densités de cervidés et de suidés ainsi que la rare Martre d'Europe (Martes martes). Ainsi que d'autres Mammifères tel que le Putois (Mustella putorius) et plusieurs espèces de chauve-souris : la Barbastelle (Barbastella barbastella), le Vespertilion de Bechstein (Myotis bechteinii), le Vespertilion de Daubenton (Myotis daubentonii), le Vespertilion à oreilles échancrées (Myotis emarginatus), le Petit Rhinolophe (Rhinolophus hipposideros).

Commentaires sur la délimitation

Habitats remarquables en inter-relation, tourbeux pour la plupart et renfermant de nombreuses espèces d'intérêt patrimonial.