Au sein d’un paysage au relief vallonné, la forêt d’Eperlecques et les bois associés (bois de Ruminghem et de Recques) occupent les collines recouvertes de formations résiduelles à silex. Les cultures, surtout localisées au niveau de la plaine sur les argiles Yprésiennes, forment une auréole autour des espaces boisés. Aux confins de trois grandes régions naturelles (Flandre intérieure, Flandre Maritime et collines de l’Artois), cette ZNIEFF souligne les premières ondulations des collines crayeuses de l’Artois. Elle s’étend entre les vallées de la Hem et de l’Aa canalisée, au sud de Ruminghem. La partie sud-orientale, en contrebas de la forêt d’Eperlecques, comporte deux marais (marais de Noord Brouck et marais de la Vlotte) correspondant à l’extrémité septentrionale du marais audomarois. Dès 1920, le plateau de la forêt d’Eperlecques avait été enrésiné en Pin noir et Pin sylvestre dont il ne subsiste aujourd’hui que quelques individus. Il y a une cinquantaine d’années, un enrésinement important en Epicéa de Sitka et sapins a été effectué après de vastes coupes à blanc. Cette sylviculture semble se perpétuer puisqu’il y a vingt ans, de nouvelles plantations venaient d’être réalisées et qu’en 2010, des coupes à blanc sur de grandes parcelles ont de nouveau été notées. Cette sylviculture nuit à la qualité et à la diversité biologiques de la forêt en limitant les potentialités naturelles d’expression de très nombreux habitats, qu’ils soient forestiers ou liés aux nombreux petits biotopes associés (layons herbeux, mares, lisières…). Un golf a également été aménagé dans le bois de Ruminghem. Par ailleurs, le TGV Lille-Calais passe au nord de la forêt d’Eperlecques dont il a détruit une partie des lisières et qu’il isole aujourd’hui de toute la partie nord de cette ZNIEFF. Une partie de la forêt d’Eperlecques appartient aujourd’hui au département du Pas-de-Calais (espace naturel sensible). L’ensemble du massif boisé se présente comme une alternance de croupes et de vallons de direction nord/sud ; certains de ses vallons sont parcourus de ruisseaux temporaires au débit très irrégulier. La Forêt d’Eperlecques, comme mentionné précédemment repose en fait sur des argiles et des formations résiduelles à silex qui la différencie totalement de la forêt de Tournehem pourtant très proche. Cette géologie particulière explique bien l’originalité des végétations forestières rencontrées, avec des successions parfois complexes de communautés forestières ou associées en fonction de la nature des sols : - sols podzoliques occupés par une Hêtraie-Chênaie sessiliflore mésophile acidiphile à Houx pauvre en espèces relevant de l’Ilici aquifolii - Fagetum sylvaticae, présent ici sous deux type principaux (Ilici aquifolii - Fagetum sylvaticae luzuletosum sylvaticae et Ilici aquifolii - Fagetum sylvaticae vaccinietosum myrtilli, ou très localement au niveau de cuvettes engorgées correspondant à d’anciennes exploitation artisanales de silex, des bétulaies à sphaignes du Sphagno palustris - Betuletum pubescentis, toutes particulièrement rares dans le Nord - Pas de Calais ; - sols un peu moins acides colonisés par une Chênaie –Hêtraie un peu plus diversifiée qui pourrait correspondre au type forestier décrit en Haute-Normandie sous le nom d’Oxalido acetosellae - Fagetum sylvaticae ; - sols bruns argileux plus ou moins lessivés et pauvres en bases avec chênaies-charmaies acidiclines à mésoacidiphiles relevant soit du Primulo vulgaris - Carpinetum betuli, type forestier original décrit des collines argileuses de Flandre, soit de chênaies du Quercion roboris restant à caractériser ; - colluvions de fond de vallons temporairement inondables où se développent des aulnaies rivulaires relevant de l’Alnenion glutinoso – incanae voire ponctuellement de l’Alnion glutinosae. De nombreuses communautés végétales illustrent ainsi la diversité des biotopes présents au sein de ce massif boisé, une vingtaine d’entre-elles étant déterminantes de ZNIEFF. Outre les grandes associations forestières structurant le paysage de la forêt d’Eperlecques, diverses végétations annexes liées à d’anciennes gravières en eau, à des mares, des chemins, etc. sont tout à fait originales et dignes d’intérêt : - Végétation mésotrophile rase amphibie à Jonc bulbeux et Renoncule flammette du Ranunculo flammulae - Juncetum bulbosi ; - prairie forestière hygrophile à Molinie bleue et Jonc aggloméré (Cf. Junco acutiflori - Molinietum caeruleae) ; - layon inondable avec Carici oedocarpae - Agrostietum caninae très typiques, certains hébergeant la rare Scutellaire naine (Scutellaria minor), taxon vulnérable et protégé au niveau régional… Ainsi, une trentaine de taxons sont également déterminants de ZNIEFF dont plus de la moitié sont inféodés aux diverses végétations acidiclines à acidiphiles évoquées précédemment (Carex echinata, Vaccinium myrtillus, Primula acaulis, Osmunda regalis, Melampyrum pratense, Oreopteris limbosperma, etc. les trois dernières citées étant déjà d’observation un peu ancienne et méritant d’être recherchées. Les marais de Noord Brouck et de la Vlotte, encore méconnus, apportent plusieurs espèces et habitats déterminants absent sur les collines. Malgré tout, au vu de la taille de cette ZNIEFF, de sa complexité géomorphologique et écologique, et de prospections somme toute limitées à certains secteurs, ce site n’a probablement pas encore révélé toutes ses richesses biologiques et l’ensemble de son patrimoine floristique et phytocénotique. A ce massif boisé ponctué de ruisseaux temporaires, abritant l’avifaune typique des milieux forestiers, sont associées d’anciennes gravières et plusieurs mares, accueillant plusieurs espèces d’Amphibiens, dont deux espèces déterminantes : le Triton alpestre et la Grenouille verte de Lessona. Cette dernière est assez commune en région (GODIN, 2003). Elle est quasi menacée au niveau national (UICN France et al., 2009), le Klepton Pelophylax kl. esculentus se substituant à l’espèce parente. Elle est citée ici sous réserve puisque seules des analyses génétiques permettent de déterminer l’espèce avec certitude. La Couleuvre à collier est peu commune et en déclin dans le Nord – Pas-de-Calais (GODIN, 2003). La ZNIEFF présente un intérêt pour les Rhopalocères puisque six espèces présentes sur le site sont déterminantes. Cinq d’entres elles sont peu communes en région : le Tabac d’Espagne (Argynnis paphia), le Collier de corail (Aricia agestis), l’Azuré des nerpruns (Celastrina argiolus), le Demi-deuil (Melanargia galathea) et la Thécla du chêne (Neozephyrus quercus). La Thécla du bouleau (Thecla betulae) est quant à elle considérée comme assez rare dans le Nord – Pas-de-Calais (HAUBREUX [coord.], 2005). Cette espèce fréquente les lisières, haies, bois clairs, broussailles et jardins (LAFRANCHIS, 2000). Concernant les Odonates, une espèce déterminante a été observée sur le site : le Leste brun (Sympecma fusca), espèce peu commune en région (GODIN et al., 2003). Six espèces déterminantes d’Oiseaux sont nicheurs (de probable à certain) dans le périmètre de la ZNIEFF. Parmi elles, la Bondrée apivore et le Busard des roseaux, communs en région, et le Busard Saint-Martin, assez commun dans le Nord – Pas-de-Calais (TOMBAL [coord.], 1996). Tous trois sont inscrits à l’Annexe I de la Directive Oiseaux. Le Busard des roseaux est également classé vulnérable dans la Liste rouge nationale (UICN France et al., 2008). Il niche traditionnellement dans des roselières mais, ce milieu étant en régression, il niche également dans les champs cultivés (TOMBAL [coord.], 1996). La Bondrée apivore vit dans des boisements de plusieurs dizaines d’hectares au minimum, entourés de quelques centaines d’hectares de prairies (TOMBAL [coord.], 1996). Le Busard Saint-Martin niche principalement dans l’ouest de la région (TOMBAL [coord.], 1996). Parmi les trois espèces déterminantes de Chiroptères observées sur le site, le Grand rhinolophe est inscrit à l’Annexe II de la Directive Habitats, il est classé quasi-menacé à l’échelle nationale (UICN France et al., 2009) et il est assez rare et en danger dans la région Nord – Pas-de-Calais (FOURNIER [coord.], 2000). Cette espèce affectionne les mosaïques de milieux mixtes (pâtures avec haies, lisières, sous-bois dégagés, parcs, etc.) (ARTHUR & LEMAIRE, 2009). La Pipistrelle de Nathusius, inscrite à l’Annexe IV de la Directive Habitats, est identifiée comme étant quasi-menacée à l’échelle nationale (UICN France et al., 2009) et peu commune en région (FOURNIER [coord.], 2000). Cette pipistrelle fréquente des milieux boisés associés à des plans d’eau (ARTHUR & LEMAIRE, 2009).
Extension du périmètre à l'ouest pour intégrer des terrains composés d'étangs, de fossés, de fourrés et de prairies au sein desquels sont présentes plusieurs espèces déterminantes de ZNIEFF, dont la Renoncule en crosse (Ranunculus circinatus) et le rarissime Potamot à feuilles obtuses (Potamogeton obtusifolius). Extension du périmètre au nord du site et à l'est de la voie ferrée pour intégrer les prairies humides bordées de fossés au nord, ainsi que des terrains et des cours d'eau, situés entre la voie ferrée et le canal, qui abritent les espèces déterminantes suivantes : le Céraiste à quatre étamines (Cerastium diffusum), le Potamot de Fries (Potamogeton friesii), le Potamot à feuilles obtuses (Potamogeton obtusifolius) et l'Utriculaire commune (Utricularia vulgaris).