DESCRIPTION DU SITE - INTERET
La forêt de la Serre se situe au nord-est de Dole et couvre un massif original dans le Jura qui est le seul grand affleurement de socle cristallin dans le Jura. Il se présente comme une butte (horst) allongée du nord -est vers le sud-ouest et qui a gardé une grande partie de sa couverture sédimentaire. Ces terrains sédimentaires couvrent localement le socle cristallin (conglomérats d'argiles et grès d'âge primaire, grés, argiles du Trias) et les rebords de la butte. L'altitude oscille généralement entre 300 et 350 m, les points hauts étant inférieurs à 400 m.
Les terrains cristallins et gréseux supportent une végétation acidiphile* qui forme un contraste avec le rebord de la butte et les vallées calcaires de l'Ognon au nord et du Doubs au sud où la végétation est calcicole*.
La forêt couvre en majeure partie ce massif et la zone est occupée par :
- des chênaies sessiliflores acidiphiles pauvres en espèces, établies sur sols acides, superficiels, rocailleux ou sableux. Dans la forêt de la Serre, elles sont bien typées et couvrent de grandes surfaces. Sur plusieurs secteurs, des boisements résineux (pins) leur ont été substitués pour améliorer la rentabilité. Sur la partie sommitale, se développe une chênaie sessiliflore hyperacidiphile à tendance xérophile*. Cette tendance confère au groupement un aspect encore plus clairsemé ;
- des chênaies-charmaies à stellaire holos-tée qui sont des formations acidiclines* se confinent dans les bas de versant et les fonds de vallon ;
- en bordure de ruisseaux, les conditions stationnelles permettent la venue d'aulnaies à sphaignes rares en basse altitude où l'on observe l'osmonde royale, typique des sols acides ;
- des aulnaies marécageuses.
A l'intérieur de cette forêt, plusieurs stations particulières méritent d'être mentionnées :
- stations botaniques saxicoles avec de nombreux rochers à asplenium septentrionale. L'un des plus remarquables, situé dans le bois d'Amange au bord de la route départementale 37, recèle au moins 7 espèces végétales à très forte valeur patrimoniales, certaines connaissant là une de leurs rares stations départementales.
- tourbière à sphaigne (très rare en plaine) aux prés du Girard malheureusement plantée de résineux ;
- clairières où fut exploité le sable.
Quelques anciennes petites sablières artisanales ont donné naissance à des mares. Ces petits plans d'eau, situés au sommet et au centre de la forêt, ont un rôle écologique remarquable ; ils abritent 11 des 15 espèces d'amphibiens présentes en Franche-Comté et les 4 espèces de tritons de la région, fait relativement exceptionnel.
Certains ruisseaux intraforestiers présentent une qualité optimale des eux et du milieu propice à la présence d'espèces rares comme l'écrevisse à pattes blanches. L'isolement de telles populations les rendent particulièrement sensibles à toutes travaux, forestiers en particulier.
En même temps, la forêt abrite une intéressante avifaune nicheuse dont le milieu de vie d'un certain nombre d'espèces doit être préservé au niveau européen (engoulevent d'Europe, alouette-lulu et gélinotte des bois).
En périphérie du massif de la Serre, se situent des pelouses mésophiles*calcicoles. Leur intérêt est élevé avec la présence de plusieurs espèces végétales protégées comme sur la pelouse du Routeau (trèfle strié, ophrys apifera). A Malange-Vriange, une pelouse sur marne abrite plusieurs espèces originales. Là, le sol est soumis à des contrastes hydriques importants (teneur en eau très variable selon les saisons) et les espèces présentes doivent supporter des périodes de sécheresse et d'engorgement. Au delà des groupements végétaux et des espèces de flore, ces pelouses abritent également des espèces animales particulières : lézard vert, alouette lulu, engoulevent, pie grièche écorcheur. Il faut cependant noter que ces milieux sont menacés par l'enfrichement progressif suite à l'abandon des pratiques pastorales traditionnelles.
L'intérêt de ce massif pour les chiroptères est primordial autant pour sa qualité de territoire de chasse que pour la présence de gites arboricoles de mise bas. Parmi les 17 espèces identifiées avec certitude, 6 sont fortement liées à la forêt pour l'accomplissement de leur cycle biologique. Parmi ces dernières, 4 occupent des gîtes arboricoles (décollement d'écorce, trous de pics, gélivures ...) pour mettre bas et élever leurs jeunes. L'espèce remarquable est le Murin de bechstein avec une population estimée à 55 individus adultes répartis en 3 colonies distinctes. Actuellement, l'insuffisance de recul ne permet pas de préciser la localisation exacte des arbres préférentiellement occupés bien qu'une fidélidé pour les trous de pics soit observée. Parallèlement, il convient de noter la présence, en périphérie de ce massif forestier, de nombreuses colonies situées en habitat humain ou souterrain (près de 6000 individus). Pour beaucoup, la forêt de la Serre constitue leur territoire de chasse.
OBJECTIFS ET MOYENS DE PRESERVATION ET DE GESTION
Les objectifs de gestion et les moyens de préservation découlent de la sensibilité particulière des milieux naturels et des atteintes observées. Sur l'ensemble du site, plusieurs objectifs se dégagent ; les moyens et actions permettant de les atteindre devront faire l'objet d'une définition au niveau local sur les thèmes qui suivent.
Dans le domaine forestier, ce massif a déjà fait l'objet d'enrésinements conséquents et il convient à présent de les limiter. De façon générale, les formations forestières peu productives séchardes sur sols squelettiques et humides en fond de vallon sont à maintenir. De même, il convient d'assurer la préservation de la chênaie xéro-acidiphile sommitale et, dans les aulnaies à sphaignes bordant les ruisseaux, une gestion forestière conservatoire adaptée doit être conduite. Enfin, Il y aurait lieu d'introduire une diversité de structure des peuplements dans la gestion forestière actuelle. Celle-ci devrait être favorable à la gélinotte des bois afin d'assurer son extension sur l'ensemble du massif.
Plusieurs milieux intra-forestiers présentent un grand intérêt ; leur maintien ou leur restauration est synonyme de préservation de la biodiversité en particulier grâce à :
- la protection des parois siliceuses situées en bordure de la route départementale 37 dans le bois d'Amange,
- la réhabilitation de l'ancienne tourbière des prés du Girard en enlevant la plantation de résineux qui a été opérée,
- l'entretien des mares, nécessaire lorsque leur état et l'envahissement par la végétation l'imposent. En même temps, dans les mares où il est présent, le poisson-chat devrait être éliminé car il concurence fortement les différentes espèces de batraciens au point de les mettre en danger,
- la protection des ruisseaux intraforestiers,
- le maintien des milieux naturels non boisés inclus au sein des massifs forestiers,
- la mise en place d'îlots de vieillissement,
- la protection des chênes à cavité.
Les pelouses présentent un intérêt élevé. Compte tenu de la déprise agricole, elles sont cependant menacées et certaines pratiques doivent être restaurées en vue d'éviter la fermeture du milieu :
- reconquérir les landes fermées et les milieux en voie de boisement spontané, par une gestion conservatoire de fauche ou de pâturage extensif,
- contrôler l'embroussaillement par un défrichement raisonné suivi d'une élimination des refus,
- promouvoir les pratiques extensives de gestion et limiter strictement la fertilisation de ces pelouses.