ZNIEFF 430002183
LAPIAZ DE LOULLE

(n° régional : 46000034)

Commentaires généraux

DESCRIPTION

Sur le deuxième plateau du Jura, au sud de Champagnole, le lapiaz de Loulle apparaît comme une vaste table de calcaire dur et nu, ciselé et buriné. Ce type de morphologie karstique superficielle est le résultat de la dissolution d'un calcaire très pur par des eaux de pluie froides et chargées d'acide carbonique ruisselant à la surface des dalles. La roche est progressivement découpée en sillons, mais conserve sa continuité en tant que bloc calcaire. Elle est traversée de rigoles (sillons orientés selon la ligne de pente) et de crevasses (ou laizines) plus encaissées qui proviennent de l'approfondissement de ces fissures et se recoupent. Ce phénomène est ici spectaculaire et ce lapiaz constitue l'un des plus beaux du massif jurassien. Il est dit " ouvert " ou " nu ", c'est-à-dire très peu colonisé par la végétation, par opposition aux lapiaz couverts en contexte forestier. Le lessivage constant n'autorise que le dépôt d'une mince couche d'humus dans les anfractuosités.

Les conditions écologiques sont extrêmes et très sélectives : substrat calcaire affleurant, sols squelettiques, déficit hydrique marqué et ensoleillement important. Seule une flore très spécialisée, ayant développé des stratégies d'adaptation, peut survivre. Les espèces pionnières et saxicoles sont largement représentées, notamment les mousses, les lichens et les chaméphytes succulentes (telles que les orpins). La floraison des plantes annuelles est spectaculaire au printemps.

Le lapiaz de Loulle forme un complexe de dalles rocheuses, de pelouses, de fruticées et de boisements xérophiles étroitement imbriqués en mosaïque. Outre un intérêt géologique et esthétique évidents, il présente une forte originalité biologique : des espèces inféodées au froid des milieux sub-alpins ou aux chaudes stations méditerranéennes cohabitent ici de façon intime et contrastée. Entre la surface de la roche et le fond des laizines, les plantes xérophiles à hygrosciaphiles se répartissent de façon différentielle selon leurs exigences. Ces habitats, d'intérêt européen, sont des refuges pour des espèces méridionales en limite d'aire de répartition. C'est le cas du nerprun des rochers, xérothermophile et calcicole, formant des buissons épineux, prostrés et peu élevés dans des zones en cours d'évolution. De plus, ce site constitue l'une des rares stations régionales d'une petite graminée pionnière des sols superficiels, le pâturin de Baden. Il héberge également la fétuque de Patzke et l'épervière faux buplèvre, astéracée rare en France, qui ne compte que huit stations en Franche-Comté. Les boisements sont représentés par des chênaies sèches sur calcaire à chênes pubescent et hybride.

La bacchante, papillon des lisières et bois clairs à strate herbacée développée, est régulièrement présente sur la zone. Cette espèce protégée, en forte régression, reste très localisée.

 

STATUT DE PROTECTION

Aucune protection réglementaire de l'espace n'a été mise en place. En revanche, la présence d'espèces protégés confère indirectement un statut de protection au milieu : la législation interdit en effet de porter atteinte aux espèces et aux milieux qui les supportent (arrêtés ministériels du 23/04/07, du 19/11/07 et du 29/10/09).

 

OBJECTIFS DE PRESERVATION

Par nature, ce milieu est peu évolutif du fait des conditions écologiques, mais présente une grande fragilité et se révèle sensible aux perturbations.

Les remblaiements, dépôts divers, extractions ou essais de plantation sont à exclure impérativement. Il convient également d'éviter les épandages d'engrais sur le plateau : un enrichissement du sol entraînerait la disparition des espèces caractéristiques du site et leur remplacement par une flore plus banale.

Un maintien en l'état doit être assuré en surveillant la vitesse d'évolution de la végétation arbustive (suivi simple par photographies aériennes par exemple). Parmi les autres mesures à préconiser, il conviendrait, après défrichement de certains secteurs, d'assurer un pâturage extensif des pelouses à l'est du lapiaz et une fauche annuelle des refus.

 

Commentaires sur la délimitation

La délimitation proposée prend en compte la totalité du lapiaz y compris dans les secteurs enfrichés.