Habitats représentés : - Grotte naturelle
- Forêts de versants (Tilio-Acerion)
- Dalles calcaires (Alysso-Sedion)
- Pelouses à globulaires (Globularietum)
- Pelouses à genêt poilu et laser sermontain (Genisto-Laserpitietum sileris)
- Groupements calcicoles de parois rocheuses (Potentilletalia caulescentis)
- Hêtraie-sapinière (Abieti-Fagetum)
- Eboulis calcaires (Rumicetum scutati, Gymnocarpietum robertiani)
- Pelouse mésophile à brome érigé et gentiane printanière (Gentiano vernae-Brometum)
- Pelouses marneuses (Tetragonolobo-Mesobromenion)
- Pelouses xérophiles (Xerobromion)
- Fruticées thermophiles (Coronillo-Prunetum mahaleb)
- Fruticées montagnardes thermophiles (Amelanchiereton)
- Prairies mésophiles oligo-mésotrophes (Gentiano-Cynusoretum)
- Tourbières et marais (Sphagnetum magellanici, Caricion davallianae,Menyantho trifoliatae-Caricion lasiocarpae, Molinion, Filipendulion)
- Lapiaz (Cystopteridion)
Affluent de l'Ain, la Bienne naît près des Rousses à 1100 m d'altitude. Flanquée à l'est comme à l'ouest de reliefs très accentués, elle entaille profondément le massif plissé jurassien jusqu'à Saint-Claude (environ 400 m d'altitude) où elle reçoit le Tacon, grossi du Flumen. Elle poursuit son cours plus calmement en traçant de nombreux méandres avant de confondre ses eaux avec celles de l'Ain dans la retenue de Coiselet (environ 310 m d'altitude). Le Tacon, son principal affluent, parcourt une combe longue et profonde (entre 1020 et 420 m d'altitude) avant de recevoir le Flumen, natif de plusieurs résurgences alimentées par une série de pertes qui affectent les écoulements superficiels des plateaux voisins.
Au niveau de Saint-Claude, la structure plissée du faisceau helvétique (ou Jura plissé) voit son orientation générale NNE - SSO se modifier légèrement, occasionnant ainsi un grand nombre de failles, décrochement et chevauchement, qui bouleversent la succession régulière des anticlinaux et des synclinaux. L'érosion actuelle, engendrée par les vallées de la Bienne, du Tacon et du Flumen, ne fait qu'accentuer le relief en entaillant largement les anticlinaux d'Avignon (950 à 1000 m), du Fresnois et des Bouchoux (1150 à 1200 m). D'imposants éboulis jalonnent alors le pied des corniches calcaires sur les versants de ces vallées encaissées ainsi qu'à la base des crêts, notamment à la Combe de Tressus, du Crêt du Surmontant et au Crêt pourri. Ils sont relayés dans les fonds de vallée par une importante couverture morainique témoignant de l'activité des glaciers au cours de l'ère quaternaire (moraines et formations fluvioglaciaires würmiennes).
La rareté des circulations d'eaux superficielles sur les plateaux est une des caractéristiques du massif jurassien. La perméabilité des calcaires engendre, en effet, un drainage souterrain très actif, à l'origine du relief karstique typique : cirques, reculées, grottes, dolines, lappiez... Les eaux souterraines alimentent des exsurgences ou des résurgences qui vont grossir un abondant chevelu hydrographique au sein des combes argileuses ou des synclinaux. Ces circulations souterraines sont identifiées par des transferts d'organismes des milieux aquatiques superficiels, vers les résurgences, sur des distances parfois très longues (une vingtaine de kilomètres par exemple, entre le lac de l'Abbaye et la source de Molinges parcourus par des coquilles d'un mollusque du genre Pisidium et vivant dans les sédiments profonds).
Les sytèmes lacustres et les ruisseaux du haut bassin, inscrits dans un paysage de tourbières, constituent par ailleurs, une importance ressource hydrique. Le bassin de la Bienne présente ainsi une unité hydrographique et écologique riche où s'opposent les compartiments torrentiels de l'amont, jusqu'à St Claude et une vallée élargie et moins pentue, jusqu'à la confluence avec l'Ain. Le contraste physique haute/basse vallée et la présence d'anciennes vallées glaciaires d'altitude, favorise l'installation d'une large gamme d'organismes aquatiques, de l'écrevisse à pieds blancs, présente en tête de bassin au blageon et à l'ombre commun, qui remontent la Bienne jusqu'à Saint-Claude.
Le Flumen, long de quelques kilomètres seulement, est formé à partir des eaux qui s'échappent de grottes ouvertes dans les plans de stratification des couches calcaires, au fond d'un petit cirque rocheux. Ces sources sont des résurgences principalement alimentées par une série de pertes qui affectent les écoulements superficiels de la montagne voisine. Le Tacon circule dans la combe la plus longue et la plus profonde du secteur avant d'être rejointe par le Flumen.
Dans ce bassin, la qualité des cours d'eau a peu évolué dans la dernière décennie (1981) ; la majeure partie de la Bienne fait l'objet de pollution moyenne mais sa qualité reste toutefois en-deça des objectifs prévus (classe 1B et non 1A). Les eaux du Tacon présentent une bonne qualité physico-chimique sur l'ensemble du cours et les données hydrobiologiques sont satisfaisantes. Classé en 1A à sa source, le Flumen est rapidement dégradé par les apports d'un affluent qui véhicule les eaux usées de Septmoncel où la station d'épuration fonctionne mal. Il retrouve une qualité compatible avec l'objectif fixé (1A) à sa confluence avec le Tacon.
L'encaissement des vallées, l'opposition de versants plus ou moins abruptes, la nature des calcaires... occasionnent une grande diversité de milieux :
- forêts de pente ombragées à hêtre, érable sycomore, érable plane et orme des montagnes ; hêtraie froide à dentaire sur éboulis fins et plus ou moins stabilisés et érablaie à scolopendre sur éboulis grossiers.
Les blocs rocheux sont le siège d'associations muscinales variées et de plusieurs espèces de fougères favorisées par l'humidité et la fraîcheur ;
- forêts de pente ensoleillées à tilleuls : hêtraie thermophile* à céphalanthère sur éboulis fins et tilliaie-érablaie sur éboulis grossiers ;
- chênaie pubescente en bordure de corniches ensoleillées ou en pied de falaises bien exposées. Répandue sur le pourtour méditerranéen, elle ne trouve refuge, dans notre région, qu'au niveau d'escarpements rocheux secs et très ensoleillé, où règnent les conditions écologiques nécessaires à son maintien ;
- pelouses thermoxérophiles. Les dalles calcaires compactes ou les sols très superficiels des rebords de corniches ensoleillées hébergent une flore très originale pour la région et dont l'ère de répartition est naturellement centrée sur le pourtour méditerranéen et les Alpes externes. On y trouve notamment l'androsace couleur de lait, plante protégée au niveau régional et le groupement à globulaire, concentré, en Franche-Comté, dans les environs de Saint-Claude. Il peut être en contact avec une pelouse à séslerie et laser siler, groupement peu commun et circonscrit, compte tenu de ses exigences écologiques, aux rebords de corniches submontagnardes. Ces formations herbacées peuvent être piquetés d'arbustes adaptés aux conditions de sécheresse et d'ensoleillement. Il s'agit notamment de l'amélanchier à feuilles ovales, du nerprun des Alpes ou du cytise des Alpes.
- pelouses thermophile sur sols un peu plus épais ou sur marnes et à réserve d'eau supérieure aux pelouses thermoxérophiles*. Elles sont très riches en espèces et notamment en orchidées (orchis odorant, orchis vert, orchis litigieux, protégés tous trois sur le territoire franc-comtois et sabot de vénus, magnifique orchidée bénéficiant d'une protection intégrale sur l'ensemble du terrtoire national et citée en annexe de la Directive Habitats, comme espèce d'intérêt communautaire). Ces formations herbacées nécessitent un entretien régulier et évo-luent, en l'absence d'activités pastorales, vers des groupements arbustifs préfigurant le retour à la forêt. Une structure mixte et un équilibre judicieux entre formations herbacées et artustives favorisent l'expression d'une faune diversifiée et digne d'intérêt, notamment en ce qui concerne les papillons (plusieurs espèces d'intérêt communautaire comme l'Apollon ou le Protée), les reptiles (lézard vert, couleuvre verte et jaune, coronelle lisse...) ou les oiseaux (pie-grièche écorcheur) ;
- les falaises, siège de nidification du faucon pélerin dominent de nombreux éboulis calcaires, de superficie parfois importante. On y trouve une flore caractéristique (oseille en écusson, silène des éboulis, épervière à feuilles embrassantes...) sans oublier le chamois, hôte privilégié de ces milieux instables ;
- les grottes enfin, caractéristiques du relief karstique jurassien et sites de nidification de nombreuses espèces de chauves-souris : grand rhinolophe et minioptère de Schreibers, d'intérêt communautaire et vespertilion de Daubanton et à moustaches, protégés sur le territoire français, par exemple.
L'ensemble du site présente un grand intérêt floristique et faunistique qu'il convient de préserver.
Sur les pelouses, il peut être menacé par la plantation de résineux ou par l'abandon de pratiques pastorales qui limitaient jusqu'à présent l'évolution naturelle vers les formations boisées.
En ce qui concerne les milieux aquatiques, dans un ensemble de très bonne qualité écologique, plusieurs points apparaissent sévèrement pollués et déclassent la qualité des biocénoses (environs de Morez sur la Bienne, apports du ruisseau de Chapy sur le Flumen...). La présence d'algues filamenteuses témoigne également, sur certains secteurs, de l'impact des rejets minéraux et organiques (effluents domestiques amplifiés par le tourisme, fertilisants d'origine agricole, rejets toxiques...). L'instabilité des fonds de la partie amont des cours d'eau (notamment Flumen et Tacon) accentuée par le prélèvement de matériaux à l'aval (Saint-Claude) et l'emprise croissante de l'urbanisation sur le lit de la rivière occasionne, par ailleurs, des phénomènes d'érosion intense sur les versants composés d'éléments fluviaux glaciaires plus ou moins meubles. Les barrages, à l'image de celui d'Etables, induisent parallèlement d'importantes variations du niveau de l'eau dont l'irrégularité constitue un facteur particulièrement limitant pour la richesse des biocénoses aquatiques. La qualité des populations de truite du Tacon et du Flumen est soumise à de sévères problèmes de mobilité des fonds et de charriage des matériaux du lit à l'amont et à l'aval des sites urbains (Morez, Saint-Claude). Ces problèmes sont liés à une restructuration des seuils de stabilisation ainsi qu'à l'emprise croissante de l'urbanisation sur le lit de la rivière fortement artificialisé en agglomération.
OBJECTIFS ET MOYENS DE PRESERVATION ET DE GESTION
Les objectifs de gestion et les moyens de préservation découlent de la sensibilité particulière des milieux naturels et des atteintes observées. Sur l'ensemble du site, plusieurs priorités se dégagent ; les moyens permettant de les atteindre devront faire l'objet d'une définition au niveau local sur les thèmes suivants :
- assurer le maintien de la coexistence des pelouses, des éboulis, des falaises et des forêts en favorisant la pérennisation d'activités pastorales ménagées sur les milieux ouverts à semi-ouverts (fond de gestion de l'espace rurale, mesures agri-environnement...) ;
- conduire une gestion forestière respectueuse des particularités géomorpho-logiques et des potentialités écologiques des stations. Compte tenu des difficultés d'accès, certains secteurs sont soutraits à toute forme d'exploitation ; il convient de les identifier et de suivre leur évolution, de façon à orienter d'autres choix de gestion ou maintenir cette situation ;
- fournir un effort dans l'amélioration de la qualité des eaux (assainissement, plans d'épandage sur les plateaux voisins, mise aux normes des bâtiments d'élevage...) ; la nouvelle station d'épuration de Septmoncel, en cours d'autorisation est de nature à répondre, pour partie, à cet objectif ;
- engager des études hydrauliques préalables au projet de construction au voisinage du lit de la rivière ;
- mieux comprendre la dynamique fluviale pour favoriser un rajeunissement naturel des saulaies riveraines et répondre aux problèmes d'érosion sur les secteurs amont des cours d'eau très actifs comme le Tacon et le Flumen (stabilisation des fonds, reprise de l'ancien cours en certains points de la vallée entretien et restauration des seuils, gestion intégrée des débits).
L'évolution des peuplements piscicoles de la basse vallée de la Bienne doit être suivie avec attention dans le but de limiter la remontée du hotu dans la rivière, à partir de la retenue de Coiselet.
Ces interventions doivent constituer l'aboutissement d'une réelle prise en compte du fonctionnement des milieux aquatiques et riverains sur l'ensemble du linéaire du cours d'eau.