COMMENTAIRE GENERAL
Située sur le plateau de Champagnole, à plus de 930 mètres d’altitude, la tourbière des Saignes Landry est le résultat de l’épisode glaciaire du début du Quaternaire, dans cette partie du Jura. Lors du retrait des glaciers, le paysage a été façonné, sous la forme de dépressions plus ou moins vastes, encadrées le plus souvent de chaînons calcaires dont le sommet a été érodé. Les matériaux arrachés au substrat de ces chaînons ont tapissé le fond des combes. Les conditions climatiques qui se caractérisent notamment par des précipitations importantes s’ajoutant à l’imperméabilisation des sols sont à l’origine de l’omniprésence de l’eau. Ces deux caractéristiques et le fait de températures annuelles plutôt basses concordent à l’installation d’écosystèmes originaux : les tourbières.
Le site des Saignes Landry compte en fait deux tourbières boisées séparées par une dépression où s’est développée une saulaie arbustive. Un bas marais alcalin s’est installé au sud-ouest du site, sur une surface réduite. Première phase dans la dynamique évolutive de la tourbière, il est constitué principalement de laîche millet, laîche brune, prêle des eaux courantes, orchis incarnat… Une tourbière haute active lui succède, un peu plus au nord. Difficilement pénétrable tant l’enchevêtrement des branches et des arbres tombés à terre est dense, on remarque quand même un tapis dense de myrtilles, mêlées à la prêle des bois, le sceau de Salomon à feuilles verticillées.... Le bouleau pubescent, le sorbier des oiseleurs et le tremble sont les principales compagnes de l’épicéa dans la strate dominante. Dans les trouées ou sous les épicéas lorsque ceux-ci s’éclaircissent un peu, le tapis herbacé présente des espèces de marais de transition ou de haut marais : comaret, trèfle d’eau, crépide des marais, airelle des marais… L’activité ancienne d’extraction de la tourbe a laissé des traces encore visibles, sous la forme de gouilles qui correspondent à d’anciennes fosses d’exploitation.
Lorsque les eaux, du fait du bombement de la tourbière ne sont plus en contact avec le calcaire, il s’ensuit la formation d’un bas marais acide. C’est le cas ici, sur une toute petite surface. Malgré sa faible étendue, son intérêt n’est pas des moindres notamment au niveau des espèces qu’il abrite : laîche brune, laîche hérisson, violette des marais, nard raide… La frange occidentale de cette tourbière haute est très dégradée par la plantation d’épicéas.
La périphérie de la tourbière est composée d’une mégaphorbiaie qui assure la transition avec ce milieu très particulier et les prairies humides qui l’entourent. L’ortie dioïque, la renoncule à feuilles d’aconit, la reine des prés… sont parmi les espèces dominantes de ce type de prairie un peu particulier, qui abrite le rare œillet superbe.
En ceinture autour de la tourbière s’étend une prairie humide d’une grande diversité floristique. Il s’agit d’une prairie à trolle et cirse, dont le cortège s’enrichit d’espèces de bas marais comme la laîche pâle, la laîche patte de lièvre, la linaigrette a feuilles étroites, l’orchis incarnat…
Cette zone humide boisée, entourée par des prairies est intéressante pour les insectes. C'est au niveau des zones ouvertes que ce peuplement est le plus riche.
STATUT DE PROTECTION
La présence d’une espèce végétale, citée dans l’arrêté ministériel du 31.08.1995 (annexe II), assure directement la protection de ce site puisque tout acte de destruction à l’encontre de ces espèces et de leur biotope est interdit.
OBJECTIFS DE PRESERVATION
Si l’activité de détourbage a profondément dégradé cette tourbière par le passé, dégradation accentuée sur une partie du site par la plantation d’épicéas, il n’empêche que son intérêt écologique est encore important, les milieux étant bien diversifiés sur une toute petite surface. Afin d’en assurer la pérennité, il semble judicieux d’éviter toute opération de drainage ou d’assainissement sur l’ensemble du site. L’apport d’engrais, au sein et dans les environs de la tourbière (notamment dans les prairies limitrophes) provoquerait un déséquilibre trophique du milieu et entraînerait ainsi une banalisation de la flore et de la faune, limitant alors fortement l’intérêt de ce site.