DESCRIPTION
Remarquable pour la qualité paysagère de sa vallée, l'Audeux l'est également pour ses caractéristiques biologiques et pour son fonctionnement karstique. En effet, le relief jurassien est fortement marqué par des phénomènes issus du pouvoir de dissolution des roches calcaires par l’eau. Outre l’existence de formes particulières (dolines, gouffres, grottes), la morphologie karstique se caractérise par la rareté des écoulements superficiels, ceux-ci laissant place à une circulation souterraine. C’est le cas sur ce tronçon aval du cours d’eau, correspondant à un linéaire de plus de 7 kilomètres le long d’une vallée encaissée, avant sa confluence avec le Cusançin. Ainsi, après un parcours souterrain sur la partie haute, l'Audeux réapparaît en aval des gorges sous forme d’une résurgence et prend alors le nom de Sesserant. Dans ce canyon encaissé, les rapides et les cascades deviennent impétueux en période de pluie, mais le cours d'eau ne montre un écoulement aérien qu'en période de débit soutenu. A l'étiage, il présente un lit encombré de blocs et de rochers. Le parcours est émaillé de gours (ou marmites de géant) successifs. Cette section de la rivière est appelée « les Cuves de Bléfonds ».
La variété des conditions géomorphologiques et la forte opposition de versant de part et d’autre des gorges de l’Audeux permettent l’expression d’un complexe d’habitats particulièrement riche. L’intérêt écologique du site réside principalement dans cette diversité.
L’essentiel du vallon est forestier, à l’exception de quelques prairies eutrophes au niveau du hameau de Bléfond. Lorsque l’éclairement est suffisant, le ruisseau présente une végétation caractéristique des cours d’eau sur calcaire : groupements des sources incrustantes, herbiers à glycérie flottante ou à véronique mouron d’eau et berle dressée, roselières en bordure. Sur les berges, la frênaie-érablaie riveraine présente une extension remarquable, dans une ambiance très confinée. Ces boisements riverains des rivières à eaux vives sur calcaire sont toujours linéaires et peu étendus. Le tapis végétal y est très diversifié, et la flore vernale, notamment, est bien développée. Des mégaphorbiaies (formations humides de hautes herbes) et ourlets humides soulignent le bord des eaux et les lisières forestières.
Les forêts de pente qui dominent le vallon du Sesserant montrent des groupements diversifiés, répartis à la fois selon l’exposition (fort contraste entre l’adret et l’ubac) et la granulométrie des éboulis. En situation froide, l’érablaie à scolopendre se trouve sur des pentes fortes avec gros blocs mobiles, alors que la hêtraie à tilleul apparaît sur substrat fin à moyen. Plusieurs variantes thermophiles ou hygrosciaphiles des hêtraies-chênaies-charmaies neutrophiles sont également représentées. Les parois calcaires en ambiance hygrosciaphile (fraîche et confinée) sont colonisées par une végétation pionnière à capillaire blanc. Enfin, quelques éboulis thermophiles apparaissent localement.
En raison d’une exploitation forestière réduite, cette zone abrite de nombreux arbres morts et à cavités, ce qui en renforce la valeur écologique. Ce type de forêt mature, en voie de raréfaction, présente un intérêt majeur pour une faune spécialisée (insectes sapro-lignicoles, oiseaux, chauves-souris).
STATUT DE PROTECTION
Cette zone est incluse dans le réseau Natura 2000 « Moyenne vallée du Doubs ». De plus, le site des « gorges de l’Audeux à Silley-Bléfond » est inscrit au titre de la loi de 1930. Enfin, la présence d'espèces d'oiseaux, d'amphibiens et de reptiles protégés confère indirectement un statut de protection au milieu : la législation interdit tout acte de destruction vis-à-vis des espèces et de leur milieu (arrêtés du 19/11/2007 et du 29/10/2009).
OBJECTIFS DE PRESERVATION
Du fait de ses caractéristiques morphologiques, la zone des gorges de l’Audeux et du vallon du Sesserant présente un bon état de conservation. Les forêts sont peu ou pas exploitées en raison de leur inaccessibilité. En conséquence, les habitats sont essentiellement soumis à la dynamique naturelle de succession écologique. Afin de pérenniser cette situation, très favorable sur le plan de la richesse biologique, l’instauration d’une protection réglementaire de type réserve intégrale pourrait être envisagée.