Du Saut du Doubs à son entrée en Suisse, le Doubs sert de frontière naturelle entre la France et la Suisse et circule dans une vallée encaissée dominée par des falaises abruptes. Ce site présente un caractère sauvage marqué par l'alternance de canyons (gorges, goules comme aux Echelles de la Mort) et de bassins épanouis (Goumois). Ce secteur présente une succession de groupements végétaux dans un espace restreint et dans un état de conservation remarquable :
- une pessière-sapinière sur le plateau ;
- un taillis clair à hêtre, alisier et sorbier des oiseleurs installé en limite de corniche ;
- une falaise à groupements caractéristiques (potentille caulescente) ;
- des éboulis fixés colonisés par des pelouses sèches de corniche à seslérie (Seslerio-Xerobromion) ;
- sur les éboulis et les secteurs très pentus, dans une ambiance confinée, se développent assez largement des érablières fraîches ou thermophiles et des tiliaies ;
- sur certaines corniches (Falaise des Echelles de la Mort vers Charquemont), des pelouses sèches, proches des prairies acidiclines montagnardes, se développent sur sol profond (Mesobromion).
- la hêtraie chaude développée sur les éboulis fixés ensoleillés présente également un recouvrement important ;
- une hêtraie froide installée sur les sols peu épais ombragés et une érablière à scolopendre sur les éboulis plus grossiers ;
- des fonds de gorges colonisés par des prairies alluviales à fritillaire pintade (Fritillaria meleagris). Etroites et peu accessibles, elles tendent à régresser par manque d'entretien. Le fond est également occupé par des forêts alluviales à aulne blanchâtre (Alnus incana). Les berges sont très souvent colonisées par de remarquables groupements à hautes herbes et pétasites. La présence d'une espèce végétale protégée, la campanule à larges feuilles est à souligner.
La morphologie du lit mineur est marquée par l'alternance de seuils stables et de mouilles ("gours, gauts, retournes"), très favorables aux poissons de grande taille. La présence relictuelle de l'apron, à l'aval du site, témoigne de cette qualité de milieu et la densité des larves d'insectes pétricoles du groupe des Plécoptères (Perlidae) est une des plus élevée du réseau hydrographique franc-comtois. La qualité de l'eau se situe entre la classe 1A et 1B (objectif : 1A) et les valeurs d'indice biologique restent parmi les plus élevées du bassin du Doubs (I.B.G. = 17/20) bien qu'elles aient perdu trois unités en l'espace d'une décennie. Ceci se traduit par une prolifération de certains groupes d'invertébrés moins sensibles à la pollution minérale et organique, y compris dans les plus hauts niveaux de qualité. Cette régression de la qualité biologique est due à une pollution par l'azote et les matières organiques en provenance du karst et des retenues hydroélectriques.
Les forêts de pente, inaccessibles sur de nombreux secteurs sont jusqu'à présent exploitées de façon relativement extensive et les plantations monospécifiques restent rares. L'ensemble présente de ce fait un très bon état de conservation et propice à la nidification d'espèces comme le milan royal, le milan noir, l'épervier d'Europe. Au sein de ces forêts, les corniches, les pelouses et éboulis sont nombreux. Le site possède également un haut intérêt faunistique, les falaises abritant régulièrement, le grand corbeau, le faucon pélerin et le hibou grand duc.
Le Doubs est utilisé pour la production d'énergie électrique et les barrages successifs ont fortement modifié la structure originelle et généré des nuisances qui s'accroissent et se caractérisent par la rupture des cycles hydrologique, thermique et sédimentaire, des obstacles au déplacement des poissons, des épisodes d'émersion et de submersion des fonds, un effet de chasse d'eau et un confinement des masses d'eau. Depuis plus de dix ans, les proliférations végétales (végétaux dressés dans les retenues, algues filamenteuses fixées en eau vive ou non fixées dans les secteurs calmes) se sont accrues sur le site sous l'effet des rejets insuffisamment ou non traités des secteurs amont, des plateaux et de la vallée (la Chaux-de-Fonds, Charmauvillers, Goumois). La régression des peuplements de trichoptères est un des signes les plus nets de cet envahissement végétal. La création d'équipements touristiques et la pratique de sports d'eau vive insuffisamment contrôlée, constituent également de sérieuses menaces pour ce secteur.
OBJECTIFS DE GESTION
1. Restaurer la qualité physico-chimique des eaux de surface et des eaux souterraines en améliorant l'épuration des effluents domestiques, mettant en place des dispositifs d'assainissement individuels performants et régulièrement entretenus, limitant les effets des effluents d'origine agricole et les nuisances induites par les installations touristiques et sportives à fonctionnement saisonnier.
2. Préserver la dynamique du cours d'eau et la qualité des habitats naturels et obtenir une gestion concertée des barrages hydroélectriques (modification du rythme des éclusées, réduction des épisodes submersion - émersion des fonds et des effets de chasse d'eau, maintien d'une valeur de débit biologique acceptable défini en fonction des exigences écologiques des espèces aquatiques).
3. Entretenir les frayères ;
4. Entreprendre une cartographie des formations boisées visant à définir les secteurs non exploitables, ceux devant faire l'objet d'une gestion particulière et ceux où une gestion ordinaire adaptée est suffisante ;
5. Concevoir et réaliser avec le maximum de précaution les dessertes forestières ;
6. Restaurer et entretenir les milieux ouverts y compris intra-forestiers (corniche, pelouses, éboulis, fond de vallée,...) ;
7. Organiser l'affluence liée aux loisirs pour prévenir la surfréquentation afin de maintenir la quiétude des espèces animales et d'éviter la dégradation des milieux ;
8. Assurer une protection réglementaire des secteurs les plus remarquables.
La délimitation inclut le versant dominant la vallée du Doubs en rive gauche.