DESCRIPTION
Jusqu'à Mouthier-Hautepierre, la Loue entaille profondément le plateau de Levier par les Gorges de Nouailles formées des couches du Jurassique supérieur calcaire. Les kilomètres suivants correspondent au franchissement du faisceau salinois, à l'origine de la sculpture de grands ensembles rocheux. En rive droite, ces déformations sont représentées par la Roche de Hautepierre-le-Châtelet et en rive gauche par les Rochers du Capucin. Ces derniers constituent un beau linéaire de falaises, en surplomb de versants forestiers abrupts.
Le sommet des Rochers des Capucins est une vaste zone tabulaire occupée par des pâtures mésophiles et des bosquets. A proximité des corniches, la forte exposition au vent et les sols superficiels ne permettent l'expression que de groupements bien adaptés à ces conditions difficiles. C'est ainsi un liseré discontinu de hêtraie calcicole à seslérie, entrecoupé de lambeaux de pelouse mésoxérophile à laîche humble et brome érigé, d'ourlet et de fruticée mésoxérophiles, qui souligne le rebord du plateau. Adoptant un port tortueux et rabougri, le hêtre domine le peuplement, en compagnie de l'alisier blanc et du chêne sessile. Cette mosaïque de milieux héberge notamment le petit sylvandre, un papillon prioritaire en Franche-Comté, inféodé sur la vallée de la Loue à ces situations de corniche et aux versants forestiers clairs, bien pourvus en lisières. En contrebas, l'érosion des parois verticales crée des anfractuosités favorables à une maigre flore, adaptée à la rudesse des conditions écologiques régnant dans de tels endroits, et procure au faucon pèlerin et au grand corbeau les vires rocheuses dont ils ont besoin pour nicher.
Au pied de ces falaises, les versants, peu ensoleillés, sont intégralement couverts par la forêt, déclinée en plusieurs types selon la granulométrie du substrat. Les blocs instables, issus du délitement des parois, sont le domaine de l'érablaie à scolopendre, alors que les pierriers plus fins, moins contraignants, permettent le développement de belles hêtraies à tilleul. Localement, de petites trouées hébergent l'association montagnarde à rumex à écussons et scrophulaire du Jura. Il s'agit d'une végétation rare et originale, présentant un fort intérêt patrimonial en raison de sa nature primaire. Enfin, les stations moins accidentées accueillent la hêtraie-chênaie neutrophile, trop fréquemment convertie en plantations de résineux. Outre leur intérêt communautaire, toutes ces formations constituent un refuge pour de nombreuses espèces. L'inaccessibilité à la sylviculture des pentes les plus fortes favorise en effet la conservation d'arbres morts pour des communautés animales et végétales étroitement liées à cette ressource, beaucoup plus rare dans les forêts exploitées, et offre des zones de quiétude aux mammifères forestiers.
STATUT DE PROTECTION
La protection de la falaise est assurée par arrêté préfectoral de protection de biotope. La tranquillité du faucon pèlerin est assurée pendant la période de nidification (les pratiques de l'escalade et de vol libre y sont ainsi interdites du 15 février au 15 juin) de même que les travaux d'équipement ou d'aménagement sont interdits.
OBJECTIFS DE PRÉSERVATION
Hormis le respect de la tranquillité de l'avifaune rupestre, la conservation de ce site passe par la conduite d'une exploitation forestière respectueuse de la haute valeur patrimoniale des groupements en place. Cela implique la proscription de tout nouvel enrésinement et la préférence du débuscage au câble lors des récoltes plutôt que la création de nouvelles pistes. La spécificité des forêts de pente plaide également en faveur d'une gestion jardinatoire par bouquets ou pied à pied, voire même d'un abandon de l'exploitation pour les peuplements forestiers à faible potentialité. Sur le rebord de plateau, il convient d'envisager la réouverture des zones les plus fermées de façon à obtenir des bois clairs au sous-bois bien dégagé pour les papillons. Enfin, l'entretien du GR 590 doit veiller à ne pas accumuler des branchages en bord de corniche.