Description
Avec un bassin versant de 2285 km², l'Ognon occupe le 3ème rang des rivières comtoises. Il prend sa source dans les Vosges méridionales sur la commune du Haut du Them-Château Lambert (70) à 904 m d'altitude, près du Ballon de Servance, et conflue avec la Saône en amont de Pontailler-sur-Saône, à 185 m d'altitude, après un parcours de 215 km.
Le bassin de l'Ognon est marqué par le passage des structures hercyniennes silicatées aux puissantes formations calcaires du Jurassique moyen à l'aval. Cette succession entraîne différents types de drainage et de perméabilité et s'accompagne de variations longitudinales de la minéralisation et du régime des eaux.
La basse vallée est délimitée par les rides des Avants-Monts du Jura au sud et les plateaux de la Haute-Saône au nord. Son débit moyen est de 29 m3/s à Chevigney. Ce régime s'apparente à celui des rivières de plaine et il subit les influences vosgiennes en hiver et au printemps (rétention - fonte des neiges). Le débit d'étiage atteint 3,3 m3/s.
Entre Moncley et sa confluence avec la Saône, cet écosystème comprend bien entendu le cours d'eau mais également la vallée alluviale régulièrement inondée (lit majeur), la nappe alluviale et quelques systèmes latéraux.
Malgré la mise en culture de nombreux secteurs, le lit majeur présente encore des complexes prairiaux bien individualisés et remarquables. L'arrhénathéraire à colchique se développe sur les niveaux topographiques supérieurs, rapidement ressuyés après les inondations saisonnières. La prairie inondable à brome et séneçon et la pâture mésohygrophile occupent une grande partie de la surface alluviale du lit majeur, sur les niveaux topographiques moyens, inondables. C'est un groupement intéressant qui présente une flore diversifiée et caractéristique. La prairie à oenanthe fistuleuse est un groupement longuement inondable qui se développe dans les dépressions mouillées une grande partie de l'année. Elle permet le développement de communautés végétales originales qui assurent la transition topographique entre les prairies précédentes et les groupements hélophytiques plus humides des cariçaies et roselières. Elle présente un intérêt floristique remarquable avec la gratiole officinale et la stellaire des marais (espèces protégées).
Les forêts alluviales inondables sont du type ormaie-frênaie. Elles sont tout à fait remarquables et sont observées à la confluence avec la vallée de la Saône (seule station franc-comtoise importante, se prolongeant en Côte-d'Or et en Haute-Saône). Ces forêts sont en régression alarmante ici, comme sur tout le territoire national.
La rivière recouvre les trois derniers niveaux typologiques caractérisant des secteurs à cyprinidés dominants et abrite un riche cortège d'espèces de poissons (28) dont le brochet constitue l'espèce type. En rive droite, plusieurs ruisseaux de dimensions réduites aux eaux fraîches abritent de belles populations d'écrevisse à pieds blancs. Les groupements aquatiques développées au sein des zones calmes et abritées du cours d'eau sont remarquables en raison de la présence des naïades majeure et mineure, espèces protégées au niveau régional.
Sur ce secteur, la qualité des eaux de l'Ognon n'est pas optimale (classe 1B) avec quelques tronçons qui présentent une qualité médiocre (classe 2), l'objectif étant la classe 1B. La valeur de l'indice biologique évolue autour de 13/20. L'altération de la qualité des eaux est liée à une insuffisance des systèmes d'épuration et aux apports diffus organiques et minéraux de l'agriculture intensive. A ces derniers, s'ajoutent les composés toxiques de produits phyto-sanitaires pouvant être à l'origine de mortalités inexpliquées à ce jour de poissons et de moules d'eau douce. Le rôle de plusieurs sous-bassins de la rive gauche amplifie cette situation (quelques affluents sont très dégradés et constituent, malgré leur petite taille, une source d'apports polluants non négligeables). Les surcharges en nitrates et phosphates se traduisent de plus en plus fréquemment par l'apparition massive de fleurs d'eau à algues brunes (site de Pesmes). La création de plans d'eau favorise la naissance de tels phénomènes.
La faune associée à ces ensembles végétaux est riche. L'avifaune emprunte cette voie de migration privilégiée à l'échelle régionale avec de nombreux sites de repos, d'hivernage et même de reproduction pour certains passereaux. On y rencontre de nombreuses espèces dont certaines, protégées, présentent un intérêt européen : martin-pêcheur, busards, locustelle luscinoïde, courlis cendré...
L'intérêt herpétologique est souligné par la présence de deux espèces de couleuvre et trois espèces d'amphibiens.
Notons enfin, à proximité (Ougney), l'existence de très importantes colonies de chauves-souris en période de reproduction. Leur développement est corrélé au maintien d'agrosystèmes marqués par une bonne productivité (prairies alluviales inondables et haies bocagères).
Présence du Coenagrion de mercure dans le ruisseau afférent à l'Ognon (communes de Mutigney et Champagney)
Objectifs et moyens de préservation et de gestion
Les objectifs de gestion et les moyens de préservation découlent de la sensibilité particulière des milieux naturels et des atteintes observées. Sur l'ensemble du site, plusieurs priorités se dégagent ; les moyens permettant de les atteindre devront faire l'objet d'une définition au niveau local sur les thèmes suivants :
La gestion de la basse vallée de l'Ognon doit être approchée dans sa globalité : la clef du système est de respecter l'intégrité de la plaine alluviale, son caractère inondable et de restaurer la qualité des eaux. Assurer la préservation de la qualité des milieux alluviaux est donc la priorité et pour cela, il convient de :
-restaurer la qualité physico-chimique des eaux de surface et phréatiques. Cette amélioration passe par une réduction des intrants organiques, minéraux et toxiques et la mise en place d'actions concernant tous les niveaux de fonctionnement des bassins versants (optimisation des apports de fertilisants, amélioration de la capacité de stockage des déjections animales, restauration de réseaux de haies, ralentissement du ruissellement),
-préserver la dynamique du cours d'eau et la qualité des habitats naturels en évitant toute modification des conditions de milieux terrestres (assainissement, drainage des sols) et aquatiques (curage, calibrage, endiguement...),
-conduire les travaux de génie écologique nécessaires à son entretien et à sa restauration
-préserver ou restaurer les connexions entre la rivière et les différents systèmes latéraux (ruisseaux, mortes, secteurs longuement inondés...) afin d'en améliorer l'efficacité comme frayères (brochet en particulier) et zones refuges,
-conduire dans la plaine alluviale des pratiques agricoles respectueuses de la qualité des milieux naturels (maintien de la prairie inondable, diminution d'intrants, retard de fauche),
-concilier une éventuelle production de bois avec le maintien en l'état naturel des peuplements forestiers en pratiquant une sylviculture respectueuse du fonctionnement de l'écosystème et en maintenant le régime d'inondation,
-entretenir et valoriser le patrimoine boisé naturel existant en pratiquant des interventions adaptées aux stations forestières peu favorables à la production de bois,
-favoriser la restauration de certains milieux naturels dégradés comme les ripisylves afin d'assurer la stabilité des berges, prairies pour limiter l'érosion et la pollution des eaux, haies pour favoriser l'installation de la faune,
- mettre un terme aux extractions de matériaux alluvionnaires pour tenir compte de la qualité des milieux naturels,
- organiser les activités de loisirs en freinant celles qui peuvent nuire à la quiétude des espèces animales ou qui engendrent des modifications conséquentes du milieu.