DESCRIPTION
La région naturelle des plateaux et moyenne montagne vosgienne dite " plateau des Mille Etangs " se caractérise par une grande densité d'étangs tourbeux dans un contexte de forêts et de prairies humides. Dans un relief assez peu marqué, les deux étangs du Feu de Chaudière s'étendent au nord-est du village de la Lanterne-et-les Armonts, près du hameau du Serrurey, dans la continuité des tourbières du Bois d'Annegray.
Beaux exemples d'étangs oligotrophes des Vosges comtoises, ces plans d'eau recèlent de nombreuses plantes rares, typiques de ces eaux pauvres en éléments nutritifs, telles que l'écuelle d'eau protégée au plan régional. Des zones tourbeuses et paratourbeuses apparaissent entre ces étangs et sur leur pourtour. Les conditions particulières de cette région de moyenne altitude se révèlent en effet propices à leur formation : climat froid et très humide, substratum géologique cristallin associé à des placages glaciaires plutôt imperméables, nature acide des eaux de ruissellement et des précipitations ainsi qu'un relief peu accidenté. Divers cas se présentent selon le type d'alimentation hydrique : accumulation et stagnation d'eau dans une dépression, ruissellement le long d'une pente douce, radeau flottant à la surface d'un étang (cas de plus de la moitié des tourbières des Vosges comtoises). Ces deux derniers processus sont à l'origine des tourbières du Feu de Chaudière. Si l'alimentation en eau intervient latéralement dans la genèse, les précipitations peuvent s'y ajouter ou s'y substituer totalement ensuite. Souvent, différents stades d'évolution cohabitent étroitement : sur ce site, des groupements de tourbière bombée active et de bas-marais acide alternent en mosaïque avec des communautés à rhynchospore blanc installées dans les gouilles. Ces milieux caractérisés par la présence de sphaignes sont riches en espèces typiques inféodées à cet environnement original et contraignant, telles que les rossolis à feuilles intermédiaires et à feuilles rondes, plantes carnivores protégées au plan national.
Ces habitats imbriqués sont également très favorables aux insectes. Parmi le cortège très intéressant de libellules, pas moins de sept espèces prioritaires sont recensées : la leucorrhine à gros thorax, protégée à l'échelon national, l'agrion hasté, peu répandu en France, l'agrion délicat, qui affectionne les zones tourbeuses, ainsi que l'orthétrum brun, le leste verdoyant, l'orthétrum bleuissant et le sympétrum noir. Ces dernières sont très localisées en France ou peu fréquentes en plaine.
STATUT DE PROTECTION
La zone est incluse dans le site Natura 2000 " Plateau des Mille Etangs ". En outre, la présence d'espèces protégées confère indirectement un statut de protection au milieu : la législation interdit en effet de porter atteinte aux espèces et aux milieux qui les supportent (arrêtés ministériels des 20/01/82, 22/06/92 et 23/04/07).
OBJECTIFS DE PRESERVATION
Les tourbières de Haute-Saône s'étendent sur moins de 250 hectares pour une centaine de sites. Ces réservoirs de biodiversité assurent également des fonctions de régulation hydrique (" rôle d'éponge ") et d'épuration des eaux. Compte tenu de sa valeur et de la rareté des habitats représentés, la sauvegarde de cette zone est prioritaire, ce qui implique le maintien de la fonctionnalité hydrologique et des conditions oligotrophes. Aussi, toute opération de drainage et d'assainissement est-elle à proscrire aux alentours. La poursuite de la pisciculture extensive est à encourager.
L'état de conservation du site du Feu de Chaudière est globalement assez favorable. Toutefois, l'évolution naturelle conduit progressivement à un atterrissement puis à l'installation des ligneux. Ainsi, quelques précautions seraient à prendre, afin de préserver l'intérêt entomologique de la zone :
- contenir la strate arbustive, ce qui serait notamment favorable à certains papillons ;
- entretenir les plans d'eau de manière extensive en respectant la végétation des zones les moins profondes et en veillant au maintien en eau des gouilles.