Description
La vaste plaine alluviale de la Saône représente un territoire bien particulier en raison de son inondabilité. En Haute-Saône, où la dynamique fluviale reste active, la Saône présente un profil caractéristique des rivières de plaine, avec de nombreux méandres serpentant dans un lit majeur étendu. Les crues successives ont façonné le paysage au fil du temps et imposé l’occupation des sols. Les prairies inondables, constituant encore des complexes fonctionnels bien typiques, sont ainsi associées à diverses annexes alluviales et bras morts.
A Charentenay et Vanne, la délimitation de la zone comprend, outre le lit mineur de la Saône, tout l’espace compris entre le méandre et le canal de dérivation, ainsi que les prairies du Paradis et de la Rosière en rive droite.
La composition floristique des prairies reflète leur position topographique (degré d’inondabilité) et leur mode d’exploitation, les formes fauchées étant les plus riches. La majeure partie de ce vaste espace, qui relève d’une association de niveau topographique moyen à séneçon aquatique et brome en grappe, est associée à des prairies de fauche à fromental et à des prés pâturés mésophiles. Une palette d’habitats humides complète l’ensemble : ruisselets bordés de végétation amphibie, annexe alluviale, ceinture de roseaux phragmites, formations riveraines de saules, et surtout une mare particulièrement riche sur le plan écologique. Elle abrite des plantes rares comme le faux nénuphar, le butome en ombelle et le stratiotès faux-aloès (ces deux dernières sont protégées dans la région). Au sein du cortège de libellules, remarquable tant sur le plan de la diversité (14 espèces) que des effectifs, il faut souligner la présence de l’orthétrum bleuissant, qui recherche des micro-habitats bien ensoleillés.
Outre la présence d’un peuplement d’amphibiens intéressant, ce sont surtout les aspects ornithologiques qui confèrent un intérêt majeur à cette zone. Ce vaste ensemble prairial non morcelé est propice à la nidification régulière d'un couple de courlis cendré. Le râle des genêts, d'intérêt communautaire et mondialement menacé, était recensé en 1998. De plus, les zones humides annexes accueillent en hivernage une grande diversité d’oiseaux d’eau : canards siffleur et chipeau, sarcelle d'hiver, fuligules morillon et milouin, harle piette et oie cendrée. Ces deux dernières espèces n’ont toutefois pas été revues récemment. Plusieurs couples de rousserolle turdoïde (en forte régression) nichent dans la roselière.
La prairie de la Rosière présente une dépression longuement inondable et un fossé aménagé afin de conserver un fort potentiel en tant que frayère à brochet.
Statut de protection
La zone est incluse dans le site Natura 2000 « Vallée de la Saône ». En outre, elle héberge des espèces inscrites dans les arrêtés ministériels des 8/12/88, 22/06/92 et 29/10/09, ce qui confère indirectement un statut de protection au milieu : la législation interdit en effet de porter atteinte aux espèces et aux milieux qui les supportent.
Objectifs de préservation
Ce vaste ensemble de zones humides joue le rôle d’un espace tampon dans la plaine alluviale, assurant des fonctions d’amélioration de la qualité de l’eau (filtration physique des matières en suspension et auto-épuration des eaux de surface), de régulation du débit (champ d’expansion des crues et soutien en période d’étiage) et de limitation de l’érosion.
La gestion traditionnelle a contribué à créer une mosaïque d’habitats semi-naturels riches et diversifiés. La préservation durable de cette zone est liée au bon fonctionnement hydrologique et à l’intégrité des milieux, dans le cadre plus général du Contrat de Vallée Inondable, dont une nouvelle phase est en cours d’élaboration. Il convient donc de conserver :
- la fonctionnalité des systèmes latéraux (pas de drainage ni de remblaiement) ;
- les prairies inondables (trop souvent converties en cultures ou peupleraies) et la végétation riveraine ;
- les pratiques agricoles extensives (limitation des intrants, retard de fauche).