Description
La vaste plaine alluviale de la Saône représente un territoire bien particulier en raison de son inondabilité. En Haute-Saône, où la dynamique fluviale reste active, la Saône présente un profil caractéristique des rivières de plaine, avec de nombreux méandres serpentant dans un lit majeur étendu. Les crues successives ont façonné le paysage au fil du temps et imposé l’occupation des sols. Les prairies inondables, constituant encore des complexes fonctionnels bien typiques, sont ainsi associées à diverses annexes alluviales et bras morts.
Au droit du village de Mantoche, le bois de la Vaivre constitue un bel exemple de forêt alluviale, bien qu’il soit morcelé par des extractions de granulats (gravières en eau). Malgré son caractère relictuel, cette ormaie-frênaie des grands fleuves reste remarquable du fait de la relative maturité de certaines parcelles. Plus au sud, en rive droite de la Saône, la délimitation comprend une vaste zone herbacée (prairies du Breuille et de la Grosse Aige). Enfin, au nord, un ru rectifié et une dépression longuement inondable (« les Varenelles »), en connexion avec la Saône, constituent une frayère à brochet d’un bon potentiel.
La composition floristique des prairies reflète leur position topographique (degré d’inondabilité) et leur mode d’exploitation, les formes fauchées (majoritaires sur le site) étant les plus riches : en particulier, un groupement longuement inondable à œnanthe fistuleuse abrite la gratiole officinale et la stellaire des marais, protégées respectivement en France et dans la région. Des mégaphorbiaies (formations humides de hautes herbes) se développent localement dans des secteurs non fauchés régulièrement.
Ces vastes espaces herbacés sont propices à la nidification d'un couple de courlis cendré. En effet, la vallée de la Saône constitue un site d’accueil majeur pour l’avifaune, dans la continuité du couloir rhodanien. Le milan noir niche dans le bois de la Vaivre. Dans la plaine, le peuplement d'amphibiens, diversifié, comprend le crapaud calamite, très menacé en Franche-Comté. Le cuivré des marais, papillon de jour protégé en France, fréquente ces milieux herbacés humides. Enfin, cette zone sert de territoire de chasse à plusieurs chauves-souris vulnérables qui se reproduisent dans les environs.
Enfin, le bois de la Vaivre accueille des oiseaux nicheurs comme le Milan noir ou le Pic cendré. Il est aussi une zone de chasse appréciée de chauves souris comme le Grand murin ou le Murin à oreille échancrées.
Statut de protection
La zone est incluse dans le site Natura 2000 « Vallée de la Saône ». En outre, elle héberge des espèces inscrites dans les arrêtés ministériels des 20/01/82, 8/12/88, 22/06/92, 23/04/07, 19/11/07 et 29/10/09, ce qui confère indirectement un statut de protection au milieu : la législation interdit en effet de porter atteinte aux espèces et aux milieux qui les supportent.
Objectifs de préservation
Ce vaste ensemble de zones humides joue le rôle d’un espace tampon dans la plaine alluviale, assurant des fonctions d’amélioration de la qualité de l’eau (filtration physique des matières en suspension et auto-épuration des eaux de surface), de régulation du débit (champ d’expansion des crues et soutien en période d’étiage) et de limitation de l’érosion.
La gestion traditionnelle (fauche et pâturage extensif) a contribué à créer une mosaïque d’habitats semi-naturels riches et diversifiés. La préservation durable de cette zone est liée au bon fonctionnement hydrologique et à l’intégrité des milieux, dans le cadre plus général du Contrat de Vallée Inondable, dont une nouvelle phase est en cours d’élaboration. Il convient donc de conserver :
- la fonctionnalité des systèmes latéraux (pas de drainage ni de remblaiement) ;
- les prairies inondables (souvent converties en cultures ou peupleraies) et la végétation riveraine ;
- les pratiques agricoles extensives (limitation des intrants, retard de fauche).
Le maintien et le développement des populations de brochets dépendent directement du nombre et de la qualité des frayères. L’encombrement des fossés est l’un des facteurs limitants de la fonctionnalité de celle des Varenelles. De plus, ce poisson est sensible à la pollution de l’eau, notamment par les produits toxiques.