DESCRIPTION
En limite des départements du Doubs et de la Haute-Saône, la cuvette topographique de la vallée de l'Ognon constitue une dépression douce entre les reliefs des Avants-Monts au sud et les plateaux calcaires de Haute-Saône au nord. L'Ognon s'écoule en décrivant de larges méandres dans une vallée élargie à fond plat, sur des alluvions modernes constituées de graviers siliceux d'origine vosgienne. Celles-ci ont été largement exploitées dans le secteur de Chambornay-lès-Bellevaux, comme en témoigne la présence de nombreuses sablières en eau.
En rive droite de l'Ognon, la zone des prairies de la Recrue et de la Rangée de l'Isle correspond à un ensemble encore bien typique de prairies humides. Ce secteur, limité à l'ouest par la côte de Pissoire, entièrement boisée, apparaît relictuel dans un contexte agricole plutôt intensif (cultures, prairies améliorées).
Dans cette zone, les prairies portent l’empreinte de la dynamique alluviale, ce qui se traduit par une micro-topographie bien apparente dans le paysage, comprenant notamment d'anciens bras longuement inondables. Elles sont parcourues par des fossés bordés de mégaphorbiaies (formations humides de hautes herbes), quelques haies et buissons résiduels. Le degré d'inondabilité et le mode d'exploitation conditionnent la nature des groupements prairiaux. Ici, ces prés semblent être régulièrement pâturés. La flore, diversifiée, comprend toute une gamme de plantes inféodées à ces conditions. Certaines d'entre elles sont peu communes et en voie de régression dans la vallée de l'Ognon, comme la germandrée d'eau, plante des lieux inondés, l’œnanthe fistuleuse, qui caractérise des prairies de fauche longuement inondables, ou encore la gaudinie fragile, graminée des lieux sableux, qui pousse à des niveaux topographiques un peu plus élevés. La répartition de ces deux dernières espèces dans la région suit fidèlement le tracé des grandes vallées.
Les rives de l'Ognon sont soulignées par une ripisylve continue de type aulnaie-frênaie. Au sud, une annexe alluviale connectée avec le cours principal est bordée de roselières et de cariçaies (groupements de grandes laîches). Au sud, quelques boisements marécageux (saulaie arbustive, aulnaie), peu étendus toutefois, complètent la gamme des habitats.
Ces milieux constituent des biotopes de reproduction privilégiés pour une faune particulière liée aux zones humides (amphibiens et insectes, notamment).
Statut de protection
Aucune protection réglementaire de l'espace n'a été mise en place. En revanche, la préservation des zones humides, tant pour leur intérêt patrimonial que fonctionnel, est un objectif réaffirmé par la loi sur l’eau et les milieux aquatiques du 30/12/2006 et par le Schéma Directeur d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) en vigueur depuis le 17/12/2009.
Objectifs de préservation
Cet ensemble de zones humides joue le rôle d’un espace tampon dans la plaine alluviale, assurant des fonctions d’amélioration de la qualité de l’eau (filtration physique des matières en suspension et auto-épuration des eaux de surface), de régulation du débit (champ d’expansion des crues et soutien en période d’étiage) et de limitation de l’érosion.
La gestion traditionnelle a contribué à créer des habitats semi-naturels riches et diversifiés. La pérennité de ces habitats, en régression en France, est soumise au maintien des conditions hydrologiques et des activités agricoles. En effet, l’intensification des pratiques (pâturage intensif, fertilisation, voire même drainage et mise en culture), ou, à l'inverse, l'abandon (qui se traduit par une densification de la végétation puis un enfrichement), conduisent à une baisse de la diversité floristique et au remplacement des espèces patrimoniales par une flore plus banale. De ce fait, la poursuite de pratiques agricoles extensives (fauche tardive ou pâturage) est un mode de gestion à encourager.
L’objet du deuxième contrat de rivière en cours d'élaboration est de mener une politique de gestion cohérente à l’échelle de l’hydrosystème et du bassin versant, notamment conforter les actions de reconquête de la qualité des eaux.
Prospection 2018 :
Cet ensemble de prairies est en bon état de conservation.
L'inule britannique (Inula britannica), plante très rare et vulnérable en Franche-Comté, qui n’était pas connue de la vallée de l’Ognon a été observée. Elle forme quelques beaux massifs en bordure d’une ancienne morte.
Elle est accompagnée de l’œnanthe fistuleuse (Œnanthe fistulosa).
Par contre, la germandrée d’eau (Teucrium scordium) n'a pas été retrouvée malgré une recherche attentive.
L’espèce de bryophyte vulnérable en FC Cryphaea heteromalla a été revue. Les prairies abritent également la gaudinie fragile (Gaudinia fragilis).
Il convient de :
- Maintenir à tout prix la naturalité du site et éviter toute transformation par labour et ressemis;
- Eviter ou maintenir des apports de fertilisants très réduits afin de ne pas provoquer d’eutrophisation préjudiciable à la flore patrimoniale du site;
- Maintenir une fauche si possible tardive.