DESCRIPTION
En aval d'Arc-et-Senans et de Cramans, l'élargissement du lit majeur marque le début de la basse vallée de la Loue. La rivière présente encore un tracé sinueux et de nombreuses annexes hydrauliques. Toutefois, la chenalisation et l'endiguement massif subis jusque dans les années 1970 ont largement favorisé la simplification de la mosaïque fluviale (perte de quatre kilomètres de linéaire, déconnection de soixante bras secondaires et enrochement de 94 % des berges). L’accélération de la circulation de l’eau a provoqué une incision du lit de l’ordre d’un à deux mètres et un abaissement de la nappe alluviale. Depuis lors, les annexes hydrauliques se trouvent perchées et subissent un atterrissement accéléré.
Malgré ces profonds bouleversements, la Loue présente encore une remarquable diversité d'habitats entre Arc-et-Senans et Chissey : les groupements aquatiques, amphibies et riverains sont développés au sein des îles, des grèves et des eaux vives, mais surtout dans les vastes complexes impénétrables qui persistent sur une partie de son lit majeur. De nombreuses formations des eaux claires et propres sont recensées : communautés à hottonie des marais (plante protégée dans la région) et à myriophylle verticillé, voiles de lentille d’eau à trois lobes et groupements à ache nodiflore, ou encore tapis de Characées (algues vertes évoluées). Il faut souligner que la fonctionnalité optimale des mosaïques de milieux qui font la richesse de ce territoire s'exprime essentiellement dans les grands complexes composés de prairies de fauche et de pâtures. Ces secteurs marqués par une micro-topographie résultant de la dynamique fluviale passée sont particulièrement riches sur le plan de la diversité et la fréquence des espèces remarquables y est élevée.
Les prairies humides hébergent notamment l’une des quatre stations comtoises de nivéole d'été, plante protégée en France. Cette localité présente actuellement de beaux effectifs, mais son isolement la rend vulnérable et elle est soumise à plusieurs menaces : augmentation de la pression de pâturage, voire drainage ou mise en culture. Il est donc impératif de mettre en place une gestion conservatoire. Les prairies inondables sont également caractérisées par la présence de l’œnanthe fistuleuse.
La basse vallée de la Loue constitue néanmoins un territoire propice à la colonisation par des végétaux invasifs, du fait de l'intensité des perturbations naturelles (crues décapantes) et artificielles (déplacements massifs de matériaux alluvionnaires lors des aménagements). Les espèces les plus problématiques sont l’élodée du Canada dans les eaux stagnantes, la renouée du Japon, le topinambour et la balsamine de l’Himalaya dans les mégaphorbiaies, ou encore l’érable negundo dans les saulaies.
L’intérêt piscicole est marqué par la présence de plusieurs espèces indicatrices d’eaux de bonne qualité : lamproie de Planer, toxostome, chabot, blageon.
STATUT DE PROTECTION
Aucune protection réglementaire de l’espace n’a été mise en place. En revanche, la présence d’espèces protégées confère indirectement un statut de protection au milieu : la législation interdit en effet de porter atteinte aux espèces et aux milieux qui les supportent (arrêtés ministériels des 8/12/88, 20/01/82 et 22/06/92).
OBJECTIFS DE PRESERVATION
Les habitats existants demeurant fragiles, leur préservation passe par différentes mesures : outre une amélioration de la qualité et du volume de la ressource en eau, il convient d’abandonner la conversion de forêts alluviales en peupleraies, le remblaiement de mortes et de remettre en cause l'intensification agricole de certains secteurs tout en rétablissant des pratiques extensives sur d'autres sites. En parallèle, la restauration d’une dynamique alluviale active, impliquant une reprise de l'action érosive de la Loue, est essentielle pour entretenir les milieux actuels et en créer de nouveaux. Enfin, il convient d’instaurer une veille sur les espèces invasives, afin que les habitats générés ne soient pas rapidement envahis par ces néophytes.