DESCRIPTION
Sur la commune d'Epenouse, au lieu dit Les Prés de la Méchante Femme, une prairie humide oligotrophe se trouve complètement enclavée dans des boisements. Cette petite zone installée à la faveur d’affleurements marno-calcaires imperméables de l’Oxfordien (Jurassique supérieur) se démarque dans le contexte à dominante calcaire et karstique des premiers plateaux. Plusieurs étangs ont été creusés à proximité immédiate.
La végétation herbacée est dominée par la molinie bleue. Ce milieu oligotrophe original se distingue par des sols alcalins, pauvres en nutriments, qui sont soumis à des fluctuations de niveau d’eau (battement du toit de la nappe phréatique). Dans ces conditions d’humidité contrastée, la molinie se développe en nappe. Un cortège floristique de plantes à fleurs caractéristique est associé à cet habitat, ce qui lui confère un intérêt botanique majeur. En effet, les prairies à molinie sur sols calcaires sont plus riches en espèces que les variantes en milieu acide.
Cette formation recèle une trentaine d'espèces végétales ; la valeur patrimoniale de certaines d’entre elles est remarquable, du fait de leur rareté. Il faut notamment souligner la présence de deux espèces bénéficiant d’un statut de protection, dont la grassette commune, et d’autres plantes peu courantes et/ou représentatives de ces milieux comme la scorsonère humble ou la callune. Les habitats sont encore bien typés, toutefois le tapis graminéen dense forme une litière dont l’accumulation défavorise les espèces typiques et qui contribue à accélérer la colonisation par les ligneux. Ces derniers sont principalement représentés par des pins sylvestres et de jeunes aulnes glutineux ; ils sont disséminés dans le secteur et tendent à le coloniser rapidement. La callune est également assez recouvrante.
A cet habitat original, structuré de façon hétérogène, est associée une faune typique. En particulier, la richesse en plantes à fleurs est favorable à de nombreux insectes floricoles. Les investigations conduites dans le groupe des papillons diurnes ont montré la valeur tout à fait remarquable de ce site.
STATUT DE PROTECTION
Aucune protection réglementaire de l’espace n’a été mise en place. En revanche, la présence d’espèces protégées confère indirectement un statut de protection au milieu : la législation interdit en effet de porter atteinte aux espèces et aux milieux qui les supportent (arrêtés ministériels des 20/01/82, 22/06/92 et 23/04/07).
OBJECTIFS DE PRESERVATION
Comme pour l’ensemble des zones humides, les fonctions de ce secteur sont essentielles dans le cycle de l’eau : rétention pendant les périodes pluvieuses, alimentation des nappes souterraines, auto‑épuration des eaux de surface.
Cette zone n’est soumise à aucun entretien particulier. Son état de conservation global apparaît défavorable, du fait de fortes menaces qui pèsent sur les habitats et sur les espèces patrimoniales associées. Plusieurs causes peuvent être évoquées :
- la densification de la strate herbacée et la colonisation par le pin sylvestre ;
- des travaux de drainage et des plantations en périphérie immédiate (sur des sols aux caractéristiques similaires) ont altéré le fonctionnement du site, de même que le creusement de plusieurs étangs. Toutes ces opérations ont pour conséquence d’abaisser le niveau de la nappe phréatique et de perturber l’hydrologie du secteur, en accélérant le processus naturel d’enfrichement.
A brève échéance, il convient de mener une restauration de la zone, qui passe en priorité par le retour de conditions hydrauliques favorables au maintien d’un milieu humide (fermeture des drains) ; en parallèle, la coupe des pins sylvestres les plus gros et l'arrachage des arbustes peut aussi contribuer à relever le niveau de la nappe. Par la suite, les mesures de gestion courante reposent sur une fauche tardive annuelle (début septembre) avec enlèvement de la litière.
Au vu du grand intérêt de la zone des Prés de la Méchante Femme, l’ensemble de ces actions devrait être précisé dans un plan de gestion conservatoire.