DESCRIPTION
Dans le Haut-Jura plissé, entre Moirans-en-Montagne et Les Crozets, le pli anticlinal s’étendant selon un axe sud-ouest/nord-est, constitué de calcaires du Jurassique supérieur, est presque exclusivement couvert de forêts. Dans ce contexte, les pelouses de la Chèvrerie, constituant une belle enclave de milieux ouverts herbacés, sont installées sur un versant globalement exposé au sud-est. Des formations forestières résineuses et mixtes entourent totalement ce site, qui se trouve finalement assez isolé. Divers vallonnements et petits accidents de terrain contribuent à son intérêt écologique et paysager. Quelques arbres et bosquets ponctuent la zone. Au sud-ouest, la limite forestière est progressive, ce qui confère localement un faciès de pré-bois à ce secteur.
Plusieurs facteurs conditionnent l’installation de groupements de pelouses sur ce site : sols superficiels à squelettiques, réserves en eau limitées sur un substrat très filtrant, et ce, bien que la pluviométrie soit plutôt élevée, relative pauvreté en éléments nutritifs. Localement, des affleurements rocheux apparaissent, ainsi que des secteurs au sol très peu profond, qui favorisent la création de zones écorchées. Des portions plus mésophiles sont représentées sur les marges du site ou à la faveur des petits accidents de terrain disséminés sur la zone. Ainsi, différents types de pelouses calcicoles mésophiles à méso-xérophiles (sèches à très sèches) se répartissent selon l’épaisseur du sol. Une petite carrière abandonnée, située au sud du site, semble être utilisée comme terrain de motocross.
Cette zone héberge une flore intéressante, en lien avec les habitats existants. Par exemple, la calamagrostide argentée est une graminée spectaculaire assez rare dans la région, où elle ne se rencontre que sur des rochers et éboulis calcaires bien exposés. La grande orobanche est une plante parasite des milieux prairiaux en contexte thermophile. Exclusivement inféodée aux astéracées des genres Centaurea et Echinops, cette espèce est inscrite sur la liste rouge régionale avec le statut « en danger ». En limite sud du site, en contexte forestier, on trouve la circée des Alpes, protégée dans la région.
Ces formations maigres très fleuries accueillent une entomofaune diversifiée, et notamment un riche cortège de papillons comptant 27 espèces au total. Trois d’entre eux sont inscrits dans la catégorie quasi-menacée sur la liste rouge régionale : le cuivré de la verge d’or (qui recherche les prairies et clairières fleuries), l’azuré du genêt et l’hespérie du carthame (inféodés aux milieux de type pelouses rases et lisières chaudes). Ce milieu est également très favorable à de nombreux orthoptères (sauterelles et criquets).
STATUT DE PROTECTION
Aucune protection de l'espace n'a été mise en place en dehors des dispositions de la loi Littoral qui s'appliquent aux communes limitrophes du lac de Vouglans. En revanche, la présence d’une plante protégée confère indirectement un statut de protection au milieu : la législation interdit en effet de porter atteinte aux espèces et aux milieux qui les supportent (arrêté ministériel du 22/06/92).
OBJECTIFS DE PRESERVATION
Les pelouses de la Chèvrerie sont exploitées par fauche ou pâturage. Ce type d'espace agro-pastoral extensif présente un intérêt écologique certain, tant sur le plan de la structuration des habitats que sur celui de sa richesse botanique et entomologique. Ce genre de milieu tend à régresser à l'échelon régional, notamment en plaine, ce qui en rehausse l’intérêt.
Il convient de maintenir le caractère extensif de la zone et d'y proscrire tout amendement. En effet, l’enrichissement en éléments nutritifs conduit à une baisse de diversité floristique et finalement à une banalisation de la flore, de la faune et des habitats. La poursuite de la gestion extensive actuelle, respectueuse d’une certaine hétérogénéité des habitats, est donc à encourager, puisqu’elle se révèle la plus favorable à une biodiversité élevée.