Situées à la jonction du Comminges, des coteaux de Gascogne et du Volvestre, aux confins des départements de la Haute-Garonne et de l’Ariège, les Petites Pyrénées s’étendent de part et d’autre de la vallée de la Garonne. Relief calcaire d’orientation ouest/nord-ouest - sud/sud-est et d’altitude modeste (point culminant : tour d’Ausseing, 628 m), elles constituent le prolongement occidental du chaînon ariégeois du Plantaurel. Placées sous influence climatique atlantique et subissant un certain effet de blocage orographique pyrénéen (flux cycloniques d’ouest et de nord-ouest), les Petites Pyrénées reçoivent des précipitations généreuses, réparties assez régulièrement tout au long de l’année (déficit estival plus ou moins marqué). C’est un pays verdoyant dominé par les forêts caducifoliées et les prairies naturelles serties de haies bocagères. Du fait de l’orientation générale ouest-est des plis calcaires qui les constituent, elles présentent localement d’importantes surfaces à la fois généreusement ensoleillées (versants pâturés exposés plein sud) et vigoureusement drainées (pente sensible, roche mère très perméable). Ces deux variables physiques se conjuguent pour générer des microclimats édapho-topographiques secs et chauds auxquels sont adaptés de nombreux taxons à affinités méditerranéennes, qui s’y maintiennent en situation de disjonction ou de limite aréale dans un contexte macro-climatique atypique.
Ainsi, dès le début du XXe siècle, des phytogéographes tel Henri Gaussen ont porté à connaissance l’originalité floristique des Petites Pyrénées, et souligné la surprenante présence à cet endroit de végétaux tels que l’Érable de Montpellier (Acer monspessulanum), la Leuzée conifère (Leuzea conifera) ou le Genêt scorpion (Genista scorpius). Bien plus tard, dans le courant des années 1990 et au début des années 2000, plusieurs inventaires de flore et de faune ont eu lieu dans cette zone, qui ont conduit à de nombreuses découvertes et ont largement confirmé sa singularité biogéographique. Notamment, deux remarquables reptiles méridionaux y ont été signalés pour la première fois : le Seps strié et le Lézard ocellé, passés longtemps inaperçus du fait de leur discrétion. Très localisé en Midi-Pyrénées, le Seps strié n’existe dans la région que sur un axe Lauragais - coteaux du Mirepessin - Plantaurel - Petites Pyrénées - coteaux de l’Astarac, de façon éparse, et sa présence est toujours liée à des habitats eux-mêmes localisés (pelouses sèches). À l’échelle nationale, les populations extra-méditerranéennes de cette espèce sont rarissimes (moins de cinq signalements en Charente-Maritime, Gironde et Landes), et Midi-Pyrénées héberge la quasi-totalité de l’effectif français hors Midi méditerranéen. Il s’agit de populations relictuelles, vestiges d’une présence continue en Languedoc-Roussillon - Midi-Pyrénées - Aquitaine - Poitou-Charentes durant un épisode climatique favorable (historique biogéographique très similaire à celui du Pélobate cultripède, et d’ailleurs semblable à celui de plusieurs taxons ibéro-maghrébins : Coronelle girondine, Lézard ocellé et Rainette méridionale). Moins localisé à l’échelle régionale (le Lot, l’Aveyron et le Tarn sont d’importants bastions de l’espèce) et plus largement distribué dans le Sud-Ouest que le Seps strié, le Lézard ocellé est, en revanche, incomparablement plus localisé que ce dernier sur le piémont des Pyrénées centrales françaises, où trois populations seulement sont actuellement connues, dont deux sont incluses dans les Petites Pyrénées. La ZNIEFF des « quères des Petites Pyrénées (partie sud) » est remarquable par ses versants sud très caractéristiques, riches en espèces à affinités méditerranéennes, qui hébergent des cortèges floristiques originaux avec notamment la Lavande à larges feuilles (Lavandula latifolia), l’Iris à feuilles de graminée (Iris graminea), protégé à l’échelle régionale, ainsi que de très nombreuses orchidées. Ces stations hébergent également des espèces animales rares ou localisées en Midi-Pyrénées (le Seps strié et le Lézard ocellé, mais aussi plusieurs orthoptères, lépidoptères et mollusques...). La colline du lieu-dit « le Coup » au nord de Cérizols (09), qui comporte de remarquables surfaces de calcaires lapiazés (creusés par les eaux en superficie) surmontant des faciès marneux, peut être considérée comme la plus exemplaire de ces entités. Bien que de taille plus modeste et présentant souvent un aspect moins diversifié, les autres zones de ce type hébergent pour la plupart les mêmes cortèges d’espèces, et présentent un intérêt écologique, faunistique et floristique très élevé. Cette ZNIEFF comprend également plusieurs surfaces forestières dont la très originale forêt de Sainte-Croix-Volvestre (09), qui présente à une altitude remarquablement basse (étage bioclimatique collinéen) un important peuplement relictuel de Sapin pectiné (Abies alba), arbre dont les populations les plus proches se trouvent dans les Pyrénées à des altitudes plus élevées. Cette forêt héberge notamment une fonge extrêmement diversifiée comprenant plusieurs taxons montagnards en situation de disjonction aréale. Les bois et les forêts de la zone permettent la reproduction de plusieurs espèces d’oiseaux peu communes tel l’Aigle botté. Les ruisseaux circulant en sous-bois (voire en prairie lorsque leurs berges sont boisées) sont parfois encore occupés par l’Écrevisse à pattes blanches (Austropotamobius pallipes), crustacé dont les effectifs ont sévèrement chuté ces dernières décennies dans les coteaux du Sud-Ouest, et qui ne se maintient que là où l’eau reste d’excellente qualité (absence de polluants, fraîcheur et oxygénation). Enfin, outre les pelouses sèches et les forêts, cette ZNIEFF présente des milieux plus ordinaires mais à biodiversité très élevée, hébergeant souvent des espèces vulnérables du fait de leur faible plasticité écologique. Ainsi, l’important réseau de murets de pierres sèches et de haies bocagères anciennes, ainsi que les nombreuses prairies naturelles permettent le maintien de nombreuses espèces d’invertébrés, micromammifères, reptiles, amphibiens et oiseaux. La plupart de ces espèces sont en déclin généralisé, et ont pour certaines pratiquement disparu de la plaine cultivée centrale de Midi-Pyrénées (Vipère aspic, Pie-grièche écorcheur...). Les mares-abreuvoirs des prairies naturelles permettent à de nombreuses espèces d’amphibiens d’accomplir leur cycle vital, y compris à des espèces vulnérables et en déclin tel le Triton marbré.
Du point de vue conservatoire, il importe de souligner le fait que la biodiversité des Petites Pyrénées est très étroitement liée aux pratiques agricoles encore non intensives ou peu intensives de cette zone. En effet, contrairement à de nombreux secteurs de coteaux dont la biodiversité est aujourd’hui sévèrement appauvrie par l’agriculture intensive (Lauragais, Lomagne, Lèze...), les paysages des Petites Pyrénées et les écosystèmes anthropiques de cette zone sont restés à peu près inchangés du fait des pratiques agricoles modérées qui y ont cours. Nul doute que les Petites Pyrénées verraient leur patrimoine naturel et la conservation de leurs espèces menacés si l’agriculture venait à s’y intensifier. Ainsi, les cortèges à affinités méditerranéennes des versants sud calcaires apparaissent tributaires d’un pâturage assez régulier, et le maintien du réseau bocager (murets de pierres sèches autant que haies anciennes) ainsi que celui des prairies naturelles sont une condition sine qua non de l’intérêt écologique, faunistique et floristique des Petites Pyrénées.
La délimitation de la zone proposée prend en compte la géologie (plis calcaires), et la répartition des milieux naturels les plus remarquables, tant en termes faunistiques et floristiques que paysagers. Les secteurs à fort contingent d’espèces méditerranéennes en limite d’aire ou disjonction d’aire y sont intégrés, de même que les secteurs à fort contingent d’espèces montagnardes ou nordiques. Enfin, les zones bocagères les plus préservées y sont également incluses.