ZNIEFF 730010302
Vallée de la Sagne

(n° régional : Z1PZ0253)

Commentaires généraux

La Sagne est un ruisseau qui naît un peu en amont du village de Sabadel-Lauzès, qui s’écoule du nord vers le sud et qui parcourt une bonne dizaine de kilomètres avant de se jeter dans le Célé à Cabrerets. Le vallon de ce petit cours d’eau est situé au sud du causse de Gramat. Comme les vallées plus importantes qui sillonnent les calcaires durs du jurassique moyen, il est caractérisé par des coteaux le bordant assez abrupts et qui présentent souvent des corniches rocheuses (cantonnées ici, surtout dans son tiers médian). Le vallon lui-même est essentiellement occupé par des prairies et quelques cultures tandis que les coteaux sont soit couverts de chênaie pubescente (surtout en position d’ubac), soit largement occupés par des landes à Buis (Buxus sempervirens), elles-mêmes plus ou moins colonisées par le Chêne pubescent (Quercus pubescens) et l’Érable de Montpellier (Acer monspessulanum). De la charmaie et de la hêtraie calcicole sont également présentes sur le site.

Les habitats naturels d’intérêt patrimonial sont très diversifiés, et font de cette petite vallée un site naturel tout à fait remarquable. Les pelouses sèches présentes sur le site sont majoritairement affiliées au Xerobromion du Quercy. Celles-ci se développent sur les zones les plus arides et les plus ensoleillées, donc essentiellement sur les pentes orientées sud et ouest. Cet habitat présente une composition floristique identique à celle des pelouses du Xerobromion rencontrée sur le reste des causses à calcaire dur avec des espèces xérophiles comme l’Armoise blanche (Artemisia alba). En revanche, elles possèdent au moins un élément floristique tout à fait distinct : la Globulaire commune (Globularia vulgaris). Dans le Lot, c’est une espèce à distribution méridionale qui ne dépasse pas le sud du causse de Gramat. Sur le site, elle se trouve sur calcaire dur, dans des stations franchement xériques. Des tonsures à annuelles méridionales relevant du Thero-Brachypodion sont présentes sur les zones sommitales pacagées par des ovins. Parmi les autres types de pelouses sèches, il convient de spécifier la diversité des différentes pelouses au sein même du Mesobromion : pelouses à tonalité prairiale dans les parties les plus sèches du fond de la vallée, au contact avec les prairies au sens strict, pelouses à Fétuque ovine en situation mésoxérophile sommitale ou de versant peu abrupt, pelouses à Seslérie bleue (Sesleria caerulea) des versants rocheux en exposition fraîche. Les pelouses du Mesobromion sont présentes en zone de plateau, sur des terrains moins pentus et arides que ceux qui accueillent le Xerobromion. En revanche, on peut aussi les rencontrer en fond de vallon, où elles voisinent avec les prairies de fauche en se cantonnant aux terrains les moins hygrophiles. Les seslériaies sont surtout présentes sur les zones de corniches rocheuses orientées nord et est. Elles possèdent un contingent d’espèces assez exigeantes comme l’Euphorbe de Duval (Euphorbia duvalii), endémique du sud de la France, et la Tulipe australe (Tulipa sylvestris subsp. australis). D’autres plantes remarquables trouvent aussi leur optimum dans les zones rocheuses. C’est le cas de la Campanule à petites fleurs (Campanula erinus), présente dans les formations à annuelles qui relèvent du Thero-Brachypodion, ou encore de l’Orlaya à grandes fleurs (Orlaya grandiflora). En étroite imbrication avec les végétations de pelouses primaires présentes sur les zones de corniches, on rencontre sur cette zone une végétation chasmophytique qui appartient au Potentillion caulescentis et qui se développe sur les parois rocheuses elles-mêmes. Parmi les espèces typiques de ces formations, on note la présence du Silène saxifrage (Silene saxifraga) et de la Saponaire de Montpellier (Saponaria ocymoides). Une autre formation végétale remarquable, inféodée aux parois rocheuses ombragées, en exposition fraîche, est présente sur le site. Elle est à rattacher au Violo biflorae-Cystoperidion alpinae. Le Grand-Duc d’Europe niche dans les milieux rocheux du site, d’où il a évincé le Faucon pèlerin au milieu des années 2000. Les espèces animales observées sur le site (ou à proximité immédiate) et liées aux pelouses sèches et autres formations xérophiles sont des coléoptères. Le Némognathe nain (Zonitis nana) fréquente assidûment les inflorescences des plantes de pelouses tandis que le Criocère de l’Asperge sauvage est, comme son nom l’indique, lié aux asperges dont l’Asperge sauvage (Asparagus acutifolius), méridionale en limite d’aire dans le Lot qui est présente sur la zone. Les landes à buis et les autres formations arbustives du secteur hébergent plusieurs arbustes xérophiles comme le Pistachier térébinthe (Pistacia terebinthus) et le Nerprun des rochers (Rhamnus saxatilis). Elles sont également fréquentées par la Fauvette passerinette. Si les boisements relèvent quasiment tous du Quercion pubescentis, une autre formation boisée, la hêtraie calcicole du Cephalanthero-Fagion, a un caractère exceptionnel. Si, dans le passé, on peut supposer que de nombreux secteurs de chênaie calcicole matures pouvaient présenter des faciès à Hêtre (Fagus sylvatica), c’est aujourd’hui un des très rares secteurs lotois connus où cette essence forestière se développe en terrain calcaire. Cette formation liée à des expositions nord héberge des plantes peu communes comme le Muguet (Convallaria majalis), voire rares au niveau régional ou départemental, telles l’Épiaire des Alpes (Stachys alpina) et la Mélique penchée (Melica nutans). Le caractère très ponctuel de la présence sur la zone de cet habitat forestier, comme de cette épiaire, n’enlève en rien le niveau d’intérêt que ces deux éléments représentent pour le Parc naturel régional des causses du Quercy comme pour le Lot. On note aussi la présence remarquable du Pic mar qui affectionne les bois plus frais de bas de versants et les haies arborées de la petite vallée. Cette espèce est globalement bien répandue dans le Quercy, où elle évite toutefois, en période de reproduction, les chênaies pubescentes trop jeunes ou constituées d’arbres trop grêles. Parmi les coléoptères saproxylophages, le Platystome à rostre blanc (Platystomos albinus) et le Microrhage élégant (Microrhagus lepidus) ont fait l’objet d’observations sur la zone. Les prairies naturelles de fauche atlantique occupent une bonne partie du fond de vallon ; elles relèvent du Brachypodio rupestris-Centaureion nemoralis. Ces prairies sont souvent en contact avec du Mesobromion sur sol profond, et elles participent fortement à l’intérêt patrimonial de cette zone dans la mesure où ces formations sont globalement en régression sur le département. Cet habitat est en danger pour deux raisons principales : certaines prairies sont mises en culture, avec travail du sol, alors que d’autres sont abandonnées et s’embroussaillent assez rapidement. Un autre danger réside dans le changement éventuel de mode de gestion. Certaines prairies uniquement fauchées auparavant sont, en effet, parfois soumises à la seule pression du pâturage, ce qui modifie très fortement la structure des peuplements végétaux. Parmi les espèces d’insectes inféodées à ce type de milieu, on notera la présence du Damier de la succise (Euphydryas aurinia), espèce protégée en France et rare sur le causse de Gramat, dont la chenille se développe sur la Succise des prés (Succisa pratensis) et, dans une moindre mesure, sur la Knautie des champs (Knautia arvensis). D’autres milieux herbacés remarquables sont présents dans le vallon. Ce sont des milieux humides liés à la Sagne et à sa zone d’influence. La cariçaie à Laîche paniculée (Carex paniculata) occupe ponctuellement les bords du ruisseau. Cet habitat est relativement rare dans le Lot, et en particulier sur le territoire du Parc naturel régional des causses du Quercy. Autre habitat peu courant, la phragmitaie sèche à Roseau commun (Phragmites australis) est également ponctuellement présente en bord de Sagne. Parmi les autres milieux étroitement liés à la présence de l’eau et peu répandus au sein des causses du Quercy, il faut signaler la saussaie marécageuse dominée par le Saule roux (Salix atrocinerea), une espèce très proche du Saule cendré (Salix cinerea). Ces saulaies sont globalement rares dans le Lot, mis à part dans certains secteurs de la Bouriane et du Limargue et dans le Ségala. Il faut aussi signaler plusieurs habitats naturels présents dans le lit mineur du ruisseau. Les formations tufeuses qui forment des barres de calcaire encroûtant à l’origine de petites cascades sont constituées de bryophytes très spécialisées qui permettent l’installation de phénomènes physico-chimiques complexes et fragiles. Les herbiers à Characées du genre Chara et à Potamot dense (Groenlandia densa) occupent plusieurs petits tronçons de la Sagne et représentent l’aile oligotrophe calcaire du Ranunculion fluitantis. Ces herbiers rares et peu répandus occupent préférentiellement les petits ruisseaux des causses du Quercy ainsi que les lacs de Saint-Namphaise (ils sont alors classés dans des habitats d’eau stagnante oligotrophe). Les milieux rivulaires et le lit mineur lui-même sont des habitats intéressants pour 3 espèces d’intérêt patrimonial : l’Agrion de Mercure (Coenagrion mercuriale) – petite libellule protégée –, le Gomphe à crochets (Onychogomphus uncatus) et la Germandrée des marais (Teucrium scordium), plante hygrophile peu commune liée à des stations longuement inondables. Plusieurs cavités sont présentes sur la zone. L’une d’elles, très connue pour ses peintures pariétales, a même fait l’objet d’aménagements touristiques. Ces habitats permettent à plusieurs espèces de chauves-souris, dont certaines très remarquables, d’occuper le site. Cette zone condense une diversité de milieux très contrastés. Pelouses xérophiles du Xerobromion, hêtraies calcicoles et phragmitaies se côtoient ainsi de très près. Cette petite vallée verdoyante possède aussi un très fort intérêt paysager qui vient s’ajouter à une longue liste d’éléments patrimoniaux rares et fragiles. Le rôle de ces zones humides est également très important dans la limitation du ruissellement et peut-être le soutien à l’étiage, et ce malgré la faiblesse de leur emprise. Signalons enfin plusieurs espèces dont le statut reste à préciser : la Corbeille d’argent à gros fruits (Hormathophylla macrocarpa), indiquée sur le site dans les années 1950, n’y a pas été retrouvée et peut être considérée comme disparue. La Rousserolle effarvatte (Acrocephalus scirpaceus) a niché ponctuellement dans les années 1980. Non revue depuis, les milieux qui l’abritaient ont évolué dans un sens peu favorable. L’Écrevisse à pattes blanches (Austropotamobius pallipes) était assurément encore présente dans les années 1990 dans la partie amont : sa situation actuelle est incertaine en l’absence de prospections récentes sur cette partie potentiellement favorable. Bien qu’il n’y ait pas d’observations postérieures à 1990, les espèces suivantes sont sans doute encore présentes sur le site, car elles sont liées à des milieux n’ayant probablement pas subi de modifications notables : la Centaurée de Lyon (Centaurea triumfetti subsp. lugdunensis), la Fétuque châtain (Festuca paniculata subsp. spadicea) ou le Millet verdâtre (Piptatherum virescens).

Commentaires sur la délimitation

La zone comprend le vallon de la Sagne et les coteaux plus ou moins pentus attenants. Dans sa portion amont, seul le fond de vallon est inclus dans la zone, depuis le Laborie jusqu’à la hauteur du Valadié. Sur le reste aval du cours de la Sagne, les coteaux tantôt boisés, tantôt couverts de landes à Buis voire de pelouses sèches en cours de fermeture, sont inclus. Les zones de plateau environnantes qui sont souvent cultivées sont donc majoritairement exclues du zonage.