ZNIEFF 730010306
Pech de Fumades et Forêt de Monclar

(n° régional : Z1PZ0254)

Commentaires généraux

Cette vaste zone calcaire, qui couvre plus de 700 ha, se situe dans le sud du causse de Gramat, non loin des vallées du Célé et de la Sagne. Sa partie nord, un plateau, est largement dominée par des pelouses sèches et des landes dévolues à l’élevage ovin extensif, encore bien présent. Sa partie sud possède une importante couverture forestière composée pour l’essentiel de chênaies pubescentes et pour une faible part de plantations de conifères (partie nord de la forêt domaniale de Montclar). Elle comprend aussi de petites combes sèches cultivées dont les versants sont généralement boisés ou couverts de landes.

Les habitats de pelouses sont en majorité en bon état de conservation et intrinsèquement riches. Encore bien représentés, ils ont néanmoins régressé sur plusieurs secteurs dans la période récente, soit du fait de l’embroussaillement lié à la déprise pastorale, qui touche en particulier les zones pentues, plus ingrates pour l’éleveur, soit du fait de leur substitution par des prairies semées, phénomène surtout marqué en zone de plateau. Les pelouses à vivaces dominent, avec le Xerobromion du Quercy et, dans une moindre mesure, le Mesobromion du Quercy. Également très présentes, les formations de tonsures à annuelles, qui relèvent du Thero-Brachypodion, sont distribuées en mosaïque avec le Xerobromion et le Mesobromion mésoxérophile. Elles se présentent sous deux formes, l’une oligotrophe rattachable à l’association du Lino collinae-Arenarietum controversae, l’autre à tendance nitrophile, qui se rapporte au Vulpio ciliatae-Crepidetum foetidae.

Les végétaux remarquables du site sont quasiment tous liés aux formations de pelouses. Parmi les annuelles méridionales du Thero-Brachypodion sont à noter la Sabline des chaumes (Arenaria controversa), protégée au niveau national, la Gastridie ventrue (Gastridium ventricosum) et, surtout, l’Hélianthème à feuilles de saule (Helianthemum salicifolium), fortement localisée au niveau départemental et qui semble très rare sur le Parc naturel régional des causses du Quercy. Le Lin d’Autriche (Linum austriacum subsp. collinum) est fréquent d’une part dans les pelouses du Thero-Brachypodion, plus précisément dans le Lino collinae-Arenarietum controversae, dont il est l’une de caractéristiques, d’autre part dans les pelouses vivaces xérophiles du Xerobromion. Celles-ci hébergent nombre d’autres espèces méridionales remarquables telles que l’Armoise blanche (Artemisia alba), la Bugrane striée (Ononis striata), l’Hysope officinale (Hyssopus officinalis), la Renoncule à feuilles de graminée (Ranunculus gramineus), la Scorsonère hirsute (Scorzonera hirsuta), limitée à la partie sud du département, et la Globulaire piquante (Globularia vulgaris), méditerranéenne dont l’essentiel des populations midi-pyrénéennes se trouvent en Quercy (du Quercy blanc à la marge méridionale du causse de Gramat). Arbuste surtout présent dans les fruticées à Buis et à Genévrier, le Nerprun des rochers (Rhamnus saxatilis) colonise également les pelouses xérophiles. L’Euphorbe de Duval (Euphorbia duvalii), endémique du sud de la France nettement localisée dans le Lot, semble en revanche affectionner des formations moins xériques, à caractère mésoxérophile. Il en est de même de la Gesse blanchâtre (Lathyrus pannonicus subsp. asphodeloides), papilionacée protégée en Midi-Pyrénées et très rare dans le Lot, ponctuellement recensée sur le site dans des pelouses de lisière. Également très rare au niveau départemental (moins de cinq stations connues), la Potentille dressée (Potentilla recta) avait été observée très ponctuellement sur le site lors du précédent inventaire ZNIEFF (1988), mais n’a pu être retrouvée lors des prospections récentes. Les milieux associés aux points d’eau sont très localisés sur le site. Un lac de Saint-Namphaise (mare rocheuse) abrite un herbier à Characées, plantes aquatiques proches des algues. Généralement dominée par une ou deux espèces du genre Chara, cette végétation des eaux calcaires oligotrophes joue un rôle important dans les écosystèmes aquatiques où elle se développe (régulation thermique, refuge et milieu de reproduction pour la faune aquatique, etc.). Au niveau d’un autre point d’eau à caractère temporaire a été recensée une végétation amphibie annuelle à Jonc des crapauds (Juncus bufonius), habitat nettement localisé sur les causses en raison de son écologie particulière (stations inondées en hiver et au printemps, exondées en été-automne). Outre le Cresson rude (Sisymbrella aspera), crucifère méridionale assez rare en France mais régulière en Quercy dans ce type de végétation, elle abrite une plante rare dans le Lot et sur le territoire du Parc naturel régional des causses du Quercy : la Salicaire à feuilles d’hysope (Lythrum hyssopifolia). Le site possède également un intérêt faunistique élevé. Le Circaète Jean-le-Blanc niche régulièrement, depuis au moins vingt-cinq ans, dans sa partie la plus boisée. Ce grand rapace migrateur et prédateur de serpents ne produit qu’un jeune par an, et a besoin de secteurs boisés calmes, à l’écart des activités humaines, pour installer son aire. Les zones de pelouses et de landes ouvertes du site permettent aussi à l’espèce de trouver sa provende. Le Pic mar fréquente les chênaies pubescentes comprenant de vieux arbres. Sa population locale est certainement en lien étroit avec celle qui occupe les vallées voisines de la Sagne et du Célé. D’autres vertébrés remarquables sont, quant à eux, liés aux pelouses : l’Œdicnème criard, petit échassier en régression qui niche au sol dans les milieux ouverts et secs, et le Lézard ocellé, grand lézard méridional menacé dont les causses du Lot abritent la plus forte population française extraméditerranéenne. Les pelouses possèdent également une entomofaune diversifiée. Parmi les orthoptères, il faut relever la présence de l’Œdipode rouge (Oedipoda germanica germanica), du Criquet des garrigues (Omocestus raymondi raymondi), du Criquet des rocailles (Omocestus petraeus) et du Criquet bariolé (Arcyptera fusca). Les trois premiers, d’affinité méridionale, affectionnent les milieux rocailleux nus ou les pelouses xériques écorchées, alors que le dernier, à distribution essentiellement montagnarde et fortement localisé à basse altitude, se trouve surtout dans des pelouses mésoxérophiles à végétation herbacée relativement dense. Les papillons d’intérêt patrimonial du site comprennent le Nacré de la filipendule (Brenthis hecate), papillon méditerranéo-asiatique fortement localisé en France mais bien représenté sur les causses du Quercy, notamment sur la zone, où il fréquente préférentiellement les pelouses mésophiles et les brachypodaies héliophiles et d’ourlets forestiers qui hébergent sa plante hôte, la Filipendule commune (Filipendula vulgaris). Un autre papillon remarquable, l’Hermite (Chazara briseis), quant à lui lié aux pelouses rases et caillouteuses, a été recensé au début des années 1990 sur la zone. Il est possible qu’il y ait disparu depuis, car un effondrement des populations lotoises de l’espèce a été constaté ces dernières années, qui semble largement imputable à la canicule de 2003. Parmi les coléoptères observés dans les milieux xériques du site ou de ses environs immédiats peuvent être citées la Chrysomèle de l’Aveyron (Chrysolina aveyronensis), propre aux causses du Massif central, et des espèces méditerranéennes se trouvant en limite nord de leur aire de répartition dans le Lot, tels le Némognathe nain (Zonitis nana), qui fréquente assidûment les fleurs des pelouses, et le Criocère de l’asperge sauvage (Crioceris paracenthesis), qui vit sur l’Asperge à feuilles aiguës (Asparagus acutifolius). Un autre groupe de coléoptères, les coléoptères saproxyliques (liés aux bois morts), est représenté dans les secteurs boisés du site et des environs par quelques espèces peu communes : le Pogonochère de Carol (Pogonocherus caroli), le Microrhage élégant (Microrhagus lepidus) et le Platystome à rostre blanc (Platystomus albinus).

Cette zone présente un très fort intérêt, car elle possède encore un écosystème pastoral riche et entretenu par les éleveurs d’ovins du secteur. La flore xérophile y est intéressante et diversifiée. Le site permet aussi au Circaète Jean-le-Blanc, rapace emblématique des causses du Quercy, et à tout un cortège faunistique, de maintenir localement leurs populations.

Commentaires sur la délimitation

La délimitation de la moitié nord du site s’appuie essentiellement sur la répartition des zones de pelouses sèches et de landes ouvertes les plus étendues et les plus remarquables (pech Héritier, Camp Grand, pech Fumades, Place Rascle, Les Cloupillous). Les secteurs à dominante cultivée et les abords anthropisés des bâtiments agricoles et autres éléments bâtis sont évités. Pour la moitié sud, à large dominante boisée, la délimitation inclut principalement une zone de vigilance liée à la nidification du Circaète Jean-le-Blanc. Elle englobe également plusieurs secteurs ouverts ou semi-ouverts (mosaïques de milieux pelousaires et arbustifs) abritant des espèces remarquables.