Les montagnes commingeoises de cette ZNIEFF sont dominées par le Crabère, à l’est de la Garonne. Elles s’élèvent progressivement en formant au nord un premier niveau de sommets qui culminent à des altitudes moyennes, entre 1 900 et 2 100 m, au Tuc de l’Étang, au cap de Gauch et au Puech, de part et d’autre du Ger. La géologie de cette partie du nord de la zone comprend des unités calcaires avec au centre et à l’est des réseaux karstiques, sur lesquelles s’appuient des ensembles métamorphiques, principalement de schistes. Au-dessus se distingue le Crabère (2 593 m) formant, avec ses voisins, la chaîne frontière avec le val d’Aran, qui domine le plateau d’Uls. Il s’en écoule vers l’ouest deux vallées latérales, le Maudan et le Mourras, qui structurent un vaste massif forestier descendant jusqu’à la Garonne. La géologie de l’ensemble de cette partie du massif est dominée par les schistes, avec apparition, au niveau des sommets, de longs filons de quartz et, çà et là, de dépôts morainiques caractérisés par la présence de blocs arrondis de granites. Le climat est montagnard à alpin avec des isothermes annuelles de 0°C au niveau du Crabère, 5°C plus au nord et à l’ouest (suivant à peu près l’altitude 1 500 m), et 10°C dans la partie la plus basse de la vallée de la Garonne. Les précipitations sont assez contrastées. Les crêtes supérieures orientées au nord ou à l’ouest ont des précipitations enregistrées supérieures à 2 000 mm par an. Le fond de la vallée du Ger ouverte au nord reste bien humide, et reçoit 1 200 à 1 500 mm, contrairement au fond de la vallée de la Garonne qui dépasse péniblement les 1 100 mm annuels.
Les habitats naturels présents sont variés, et certains possèdent un intérêt patrimonial particulier. On note des formations liées aux calcaires avec des sources pétrifiantes surtout présentes à basse altitude. À leurs marges se développent des prairies humides à Molinie bleue (Molinia caerulea) sur calcaire avec le Lotier maritime (Lotus maritimus), et pouvant contenir un cortège assez riche d’orchidées. Sur les cônes de tufs verticaux délaissés par les écoulements, ainsi que sur des parois rocheuses que l’on rencontre plus haut en altitude (entre 1 200 et 1 600 m sur la moitié nord du site), on trouve des végétations de falaises calcaires des Pyrénées centrales, souvent avec une grande diversité d’espèces. La végétation des terrains siliceux est plus fréquente et mieux développée dans la moitié sud de la zone. Dans les parties basses proches de la vallée de la Garonne, on trouve des habitats liés au modelé glaciaire : des dalles rocheuses peuplées d’une grande variété d’orpins ainsi que des pelouses siliceuses à annuelles naines. Souvent voisines des premières, ces pelouses profitent des replats où sont accumulés des sables. En situation plus exposée aux intempéries, on trouve sur les crêtes des communautés alpines occupant des affleurements désagrégés. Cette gamme assez complète d’habitats naturels de dalles et pelouses acides donne au territoire concerné un intérêt écologique particulier. Des parois rocheuses siliceuses dominent dans les parties les plus élevées, mais elles descendent également en forêt. Les rochers exposés sont souvent colonisés par des plantes en coussinets comprenant notamment des saxifrages (Saxifraga intricata, Saxifraga geranioides, Saxifraga iratiana…) voire des androsaces (Androsace pyrenaica, Androsace vandelii) (Dupias, 1969). Ces plantes confèrent aux parois siliceuses concernées un attrait tout particulier. On note plus bas, à l’étage montagnard, la présence de falaises siliceuses plus chaudes à Asarine couchée (Asarina procumbens) se rattachant au type catalano-languedocien et qui se trouve ici en limite ouest de répartition pyrénéenne. On observe également des éboulis siliceux, notamment celui qui prolonge la célèbre combe à neige du col d’Auéran (Dupias, 1969), avec l’Orpin de Candolle (Mucizonia sedoides), espèce caractéristique, et la Saxifrage faux géranium (Saxifraga geranioides). Les zones humides et tourbières comprennent des ensembles complexes d’habitats, surtout aux alentours du plateau d’Uls, mais également dans les petits cirques lacustres voisins du Tuc de l’Étang. L’étang d’Uls, d’une faible profondeur, comprend des végétations de ceinture et des tremblants à Laîche à bec (Carex rostrata) et linaigrettes (Eriophorum sp.) colonisés par des sphaignes. Il possède également des gazons amphibies d’isoètes (Isoëtes lacustris et Isoëtes echinospora). Les tremblants colonisent presque totalement certains étangs (près d’Argut) sur lesquels de belles populations de sphaignes ou de mousses brunes se développent parfois. Des formations de pozzines se développent sur les pentes du plateau d’Uls. Il s’agit d’une succession de mares tourbeuses ou de laquets de pente reliés par des éléments tourbeux (pelouses hygrophiles, buttes de sphaignes ou d’éricacées) qui retiennent l’eau en formant des « petits puits » (mot corse). Des dizaines de mares temporaires à Rubanier à feuilles étroites (Sparganium angustifolium) sont disposées sur l’ensemble des replats dominés par les pics des Coupets et de Pièle de Mil. Cet ensemble humide constitue le plus vaste système tourbeux de Haute-Garonne. Des éléments de tourbière haute active, soit des espèces particulières de sphaignes (Sphagnum magellanicum, Sphagnum capillifolium…) et des chenaux à Ossifrage (Narthecium ossifragum), apparaissent ici en unités dissociées. En outre, des buttes ombrotrophes n’ont pas encore été signalées. Ce territoire ne représente donc pas une tourbière unique, mais un vaste complexe tourbeux, très riche et intéressant. Parmi les diverses formations herbeuses présentes, on note des pelouses à Gispet (Festuca eskia) continues et quelquefois en gradins, ainsi que des petites pelouses à Laîche courbée (Carex curvula, Dupias, 1969) limitées aux parties sommitales en versant nord. Des pelouses calcaires (Mesobromion des Pyrénées occidentales) se développent seulement aux alentours des formations rocheuses et sources pétrifiantes du nord de la zone, sur les pentes bien exposées. En bordure des torrents, se développent les mégaphorbiaies pyrénéo-cantabriques (Dupias, 1969) avec la Laitue de Plumier (Cicerbita plumieri), une espèce non déterminante, et la Valériane des Pyrénées (Valeriana pyrenaica), souvent réduite en raison de la forte pression exercée par les cervidés. Les habitats de landes déterminants se déclinent en trois composantes : les landes rases alpines à Azalée naine (Loiseleuria procumbens), les landes alpines à Vaccinium et landes à Empetrum et Vaccinium, et enfin de petits îlots de landes à Dryade à huit pétales (Dryas octopetala), limités à quelques vires sur le pic de la Coumasse, correspondant certainement à un substrat calcaire. Cette zone comprend un nombre important d’espèces végétales ayant un statut de protection ou d’intérêt patrimonial. Au premier rang se situent l’Androsace des Pyrénées et l’Androsace de Vandelli, déjà citées, protégées au niveau national et dont la première est la seule espèce végétale connue du massif appartenant à l’annexe II de la directive « Habitats ». De la liste nationale des espèces végétales protégées, on trouve ici, d’une part la rare Phyllodoce bleue (Phyllodoce caerulea) dans les landes alpines, connue en France seulement dans les Pyrénées centrales, d’autre part, sur les tourbières, le Rossolis à feuilles rondes (Drosera rotundifolia), le Lycopode inondé (Lycopodiella inundata) et les deux espèces d’isoètes (Isoëtes lacustris et Isoëtes echinospora). Les espèces appartenant à la liste de protection régionale sont, pour les milieux rocheux, l’Anogramme à feuilles étroites (Anogramma leptophylla), une fougère des parois siliceuses sèches de basse altitude (ici, en limite d’aire) ainsi que le Pigamon à gros fruits (Thalictrum macrocarpum), et pour les forêts humides, deux orchidées dont la Listère en cœur (Listera cordata) et la Racine-de-corail (Corallorhiza trifida), une espèce saprophyte très rare. La Linaigrette engainante (Eriophorum vaginatum), qui est ici en limite occidentale de son aire pyrénéenne, se trouve dans les milieux tourbeux, mais reste très rare ici. Quelques espèces déterminantes sont inscrites au livre rouge régional : l’Arméria de Bubani (Armeria bubanii) et l’Ancolie des Pyrénées (Aquilegia pyrenaica), dans les milieux rocheux siliceux pour la première, calcaires pour la seconde. On signale dans les pelouses ou landes calcaires, au nord, la Fritillaire des Pyrénées (Fritillaria nigra), et dans les mouillères plus ou moins tourbeuses à partir des plus basses altitudes de la zone, la Petite scutellaire (Scutellaria minor), bien représentée en général. Une quarantaine d’autres espèces déterminantes ont également été trouvées sur cette zone. Parmi celles-ci, on notera la présence du Genêt purgatif (Cytisus oromediterraneus) sur les crêtes et pentes siliceuses sèches et chaudes, dans les landes de basse altitude, du Millepertuis à feuilles de linaire (Hypericum linariifolium) qu’on trouve ici en aire disjointe occidentale, des Saxifrages de Burser, faux géranium et enchevêtrée (Saxifraga aretioides, Saxifraga geranioides et Saxifraga intricata) se rapprochant des limites de leur aire (à l’ouest pour la deuxième et vers l’est pour les autres), et enfin, de la Toque des Alpes (Tozzia alpina), qui semble bien représentée dans les montagnes du Comminges, mais plus rare voire absente plus à l’est. D’un point de vue zonal, on constate que la région d’Uls au sens large offre un très fort intérêt pour les milieux tourbeux. Le secteur du Mourtis, bien qu’aménagé pour le ski, a conservé un fort intérêt patrimonial, en particulier pour ses orchidées saproxyliques et pour la flore des zones humides ayant persisté. Les rochers escarpés et landes d’altitude, tout comme la flore acidiphile des escarpements proches de la Garonne au sud, présentent également un grand intérêt. La source pétrifiante d’Argut et ses annexes constituent une formation originale très étendue et en assez bon état de conservation. Le reste des zones calcaires, au nord du site, offrent des ressources naturalistes plus classiques, bien qu’intéressantes. La diversité et l’abondance des zones humides se traduisent également par la présence d’un cortège exceptionnel de 17 espèces de sphaignes. Les mammifères sont assez bien représentés. Le Desman des Pyrénées trouve ici des torrents et ruisseaux encore peu perturbés. Le Ger au nord et le Maudan au sud-ouest forment avec leurs petits affluents un réseau hydrographique secondaire capable d’héberger des populations assez conséquentes. La Loutre d’Europe fréquente parfois le Maudan à partir de la vallée de la Garonne, mais des obstacles naturels, difficilement franchissables à l’aval, limitent certainement les possibilités d’allers-retours fréquents. 2 espèces de chauves-souris déterminantes sont présentes ici : le Minioptère de Schreibers (Miniopterus schreibersii), qui trouve dans la zone des cavités à sa mesure, et le Petit Rhinolophe (Rhinolophus hipposideros), que l’on trouve, çà et là, dans les galeries en hiver et dans les greniers des granges et des maisons délaissées en gîtes de reproduction estivaux. L’Ours brun (Ursus arctos) a été réintroduit sur ce site à partir de 1996. Deux zones de mise bas y sont connues ainsi que plusieurs tanières d’hibernation. L’Isard (Rupicapra pyrenaica) a recolonisé l’ensemble des montagnes en rive droite de la Garonne à partir de la réserve de la Coume du Ger située sur le site. L’espèce a connu ici une régression marquée dans la seconde moitié des années 2000. Les rapaces diurnes et nocturnes sont bien représentés. Le Grand-duc d’Europe (Bubo bubo) est repéré sur diverses unités du secteur, avec un important développement des données dans le milieu des années 2000, sur les zones rocheuses proches de la Garonne (Melles, Fos), à basse altitude. La Chouette de Tengmalm (Aegolius funereus) est connue sur ce site depuis les années 1980 (PARDE et al., 1988). Elle a continué de fréquenter plusieurs boisements de sapins qui lui sont propices, aux altitudes moyennes et hautes de la zone. L’Aigle royal (Aquila chrysaetos) est présent de façon constante sous la forme d’adultes et de jeunes, et ses territoires occupés dépassent les limites de notre ZNIEFF. Pour cette espèce, on doit signaler une présence constante en hiver au niveau des versants ensoleillés peu ou pas boisés de basse et moyenne altitude. Le Milan royal (Milvus milvus) est lui aussi constamment présent et nicheur. 2 espèces de gallinacés, la Perdrix grise de montagne (Perdix perdix hispanicus) et la sous-espèce pyrénéenne du Lagopède alpin (Lagopus mutus), sont présentes sur les estives (landes, pelouses, vires et éboulis). La première conserve une distribution assez vaste. En revanche, les observations de lagopèdes ont nettement diminué dans les années 1990 puis 2000, et certains secteurs où il était présent sont aujourd’hui désertés. La régression est encore plus marquée pour le Grand Tétras (Tetrao urogallus). Les chênaies et châtaigneraies peu exploitées ou sénescentes des parties basses des soulanes de Fos et, dans une moindre mesure, de Melles et d’Argut, sont occupées par une population nicheuse de Pic mar (Dendrocopos medius). Parmi les reptiles et amphibiens, 4 espèces sont déterminantes sur ce site. La Coronelle girondine (Coronella girondica) est bien représentée sur les secteurs de pierrailles plus ou moins broussailleuses de basse altitude, notamment à Fos et Melles. Le Triton marbré (Triturus marmoratus), également à basse altitude, occupe un petit nombre de mares temporaires. Il est ici en situation isolée par rapport aux populations de plaine les plus proches. L’Euprocte des Pyrénées (Euproctus asper) est assez bien représenté localement où il forme de petites populations sur certains torrents et ruisselets. Cette espèce appartient à l’annexe V de la directive « Habitats ». Le Lézard des Pyrénées du val d’Aran (Iberolacerta aranica) est une espèce très originale liée aux formations rocheuses et éboulis froids ; elle se trouve ici dans sa limite occidentale pour la France. Elle présente donc un grand intérêt, et appartient à l’annexe II de la directive « Habitats ». Parmi les invertébrés, beaucoup d’espèces déterminantes sont à signaler. Chez les rhopalocères (papillons de jour), on retiendra la présence d’une espèce protégée à l’échelle nationale : l’Azuré du serpolet (Maculinea arion), qui est aussi bien présent sur les pelouses des soulanes ensoleillées (Couledoux, Melles) que sur les landes rases plus haut en altitude (Melles, Fos). La Grande Coronide (Satyrus ferula), qui n’était plus connue en Haute-Garonne, apparaît ici en limite d’aire. La présence de l’Azuré du genêt (Plebejus idas), un papillon appartenant au cortège des prairies mésophiles, souligne la persistance de prairies maigres ; cette espèce est en régression en France. Parmi les odonates, la Leucorrhine douteuse (Leucorrhinia dubia) dispose sur ce site de ses seules populations hautes-garonnaises connues. Cette espèce est présente dans la plupart des tourbières des massifs montagneux (Pyrénées, Massif central, Alpes, Jura et Ardennes en France). Les espèces de coléoptères se répartissent en deux cortèges. Des cavernicoles composés de cinq espèces rares des genres Aphaenops et Geotrechus sont signalés uniquement dans le réseau karstique au nord de la zone. Les insectes liés au bois sont davantage représentés, avec 17 espèces (sous-corticoles, consommateurs de champignons et saproxylophages plus généraux) auxquelles on peut ajouter la Rosalie des Alpes (Rosalia alpina), une espèce non déterminante mais qui est bien représentée, notamment dans la hêtraie et sur les bordures de frênes. Parmi les orthoptères, on note la présence de la Decticelle pyrénéenne (Metrioptera buyssoni), une espèce endémique dont la distribution française se limite aux trois départements des Pyrénées centrales. Parmi les espèces de crustacés, on relève 4 espèces déterminantes dont l’Écrevisse à pattes blanches (Austropotamobius pallipes), espèce en régression qui occupe quelques petits ruisseaux très localisés dans des secteurs plus ou moins marécageux.
Ce site et les diverses unités qui le composent offrent donc des intérêts naturels multiples et un attrait naturaliste exceptionnel.
Cette vaste zone comprend la partie ouest du massif de Crabère ainsi que la partie haute-garonnaise du massif du Puech (jusqu’à Saint-Lary). Les contours sont d’abord basés sur des critères géomorphologiques et fonctionnels (bassin versant). Ce territoire est délimité au sud et à l’est par les lignes de crêtes qui matérialisent la frontière franco-espagnole puis la frontière entre les départements de la Haute-Garonne et de l’Ariège. À l’ouest, c’est le fond de la vallée de la Garonne qui constitue la limite, et au nord, le bas des versants des montagnes calcaires d’altitudes moyennes dont la montagne de la Seube et les hautes vallées du Ger et de la Bouigane. Quelques secteurs en périphérie ouest et nord de la zone, moins riches en enjeux naturels identifiés et davantage artificialisés (dont la station de ski de Mourtis, exclue pour partie), font l’objet de la ZNIEFF de type 2 : « Montagnes entre la haute vallée de la Garonne et la haute vallée du Lez ». Ce site, qui représente le sud-est de la partie la plus élevée du département de la Haute-Garonne, est particulièrement riche, avec de nombreuses données déterminantes relatives à la faune, à la flore ou aux habitats naturels.