ZNIEFF 730011155
Gorges de la Dourbie et ses affluents

(n° régional : Z1PZ0734)

Commentaires généraux

Situées dans la région des Grands Causses, les gorges de la Dourbie séparent le causse Noir (au nord) du causse du Larzac (au sud). Cette ZNIEFF de plus de 13 000 ha est composée pour l’essentiel de milieux forestiers (versants des gorges). Sur la partie haute de ces versants, de nombreux affleurements rocheux et falaises sont présents. Dans la partie aval du site, les gorges sont très encaissées tandis qu’en amont de Cantobre, la vallée est un peu plus large, permettant la présence de villages (Nant, Saint-Jean-du-Bruel...), de prairies et de cultures. Il s’agit d’une région assez touristique en période estivale ; ainsi, plusieurs campings existent le long de la Dourbie. L’activité touristique est surtout orientée vers les sports de pleine nature : randonnée pédestre, escalade, via ferrata... Une très grande partie de cette ZNIEFF est classée en zone Natura 2000 soit au titre de la directive européenne « Habitats » (ZSC « Gorges de la Dourbie » et ZSC « Causse noir et ses corniches »), soit au titre de la directive européenne « Oiseaux » (ZPS « Gorges de la Dourbie et causses avoisinants »).

Une grande partie du site est composée de forêts de feuillus, de conifères ou mixtes. Un de ces habitats est d’ailleurs déterminant : les hêtraies sur calcaire. On y retrouve aussi des pelouses sèches, milieux typiques des causses, ainsi que de nombreuses falaises calcaires, des éboulis rocheux et des grottes. Les différents cours d’eau (Dourbie, Durzon, Virenque...) coulant au fond des vallées permettent la présence de milieux terrestres plus humides, par exemple au niveau des sources du Durzon, mais aussi disséminés le long des berges de la Dourbie. La grande diversité de ces milieux permet la présence d’une faune et d’une flore très variées.

1 - L’intérêt floristique des milieux rocheux et rocailleux (falaises, éboulis, dolomies...) est très important puisque de nombreuses espèces protégées y ont été recensées. Ainsi, 3 espèces protégées au niveau national sont notées : l’Ancolie des causses (Aquilegia viscosa subsp. viscosa), taxon endémique des causses, la Gagée des rochers (Gagea saxatilis) et la Corbeille d’argent à gros fruits (Hormathophylla macrocarpa). En protection régionale, on retrouve pas moins de 10 espèces dont plusieurs endémiques des causses, d’Auvergne ou des Cévennes : la Sabline hérissée (Arenaria hispida), l’Armérie de Girard (Armeria girardii), le Vélar gris blanchâtre de l’Ariège (Erysimum incanum subsp. aurigeranum), la Marguerite vert-glauque (Leucanthemum subglaucum), la Minuartie de Lozère (Minuartia rostrata subsp. lesurina), la Grassette des causses (Pinguicula longifolia subsp. caussensis), la Potentille des Cévennes (Potentilla caulescens subsp. cebennensis), la Saxifrage des Cévennes (Saxifraga cebennensis), la Joubarbe d’Auvergne (Sempervivum tectorum subsp. arvernense) et le Thym luisant (Thymus nitens). Enfin, une espèce protégée au niveau départemental a été recensée : la Campanule remarquable (Campanula speciosa subsp. speciosa). En dehors des espèces protégées, plusieurs autres taxons sont jugés très rares en Aveyron : l’Alchémille des rochers (Alchemilla saxatilis), la Laîche à bec court (Carex brevicollis), l’Œillet du granite (Dianthus graniticus), le Gaillet verticillé (Galium verticillatum), le Cirse acarna (Picnomon acarna), la Ronce des rochers (Rubus saxatilis), la Sarriette des montagnes (Satureja montana subsp. montana), le Silène saxifrage (Silene saxifraga), le Téléphium (Telephium imperati) et le Serpolet couché (Thymus praecox). Du point de vue avifaunistique, plusieurs espèces rupestres se reproduisent sur les falaises des gorges de la Dourbie. Côté rapaces, on retrouve tout d’abord un couple d’Aigle royal qui possède plusieurs aires qu’il occupe successivement, que ce soit en rive droite ou en rive gauche de la Dourbie. Autre rapace nicheur de ces gorges, au moins trois couples de Faucon pèlerin s’y reproduisent. Un des sites est d’ailleurs occupé depuis au moins 1976, période à laquelle l’espèce était devenue très rare en France. Le Vautour fauve, réintroduit dans les Grands Causses au début des années 1980, s’est reproduit pour la première fois dans les gorges de la Dourbie en 2003. En 2008, pas moins de dix couples y étaient installés. Enfin, le Grand-Duc d’Europe est bien présent tout au long des gorges. En dehors des rapaces, plusieurs couples de Crave à bec rouge se reproduisent dans les gorges. Après la saison de reproduction, des groupes atteignant parfois 200 individus sont observés. Une espèce rupestre est également régulièrement observée dans les gorges, mais sa reproduction n’y a pas encore été prouvée : le Monticole bleu. Ces milieux permettent aussi la présence de reptiles qui affectionnent les terrains rocheux, secs et bien ensoleillés, à végétation éparse d’affinité méditerranéenne, comme la Coronelle lisse, qui recherche ces biotopes où abonde le Lézard des murailles dont elle se nourrit. Concernant les mammifères, le Molosse de Cestoni a été identifié grâce à un détecteur à ultrasons. Cette grande chauve-souris est une espèce rupestre puisqu’elle s’abrite sous les écailles rocheuses dont l’ouverture est orientée vers le bas.

2 - L’intérêt floristique des bois est important puisque plusieurs espèces protégées y ont été recensées. Ainsi, 2 espèces protégées au niveau national sont notées : la Marguerite de la Saint-Michel (Aster amellus) dans les bois clairs et rocailleux, et le Millet verdâtre (Piptatherum virescens) dans les chênaies pubescentes. Une espèce présente sur le site est également protégée au niveau régional : la Gesse blanchâtre (Lathyrus pannonicus subsp. asphodeloides), qui recherche les bois clairs et les lisières. En dehors des espèces protégées, plusieurs autres taxons sont jugés rares à très rares en Aveyron : l’Aster à trois nervures (Aster sedifolius subsp. trinervis), présente dans les bois clairs et coteaux rocailleux, la Mélique penchée (Melica nutans), qui recherche les bois frais, et la Valériane des montagnes (Valeriana montana), dans les bois et rochers humides. Côté oiseaux, l’espèce la plus importante se reproduisant en forêt est sans conteste le Vautour moine. Réintroduits dans les Grands Causses dans les années 1990, la plupart des couples de Vautour moine nichent dans les gorges de la Jonte et du Tarn. Néanmoins, un couple se reproduit dans les gorges de la Dourbie depuis 2007. Par ailleurs, plusieurs couples de Circaète Jean-le-Blanc sont connus tandis que le Pic noir est très présent tout au long des gorges. Sa nidification certaine (loge et poussins) a été observée à deux reprises. Ces grandes étendues forestières sont aussi l’habitat de la Martre des pins, où un couple avec un jeune a été vu en août 2001. Plusieurs espèces de champignons déterminants sont présents dans les sous-bois de feuillus dont le Cortinaire élégant (Cortinarius elegantissimus) et l’Hygrophore du hêtre (Hygrophorus fagi) dans les hêtraies, ou encore la Russule maculée (Russula maculata) dans les chênaies thermophiles.

3 - L’intérêt floristique des pelouses sèches caussenardes est réputé puisqu’on y retrouve des espèces caractéristiques. Ainsi, une espèce protégée au niveau national est recensée : l’Orchis parfumé (Orchis coriophora subsp. fragans), tandis que deux autres sont protégées au niveau régional : l’Ophrys d’Aymonin (Ophrys aymonii), orchidée endémique des causses, et l’Orpin à feuilles embrassantes (Sedum amplexicaule), espèce endémique du Massif central. Plusieurs autres taxons présents sur le site sont jugés rares à très rares en Aveyron : l’Antennaire dioïque (Antennaria dioica), le Gaillet glauque (Galium glaucum), l’Iris jaunâtre (Iris lutescens), le Plantain argenté (Plantago argentea), la Potentille à petites fleurs (Potentilla micrantha) et la Valériane tubéreuse (Valeriana tuberosa). Parmi la faune présente, on retrouve des oiseaux appartenant au cortège dit des agrosystèmes comme la Pie-grièche écorcheur, le Pipit rousseline ou encore l’Alouette lulu, mais aussi les Busards Saint-Martin et cendré qui utilisent les landes pour nicher. Les landes ouvertes sont l’habitat de reptiles comme le Lézard ocellé, dont une station est connue, ou encore de la Coronelle girondine, qui affectionne les terrains secs et chauds. On y retrouve également des orthoptères peu communs comme la Magicienne dentelée (Saga pedo), la plus grande sauterelle d’Europe et l’unique sauterelle protégée en France, qui se trouve ici dans une des rares stations aveyronnaises, mais également le Criquet des jachères (Chorthippus mollis mollis), localisé dans notre région.

4 - Les rivières et ruisseaux comme la Dourbie, le Durzon, la Virenque... sont des milieux très intéressants, car ils permettent d’accueillir une faune et une flore spécifiques sur plus de 60 km linéaires de cours d’eau. Sur les berges humides des cours d’eau, dans les petites zones humides comme les sources, mais aussi dans les alluvions déposées par les rivières, de nombreuses espèces protégées y ont été recensées. Ainsi, une espèce protégée au niveau national a été notée : l’Orchis punaise (Orchis coriophora subsp. coriophora). Deux espèces présentes sur le site sont également protégées au niveau régional : le Vulpin bulbeux (Alopecurus bulbosus) et l’Épilobe de Dodoens (Epilobium dodonaei), tandis qu’une autre est protégée au niveau départemental : l’Épipactis des marais (Epipactis palustris). En dehors des espèces protégées, plusieurs autres taxons sont jugés rares à très rares en Aveyron : l’Achillée des Pyrénées (Achillea ptarmica subsp. pyrenaica), le Jonc capité (Juncus capitatus) et la Linaire simple (Linaria simplex). Réintroduit dans la Dourbie en 1989 et 1990 avec un lâcher de 12 individus, le Castor d’Eurasie est désormais présent sur tout le cours d’eau. Sa présence est généralement attestée par l’observation de troncs d’arbres ou d’arbustes rongés, mais des observations directes d’individus ne sont pas rares. Par exemple, une famille composée de deux adultes et deux jeunes a été vue à la tombée de la nuit près de Nant en septembre 2006. Tout comme le castor, la Loutre d’Europe est actuellement notée sur toute la Dourbie où sa présence était déjà effective dans les années 1980, période où l’espèce était devenue très rare en France. Le Muscardin a quant à lui été observé dans la ripisylve de la Dourbie en mai 1993, cette observation constituant la seule du département de l’Aveyron. Deux espèces d’oiseaux déterminantes sont aussi strictement liées à la présence du cours d’eau : le Guêpier d’Europe, dont une colonie de reproduction est présente dans les berges de la Dourbie un peu avant la confluence avec le Tarn ; le Chevalier guignette, dont un couple avec un comportement de reproduction est observé sur les bancs de graviers de Massebiau en juin 2006. D’un point de vue ichtyologique, 2 espèces déterminantes ont été recensées dans le cours d’eau. La Vandoise rostrée, considérée comme une sous-espèce endémique du Sud-Ouest de la France, fréquente les eaux vives des cours moyens des principales rivières de la région. Dans la Dourbie, des biomasses exceptionnellement fortes sont parfois importantes ; par exemple, lors d’une pêche électrique réalisée en 1996, les vandoises représentaient 674 kg à l’hectare. Quant au Chabot, c’est un petit poisson caractéristique des eaux fraîches et vives des cours d’eau en tête de bassin observé dans la partie amont de la Dourbie et dans le Durzon. Sur ce dernier cours d’eau, à quelques kilomètres de distance, on passe de la présence de quelques individus à une densité minimale de 14 500 poissons par hectare dans la partie terminale. Ce niveau d’abondance est exceptionnel à l’échelle nationale pour un cours d’eau de cette dimension (largeur de 5 à 6 m). L’Écrevisse à pattes blanches (Austropotamobius pallipes) est notée dans les têtes de bassins de deux affluents de la Dourbie, avec des effectifs moyens pour chacune des populations.

5 - Plusieurs grottes présentes dans les gorges abritent des colonies de chauves-souris en période d’hivernage, par exemple. 15 petits rhinolophes ont été recensés en février 2001 dans une grotte de la commune de Millau. Certaines grottes sont également utilisées par d’autres espèces de chauves-souris. Le milieu souterrain abrite aussi différentes espèces d’invertébrés, certains étant endémiques en France : un coléoptère (Speotrechus mayeti), des crustacés (Elaphoidella brehieri, Niphargus robustus et Oritoniscus vandeli), des collembolles (Pseudosinella balazuci et Pseudosinella denisi) ou encore le Plusicampe de Dargilan (Plusiocampa dargilani).

6 - Plusieurs colonies de reproduction de chauves-souris sont connues dans des bâtiments (granges, remises à bois...) sur le zonage. Ainsi, deux colonies de Petit Rhinolophe, une d’au moins 80 individus et une autre de 60, sont présentes sur la commune de Nant.

Les gorges de la Dourbie viennent récemment d’être colonisées par les Vautours fauve et moine, la majorité des couples de ces deux espèces se reproduisant dans les gorges du Tarn et de la Jonte. Ce site est donc important comme zone d’expansion des sites de reproduction de ces espèces.

Commentaires sur la délimitation

Le zonage prend en compte l’ensemble des gorges de la Dourbie, depuis son entrée dans le département de l’Aveyron jusqu’à sa confluence avec le Tarn. Des affluents de la Dourbie sont également pris en compte. Les limites du site s’arrêtent généralement au début des plateaux.