Les cours d’eau appelés « Lavets » structurent un réseau hydrographique autonome de six rivières ou ruisseaux se réunissant en amont de Ponlat avant de se jeter dans la Garonne. Ils drainent, autour des villages de Cuguron et Les Tourreilles, un vaste plateau de cailloutis et d’argiles qui constitue la partie orientale du Lannemezan. Chacun de ces petits cours d’eau naît sur le plateau, aux alentours de 550 m, et forme une gouttière qui s’encaisse progressivement entre des versants assez abrupts couverts de forêts et parfois de prairies ou de landes. Le fond des vallons, en amont, est occupé par des systèmes tourbeux (tourbières actives et bas-marais) d’abord denses qui deviennent plus épars en descendant le cours des rivières. L’apparition, çà et là, de sources ou de suintements sur les versants, détermine la présence de tourbières, plus fréquentes dans la vallée du Lavet de derrière. Les boisements qui occupent le fond des vallons sont très humides et influencés par le cours divaguant des ruisseaux dont les méandres sont souvent assez nombreux du fait de l’absence de relief. En allant vers l’est, les boisements humides perdent de l’importance au profit d’un bocage où le Chêne pédonculé amène une tonalité atlantique marquée. Les versants sont occupés par des bois de chênes ou quelques châtaigneraies, mais la plupart des vastes landes atlantiques qui les occupaient également ont été transformées en plantations de conifères. Le paysage formé par cette succession de vallons est assez attrayant et contrasté, du fait de l’absence de relief sur le plateau dominant. Des vestiges préhistoriques des âges du bronze et du fer ont été mis au jour sur plusieurs endroits du site. La tourbière la plus vaste, sur le Lavet de derrière, a fait l’objet d’études palynologiques qui ont permis de situer son origine à 5 000 ans avant le présent et de connaître l’évolution de la végétation environnante (GALOP et al., 2002). Les terrains géologiques concernés sont des cailloutis du Lannemezan, ensemble de galets liés par une gangue d’argile, très imperméables. Le climat du site est de type atlantico-montagnard. La pluviométrie annuelle moyenne est de 1 000 à 1 100 mm, et la moyenne annuelle des températures tourne autour de 10°C. Les sols sont argilo-siliceux humifères, avec des pH très acides.
Les habitats naturels déterminants signalés sur ce site concernent principalement les milieux tourbeux surtout présents près des têtes de bassins. Les zones de suintements ou de résilience de l’eau sont parfois occupées par des landes humides à Bruyère à quatre angles (Erica tetralix), des formations de bas-marais acides, des tourbières de transition avec des radeaux de Trèfle d’eau (Menyanthes trifoliata), des tourbières tremblantes à Molinie bleue (Molinia caerulea) ou encore des communautés de Rhynchospore blanc (Rhynchospora alba). La tourbière haute est représentée ici par des communautés tourbeuses à Erica tetralix et Sphagnum, pouvant accumuler localement une épaisseur de tourbe de plus de 3 m de haut. Sur ce type de formations, les chenaux d’Ossifrage (Narthecium ossifragum) sont fréquents. On trouve aussi quelques dépressions à Rhynchospore blanc, typiques, peu profondes et temporairement inondées. Les fonds de vallons sont occupés par des substrats engorgés une grande partie de l’année. Divers types de boisements humides s’y rencontrent, notamment des aulnaies marécageuses oligotrophes. Les sous-bois riverains hébergent une flore de mégaphorbiaie comprenant notamment le Pavot du pays de Galles (Meconopsis cambrica), le Pigamon à feuilles d’ancolie (Thalictrum aquilegifolium), la Fougère femelle (Athyrium filix femina) et la Saxifrage hirsute (Saxifraga hirsuta). Bien que ces espèces ne soient pas déterminantes pour la zone « montagne », cette formation dont la flore est proche de celle de la hêtraie neutrophile est très originale à moins de 600 m d’altitude et dans une situation aussi externe par rapport au massif pyrénéen. Les espèces de plantes présentes correspondent aux habitats mentionnés. Les milieux tourbeux hébergent plusieurs espèces protégées. Le Rossolis intermédiaire (Drosera intermedia) présent ici sur plusieurs stations, les seules connues de Haute-Garonne, est une espèce protégée de la liste nationale, inscrite sur la liste rouge régionale des espèces végétales. Le Rossolis à feuilles rondes (Drosera rotundifolia) est mieux représenté et jouit également d’une protection nationale. La Grassette du Portugal (Pinguicula lusitanica) semble, elle aussi, inconnue ailleurs en Haute-Garonne ; elle bénéficie d’une protection régionale, et figure sur la liste rouge régionale, tout comme le Scirpe à nombreuses tiges (Eleocharis multicaulis), très localisé ici. L’Osmonde royale (Osmunda regalis), protégée à l’échelle de la Haute-Garonne, est ici bien représentée, et occupe une quinzaine de stations dans les boisements humides, sur les bordures de bois et de fossés et sur les talus. La flore déterminante comprend également un contingent d’espèces des tourbières, bas-marais et prairies humides : la Laîche jaunâtre (Carex flava), le Trèfle d’eau (Menyanthes trifoliata), le Rhynchospore blanc (Rhynchospora alba) et la Petite scutellaire (Scutellaria minor). Elle compte aussi des espèces présentes dans les landes plus ou moins humides et pour certaines, dans les bois clairs : la Gentiane pneumonanthe (Gentiana pneumonanthe), l’Avoine de Thore (Pseudarrhenatherum longifolium), la Phalangère à feuille planes (Simethis mattiazzii) et l’Ajonc nain (Ulex minor). Les bordures humides de tourbières et de ruisseaux abritent l’Euphorbe velue (Euphorbia villosa). On mentionnera également la Trompette de méduse (Narcissus bulbocodium), bien représentée quoique en régression du fait des drainages et s’approchant de sa limite orientale d’aire de répartition. On signalera qu’une espèce liée aux landes, mentionnée sur ce site lors du premier inventaire des ZNIEFF (1988), l’Adénocarpe à feuilles pliées (Adenocarpus complicatus), n’y a plus été retrouvée. La Gentiane pneumonanthe est également en régression marquée (de par une fermeture du milieu) dans une grande partie de la vallée du Lavet. On signale, en continuité avec les parcelles cultivées du plateau, un contingent intéressant d’espèces messicoles ou adventices des cultures qui trouvent ici des pratiques agricoles et des conditions de sols et de climat favorisant leur maintien : le Bleuet (Centaurea cyanus), la Petite brize (Briza minor) et le Glaïeul commun (Gladiolus communis subsp. byzantinus) dont la présence en France se limite à quelques départements. La végétation des tourbières et zones humides comprend au moins 7 espèces de sphaignes et 8 espèces de champignons déterminants et spécifiques de ces milieux. Une seule espèce d’oiseau est déterminante : le Busard Saint-Martin (Circus cyaneus), dont la présence ici est en lien d’une part avec les milieux ouverts pour la chasse et le repos, d’autre part avec les landes denses pour la nidification. On mentionnera également l’intérêt du site pour les Cigognes blanche (Ciconia cicogna) et noire (Ciconia nigra) qui s’y arrêtent parfois pour s’alimenter, tout comme le Circaète Jean-le-Blanc (Circaetus gallicus) et le Milan royal (Milvus milvus), très fréquemment observé et susceptible d’être nicheur ici. La faune déterminante comprend également pour les reptiles le Lézard vivipare (Zootoca vivipara), fréquent sur les tourbières et prairies attenantes, et la Coronelle lisse (Coronella austriaca), qui est très rare. Parmi les insectes, 6 espèces de libellules soulignent l’intérêt des milieux aquatiques permanents ou temporaires, notamment l’Aeschne affine (Aeschna affinis), le Caloptéryx hémorrhoïdal (Calopteryx hemorrhoidalis hemorrhoidalis), l’Agrion mignon (Coenagrion scitulum), le Leste dryade (Lestes dryas), la Libellule fauve (Libellula fulva) et le Gomphe à crochets (Onychogomphus uncatus). Parmi les papillons diurnes de la zone, on mentionnera le Damier de la succise (Euphydryas aurinia), espèce bien représentée dans la région, mais qui, sous certaines conditions, satisfaites ici (populations vivant en milieux humides) est concernée par la directive « Habitats ». On observe également assez souvent le Miroir (Heteropterus morpheus) sur les espaces herbeux hauts peu intensifiés, notamment dans les landes, prairies humides et tourbières riches en molinies. Observé au niveau de la vallée du Lavet de derrière, l’Azuré du serpolet (Maculinea alcon), espèce liée à la Gentiane pneumonanthe, semble ici très rare et vraisemblablement en régression comme sa plante hôte et le paysage humide ouvert qui l’héberge. On notera enfin la présence très ponctuelle de l’Écrevisse à pattes blanches (Austropotamobius pallipes) et de 2 orthoptères déterminants liés aux milieux humides ou aux landes : le Grillon des marais (Pteronemobius heydenii, non déterminant) et la Sauterelle basque ou Decticelle aquitaine (Zeuneriana abbreviata), ici en limite orientale de son aire de répartition.
La conjonction de plateaux et vallons successifs sur des terrains imperméables permet la subsistance d’une gamme diversifiée de zones humides et de leurs espèces associées. Ce contexte favorise des échanges d’individus (espèces mobiles de la faune) ou de diaspores entre les zones humides, et évite un trop grand confinement des populations.
Cette zone concerne les vallons humides de six cours d’eau : les Lavets. Les contours prennent en compte le réseau hydrographique ainsi que les fonds de vallées et les versants boisés ou en prairies. Cette zone, ainsi que le reste du bassin versant, certaines des sources et affluents, font l’objet de la ZNIEFF de type 2 « Amont des bassins de la Louge, de la Save, du Lavet et de la Noue et landes orientales du Lannemezan ». En aval de la ZNIEFF, le Lavet traverse des secteurs plats où les boisements et prairies riverains sont substitués par des cultures. Cette transition marque la limite de la zone.