ZNIEFF 730011397
Amont des bassins de la Louge, de la Save, du Lavet et de la Noue et landes orientales du Lannemezan

(n° régional : Z2PZ2094)

Commentaires généraux

Cette ZNIEFF de type 2 est située dans la partie orientale du plateau de Lannemezan, au nord de Montréjeau.

Il s’agit du prolongement du système orographique du Lannemezan à l’est, depuis les Hautes-Pyrénées vers la Haute-Garonne. Les ensembles de cailloutis argileux ou de « landes » (lande Folie, lande de Cuguron...) en grande partie défrichées constituent ici des plateaux qui arrêtent les précipitations et forment un véritable château d’eau d’où partent diverses petites rivières. Les altitudes sont comprises entre 410 et 590 m, et le relief est généralement constitué d’entablements entaillés par des petites vallées fraîches orientées au nord ou à l’est.

Le climat du site est de type atlantico-montagnard. La pluviométrie annuelle moyenne est de 1 000 à 1 100 mm, et les températures annuelles moyennes se situent autour de 10°C. Les sols sont argilo-siliceux humifères, avec des pH acides.

Les paysages assez attrayants et contrastés ont été occupés par l’homme assez tôt. Ils ont fourni, notamment sur les plateaux, des vestiges préhistoriques des âges du bronze et du fer, notamment quelques tumuli.

Des boisements humides (aulnaies marécageuses oligotrophes) occupent les fonds de vallons, surtout à l’ouest du site. Ils sont cependant remplacés par un bocage de type atlantique, structuré autour d’une galerie alluviale de chênes pédonculés, de frênes et d’aulnes, abritant ici et là des mégaphorbiaies avec quelques plantes montagnardes (Pavot du pays de Galles [Meconopsis cambrica], Pigamon à feuilles d’Ancolie [Thalictrum aquilegiifolium]) non déterminantes.

Les versants les plus abrupts sont quant à eux occupés par des bois de chênes ou de châtaigniers ; on note également quelques rares massifs de hêtres.

Enfin, les landes atlantiques ont ici été transformées en plantations de conifères, et ne subsistent qu’en fragments épars.

Les systèmes tourbeux (tourbières actives et bas-marais) se sont maintenus dans la partie ouest des vallons, mais ont été drainés depuis plusieurs décennies sur les plateaux. Sont présents des landes humides à Bruyère à quatre angles (Erica tetralix, non déterminante dans les Pyrénées), des bas-marais acides, des dépressions sur substrats tourbeux et quelques tourbières de transition (notamment une présentant des radeaux flottants de Trèfle d’eau [Menyanthes trifoliata]). On a également des unités de tourbières plus développées (près de 3,5 m d’épaisseur de tourbe dans certains cas) avec des communautés tourbeuses à Erica tetralix et Sphagnum sp., mais dont les caractéristiques ombrotrophes sont peu marquées, probablement du fait d’une alimentation en eau par les versants. Les chenaux à Ossifrage (Narthecium ossifragum, non déterminante dans les Pyrénées) y sont fréquents, avec parfois des dépressions à Rhynchospore blanc (Rhynchospora alba), peu profondes et temporairement inondées.

Sur les zones dégradées du plateau, les landes atlantiques et habitats humides conservent certaines capacités de restauration du fait de l’absence de relief et de la dynamique active des plantes de landes qui réapparaissent rapidement en cas de déprise : ajoncs (Ulex minor et Ulex europaeus), Bourdaine (Frangula alnus, non déterminante), Avoine de Thore (Pseudarrhenatherum longifolium)... Ainsi, le maintien d’une pression agricole modérée sur les plateaux est l’une des garanties de la persistance des systèmes tourbeux des vallons sous-jacents.

Les conditions du sol, les pratiques culturales et la nature du climat rendent difficile l’éradication des plantes compagnes des céréales. Aussi, le cortège d’adventices et de messicoles acidiphiles est-il souvent important et intéressant dans plusieurs parcelles cultivées.

Parmi les espèces de plantes présentes, on peut citer, en premier lieu, 6 espèces protégées présentes dans les milieux tourbeux.

La Spiranthe d’été (Spiranthes aestivalis), qui bénéficie d’une protection nationale, est rare aussi bien à l’échelle nationale qu’à celles de la région et du département (seule station connue). Le Rossolis intermédiaire (Drosera intermedia), présent ici sur plusieurs stations qui semblent les seules de Haute-Garonne, est une espèce protégée de la liste nationale et inscrite sur la liste rouge régionale des espèces végétales. Le Rossolis à feuilles rondes (Drosera rotundifolia) est mieux représenté et bénéficie également d’une protection nationale. La Grassette du Portugal (Pinguicula lusitanica) semble, elle aussi, limitée à cette zone pour la Haute-Garonne. Elle bénéficie d’une protection régionale, et est sur la liste rouge régionale, tout comme le Scirpe à tiges nombreuses (Eleocharis multicaulis), présent sur une station. L’Osmonde royale (Osmunda regalis), qui est une espèce protégée en Haute-Garonne, est présente dans les talus humides et en bord de rivières et de bois.

La flore déterminante comprend également des espèces typiques des tourbières, bas-marais et prairies humides : Laîche jaune (Carex flava), Trèfle d’eau (Menyanthes trifoliata), Rhynchospore blanc (Rhynchospora alba) et Petite scutellaire (Scutellaria minor).

Elle compte aussi, dans les landes plus ou moins humides ou les bois clairs, la Gentiane pneumonanthe (Gentiana pneumonanthe), l’Avoine de Thore (Pseudarrhenatherum longifolium), la Phalangère de Mattiazzi (Simethis mattiazzii) et l’Ajonc nain (Ulex minor).

Les bordures humides de tourbières et de ruisseaux abritent l’Euphorbe poilue (Euphorbia villosa). La Trompette de méduse (Narcissus bulbocodium, déterminante en plaine seulement), qui est proche de sa limite d’aire vers l’est, est ici bien représentée.

Sur certaines parcelles cultivées du plateau, on signale un cortège intéressant d’espèces messicoles ou adventices des cultures : Bleuet (Centaurea cyanus), Petite brize (Briza minor), Glaïeul commun (Gladiolus communis subsp. byzantinus) dont la présence en France se limite à quelques départements, doucettes (Valerianella locusta et Valerianella rimosa), Myosotis bicolore (Myosotis discolor), Renoncule des champs (Ranunculus arvensis), Laiteron des champs (Sonchus arvensis), Vesce à quatre graines (Vicia tetrasperma), Galéopsis douteux (Galeopsis segetum), Pensée des champs (Viola arvensis)...

Enfin, on compte au moins 7 espèces de sphaignes et 8 espèces de champignons déterminantes dont plusieurs sont spécifiques des zones humides.

Concernant la faune, les oiseaux représentent l’un des points forts de ce site qui constitue une halte migratoire fréquentée par les cigognes (Ciconia ciconia, Ciconia nigra), le Circaète Jean-le-Blanc (Circaetus gallicus) et le Milan royal (Milvus milvus) qui y chasse presque constamment et s’y reproduit probablement. Les passereaux y stationnent longuement avant de gagner les territoires d’altitude (Traquet motteux). Le milieu ouvert, pastoral ou cultivé, mais peu habité par l’homme, attire nombre d’oiseaux en déplacement, et les observations d’espèces rares (Traquet oreillard [Oenanthe hispanica]...) ou montagnardes (Vautour percnoptère [Neophron percnopterus]) sont assez fréquentes. Le Busard Saint-Martin (Circus cyaneus) est une espèce incontournable du site, qui niche dans les parcelles de landes denses, et chasse sur les milieux ouverts. Sa présence reste ici à peu près constante.

La faune déterminante comprend également le Lézard vivipare (Zootoca vivipara) sur les tourbières et prairies attenantes, et la Coronelle lisse (Coronella austrica) qui n’a été observée qu’une seule fois (déterminante en dessous de 400 m d’altitude dans les Pyrénées).

6 espèces de libellules sont présentes, notamment l’Aeschne affine (Aeshna affinis), le Caloptéryx hémorrhoïdal (Calopteryx haemorrhoidalis), l’Agrion mignon (Coenagrion scitulum), le Leste dryade (Lestes dryas), la Libellule fauve (Libellula fulva), et le Gomphe à crochets (Onychogomphus uncatus).

Certaines mares sont riches en espèces d’amphibiens, notamment le Triton marbré (Triturus marmoratus, déterminant en plaine uniquement).

Le Damier de la Succise (Euphydryas aurinia) est une espèce de papillon diurne bien représentée sur l’ensemble de la zone (populations vivant en milieux humides), qui est concernée par l’annexe II de la directive « Habitats ». On observe également le Miroir (Heteropterus morpheus). L’Azuré du serpolet (Maculinea alcon), qui pond ses œufs sur la Gentiane pneumonanthe (Gentiana pneumonanthe), est en régression et semble être devenu très rare ici.

On signale enfin une espèce d’orthoptère déterminante des milieux humides : la Decticelle aquitaine (Zeuneriana abbreviata), une sauterelle ici en limite d’aire de répartition vers l’est.

Plateaux imperméables et vallons humides forment ici, avec les habitats et les espèces qui les caractérisent, un riche ensemble naturel interdépendant. Leur disposition en successions rapprochées favorise les échanges d’espèces qui conditionnent la survie des populations à long terme. L’intérêt paysager du site est également très marqué.

Commentaires sur la délimitation

Ce site rassemble les têtes de bassin de quatre rivières (la Louge, la Save, le Lavet et la Noue), dont les nombreux habitats humides intéressants font l’objet de deux ZNIEFF de type 1, ainsi que certains secteurs du plateau de Lannemezan les entourant.

Le périmètre de cette ZNIEFF de type 2 s’appuie donc sur un critère de fonctionnalité des bassins versants : la gestion des parties planes surplombant les sources et les rivières est ici un facteur important de la pérennité des habitats humides qu’elles abritent.

Ainsi, ce site intègre une proportion assez importante d’habitats modifiés parmi des cultures extensives (avec des espèces messicoles parfois rares), des prairies et des parcelles de landes qui offrent à plusieurs espèces d’oiseaux des sites de nidification, d’hivernage ou de haltes migratoires de qualité.