ZNIEFF 730011972
Rive gauche de la haute vallée de l'Ariège

(n° régional : Z2PZ0431)

Commentaires généraux

La ZNIEFF s’étend sur 16 000 ha au sud-est du département de l’Ariège, dont la rivière éponyme sert de limite orientale. Comprise entre 550 et 2 800 m d’altitude (étages collinéen à nival), elle correspond à une partie de la haute chaîne des Pyrénées avec des paysages de haute montagne. La ZNIEFF est principalement sur substrat acide (gneiss et granite), et accueille des zones ouvertes prairiales dans la vallée, des forêts de feuillus à l’étage montagnard, des zones tourbeuses et pelouses alpines, jusqu’à des zones rocheuses d’altitude. La forêt (hêtraie, hêtraie-sapinière) occupe une large place à l’étage montagnard. Les vastes zones d’estives comprennent des landes, pelouses subalpines et alpines qui dominent le paysage. Les falaises et les éboulis sont aussi très présents dans le sud de la zone, créant un univers très minéral à partir d’une certaine altitude. Les zones humides d’altitude, et plus particulièrement les zones tourbeuses, sont aussi une caractéristique de cette zone, comme celles de la vallée de Lavail. La ZNIEFF se caractérise également par la présence de quelques plans d’eau naturels et d’un réseau hydrographique assez dense. La zone représente un important bassin collecteur d’un point de vue hydrologique pour la haute vallée de l’Ariège. Deux domaines skiables sont compris dans la zone : celui de Beille pour partie, et l’intégralité d’Ax-Bonascre, à l’exception du bâti.

La ZNIEFF occupant les étages de végétation collinéen à nival, les milieux qui la composent sont nombreux et variés. On y trouve entre autres un complexe de micro-habitats tourbeux et humides comme les buttes à sphaignes, bas-marais acides à sphaignes et à Laîche des bourbiers (Carex limosa) – ceux-ci comptent une très forte diversité d’espèces dont l’Orpin velu (Sedum villosum), la Petite scutellaire (Scutellaria minor), la Pédiculaire mixte (Pedicularis mixta), la Pédiculaire des Pyrénées (Pedicularis pyrenaica) et la Pédiculaire verticillée (Pedicularis verticillata) –, tourbières de transition avec le Trèfle d’eau (Menyanthes trifoliata) et la Potentille des marais (Potentilla palustris), boisements humides à saules spp. et mégaphorbiaies montagnardes (végétations à hautes herbes) avec des espèces comme l’Ail victorial (Allium victorialis) ou la Valériane des Pyrénées (Valeriana pyrenaica). Outre leur intérêt en tant qu’habitats naturels (intérêt patrimonial régional et européen), ces milieux jouent un rôle important d’un point de vue fonctionnel : atténuation des effets de crues par stockage d’eau, ralentissement des ruissellements de surface. D’autres milieux sont bien représentés. Parmi eux : les milieux forestiers avec les hêtraies, hêtraies-sapinières et forêts de Pin à crochets (Pinus uncinata) abritent une flore très variée, avec par exemple la Luzule des neiges (Luzula nivea) ; les prairies de fauche de montagne ; les pelouses à Gispet (Festuca eskia) bien présentes à partir de l’étage subalpin ; les landes et landines de montagne comme les landes à myrtilles et Azalée naine (Loiseuleria procumbens) accueillent l’Arnica des montagnes (Arnica montana subsp. montana), la Pulsatille alpine (Pulsatilla alpina subsp. apiifolia) et la Pulsatille d’été (Pulsatilla vernalis) ; on trouve aussi des formations monospécifiques à Genêt purgatif (Cytisus oromediterraneus) ; les communautés végétales des combes à neige ; les habitats rocheux, éboulis et falaises bien représentés dans la partie haute de la ZNIEFF. D’autres enjeux floristiques typiques concernant différents habitats peuvent être ajoutés ici. La flore de milieux humides et tourbeux est bien représentée avec des espèces comme le Rossolis à feuilles rondes (Drosera rotundifolia), le Lycopode inondé (Lycopodiella inundata) et le Saule des Lapons (Salix lapponum), protégés au niveau national, la Linaigrette engainante (Eriophorum vaginatum), l’Isoète des lacs (Isoëtes lacustris) et la Subulaire aquatique (Subularia aquatica), protégés en Midi-Pyrénées, ou encore la Potentille des marais (Potentilla palustris), espèce protégée en Ariège. Le Rossolis intermédiaire (Drosera intermedia), protégé nationalement, est également mentionné pour la zone et serait l’unique station de cette espèce pour l’Ariège. Ces zones humides accueillent aussi une flore bryophytique (sphaignes) diversifiée et remarquable avec 18 espèces signalées. Les milieux rocheux hébergent des espèces spécialisées patrimoniales comme la Saxifrage faux géranium (Saxifraga geranioides), la Saxifrage à cinq doigts (Saxifraga pentadactylis) et la Saxifrage à feuilles rondes (Saxifraga rotundifolia), ou encore la Jourbarbe des toits (Sempervivum tectorum subsp. tectorum) ou le Moloposperme du Péloponnèse (Molopospermum peloponnesiacum), une immense ombellifère. Parmi les espèces déterminantes caractéristiques des pelouses d’altitude, on trouve l’Œillet en delta (Dianthus deltoides), la Gentiane de Burser (Gentiana burseri), la Gentiane des Pyrénées (Gentiana pyrenaica), le Lis des Pyrénées (Lilium pyrenaicum) et la Gagée de Liotard (Gagea fragifera). Pour finir cette description globale, on notera un cortège mycologique d’au moins 11 espèces déterminantes, présentes en grande partie dans les zones forestières du secteur. De nombreuses espèces déterminantes, réparties dans divers groupes faunistiques, sont présentes sur le site. Un des enjeux de cette ZNIEFF est le Desman des Pyrénées, petit mammifère semi-aquatique endémique des Pyrénées et du quart nord-ouest de la péninsule Ibérique, particulièrement original dans tous les aspects de sa biologie. Étroitement adapté à la vie semi-aquatique, il peuple des cours d’eau à régime hydrologique de type nival de transition à pluvio-nival, dans des massifs montagneux ou de piémont recevant une pluviométrie annuelle supérieure à 1 000 mm. Toutes les perturbations pouvant affecter le fonctionnement des cours d’eau et notamment le fonctionnement hydrologique sont préjudiciables à l’espèce. La pollution, la gestion piscicole, les sports aquatiques, etc. constituent autant de facteurs pouvant affecter de manière négative l’espèce et son habitat. Le cortège en avifaune montagnarde est riche, la zone étant notamment importante pour les galliformes de montagne : le Grand Tétras (Tetrao urogallus), la Perdrix grise de montagne (Perdix perdix hispanicus) et le Lagopède alpin (Lagopus mutus) sont nicheurs sur la zone et particulièrement sensibles aux dérangements (activités de loisirs, pratiques sylvicoles). Espèce discrète des vieilles forêts froides de montagne (hêtraie-sapinière), la Chouette de Tengmalm (Aegolius funereus) est connue en tant que nicheuse certaine sur le site. Cette vaste zone mêlée de zones ouvertes et de zones forestières offre un territoire de chasse privilégié et un site de nidification pour le Circaète Jean-le-Blanc, qui se nourrit essentiellement de reptiles, et le Faucon pèlerin. La ZNIEFF est également d’une importance majeure pour la conservation de reptiles et d’amphibiens endémiques et à forte valeur patrimoniale comme le Lézard agile de Garzón (Lacerta agilis garzoni) et l’Euprocte des Pyrénées (Euproctus asper). Concernant les lépidoptères rhopalocères (papillons de jour), on rencontre une grande diversité d’espèces déterminantes, réparties en plusieurs cortèges. Cette richesse est liée à la diversité des habitats présents sur l’ensemble de la zone. Un premier ensemble caractérise les stations plus sèches de basse altitude, bien exposées et présentant quelques affleurements rocheux, avec l’Aurore de Provence (Anthocharis belia euphenoides), Pyrgus onopordi, l’Azuré du serpolet (Maculinea arion) et l’Agreste (Hipparchia semele). Plus haut, dans la zone montagnarde, on rencontre un ensemble d’espèces hygrophiles liées aux prairies mésohygrophiles à humides et aux mégaphorbiaies, comme le Damier de la succise (Euphydryas aurinia), le Nacré de la bistorte (Boloria eunomia), le Fadet des méliques (Coenonympha glycerion). Enfin, sur les pelouses subalpines et dans les zones rocailleuses de haute atitude, il s’agit d’espèces plus spécialisées et peu communes, comme le Nacré subalpin (Boloria pales), le Candide (Colias phicomone oberthueri), la Piéride du Vélar (Pontia callidice), l’Azuré des soldanelles (Agriades glandon) ou encore la sous-espèce endémique des Pyrénées du Moiré chamoisé (Erebia gorge ramondi) et le Moiré des Pyrénées (Erebia gorgone), également endémique du massif pyrénéen. 3 espèces d’orthoptères déterminantes sont également connues sur le site. Il s’agit d’Antaxius hispanicus, endémique de la chaîne pyrénéenne et catalane, relativement courante pour les étages de végétation montagnard et subalpin, ainsi que de deux espèces endémiques pyrénéennes qui occupent la végétation subalpine et alpine : Cophopodisma pyrenaea et Gomphoceridius brevipennis. Enfin, on peut compléter cet inventaire de la diversité du site en mentionnant la présence d’une espèce déterminante de crustacé isopode (Oritoniscus intermedius) et de 7 espèces de collemboles également déterminantes pour les ZNIEFF.

Commentaires sur la délimitation

Cette ZNIEFF de 16 000 ha s’insère dans un rectangle reliant les villages d’Albies et Garanou au nord-ouest, jusqu’à Savignac et Ax-les-Thermes au nord-est. Le premier critère de tracé des contours est à la fois géomorphologique et fonctionnel (partie de bassin versant) puisque la zone correspond au versant en rive gauche de l’Ariège pour sa partie amont, jusqu’aux Cabannes à l’aval. La rivière Ariège représente donc sa limite est, le cours d’eau en lui-même faisant l’objet d’une autre ZNIEFF. Au sud, c’est la crête frontière qui marque la limite, et à l’ouest la crête qui relie le pic de la Cabanette à la station de Beille. Cette zone comprend des ensembles homogènes d’habitats qui évoluent selon l’altitude. L’ensemble de la zone fait l’objet d’un réseau dense de données déterminantes. Deux domaines skiables sont inclus dans la zone : celui de Beille pour partie, et celui d’Ax-Bonascre intégralement, à l’exception du bâti. Ces deux domaines sont très riches en enjeux naturels (flore, galliformes patrimoniaux, rhopalocères, mammifères, rapaces,...).