ZNIEFF 730014505
La Dordogne quercynoise

(n° régional : Z1PZ0425)

Commentaires généraux

Cette ZNIEFF de près de 2 000 ha concerne la partie de la plaine alluviale de la Dordogne inscrite dans le contexte du Quercy lotois, c’est-à-dire depuis les communes du Roc à l’ouest jusqu’à Biars-sur-Céré à l’est. Cette vaste zone englobe la plus grande partie du lit majeur de cette rivière, et se compose donc d’un ensemble de milieux alluviaux (cours d’eau, boisements alluviaux, prairies de fauche, bancs d’alluvions, pelouses alluviales, bras morts, mégaphorbiaies...), mais aussi plus ponctuellement de certains secteurs adjacents de coteaux secs calcaires caractéristiques des causses du Quercy (pelouses sèches, falaises, forêts de ravins, boisements thermophiles, éboulis...). Le cours de la Dordogne et ses bras secondaires sont localement colonisés par une végétation d’herbiers aquatiques (Potamogetonion) comprenant de nombreuses espèces d’intérêt comme la Renoncule aquatique (Ranunculus aquatilis) et des potamots (Potamogeton alpinus, Potamogeton bertchtoldi, Potamogeton nodosus, Potamogeton perfoliatus). Le Flûteau nageant (Luronium natans), espèce protégée à l’échelon national, inscrite en annexe II de la directive « Habitats » et extrêmement rare, y est également recensé. Ces milieux aquatiques ont par ailleurs un fort intérêt piscicole pour des espèces remarquables comme la Grande Alose, l’Anguille, la Lamproie marine, le Saumon atlantique et la Truite de mer. La Loutre d’Europe est également présente, ainsi que plusieurs odonates protégés : la Cordulie à corps fin (Oxygastra curtisii) et l’Agrion de Mercure (Coenagrion mercuriale). On notera aussi la présence de la Naïade aux yeux rouges (Erythromma najas), espèce localisée en plaine. Les milieux riverains du cours d’eau sont particulièrement intéressants, notamment les dépôts d’alluvions fluviatiles. En effet, ils abritent une flore remarquable et parfois protégée (Ache inondée [Apium inundatum], Souchet de Micheli [Cyperus michelianus], Scirpe ovale [Eleocharis ovata], Pulicaire annuelle [Pulicaria vulgaris], Lindernie couchée [Lindernia procumbens]...), et constituent des sites de reproduction privilégiés du Petit Gravelot. Les formations herbacées riveraines (mégaphorbiaies, roselières...) abritent également des espèces remarquables comme le Butome en ombelle (Butomus umbellatus), protégé en Midi-Pyrénées. La présence de micro-falaises sableuses permet également à l’Hirondelle de rivage de nicher, avec des effectifs fluctuant de 40 à 100 couples nicheurs. Le lit majeur de la Dordogne est le support d’activités agricoles diverses. On y trouve des prairies de fauche mésophiles (Brachypodio-Centaureion nemoralis). Celles-ci sont occupées par des papillons remarquables comme le Cuivré des marais (Lycaena dispar) et le Damier de la succise (Euphydryas aurinia), protégés nationalement. Il faut également noter la présence d’une belle diversité d’orthoptères liés aux zones humides comme le Grillon des torrents (Pteronemobius lineolatus), inféodé aux berges des cours d’eau et rare dans la région. Les boisements alluviaux de la Dordogne sont aussi remarquables tant du fait de leur statut (habitats d’intérêt communautaire) et de leur composition floristique (Laîche à épi grêle [Carex strigosa], Laîche fausse brize [Carex brizoïdes], Moschatelline [Adoxa moschatellina], Vigne des bois [Vitis vinifera subsp. sylvestris], cette dernière étant protégée) que de leur intérêt pour la faune (héronnières de Héron cendré, sites de nidification du Pic mar...). Les boisements du site sont en outre favorables aux coléoptères avec une trentaine d’espèces patrimoniales. On citera la présence d’Elater ferrugineus, un taupin peu commun. Ses larves vivent dans les cavités des chênes, châtaigniers et autres arbres feuillus, et s’attaquent aux larves de cétoines dont le Pique-prune (Osmoderma eremita), non signalé sur le site. On signalera aussi la présence d’Ampedus rufipennis, un autre élatéridé assez rare, vivant dans les vieilles futaies de chênes et autres feuillus. Les coteaux bordant la plaine alluviale sont des milieux très secs du fait de la nature de la roche mère calcaire et des pentes souvent fortes. Par conséquent, il s’y développe des végétations de pelouses sèches dominées par des espèces vivaces (Xerobromion du Quercy) ou annuelles sur les sols superficiels (Thero-Brachypodion), leur flore caractéristique composée d’un cortège d’espèces remarquables (Hélianthème fausse bruyère [Fumana ericoides], Lin d’Autriche [Linum austriacum subsp. collinum]. Les reliefs particulièrement escarpés sont en outre d’intérêt, en particulier pour l’avifaune rupestre comme le Faucon pèlerin, le Pigeon colombin et le Grand-Duc d’Europe, mais aussi pour la flore tel l’Alysson des montagnes (Alyssum montanum), inscrit en liste rouge en Midi-Pyrénées. Une coléoptérofaune remarquable est présente sur le site de la vallée de la Dordogne quercynoise. La variété des espèces recensées traduit la diversité des micro-habitats liés aux vieux arbres dépérissants et morts présents sur la zone. La rareté de certaines des espèces présentes traduit à la fois la maturité et la continuité écologique dans le temps de ces habitats. Parmi les espèces les plus exigeantes et les plus intéressantes de ce cortège, on trouve celles inféodées aux cavités d’arbres. Ces espèces sont la plupart du temps dotées de capacités de dispersion faibles, ce qui leur confère une sensibilité importante à l’appauvrissement en vieux arbres porteurs de micro-habitats liés à l’exploitation des écosystèmes forestiers. La diversité des espèces cavicoles remarquables présentes traduit de plus les différents types de cavités présents sur le site. Les taupins Megapenthes lugens et Procrerus tibialis se développent dans les cavités dont les parois sont tapissées de carie blanche, alors que le taupin Ampedus cardinalis affectionne les cavités composées de carie rouge. Les taupins Elater ferrugineus, Brachygonus megerlei et la cétoine Liocola lugubris habitent les cavités hautes ensoleillées. Notons que ces espèces sont très souvent associées à une espèce de cétoine encore plus rare, le Pique-prune (Osmoderma eremita). À l’inverse, les taupins Cardiophorus gramineus et Ischnodes sanguinicollis se développent dans le terreau des cavités situées à la base des troncs d’arbres. Notons également que ces espèces appartiennent au cortège d’un autre taupin rarissime en Europe : le Taupin violacé (Limoniscus violaceus). Le cortège d’espèces observé sur le site comprend également des espèces typiques des différents types de dégradation du bois. Les espèces xylophiles qui consomment le bois fraîchement mort sont représentées par les eucnémides Dirhagus lepidus et Dirhagus pygmaeus, le longicorne Oplosia cinerea, qui se développe dans les branches mortes tombées au sol, et les anthribides Tropideres albirostris et Dissoleucas niveirostris. Les espèces saproxylophages qui consomment le bois mort en cours de dégradation sont représentées par les œdemères Ischnomera caerulea et I. cyanea ainsi que par la cétoine Liocola lugubris, habitante des cavités. Le bois en cours de décomposition héberge une faune spécialisée qui attire de nombreux prédateurs. C’est le cas des clérides Opilo mollis et Tillus elongatus, qui prédatent les larves du bois carié, ou du rare histéride Aeletes atomarius. Certaines espèces, souvent peu répandues en raison de faibles capacités de dispersion et de la disparition de leur micro-habitat dans de nombreuses forêts, sont spécialisées dans la consommation des champignons lignicoles, lesquels assurent en partie la dégradation du bois mort. Citons le biphyllide Biphyllus lunatus, les ténébrions Platydema violaceum, inféodé aux champignons sous-corticaux des gros bois, et Bolitophagus reticulatus, inféodé aux polypores, le rare mélandryide Abdera flexuosa, consomnateur de carpophores, ainsi que le mycétophagide Tetratoma fungorum, consommateur de champignons sous-corticaux. L’ensemble des régimes trophiques représentés par toutes ces espèces remarquables traduisent le bon fonctionnement des processus écologiques de dégradation du bois au sein du site. Ces espèces nous indiquent le bon état de conservation du site et la présence de nombreux micro-habitats de plus en plus rares dans les forêts tempérées en raison des sylvicultures pratiquées. Enfin, la roche mère calcaire permet de nombreux écoulements en sous-sol au sein desquels on peut trouver des crustacés exploitant le sous-écoulement des cours d’eau comme Niphargus ladmiraulti ou encore Salentinella petiti. Moitessieria rolandiana, mollusque protégé en France, est une espèce inféodée aux cours d’eau des bordures ouest et sud du Massif central. Enfin, deux espèces endémiques du réseau karstique du gouffre de Padirac (qui se jette dans la Dordogne) ont été identifiées au niveau de la résurgence à Montvalent : il s’agit de Bythinella padiraci et Islamia sp. Padirac. Bichain (2005) indique que Bythinella padiraci est en fort déclin.

Commentaires sur la délimitation

Cette zone s’étend de Biars-sur-Cère au Roc. Elle inclut la rivière mais aussi les milieux riverains comme les prairies de fauche, les boisements alluviaux, les îles, les bras morts... Elle joue un rôle évident de corridor écologique, et comprend une remarquable diversité d’habitats et d’espèces, dont la présence est liée en grande partie à la dynamique fluviale de la Dordogne.