Cette vaste zone naturelle aux contours digités met en exergue l’ensemble fonctionnel remarquable formé par la rivière Ardèche, ses milieux annexes ainsi que ses principaux affluents.
Le Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux du Bassin Rhône-Méditerranée-Corse identifie à l’échelle du bassin la basse vallée de l’Ardèche parmi les milieux aquatiques remarquables au fonctionnement peu ou pas altéré. Il rappelle que la basse Ardèche s’inscrivait historiquement dans le domaine vital des poissons migrateurs rhodaniens.
Elle conserve d’ailleurs des frayères fonctionnelles (Alose feinte du Rhône) et fait partie du plan de reconquête des axes de migration, qui souligne à cet égard l’intérêt particulier des axes Beaume-Chassezac et Ardèche-Rhône, avec de plus la présence d’espèces piscicoles rares ou endémiques du bassin rhodanien (Apron).
Cet ensemble fluviatile conserve par ailleurs un patrimoine remarquable tant dans le domaine piscicole (Bouvière, Lamproie de Planer, Toxostome…), qu’en matière de crustacées (Ecrevisse à pattes blanches), d’insectes (très grande richesse en libellules, dont des espèces à répartition méditerranéenne très localisées dans la région comme le Gomphus de Graslin, l’Agrion bleuâtre, l’Agrion blanchâtre ou la Cordulie splendide, Magicienne dentelée, coléoptère Cétoine bleue…), de reptiles et de batraciens (Seps tridactyle, Lézard ocellé, Coronelle lisse, Pélobate cultripède, Rainette méridionale …), mais aussi d’avifaune (Aigle botté et Aigle de Bonelli, Hirondelle rousseline, voire Percnoptère d’Egypte nicheur jusque dans des périodes récentes…), ou de mammifères (nombreux chiroptères dont le Minioptère de Schreibers, Castor d’Europe, Loutre…).
La flore, qui comporte des espèces remarquables (Ciste de Pouzolz, circonscrit à quelques stations du piémont cévenol…) et des plantes endémiques du Massif Central (cas de l’Œillet du granite), présente également un grand intérêt. Celui-ci va de pair avec la présence de types d’habitats naturels remarquables (lits de graviers méditerranéens…).
Enfin, le secteur abrite un karst de type méditerranéen développé dans les calcaires ou les dolomies, caractérisé par des phénomènes de dissolution relativement lents, et une karstification ancienne.
Le peuplement faunistique du karst de l’Ardèche est relativement bien connu, et cette zone est concernée par certains sites de recherche (karst de Foussoubie…). Elle conserve quelques remarquables stations disjointes d’espèces méridionales, dont la plus célèbre est un crustacé dépigmenté connu ici dans deux grottes dont celle de la Dragonnière. Un Amphipode endémique est également connu du seul site de la grotte du Colombier. D’autres espèces (notamment des coléoptères dont l’un est inféodé au milieu souterrain superficiel dans les zones particulièrement humides) sont des endémiques dont la répartition est circonscrite au sud-est du Massif Central.
Enfin, le site est concerné par une nappe phréatique, dont il faut rappeler qu’elle recèle elle-même une faune spécifique. Il s’agit d’un peuplement à base d’invertébrés aquatiques aveugles et dépigmentés. Ainsi, 45% des espèces d’Hydrobiidae (la plus importante famille de mollusques continentaux de France avec une centaine de taxons : Moitessieria, Bythinella…) sont des espèces aquatiques qui peuplent les eaux souterraines et notamment les nappes.
Un crustacé amphipode endémique est par ailleurs connu de la nappe phréatique de l'Ardèche et du Chassezac. La biodiversité est ainsi considérée comme importante dans celle-ci.
Le zonage de type II traduit le bon état de conservation général de cet ensemble, au sein duquel la richesse du patrimoine biologique est retranscrite par plusieurs zones de type I souvent soumises à de fortes interactions, et délimitant les espaces abritant les habitats ou les espèces les plus remarquables (tourbières, landes et prairies humides, escarpements rocheux…).
Il souligne également particulièrement les fonctionnalités naturelles liées à la préservation des populations animales ou végétales, en tant que zone de passages et d’échanges entre les Cévennes et le piémont méditerranéen (et zone d’échange avec le fleuve Rhône pour ce qui concerne la faune piscicole), corridor écologique fluvial, zone d’alimentation ou de reproduction pour de multiples espèces, dont celles précédemment citées. Certaines d’entre-elles exigent un vaste territoire vital (Aigle de Bonelli…).
Le cas des populations d’Apron disséminées sur plusieurs des rivières concernées, et la nécessité d’assurer la pérennité des échanges entre celles-ci, est un exemple qui illustre l’intérêt d’une prise en compte global du fonctionnement d’un tel ensemble.
Le zonage de type II souligne enfin la sensibilité particulière du bassin versant, en rapport avec le maintien des populations locales d’espèces fluviatiles réputées pour leur sensibilité particulière vis à vis de la qualité du milieu (cas de l’Ecrevisse à pattes blanches).
Il met enfin en exergue la sensibilité particulière de la faune souterraine, tributaire des réseaux karstiques et très dépendante de la qualité des eaux provenant là encore du bassin versant. La sur-fréquentation des grottes, le vandalisme des concrétions peuvent de plus rendre le milieu inapte à la vie des espèces souterraines. Les aquifères souterrains sont sensibles aux pollutions accidentelles ou découlant de l'industrialisation, de l'urbanisation et de l'agriculture intensive.
L’ensemble présente par ailleurs un évident intérêt paysager (la basse-Ardèche est citée comme exceptionnelle dans l’inventaire régional des paysages) et géomorphologique (avec, entre autres, le Pont d’Arc cité à l’inventaire des sites géologiques remarquables de la région Rhône-Alpes), mais aussi biogéographique, paléontologique, spéléologique et archéologique (grottes ornées…).