ZNIEFF 820003706
ENSEMBLE FORME PAR LA HAUTE CHAINE DU JURA, LE DEFILE DE FORT-L’ECLUSE, L’ETOURNEL ET LE VUACHE

(n° regional: 0106)

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Ce vaste ensemble naturel concerne la partie la plus accidentée du massif jurassien, autour de ses deux chaînons orientaux situés de part et d’autre de la vallée de la Valserine (les plus élevés, avec notamment les « Monts Jura » proprement dits, culminant à plus de 1700 m d’altitude). Au sud, il se prolonge par l’arête du Vuache et le rebord du bassin genevois.

Il peut paraître de prime abord artificiel d’adjoindre ici les plus hautes chaînes du Jura et leur vis à vis de l’autre côté du Rhône. Il s’agit pourtant d’un même ensemble géologique, qui constitue de plus au niveau biologique une véritable charnière entre l’ensemble alpin et l’arc jurassien.

Le Rhône s’y insinue à la faveur du défilé du Fort l’Ecluse, site migratoire majeur à l’amont duquel s’étend la zone humide remarquable formée par les marais de l’Etournel.

Jusqu'à 650 m d’altitude, on rencontre surtout des forêts de feuillus ainsi qu’à exposition favorable des formations végétales hébergeant d’insolites « colonies méridionales » (Pistachier térébinthe, Erable de Montpellier…) où chante parfois la Grande Cigale. Un étage submontagnard dominé par le Hêtre conduit aux magnifiques futaies de l'étage montagnard où règnent Epicéa, Hêtre, Sapin pectiné et grands érables ; la flore en est également remarquable (Epipogon sans feuille, Fraxinelle blanche…).

Les forêts plus clairsemées de l'étage subalpin, domaine de l’Epicéa, restent l’un des principaux bastions jurassiens du Grand Tétras, de la Chouette de Tengmalm et de la Chevêchette.

Enfin, la calotte sommitale des Monts Jura constitue l'ultime prolongement du milieu alpin. Un certain nombre d'espèces trouvent donc ici la limite septentrionale de leur aire de répartition, d’où des stations botaniques ou ornithologiques exceptionnelles. Parmi les insectes, plusieurs espèces (par exemple parmi les coléoptères) contribuent par ailleurs à distinguer la faune de la haute-chaîne de celles des massifs préalpins, pourtant très proches.

Plus à l’ouest, la vallée de la Valserine et le massif de Champfromier et du Crêt de Chalam conservent des paysages sauvages, largement dominés par la forêt ; les secteurs rocheux y restent néanmoins bien représentés. Le cortège d’espèces montagnardes, qu’il s’agisse de flore ou de faune, y est très complet.

Le secteur abrite enfin un karst de type jurassien. Ce type de karst se développe sur un substrat tabulaire ou plissé ; il est caractérisé par l’abondance des dolines, l’existence de vastes « poljé » dans les synclinaux, la formation de cluses, et le développement de vastes réseaux spéléologiques subhorizontaux.

Le peuplement faunistique du karst jurassien est relativement bien connu. Il apparaît néanmoins moins riche que celui du Vercors en espèces terrestres troglobies (c’est à dire vivant exclusivement dans les cavités souterraines).

Les chauve-souris sont très bien représentées avec la galerie du Pont des Pierres, qui présente un intérêt de niveau international pour le Minioptère de Schreibers en particulier.

Au sein de ce vaste ensemble, des secteurs étendus sont identifiés en ZNIEFF de type I compte tenu de leur riche cortège spécifique ou de l’intérêt des habitats représentés (qu’il s’agisse d’alpages, de forêts, de pelouses sèches, de cavités, de prairies de fauche de montagne ou de zones humides, au fonctionnement généralement fortement interdépendant).

La Haute-chaîne du Jura, le Vuache et le complexe Etournel/Fort l’Ecluse sont par ailleurs inventoriés en tant que Zone Importante pour la Conservation des Oiseaux (ZICO).

Parmi les fonctionnalités assurées par un tel espace naturel, on remarque ici la coexistence de deux « corridors écologiques » perpendiculaires, tous deux d’intérêt majeur :

- celui tracé par le défilé du fleuve, qui matérialise l’axe emprunté par l’avifaune migratrice (et notamment les rapaces) au débouché méridional du plateau suisse,

- celui dessiné par l’échine montagneuse, l’une des liaisons les plus nettes entre les massifs alpin et jurassien. Ainsi, c’est ici que la reconquête spontanée du massif jurassien par l’Aigle royal s’amorce actuellement à partir des Alpes.

Les fonctionnalités naturelles concernent aussi, entre autres :

- s’agissant des zones humides qui y sont disséminées, celles de régulation hydraulique (expansion naturelle des crues, auto-épuration des eaux…), de façon plus générale sur ce site, celles d’étape migratoire et de zone de stationnement (cas du marais de l’Etournel pour l’avifaune), celle de zone d’alimentation ou liée à la reproduction de nombreuses espèces animales (Cerf élaphe, Chamois, chauve-souris, Milan royal, Grand Tétras, Cassenoix moucheté, oiseaux rupicoles dont le Merle de roche, Harle bièvre à l’Etournel, papillon Hermite…), celle de territoire d’espèces d’oiseaux ou de la grande faune exigeant de vastes territoires vitaux (Cerf élaphe, Aigle royal, Lynx d’Europe…).

S’agissant du milieu karstique, la surfréquentation des grottes, le vandalisme des concrétions peuvent de plus rendre le milieu inapte à la vie des espèces souterraines. Les aquifères souterrains sont sensibles aux pollutions accidentelles ou découlant de l'industrialisation, de l'urbanisation et de l'agriculture intensive.

L’intérêt paysager est également manifeste (le défilé de Fort-l’Ecluse est cité à ce titre comme exceptionnel dans l’inventaire régional des paysages, et le panorama offert par la Haute-Chaîne sur un large segment des Alpes occidentales est sans égal), de même que l’intérêt géomorphologique (avec notamment les Pertes de la Valserine citées à l’inventaire des sites géologiques remarquables de la région Rhône-Alpes), voire historique (Fort l’Ecluse, vestiges divers des fluctuations frontalières locales…).