ZNIEFF 930012358
OCRES DE ROUSSILLON

(n° régional : 84100108)

Commentaires généraux

Description de la zone

Dans la partie orientale du bassin d’Apt, entre les monts de Vaucluse et le Calavon, un ensemble de collines siliceuses peu prononcées (de 200 à 400 m) marquent le paysage de Goult à Roussillon. Ce dernier village, très pittoresque et créé au centre même des ocres, est l’exemple frappant de mimétisme existant entre les constructions humaines et l'environnement naturel proche.
Ce site appartient au grand ensemble des ocres de la Provence occidentale. Ces gisements ne sont pas réguliers mais se présentent sous forme de lentilles plus ou moins continues allant de Gignac/Roussillon au sud est au petit massif de Bollène/Uchaux, en passant par Bédoin/Mormoiron au centre. Ce paysage insolite étonne par le contraste entre les couleurs chaudes de la terre, avec toutes les nuances possibles, allant du rouge foncé au jaune d'or, et les verts de la végétation naturelle (pinèdes et chênaies) et des cultures (vergers et vignes). Il exprime la mémoire de l'exploitation par l'homme, intensive durant tout le XIXe siècle et au début du XXe siècle, de ces gisements en carrières à ciel ouvert. Quatorze sites d'extraction existaient alors sur la seule commune de Roussillon (une seulement reste actuellement en activité dans tout le pays d'Apt). Ainsi la roche a été sculptée, d'abord par l'homme, puis par l'érosion naturelle, en parois rocheuses, galeries, cheminées de fées aux couleurs multicolores. Ce sont des sédiments d'origine marine, sables déposés au Crétacé, qui, par lessivage et altération sous un climat de type tropical, ont donné naissance à ces ocres. Silice (quartz), kaolinite (argile) et goethite (oxyde de fer), constituent le socle géologique. Cette composante siliceuse induit une végétation et une flore exceptionnelles, entièrement situées dans l’étage mésoméditerranéen (malgré quelques affinités supraméditerranéennes) et à forte personnalité. Elles contrastent par leur originalité avec celles des terrains calcaires avoisinants.
Les groupements forestiers originels, les chênaies à chêne vert et à chêne pubescent couvrent des surfaces discontinues et très limitées. Certains fonds de vallons hébergent de belles formations de peupliers blancs et le châtaignier y est présent de façon éparse. Ce sont en fait les résineux qui marquent l’espace : pin d'Alep (espèce thermophile méditerranéenne), pin sylvestre (espèce médio européenne) et pin maritime (espèce méditerranéo atlantique), espèces pionnières autrefois favorisées par l'intervention humaine permanente sur ce milieu. Les sous bois sont caractérisés par la dominance quasi exclusive de lande à bruyère à balai et à callune, qu'accompagne occasionnellement sur les sols plus régulièrement humides, le sarothamne. En terrain découvert, ces deux bruyères deviennent envahissantes et constituent un maquis dense. Au sein de ce dernier, des pelouses à thérophytes colonisent de petites clairières isolées. Localement, la présence d'une croûte ferrugineuse indurée introduit un facteur de diversification.

Flore et habitats naturels

Si la nature du substrat contribue à l’originalité floristique de cette zone, il n’en demeure pas moins qu’elle le doit aussi au fait que l’on est ici en présence d’un carrefour biogéographique pour des espèces tempérées, méditerranéennes et atlantiques en limite de leur aire de répartition. Même si, en dehors des formations forestières, c’est la lande à cistes et à bruyères avec en particulier Cistus laurifolius (ciste à feuilles de laurier) qui prédomine, c’est bien dans les micropelouses à annuelles que la flore exprime toute son exceptionnelle biodiversité. Installées sur des sols très filtrants, les espèces qui les composent ont nécessairement un cycle végétatif adapté, souvent très court, afin de coïncider au mieux à la période printanière souvent réduite au cours de laquelle l'eau est présente dans les couches superficielles du sol. Les années séchardes particulièrement défavorables, certaines d'entre elles peuvent même ne pas apparaître. C’est ainsi qu’on a pu y observer, Bassia laniflora (bassie à feuilles duveteuses), Silene portensis (silène de Porto), Phleum arenarium (pléole des sables), à Pierroux, Chrysopogon gryllus (andropogon grillon), à Coustias, Trifolium spumosum (trèfle écumeux), au Collet Rouge ou encore Ophrys  saratoi (ophrys de la Drôme) à Pié Bousquet.

Faune

Ce secteur est doté d’un patrimoine faunistique d’un intérêt élevé. Vingt-quatre espèces animales patrimoniales, dont 4 espèces déterminantes, sont présentes ici. La plupart de ces données sont toutefois anciennes et mériteraient d'être actualisées.
Les oiseaux nicheurs sont représentés par la Bondrée apivore, le Circaète Jean-le-Blanc (1 couple reproducteur), l’Autour des palombes, le Faucon hobereau, la Bécasse des bois, le Petit duc scops, le Grand-duc d’Europe, le Pic noir, le Guêpier d’Europe, la Huppe fasciée, le Pic épeichette, le Bruant proyer, le Cochevis huppée, la Caille des blés, la Fauvette orphée, la Pie grièche méridionale. En l’absence de donnée récente, la reproduction du Torcol fourmilier et du Monticole bleu serait à confirmer.
Chez les chauves-souris, signalons en particulier la présence du Petit Rhinolophe (espèce en régression sensible dans notre région).
L’herpétofaune locale patrimoniale héberge notamment le Pélobate cultripède, le Pélodyte ponctué et le Lézard ocellé dont la présence serait à actualiser.
Les insectes sont représentés par deux espèces de lépidoptères : l’Alexanor (Papilio alexanor), espèce déterminante protégée au niveau européen, rare et dont l’aire de répartition est morcelée, inféodée aux éboulis et pentes rocailleuses jusqu’à 1700 m d’altitude où croît sa plante hôte locale Ptychotis saxifraga et la Laineuse du prunellier (Eriogaster catax), espèce européenne remarquable, de la famille des bombyx (Lasiocampidés), protégée au niveau européen, globalement rare, sensible aux pesticides, inféodée à divers habitats pré forestiers tels que les lisières forestières, bocages et friches et une espèce d’orthoptère : le Criquet des joncs (Chorthippus jucundus), espèce déterminante des milieux humides à végétation herbacée haute fréquentant en plaine les formations à Joncs des Tonneliers, et à plus haute altitude les prairies et bords de ruisseaux extrêmement localisé.

Commentaires sur la délimitation

Répartition et agencement des habitats : les formations boisées, le maquis et les pelouses occupent la totalité de cette zone, permettant ainsi de mieux définir les limites de cette ZNIEFF.

Cette démarche se justifie par le fonctionnement et les relations existant entre ces différents écosystèmes.

La climatologie ainsi que le contexte géologique confortent la définition du contour de la zone.

Les secteurs trop artificialisés (zone urbaine de Roussillon par exemple avec son mitage périphérique excessif) ont été exclus, de même que ceux ne relevant pas de la même unité fonctionnelle (agrosystèmes, etc.).