ZNIEFF 930012406
CRAU

(n° régional : 13157100)

Commentaires généraux

Commentaire général

La plaine de la Crau, épandage naturel de cailloutis grossiers sur un sol plus ou moins argileux, mis en place par l'ancienne Durance, constitue un vaste plan incliné s'abaissant du nord est au sud-ouest. Ce vaste territoire présente un déficit hydrique qui détermine une végétation xérique (en limite du semi-aride dans la partie sud de la zone selon le climagramme d’Emberger). Le pâturage multiséculaire à crée une association végétale spécifique qui est l'une des plus riches de toute la région méditerranéenne : le Coussoul. La Crau est l'unique zone méditerranéenne française présentant de tels biotopes steppiques, s'apparentant à un reg d’Afrique du Nord. L’irrigation a permis, sur les marges de la plaine, l’installation de prairies productrice d’un « foin de Crau » réputé.

Flore et habitats naturels

Végétation herbacée steppique comparable aux formations similaires des montagnes d’Espagne ou d’Afrique du Nord, dont la composition floristique relève d’une interaction entre le sol, le climat et le pâturage extensif qui s’exerce depuis très longtemps. La steppe à Asphodèle (Asphodelus ayardii) et Stipe (Stipa capillata) est très bien développée et constitue en Crau sèche une association particulière (Asphodeletum fistulosi). Nombreuses espèces rares de milieux secs comme Stipella capensis, Asphodelus ayardii, Helianthemum marifolium et H. ledifolium, Kengia serotina, Taeniatherum caput medusae. Des variations floristiques existent entre le nord (plus humide) et le sud. Des “Coussous” particuliers au nord-est, vers le domaine du Luquier, avec une steppe à Brachypode rameux et Asphodèle, et un faciès à Lavandula latifolia.

Dans cette steppe à physionomie plus ou moins homogène apparaissent sur des surfaces d’une végétation plus basse à Crassula tillaea (pelouses acidophiles à Tuberaria guttata formant des tonsures).

Les pelouses à Brachypodium phoenicoides se développent sur sols assez profonds. Par endroits, elles présentent des faciès à graminées très dense avec Aegilops ovata (bons pâturages). Présence de groupements nitrophiles à Carduacée autour des bergeries et de pelouses à trèfle souterrain et de peuplements à Chêne kermès (Quercetum cocciferae) avec un faciès à Ciste (Cistus monspeliensis). Les zones humides interstitielles présentent elles aussi un intérêt majeur avec la Gratiole (Gratiola officinalis), la Salicaire à trois bractées (Lythrum tribracteatum). Les puits creusés par l’homme pour abreuver les animaux et les populations, montrent parfois de magnifiques populations de fougères, qui trouvent ici humidité et températures clémentes toute l’année. L’espèce la plus remarquable est la Scolopendre sagitté (Asplenium sagittatum), espèce très rare en France. Cette flore très particulière est malheureusement menacée par la fermeture, le comblement des puits.

Faune

La Crau représente une zone d’intérêt faunistique exceptionnel avec plus de 30 espèces déterminantes et plus de 40 espèces remarquables.

Du côté des mammifères, s’y rencontre le Grand Rhinolophe espèce déterminante et menacée, en déclin dans la région, plutôt thermophile chassant dans les bocages et les paysages riches en broussailles, pelouses, pâtures et prairies, souvent proches de l’eau courante ou stagnante, de grottes et/ou d’habitations. Le Minioptère de Schreibers (Miniopterus schreibersii) a été capté en déplacement sur la zone, c’est une espèce déterminante typiquement méditerranéenne et strictement cavernicole. A signaler aussi la Pipistrelle de Nathusius (Pipistrellus nathusii) et le Vespère de Savi (Hypsugo savii) ainsi que la Loutre (Lutra lutra) et le Castor (Castor fiber), en progression après de nombreuses années d’absence.

La Crau est l’unique site français de nidification régulière du Ganga cata (Pterocles alchata) avec probablement moins de 100 couples. Elle abrite également une partie importante des effectifs reproducteurs français de plusieurs espèces animales rares et menacées. Du côté de l’avifaune, citons par exemple le Faucon crécerellette (Falco naumanni) environ 200 couples, l’Outarde canepetière (Tetrax tetrax) forte de 750 à 1 300 mâles chanteurs, le Rollier d’Europe (Coracias garrulus) avec 100 à 130 couples, et l’Alouette calandre (Melanocorypha clandra) estimée entre 130 et 160 couples en 2010. La Pie grièche à tête rousse (Lanius senator) s’y reproduit de manière très anecdotique. Chez les échassiers quelques couples de Cigogne blanche (Ciconia ciconia) se reproduisent de manière régulière. Les zones de marais abritent, le Blongios nain (Ixobrychus minutus), le Héron pourpré (Ardea purpurea), la Grande aigrette (Ardea alba), le Butor étoilé (Botaurus stellaris) et l’Ibis falcinelle (Plegadis falcinellus). Parmi les espèces animales remarquables présentes avec des effectifs intéressants, citons notamment pour l’avifaune le Coucou geai (Clamator glandarius), la Chevêche d’Athéna (Athene noctua), l’Œdicnème criard (Burhinus oedicnemus), le Guêpier d’Europe (Merops apiaster), la Huppe fasciée (Upupa epops), l’Alouette calandrelle (Calandrella brachydactyla), la Pie grièche méridionale (Lanius meridionalis).

Pour les reptiles, plusieurs espèces remarquables comme le Psammodrome d'Edwards (Psammodromus edwarsianus), le Lézard ocellé (Timon lepidus), le Seps strié (Chalcides striatus), la Couleuvre de Montpellier (Malpolon monspessulanus), la Couleuvre à échelons (Zamenis scalaris) et la Cistude d’Europe (Emys orbicularis), et pour les amphibiens la Grenouille de Pérez (Pelophylax perezi), le Pélodyte ponctué (Pelodytes punctatus) et le Triton palmé (Lissotriton helveticus).

Dans les pelouses steppiques le cortège d’arthropodes est peu varié mais d’un intérêt patrimonial majeur, composé de nombreuses espèces spécialisées. Le peuplement d’orthoptères est unique grâce à la présence du Criquet rhodanien (Prionotropis rhodanica), strictement endémique de la Crau sèche et menacé de disparition. Chez les coléoptères, citons le Bupreste de Crau (Acmaeoderella cyanipennis perroti), endémique des Bouches du Rhône mais dont les populations sont concentrées sur la Crau, étroitement liées à sa plante hôte (Onopordon illyricum, peut être aussi O. tauricum). Quatre autres espèces déterminantes d’insectes sont signalées de la Crau sèche, soit l’abeille sauvage Anthophora fulvodimidiata, le diplopode (« Mille pattes ») Ommatoiulus sabulosus, l’Ascalaphon du midi (Deleproctophylla dusmeti), espèce déterminante de neuroptère (fourmilions et ascalaphes) qui chasse ses proies en vol, l’Hespérie de la ballote (Carcharodus baeticus), papillon de jour en régression lié aux pelouses sèches pâturées où croît sa plante hôte locale (Marrube commun Marrubium vulgare), l’écaille rose (Arctia festiva).S’ajoutent de nombreuses espèces remarquables, dont la plupart sont rares ou localisées en dehors de la Crau, constituant un bastion pour celles-ci. Chez les orthoptères, citons l’Œdipode occitane (Oedipoda charpentieri), le Sténobothre occitan (Stenobothrus festivus) et le Criquet des friches (Omocestus petraeus).

Les autres espèces appartenant à ce cortège sont la Mante terrestre (Geomantis larvoides), caractérisée par son déplacement vif en courant sur le sol, la Lycose Lycosa tarantula, la Scolopendre ceinturée (Scolopendra cingulata), le Grand fourmilion (Palpares libelluloides), et le Louvet (Hyponephele lupina), papillon de jour méditerranéo asiatique très localisé et globalement rare.

Quant à l’Hermite (Chazara briseis), espèce remarquable en régression, ce papillon semble avoir disparu de la Crau sèche alors qu’il y était commun jusque dans la fin des années 80.

Dans les zones humides, les peuplements d’insectes comportent aussi un très grand intérêt. Dans les milieux à eaux stagnantes, signalons deux espèces déterminantes, le Sympétrum déprimé (Sympetrum depressiusculum), libellule en régression spécialisée sur les pièces d’eau temporaires ou à niveau fluctuant et le Carabe à chaînons (Carabus alysidotus), coléoptère rare et en régression qui affectionne principalement les marais littoraux. Elles sont accompagnées par plusieurs espèces remarquables, l’Agrion joli (Coenagrion pulchellum), le Criquet tricolre (Paracinema tricolor bisignata), criquet méditerranéen hygrophile, et la Decticelle des ruisseaux (Roeseliana azami = Metrioptera fedtschenkoi azami), sauterelle hygrophile endémique du sud-est de la France.

Dans les cours d’eau naturels et artificiels (canaux permanents) existe un cortège diversifié d’odonates (libellules et demoiselles) abritant plusieurs espèces patrimoniales, dont le Gomphe similaire (Gomphus similimus), une très importante population d’Agrion de Mercure (Coenagrion mercuriale) et l’Agrion bleuissant (Coenagrion caerulescens), espèce méditerranéenne déterminante globalement rare, localisée et menacée en France.
En bordure des zones humides, deux autres espèces remarquables sont signalées, la Diane (Zerynthia polyxena), papillon méditerranéo asiatique des prairies humides et bordures alluviales où croît sa plante hôte locale (Aristoloche à feuilles rondes Aristolochia rotunda), et l’Ascalaphe loriot (Libelloides ictericus), neuroptère qui affectionne les surfaces ouvertes avec une strate herbacée dense.

Commentaires sur la délimitation

Limites fondées sur la répartition des habitats et des populations d’éléments patrimoniaux de faune et de flore.