Description de la zone
Belle zone de montagne centrée sur l’étage montagnard, se partageant entre le bassin de la Bévéra à l’est et le bassin de la Vésubie à l’ouest. Elle est dominée par des affleurements de flysch gréseux dans sa partie centrale, et est bordée principalement à l’ouest et au nord de calcaires et marno calcaires. Ce site grandiose, majoritairement forestier, s’étage du supraméditerranéen au montagnard, avec des formations variées : ostryaies, chênaies pubescentes, hêtraies et sapinières.
Flore et habitats naturels
Rare dans les Alpes Maritimes orientales, le hêtre compose des peuplements purs ou en association avec le sapin. La sapinière neutrophile du Troschiscantho Abietetum domine l’étage montagnard aux ubacs. Localement, le faciès à hêtre est présent (secteur de la Baisse de Patronel). Très localisée sur pente gréseuse, s’observe la hêtraie acidophile à luzules (Luzulo pedemontanae Fagetum sylvaticae), habitat forestier répandu dans le Piémont italien, mais très rare dans les Alpes Maritimes. Sur roches acides se rencontre également la pessière sapinière du Phyteumo ovati – Abietetum albae (=Abietetum albae). Les différentes sapinières abritent une bryoflore riche, avec notamment les mousses Buxbaumia viridis et Orthotrichum rogeri. Le versant nord du vallon encaissé de la Planchette est entaillé par des ravins colonisés par des forêts à érables et tilleul du Tilio Acerion qui abritent des espèces patrimoniales comme Asplenium scolopendrium, Polystichum setiferum, Lunaria rediviva. L’étage supraméditerranéen est dominé par des ostryaies du Carpinion orientalis dans les ubacs, et des bois de chêne pubescent d’affinité orientale sur les pentes d‘adret. Une belle châtaigneraie est présente sur grès dans la forêt de la Maïris.
Faune
La forêt de Turini abrite 41 espèces animales patrimoniales dont 12 sont déterminantes.
Le peuplement mammalogique est caractérisé par la présence du Loup (Canis lupus), carnivore déterminant, rare et localisé mais aujourd’hui à nouveau présent et en expansion en région P.A.C.A. depuis au moins 1992 après avoir été exterminé en France, dont les populations provenço alpines correspondent à la sous espèce italienne, du Cerf élaphe (Cervus elaphus), grand ruminant remarquable, aujourd’hui plutôt forestier, en expansion géographique et numérique en France et en région P.A.C.A., se rencontrant jusqu’à 2 500 m d’altitude, localement présent avec un petit noyau de population et de la Taupe aveugle (Talpa caeca), espèce méditerranéo montagnarde déterminante, très rare et extrêmement localisée. Se rencontre également plusieurs espèces de chauves-souris telles que le Petit Rhinolophe (Rhinolophus hipposideros), espèce remarquable en régression marquée, plutôt thermophile et anthropophile, préférant les milieux boisés clairs sur substrat calcaire qui alternent avec des espaces dégagés, assez rare en montagne mais présent jusqu’à 2 000 m d’altitude, la Noctule de Leisler (Nyctalus leisleri), espèce remarquable arboricole et forestière, relativement fréquente, présente jusqu’à 2 200 m d’altitude.
Chez les oiseaux nicheurs, ou probablement nicheurs, citons la présence de trois espèces déterminantes de rapace : la Chouette de Tengmalm (Aegolius funereus), espèce qui affectionne particulièrement les forêts d'épicéas et les boisements mixtes de pins, de bouleaux et de peupliers où les conifères sont dominants, la Chevêchette d'Europe (Glaucidium passerinum), espèce euro-sibérienne rare de la taïga et des forêts claires de résineux dans les Alpes (mélézins, sapinières, pessières, cembraies) et le Faucon pèlerin (Falco peregrinus), espèce rupicole déterminante, rare et localisée en France et en région P.A.C.A. mais en augmentation. Ces oiseaux sont accompagnés de plusieurs espèces remarquables : Bondrée apivore (Pernis apivorus), rapace forestier d’affinité médioeuropéenne, recherchant les forêts claires de feuillus et les mosaïques de milieux boisés et de milieux ouverts, Circaète Jean-le-Blanc (Circaetus gallicus), rapace d’affinité méridionale, au régime alimentaire ophiophage, Autour des palombes (Accipiter gentilis), rapace forestier d’affinité médioeuropéenne, affectionnant les grands massifs forestiers avec des clairières jusqu’à 2 000 m d’altitude, Tétras lyre (Tetrao tetrix), espèce assez rare et en léger déclin, d’affinité montagnarde, typique des écotones entre forêts (lisières), prairies, pelouses et landes, entre 1 100 et 2 500 m d’altitude, Perdrix bartavelle (Alectoris graeca), espèce méridionale de montagne recherchant les versants montagneux ouverts et ensoleillés avec des barres rocheuses entre 1 100 et 2 900 m d’altitude, semble-t-il en régression, Grand-duc d’Europe (Bubo bubo), espèce rupicole, qui se nourrit préférentiellement dans les terrains dégagés proches des falaises et autres escarpements rocheux où il niche généralement, jusqu’à 2 600 m d’altitude, Monticole bleu (Monticola solitarius), espèce rupicole d’affinité méditerranéenne, se rencontrant dans les zones de falaises et d’escarpements rocheux, les gorges, les ruines, les garrigues claires rocailleuses, jusqu’à 1 600 m d’altitude, Pie grièche écorcheur (Lanius collurio), passereau de milieux ouverts et semi ouverts, en régression à l’heure actuelle et Bruant fou (Emberiza cia), passereau d’affinité à la fois méridionale et montagnarde, propre aux milieux ouverts et rocailleux, secs et ensoleillés, de 300 à 2 600 m d’altitude.
Notons également la présence du Spélerpès de Strinatii (Speleomantes strinatii), également appelé Hydromante, espèce remarquable peu abondante à répartition très localisée en PACA, endémique franco-italien présent en France uniquement dans deux départements (Alpes-Maritimes essentiellement et Alpes-de-Haute-Provence), recherchant les milieux humides, frais et ombragés (forêts, grottes, cavernes, éboulis) entre 0 et 2 400 m d’altitude et de la Couleuvre verte et jaune (Hierophis viridiflavus), espèce remarquable à répartition majoritairement Franco-Italienne qui privilégie les fourrés et les friches.Les arthropodes d’intérêt patrimonial sont représentés par plusieurs cortèges.
La forêt de Turini présente également un très fort intérêt du côté des coléoptères. Elle abrite cinq espèces déterminantes, le Phénops de Knotek (Phaenops knotecki ochsi), sous espèce de Buprestidés, vivant préférentiellement sur les sapins et les épicéas abattus, rare et subendémique de trois pays européens (France, Italie, Autriche), qui ne se rencontre en France que dans la forêt de Turini, et qui se trouve menacée par la déforestation et les incendies de forêt, le Carabique Duvalius roberti, espèce endémique des Alpes-Maritimes où elle se localise exclusivement à la forêt de Turini, habitant préférentiellement les forêts sur substrat argilo schisteux acide entre 1 400 et 1 700 m d’altitude et le Carabique Sphodropsis ghilianii bucheti, sous espèce endémique des Alpes-Maritimes, présente dans les forêts de montagne, sous les grosses pierres et dans les grottes, l'Eucnemidae Epiphanis cornutus, espèce à large répartition néarctique mais très rare et localisée, se développant dans la carie rouge des troncs décomposés de conifères des forêts à caractère naturel et le Lyce fâché (Lopheros rubens), espèce rare d'Europe centrale et occidentale, vivant dans la carie rouge des conifères et feuillus très décomposés dans les forêts matures, connue en PACA seulement dans le Mercantour et l'Ubaye. Elles sont accompagnées par six espèces remarquables, la Callidie bronzée (Callidium aeneum), Cerambycidae eurasiatique boréo-alpine liée aux conifères, principalement dans les Alpes et le Jura en France où elle n'est jamais abondante, Evodinus clathratus, espèce à répartition européenne vivant dans le bois en décomposition des arbres de montagne, présente en France seulement dans les Alpes où elle est rarement abondante, Stictoleptura simplonica, espèce des forêts de montagne vivant dans les branches mortes de conifères et de feuillus, endémique alpine en Suisse, Italie et France, où elle ne se trouve que dans le Mercantour et le Queyras, Tetrops gilvipes, espèce eurocaucasienne se trouvant seulement en PACA à l'échelle nationale, dans quelques vallées alpines où elle se nourrit dans les branches mortes de feuillus, le Salpingidae Colposis mutilatus, espèce eurosibérienne des forêts de conifères d'altitude, où elle vit sur les branches mortes en se nourrissant de champignons et de pucerons, présente en France uniquement dans le sud-est et en grande partie en PACA, le Mycetophagidae Entoxylon abeillei, espèce endémique du sud-est de la France et du nord de l'Italie, fongivore sur les champignons lignicoles des branches mortes.
Il est important de signaler la présence ancienne de plusieurs espèces de coléoptères déterminants, qui mériteraient des prospections ciblées : Athous frigidus, Athous puncticollis, Bryaxis liguricus, Carabus violaceus picenus, Molops ovipennis medius, Trechus maritimus et Laemostenus obtusus.Le cortège des lépidoptères est caractérisé par la présence d’une espèce déterminante, la Vanesse des pariétaires (Polygonia egea), espèce en forte régression, ne subsistant en France plus que dans les Alpes-Maritimes à l’est du fleuve Var, accompagnée de plusieurs espèces remarquables : l'Azuré des orpins (Scolitantides orion), espèce à aire de distribution morcelée, inféodé aux milieux rocheux où croissent les plantes nourricières de sa chenille, des orpins (Sedum), l’Azuré du Serpolet (Maculinea arion), espèce protégée au niveau européen, inféodée aux bois clairs et ensoleillés, pelouses et friches sèches avec présence de ses plantes hôtes, des serpolets et de sa principale fourmi hôte, Myrmica sabuleti, jusqu’à 2 400 m d’altitude, l’Hermite (Chazara briseis), en forte régression, lié aux milieux très ouverts et secs où croissent ses plantes hôtes, plusieurs graminées (fétuques et brachypodes), la Zygène des bugranes (Zygaena hilaris), d'affinité ibéro provençale, liée aux pelouses et friches sèches où croît sa plante hôte (Bugrane jaune Ononis natrix), la Turquoise de la Sanguinaire (Adscita albanica = Adscita dujardini), Zygaenidae ne se trouvant en France que dans les Alpes Maritimes et le Procris de la vigne (Theresimima ampellophaga), espèce d’affinité méditerranéenne, devenue rare suite à sa forte régression probablement due à l’utilisation de pesticides sur sa plante hôte la vigne (Vitis vinifera). A signaler également la présence de deux espèces déterminantes qui seraient à rechercher dans le secteur : Zygaena brizae et Papilio alexanor.
Enfin, un orthoptère déterminant a été inventorié : le Criquet de la Bastide (Chorthippus saulcyi daimei), sous-espèce endémique de Haute-Provence et des Alpes du sud, peuplant les landes et pelouses des versants montagneux.
La ZNIEFF intègre le massif montagneux dominé par la cime de la Calamette. La zone s’étend de la Bollène Vésubie au Moulinet en prenant en compte le massif de la Forêt de Turini.