Description de la zone
Il s’agit d’une zone de haute montagne comprise entre 1 500 et 2 700 m d’altitude. Les pâturages et les sommets rocheux succèdent aux forêts. C’est une succession de paysages grandioses où l’un des éléments remarquables est un système de karst d’altitude qui s’élève jusqu’à près de 2 650 m Cette région abrite la plus grande densité européenne de gouffres et de glaciers souterrains. Ce massif fait partie d’une entité naturelle qui s’étend largement sur le territoire italien où il bénéficie d’un statut de protection « Réserve naturelle de la Alta Valle Pesio ».
L’extraordinaire richesse biologique est due à la conjugaison de plusieurs facteurs : la région est au carrefour de plusieurs influences biogéographiques, arctique, alpine, euro sibérienne, eurasiatique, méditerranéenne. De nombreuses espèces endémiques paléogènes ont pu se maintenir à la faveur de condition écologiques locales favorables malgré les glaciations.Flore et habitats naturels
Tous ces éléments contribuent au fait qu’il existe un taux d‘endémisme très élevé pour les espèces et les groupements végétaux. Le modelé karstique d’altitude permet la coexistence dans un espace restreint de communautés végétales d’écologie variée : les pelouses sèches dominent le paysage avec plusieurs communautés du Seslerion caeruleae, du Mesobromion erecti, de l’Ononidion cenisiae et de l’Oxytropo Elynion. Sur dalles calcaires et corniches se rencontre une variante appauvrie du Caricetum firmae, association alpine arrivant en limite d’aire occidentale, avec la rare laîche mucronée (Carex mucronata) et l’orchis des Alpes (Chamorchis alpina). Les nombreuses dépressions et dolines, sont occupées par une végétation de combe à neige basophile se rattachant à l’association du Salicetum retuso reticulatae, avec la rare renoncule alpestre (Ranunculus alpestris). Les rochers, vires et falaises abritent notamment la raiponce à feuilles en cœur (Phyteuma cordatum), le silène campanule (Silene campanula) et l'hélianthème à lunules (Helianthemum lunulatum), endémiques des Alpes ligures. C'est également ici la seule localité française de la Doradille découpée (Asplenium fissum) qui abonde dans tout le karst.
Faune
Cette zone abrite un peuplement faunistique d’un intérêt très élevé avec 42 espèces animales patrimoniales dont 27 sont déterminantes.
Au niveau du cortège de mammifères, les espèces patrimoniales comprennent le Loup (Canis lupus), carnivore déterminant, rare et localisé mais aujourd’hui à nouveau présent et en expansion dans la région depuis au moins 1992 après avoir été exterminé en France et dont les populations provenço-alpines correspondent à la sous-espèce italienne, et le Campagnol de Fatio (Microtus multiplex) ou Campagnol souterrain des Alpes, petit rongeur remarquable, bien adaptée aux conditions écologiques difficiles de montagne, que l’on rencontre aussi bien dans les prairies et les pelouses alpines que dans les forêts de mélèzes, les cembraies, les prés bois, et les milieux ouverts des basses vallées, jusqu’à 2 000 m d’altitude.
En ce qui concerne le peuplement avien nicheur ou probablement nicheur, il faut citer la présence du Faucon pèlerin (Falco peregrinus), rapace diurne rupestre assez rare et déterminant mais aujourd’hui en augmentation en tant que nicheur accompagné de plusieurs espèces remarquables : Aigle royal (Aquila chrisaetos), prestigieux rapace diurne actuellement en légère augmentation après avoir fortement régressé, occupant préférentiellement les régions accidentées avec zones rocheuses et étendues forestières, Lagopède alpin (Lagopus mutus helveticus), espèce menacée et en régression, d’origine arctique, relique de l’époque glaciaire dans les Alpes, où elle occupe les reliefs de croupes et de crêtes, fréquemment enneigées et balayées par le vent entre 1 800 et 3 700 m d’altitude, Tétras lyre (Tetrao tetrix), espèce assez rare et en léger déclin, d’affinité montagnarde, typique des écotones entre forêts (lisières), prairies, pelouses et landes, entre 1 100 et 2 500 m d’altitude, Perdrix bartavelle (Alectoris graeca), espèce méridionale de montagne recherchant les versants montagneux ouverts et ensoleillés avec des barres rocheuses entre 1 100 et 2 900 m d’altitude, semble-t-il en régression, le Monticole de Roche (Monticola saxatilis), la Niverolle alpine (Montifringilla nivalis), le Bruant ortolan (Emberiza hortulana) et le Crave à bec rouge (Pyrrhocorax pyrrhocorax).
En ce qui concerne les nombreux arthropodes patrimoniaux, mentionnons tout d’abord la présence du Mille pattes Plectogona vignai, espèce cavernicole déterminante de Diplopodes Craspédosomatidés, en limite d’aire dans la région, endémique franco italienne se rencontrant en France uniquement dans le département des Alpes-Maritimes, et de l’Aselle Buddelundiella zimmeri zimmeri, sous espèce remarquable de Crustacés Buddélundiellidés, endémique du département des Alpes-Maritimes, autrefois largement répandue dans ce département mais aujourd’hui localisée à quelques stations seulement, dans les ravins humides sous les pierres.
Les peuplements de coléoptères présentent un fort enjeu avec la présence de nombreuses espèces endémiques, toutes déterminantes. Citons le carabique Scotodipnus hirtus, espèce menacée d’extinction, correspondant à un endogé endémique franco-italien d’affinité montagnarde, exclusivement localisé en France dans le département des Alpes-Maritimes, vivant sous les pierres ou sous les couches de feuilles mortes profondément enfoncées dans le sol, le Cychre Cychrus angulicollis, espèce rare et gravement menacée d’extinction, en limite d’aire dans la région, localisée en France exclusivement au département des Alpes-Maritimes, correspondant à un endémique franco-italien, habitant surtout les massifs calcaires entre 2 000 et 2 600 m d’altitude, dans les éboulis et les amoncellements de blocs rocheux, à l’entrée des gouffres et des grottes, sous les détritus, le Carabique Sphodropsis ghilianii bucheti, sous espèce de Carabidés, endémique du département des Alpes Maritimes, présente dans les forêts de montagne, sous les grosses pierres et dans les grottes, le Ptérostique dilaté (Pterostichus truncatus dilatatus), Carabidés, endémique franco-italien, d’affinité montagnarde, localisé en France au département des Alpes-Maritimes où on le trouve dans la zone alpine et les forêts supérieures, le Carabique Amara lantoscana, Carabidés d’affinité montagnarde, endémique du département des Alpes-Maritimes où on le rencontre dans les zones presque dépourvues de végétation aux alentours de 2 000 m d’altitude, sur substrat granitique, le Carabique Bembidion decorum ticinense sous-espèce endémique des départements du Var et des Alpes-Maritimes, le Carabique Duvalius vaccai, d’affinité montagnarde, endémique du département des Alpes-Maritimes, cavernicole habitant dans quelques grottes et endogé vivant au contact de petits ruisseaux, le Carabique Agostinia launi, espèce cavernicole, endémique franco italienne, d’affinité montagnarde, exclusivement localisée en France dans le département des Alpes-Maritimes, le Carabique Pterostichus nicaeensis, endémique franco-ligure d’affinité montagnarde, se rencontrant en France uniquement dans le département des Alpes-Maritimes où il est très localisé à quelques stations de superficie réduite, généralement situées entre 800 et 1 800 m d’altitude à proximité de suintements ou de faibles sources sous les pierres recouvrant du terreau très humide, et le Carabique Pterostichus duratii, espèce aptère en limite d’aire dans la région où elle est exclusivement localisée au département des Alpes Maritimes, correspondant à un orophile endémique franco ligure, se rencontrant dans les forêts de montagne, sous les pierres. Ces espèces sont accompagnées de trois autres coléoptères déterminants : le Saphane brun (Saphanus piceus), Cerambycidae rare, localisée et en limite d’aire sud occidentale dans la région, d’affinité montagnarde et liée aux aulnaies et aux forêts de conifères et dont la présence mériterait d’être actualisée, le Charançon Dichotrachelus doderoi, espèce d’affinité montagnarde, rare et endémique du département des Alpes-Maritimes et le Staphylinidae Tachinus manueli.
Dans les milieux ouverts, se trouve un peuplement très diversifié de lépidoptères avec la présence de sept espèces déterminantes : le Ptérophore Oxyptilus lantoscanus, la Zygène de la Vésubie (Zygaena brizae), espèce protégée en France, rare et localisée, qui fréquente les pelouses à cirses et dont la sous-espèce vesubiana est endémique franco-italienne des Alpes du Sud, l’Hespérie rhétique (Pyrgus warrenensis), espèce très rare et localisée, endémique des Alpes, occupant certaines pelouses subalpines et alpines, l’Alexanor (Papilio alexanor), espèce protégée au niveau européen, rare et dont l’aire de répartition est morcelée, inféodée aux éboulis et pentes rocailleuses jusqu’à 1 700 m d’altitude où croît sa plante hôte locale Ptychotis saxifraga, le Semi Apollon (Parnassius mnemosyne), espèce protégée au niveau européen, d'affinité montagnarde et liée à la présence de corydales, qui fréquente les pelouses et les lisières forestières, surtout entre 1 000 et 2 000 m d’altitude, le Nacré des Balkans (Boloria graeca tendensis), espèce à distribution fractionnée, des Balkans et des Alpes occidentales, dont la sous-espèce tendensis est endémique franco-italienne des Alpes du Sud, dans les pelouses subalpines rases et sèches à Violette éperonnée (Viola calcarata) et le Moiré piémontais (Erebia aethiopellus), espèce endémique franco-italienne cantonnée aux Alpes occidentales, inféodée aux pelouses alpines sèches à Fétuque paniculée (Festuca paniculata). Ces papillons sont accompagnées de deux espèces remarquables : l’Apollon (Parnassius apollo), espèce d'affinité montagnarde, protégée au niveau européen, peuplant les rocailles, pelouses et éboulis à Crassulacées et Saxifragacées entre 500 et 2 500 m d’altitude et l’Azuré du Serpolet (Phengaris arion), espèce protégée au niveau européen, inféodée aux bois clairs et ensoleillés, pelouses et friches sèches avec présence de ses plantes hôtes, des serpolets et de sa principale fourmi hôte, Myrmica sabuleti, jusqu’à 2 400 m d’altitude.
Chez les orthoptères, il faut citer la présence de deux espèces déterminantes, l'Analote ligure (Anonconotus ligustinus), espèce déterminante de sauterelle aux ailes atrophiées, présente en France uniquement dans les Alpes-Maritimes au tour du col de Tende et le Criquet de la Bastide (Chorthippus saulcyi daimei), sous-espèce endémique de Haute-Provence et des Alpes du Sud, peuplant les landes et pelouses des versants montagneux, accompagnées par le Sténobothre alpin (Stenobothrus rubicundulus), espèce remarquable présente dans la Péninsule balkanique et dans les Alpes qui affectionne surtout les milieux secs et pierreux.
Une espèce d’odonate déterminante est également présente dans cette zone : la Cordulie alpestre (Somatochlora alpestris), espèce très rare et menacée en Provence-Alpes-Côte d'Azur, d'affinité boréo-alpine, dont la larve se développe dans les marais et tourbières d'altitude.
Du côté des mollusques citons deux espèces d’escargot de la famille des Helicidae, Chilostoma frigidum liguricum, espèce déterminante, et Chilostoma zonatum millieri, sous espèce remarquable endémique franco-italien très rare et localisée, de répartition sud alpine occidentale, qui n’est connue que de 4 stations au monde, où il vit sur les rochers et dans les éboulis frais, souvent sur substrat acide, entre 1 800 et 2 500 m d’altitude.
La ZNIEFF intègre la chaîne frontière à l’extrême pointe nord est des Alpes-Maritimes, du Col de Tende à la Cime de Pertègue.