ZNIEFF 930012774
FORÊTS ET CRÊTES DE RISOUL ET DE SALUCES - PIC DU CLOCHER - ADRET DE CRÉVOUX

(n° régional : 05109100)

Commentaires généraux

Description

Etabli dans la partie est du département des Hautes Alpes, dans la région du Guillestrois, en rive gauche de la haute Durance, le site s’étend entre le massif des Ecrins à l'ouest et le massif du Queyras à l'est.
Ce site montagneux s'étend sur un substrat dominé par les flyschs, avec localement des affleurements cristallins et de gypse. Les anciennes alluvions glaciaires recouvrent sur de vastes surfaces ces formations géologiques.
Localisé dans la zone biogéographique intra alpine du Briançonnais Queyras, il est soumis à un climat montagnard de type continental marqué, caractérisé par un ensoleillement important, des précipitations annuelles moyennes relativement faibles et un contraste saisonnier marqué.
Débutant à l’étage de végétation montagnard à environ 880 m d'altitude, ce site qui longe la vallée de la Durance, culmine à 2746 m près du Pic de Chabrières. Il est inclus essentiellement dans les étages de végétation subalpin et alpin.
Dominé par des crêtes ébouleuses et des falaises abruptes, il est caractérisé par de vastes mélèzins qui couvrent les versants en ubac et par des étendues herbeuses d’alpages, pelouses alpines et prairies.

Milieux remarquables

Six habitats déterminants sont représentés sur le site. Ce sont des formations steppiques, des éboulis et des milieux ponctuels liés à des sources minérales ou à des petits lacs. Il s’agit : des pelouses steppiques sub continentales [all. phyto. Stipo capillatae Poion carniolicae (34.31)], des éboulis calcaires fins, représentés notamment par des formations à Liondent des montagnes (Leontodon montanus) et à Bérardie laineuse (Berardia subacaulis) [assoc. phyto. Leontodontetum montani (61.2321) et Berardietum lanuginosi (61.2322)], des formations herbacées de prés salés continentaux (15.41), parmi les très rares existant en France intérieure, alors que ces milieux se rencontrent habituellement sur le littoral, des herbiers aquatiques à feuilles flottantes de Nénuphar blanc (Nymphaea alba) [all. phyto. Nymphaeion albae (22.431)], dont il s’agit de la seule localité du département des Hautes Alpes et l’une des rares de la région Provence Alpes Côte d’Azur, et des sources pétrifiantes engendrant des concrétions spectaculaires de tuf [all. phyto. Riccardio pinguis Eucladion verticillati (54.12)].
Quatorze autres habitats remarquables sont présents : les saulaies arctico alpines des bas marais et bords de ruisseaux à Saule arbrisseau (Salix foetida) [all. phyto. Salicion lapponi glaucosericeae (31.6212)], les saulaies arctico alpines des pentes rocheuses froides et humides à Saule soyeux (Salix glaucosericea) [all. phyto. Salicion helveticae (31.6211)], les landes épineuses oro méditerranéennes à Astragale toujours verte (Astragalus sempervirens) [all. phyto. Ononidion cenisiae (31.7E)], les pelouses calcicoles alpines et subalpines (36.43), les mégaphorbiaies montagnardes et subalpines, formations opulentes de hautes herbes des combes humides et fraîches [all. phyto. Adenostylion alliariae et Calamagrostion villosae (37.8)], les prairies de fauche d’altitude [all. phyto. Triseto flavescentis Polygonion bistortae (38.3)], les mélèzins cembraies ou forêts de Mélèze (Larix decidua) et de Pin cembrot (Pinus cembra) (42.3), les pinèdes de Pin sylvestre (Pinus sylvestris) [all. phyto. Ononido rotundifolii Pinion sylvestris (42.53) et Deschampsio flexuosae Pinion sylvestris (42.55)], les bas marais alcalins à Laîche de Davall (Carex davalliana) [all. phyto. Caricion davallianae (54.23)], les bas marais acides [all. phyto. Caricion fuscae (54.4)], les éboulis thermophiles à Calamagrostis argenté (Achnatherum calamagrostis) [all. phyto. Stipion calamagrostis (61.3)], les éboulis calcaires alpins [all. phyto. Thlaspion rotundifolii (61.2)] et les formations végétales des rochers et falaises calcaires [all. phyto. Potentillion caulescentis et Violo biflorae Cystopteridion fragilis (62.15)] et siliceuses [all. phyto. Androsacion vandellii et Asplenion septentrionalis (62.2)].
Par ailleurs plusieurs autres habitats présentant un intérêt écologique important sont présents : les prairies sèches méso xérophiles à Brome dressé (Bromus erectus) [all. phyto. Mesobromion erecti (34.3265)], et un complexe de zones humides associant de petites mares et un lac (le lac de Siguret) et comprenant divers habitats : sources d'eaux douces (54.1), eaux douces stagnantes (22.1), magnocariçaies de grandes laîches [all. phyto. Magnocaricion elatae (53.21)] et roselières [all. phyto. Phragmition communis (53.1)]. Ces divers milieux humides abritent des espèces à forte valeur patrimoniale. Un petit réseau bocager s’est maintenu dans ce secteur.

Flore

Le site comprend 39 trente cinq espèces végétales déterminantes dont douze sont protégées au niveau national : l'Ail dressé (Allium lineare), le Panicaut des Alpes (Eryngium alpinum), le Liparis de Loesel (Liparis loeselii), l'Inule variable (Inula bifrons), qui occupe les lisières et broussailles sèches, la Tulipe de Guillestre (Tulipa platystigma), historiquement présente et à rechercher sur le site, l'Astragale queue de renard des Alpes (Astragalus alopecurus), fabacée atteignant 1 m de hauteur, à floraison spectaculaire, affectionnant les pelouses et landes d’affinités steppiques, le Dracocéphale de ruysch (Dracocephalum ruyschiana), la Violette à feuilles pennées (Viola pinnata), la Salicaire à feuilles de thym (Lythrum thymifolium), non revue récemment et à rechercher, le Choin ferrugineux (Schoenus ferrugineus), la Potentille du Dauphiné (Potentilla delphinensis), à rechercher également, et la Pivoine officinale (Paeonia officinalis subsp. officinalis), plante spectaculaire des bois clairs, lisières et landes. Onze sont protégées en région Provence Alpes Côte d’Azur : le Nénuphar blanc (Nymphaea alba), très rare dans les Alpes du Sud et lié aux eaux pauvres en nutriments, l'Ophioglosse commun (Ophioglossum vulgatum), le Muscari botryoïde (Muscari botryoides), la Listère en forme de cœur (Neottia cordata), discrète orchidée forestière de montagne, le Dactylorhize couleur de sang (Dactylorhiza incarnata subsp. cruenta), l'Orchis des marais (Anacamptis palustris), la Pyrole moyenne (Pyrola media), le Jonc arctique (Juncus arcticus), plante arctico alpine rare des marécages et bords de ruisselets, la Potentille du Dauphiné (Potentilla delphinensis), espèce à rechercher, le Cotonéaster du Dauphiné (Cotoneaster delphinensis) et la Fraxinelle blanche (Dictamnus albus), belle rutacée des lisières et broussailles sèches. Seize espèces n’ont pas de statut de protection : la Calamagrostide velue (Calamagrostis villosa), graminée associée aux mégaphorbiaies et forêts subalpines de conifères en situations fraîches, sur substrats acides, l'Aster linosyris (Galatella linosyris var. linosyris), le Buplèvre des Alpes (Bupleurum alpigenum), grand buplèvre localisé en France à la haute vallée de la Durance et au Queyras, où il occupe les prairies de fauche, mégaphorbiaies et lisières forestières fraîches, l'Orchis musc (Herminium monorchis), le Chardon bardane (Carduus personata), le Silène de nuit (Silene noctiflora), le Sainfoin de Briançon (Hedysarum brigantiacum), légumineuse récemment décrite, l'Astragale d'Autriche (Astragalus austriacus), petite fabacée plus largement répartie en Europe centrale, très rare en France, où elle se localise aux seules vallées de la Durance et de l'Ubaye, où elle occupe les pelouses d'affinités steppiques, la Gentiane asclépiade (Gentiana asclepiadea), le Saule à feuilles étroites (Salix repens), le Jonc à fruits globuleux (Juncus sphaerocarpus), la Pulsatille des montagnes (Anemone montana), belle renonculacée à floraison printanière liée aux pelouses sèches à répartition très restreinte en France, le Pigamon simple (Thalictrum simplex), le Pied d'alouette douteux (Delphinium dubium), spectaculaire renonculacée des mégaphorbiaies subalpines, des aulnaies vertes et des prairies fraiches, la Potentille inclinée (Potentilla inclinata) et le Cotonéaster de l'Atlas (Cotoneaster nebrodensis).
Par ailleurs, le site comprend sept espèces végétales remarquables. Six sont protégées au niveau national : la Bérardie laineuse (Berardia subacaulis), composée archaïque endémique des Alpes sud occidentales typique des éboulis calcaires à éléments fins, la Primevère marginée (Primula marginata), spectaculaire plante des parois calcaires, le Sainfoin de Boutigny (Hedysarum boutignyanum), la Gagée jaune (Gagea lutea), la Gagée des champs (Gagea villosa) et l'Ancolie des Alpes (Aquilegia alpina). Une est protégée en région Provence Alpes Côte d’Azur : la Minuartie des rochers (Minuartia rupestris subsp. rupestris).

Faune

Le patrimoine faunistique de ce site, riche de quarante- cinq espèces animales patrimoniales dont quinze sont déterminantes, est d’un intérêt élevé. Les mammifères sont représentés par deuw espèces déterminantes, le Bouquetin des Alpes (Capra ibex) et la Barbastelle d'Europe (Barbastella barbastellus), espèce forestière déterminante, vulnérable et en régression, d’affinité médio-européenne, très résistante au froid et deux espèce remarquable, le Lièvre variable (Lepus timidus) et le Vespère de Savi (Hypsugo savii), espèce remarquable rupicole et montagnarde d’affinité méridionale, qui exploite d’une part les milieux forestiers (surtout ceux riverains de l’eau) pour la chasse et d’autre part les milieux rocheux (falaises) pour les gîtes, jusqu’à 2 400 m d’altitude.
L’avifaune nicheuse locale est représentée par l’Aigle royal (Aquila chrysaetos), l’Autour des palombes (Accipiter gentilis), le Busard des roseaux (Circus aeruginosus), le Circaète Jean le blanc (Circaetus gallicus), le Faucon pèlerin (Falco peregrinus), rapace diurne rupestre assez rare et déterminant mais aujourd’hui en augmentation en tant que nicheur, la Bondrée apivore (Pernis apivorus), le Tétras lyre (Tetrao tetrix), espèce remarquable fragile, emblématique des Alpes, le lagopède des Alpes (Lagopus mutus helveticus), la Chouette de Tengmalm (Aegolius funereus), espèce boréo alpine forestière et déterminante, des hêtraies, pessières, cembraies et mélézins, la Chevêchette d’Europe (Glaucidium passerinum), espèce euro sibérienne déterminante et rare de la taïga et des forêts claires de résineux dans les Alpes (mélézins, sapinières, pessières, cembraies), le Grand-duc d’Europe (Bubo bubo), le Pic épeichette (Dendrocopos minor), le Pic noir (Dryocopus martius) le Cincle plongeur (Cinclus cinclus), la Pie grièche écorcheur (Lanius collurio), le Crave à bec rouge (Pyrrhocorax pyrrhocorax), nicheur remarquable peu fréquent, inféodé aux alpages où il vient s’alimenter situés à proximité de falaises où il niche, le Venturon montagnard (Carduelis citrinella), passereau paléomontagnard remarquable, typique des boisements de conifères semi ouverts, le Bruant fou (Emberiza cia), la Niverolle des Alpes (Montifringilla nivalis), le Tichodrome échelette (Tichodroma muraria), la Perdrix bartavelle (Alectoris graeca), la Caille des blés (Coturnix coturnix). Deux vautours déterminants mais non nicheurs sur le site le survolent au cours de leurs recherches alimentaires, il s’agit du Gypaète barbus (Gypaetus barbatus), nicheur dans la vallée voisine de l’Ubaye, et du Vautour fauve (Gyps fulvus).
Les reptiles comprennent notamment le Lézard des souches (Lacerta agilis), espèce remarquable d’affinité médio européenne nordique, des landes, lisières de forêts et prairies herbeuses jusqu’à 2000 m d’altitude Les Amphibiens sont représentés par le Triton alpestre (Ichthyosaura alpestris), espèce déterminante d’affinité montagnarde, localement en régression et très localisée en rive gauche de la Durance a été observée en 1991 et serait à rechercher.
Chez les poissons, l’Omble chevalier (Salvelinus alpinus), espèce remarquable, autochtone des lacs Léman et du Bourget, introduite à la fin du XIXème siècle dans certains lacs d’altitude du Haut Dauphiné, typique des lacs profonds et froids aux eaux propres bien oxygénées et aux fonds graveleux, l’espèce étant sensible à la pollution, est présente au Lac de Siguret.
Ce site abrite quantité d’espèces intéressantes d’insectes sur le plan patrimonial. Le cortège de lépidoptères se distingue par la présence de deux espèces déterminantes : le Moiré piémontais (Erebia aethiopellus), espèce endémique franco-italienne cantonnée aux Alpes occidentales, inféodée aux pelouses alpines sèches à Fétuque paniculée (Festuca paniculata) et l’Isabelle (Actias isabellae), espèce emblématique des Alpes du sud, protégée au niveau européen, de répartition ouest-méditerranéenne morcelée (en France : Hautes-Alpes, Alpes de-Haute-Provence et Pyrénées-Orientales), principalement inféodée aux peuplements de Pin sylvestre des versants abrités entre 600 et 1 800 m d’altitude. Elles sont accompagnée par plusieurs espèces remarquables : l’Azuré de la Croisette (Maculinea alcon), Polyommatiné protégé en France, lié aux prairies sèches et pentes herbeuses vers 1200 à 1 800 m. d’altitude, dont la chenille vit sur la Gentiane croisette (Gentiana cruciata), l’Azuré du Serpolet (Maculinea arion), espèce protégée au niveau européen, inféodée aux bois clairs et ensoleillés, les pelouses et les friches sèches à serpolets jusqu’à 2 400 m d’altitude, l’Apollon (Parnassius apollo), espèce en régression, protégée au niveau européen, habitant les rocailles, pelouses et éboulis à Crassulacées et Saxifragacées des étages montagnard à alpin, entre 300 et 2 500 m d’altitude, la Laineuse du Prunellier (Eriogaster catax), lépidoptère crépusculaire et nocturne menacé et en régression, localisé et peu commun, protégé au niveau européen, fréquentant les bois clairs, lisières, fruticées et haies où sa chenille se nourrit de feuilles de divers feuillus et la Zygène des bugranes (Zygaena hilaris), Zygénidés d'affinité ibéro provençale, liée aux pelouses et friches sèches où croît sa plante hôte locale (Bugrane jaune Ononis natrix). Chez les autres insectes citons le Bourdon Bombus brodmannicus delmasi, dont cette sous espèce est déterminante et endémique des pentes fleuries ensoleillées, riches en Cerinthe glabra et C. minor dont il butine les fleurs, des Alpes du sud, le Bourdon Bombus gerstaeckeri, espèce déterminante et montagnarde, rare et très localisée en France aux Pyrénées et aux Alpes du Sud, et plusieurs odonates : l’Agrion bleuissant (Coenagrion caerulescens), espèce méditerranéenne déterminante liée aux eaux courantes claires et ensoleillées, globalement rare, localisée et menacée en France, l’Agrion de Mercure (Coenagrion mercuriale), espèce remarquable et protégée qui affectionne les écoulements modestes à eaux courantes claires, ensoleillées et peuplées d'hydrophytes, l'Agrion joli (Coenagrion pulchellum), espèce remarquable d'odonate Zygoptères (Demoiselles), inféodée à divers milieux stagnant mais en régression, le Sympétrum déprimé (Sympetrum depressiusculum), espèce déterminante, rare et régression, dont la larve aquatique est inféodée aux pièces d’eau temporaires ou à niveau fluctuant, et le Sympétrum commun (Sympetrum vulgatum vulgatum), espèce rare et en régression dans la région, où elle se trouve en limite méridionale de son aire de répartition.

Fonctionnalité

Cette ZNIEFF de type 2 englobe les trois ZNIEFF de type 1 suivantes : «05_109_152   Source thermo minérale et terrains salés du plan de Phasy» ; «05_109_153   Bois de Barbein et versant boisé en rive gauche de la Durance sous la crête du Martinat» & «05_109_157   Plateau et lac de Siguret et partie inférieure de la forêt de Saluces».
De par sa position le long de la Durance, large vallée glaciaire, qui est une voie importante de pénétration à l’intérieur des Alpes, le site se trouve sur un flux migratoire nord sud.
Il s’inscrit par ailleurs dans le système forestier fonctionnel comprenant de vastes étendues boisées qui bordent les contreforts ouest du massif du Queyras.
La fréquentation touristique, très importante aux abords du lac de Siguret ou au Plan de Phasy, peut avoir des conséquences directes néfastes sur la flore et ses habitats.
Rappelons la présence voisine du complexe important de remontées mécaniques des stations de Vars et Risoul.

Commentaires sur la délimitation

Ce site montagneux englobe des complexes forestiers, pastoraux et rocheux de fort intérêt biologique. Ses limites s’appuient sur les éléments majeurs de la topographie et sur des repères visuels importants, tels que les dessertes routières, de façon à exclure les secteurs fortement anthropisés : domaines skiables de Vars et Risoul et zones urbanisées de fond de vallée.