ZNIEFF 930012800
BOCAGE DU CHAMPSAUR DE SAINT-MICHEL-DE-CHAILLOL À SAINT-JACQUES-EN-VALGODEMARD

(n° régional : 05114100)

Commentaires généraux

Description

Vaste ensemble agro pastoral situé entre la bordure sud ouest du Parc National des Ecrins et le Col Bayard, le bocage du Champsaur offre un découpage paysager unique.
L’essentiel du site est établi sur des pentes argilo morainiques issus des dépots glaciaires du Würm et d’anciennes terrasses d’alluvions fluviatiles.
Du point de vue climatique, le site est établi dans la zone biogéographique des Alpes intermédiaires dauphinoises. Les influences atlantiques s’y font encore nettement sentir au niveau des principales vallées ouvertes vers l’ouest.
Le quadrillage des haies et l’ensemble des cultures abritent une importante avifaune, ainsi que de nombreuses espèces végétales messicoles. Quelques zones humides et corridors boisés enrichissent la variété de milieux. Compris en 800 m et 1649 m d’altitude, le site est inclus dans les étages de végétation collinéen et montagnard.
Il est principalement composé par un bocage associant des haies de feuillus divers et des coulées boisées de Chêne pubescent (Quercus humilis), Pin sylvestre (Pinus sylvestris) et Pin noir (Pinus nigra) qui délimitent des milieux prairiaux et culturaux, ainsi que leurs divers faciès d’embuissonnement. Prairies sèches méso xérophiles à Brome dressé (Bromus erectus), petits champs de céréales et cultures fourragères encore riches en plantes messicoles, landes à Genêt cendré (Genista cinerea), fruticées xérophiles d’adret riches en arbustes divers, clapiers de pierres sèches, ruisseaux et petits réservoirs constituent autant d’habitats supplémentaires, étroitement associés au bocage, qui contribuent à l’importante biodiversité du site.

Milieux remarquables

De petits champs cultivés (céréales et luzerne notamment) riches en espèces messicoles [all. phyto. Caucalion lappulae (82.3)] et d’autres milieux issus de pratiques agricoles traditionnelles, telles que les prairies hygrophiles [all. phyto. Molinion caeruleae (37.2)], les prairies mésophiles de fauche de plaine et de moyenne altitude à Fromental (Arrhenatherum elatius) [all. phyto. Arrhenatherion elatioris (38.22)], les prairies pâturées [all. phyto. Cynosurion cristati (38.1)] et les prairies sèches méso xérophiles à Brome dressé (Bromus erectus) [all. phyto. Mesobromion erecti (34.3265)], au sein desquelles se développent un grand nombre d’orchidées, constituent une mosaïque d’espaces ouverts de fort intérêt écologique et permettant le maintien d’une biodiversité importante.
Ces espaces ouverts sont délimités par un réseau bocager (84.2) encore bien préservé, qui occupe une surface importante et joue par ailleurs un rôle essentiel de corridor écologique, notamment pour l’avifaune. De petites zones humides, riches en espèces floristiques, telles des étangs (22.13), des magnocariçaies de grandes laîches [all. phyto. Magnocaricion elatae (53.21)], sont caractérisées par de nombreuses autres espèces remarquables ou déterminantes.
Quelques coulées forestières et petits massifs boisés, comme des boisements thermophiles et supra méditerranéens de Chêne pubescent (Quercus humilis) [all. phyto. Quercion pubescenti sessiliflorae (41.711)] ou des hêtraies neutrophiles [all. phyto. Fagion sylvaticae (41.13)], sont aussi présents

Flore

Le site comprend douze espèces végétales déterminantes, dont une protégée au niveau national : le Panicaut blanc des Alpes (Eryngium spinalba), ombellifère épineuse des éboulis thermophiles et des pelouses sèches endémique des Alpes sud occidentales. Trois sont protégées en région Provence Alpes Côte d’Azur : l'Ophioglosse commun (Ophioglossum vulgatum), le Gnaphale des lieux humides (Gnaphalium uliginosum) et le Rubanier nain (Sparganium natans). Sept espèces n’ont pas de statut de protection : le Potamot à feuilles de graminée (Potamogeton gramineus), qui serait à confirmer sur le sie, le Doronic à feuilles cordées (Doronicum pardalianches), anciennement signalé et à rechercher dans les hêtraies, le Silène de nuit (Silene noctiflora), l'Oeillet de Séguier (Dianthus seguieri subsp. seguieri), la Gentiane des marais (Gentiana pneumonanthe), en voie de raréfaction en France du fait de la destruction des zones humides, l'Asarum d'Europe (Asarum europaeum), le Chardon bardane (Carduus personata) et la Renoncule flammette (Ranunculus flammula).
Par ailleurs, le site comprend deux espèces végétales remarquables protégées au niveau national : la Gagée jaune (Gagea lutea) et la Gagée des champs (Gagea villosa).

Faune

Ce site bocager recèle un patrimoine faunistique d’un intérêt élevé. En effet, au moins quarante-cinq espèces animales patrimoniales, dont douze déterminantes, le fréquentent régulièrement.
Chez les oiseaux nicheurs notons tout particulièrement la reproduction possible du rare et déterminant Râle des genêts (Crex crex). Le cortège avifaunistique est riche et comprend également : Bondrée apivore (Pernis apivorus), Aigle royal (Aquila chrysaetos), Autour des palombes (Accipiter gentilis), Circaète Jean le blanc (Circaetus gallicus),  Faucon pèlerin (Falco peregrinus), rapace diurne rupestre assez rare et déterminant mais aujourd’hui en augmentation en tant que nicheur, Faucon hobereau (Falco subbuteo), la Chevêchette d'Europe (Glaucidium passerinum), espèce euro-sibérienne déterminante et rare de la taïga et des forêts claires de résineux dans les Alpes (mélézins, sapinières, pessières, cembraies), Grand duc d’Europe (Bubo bubo), Petit duc scops (Otus scops), Chevêche d’Europe (Athene noctua), Caille des blés (Coturnix coturnix), Lagopède alpin (Lagopus mutus), espèce remarquable menacée et en régression, d’origine arctique, relique de l’époque glaciaire dans les Alpes, où elle occupe les reliefs de croupes et de crêtes, fréquemment enneigées et balayées par le vent, Tétras lyre (Tetrao tetrix), Perdrix bartavelle (Alectoris graeca), Chouette de Tengmalm (Aegolius funereus), espèce boréo alpine forestière et déterminante, des hêtraies, pessières, cembraies et mélézins, Pigeon colombin (Columba oenas), Huppe fasciée (Upupa epops), Torcol fourmilier (Jynx torquilla), Pic épeichette (Dendrocopos minor), Cincle plongeur (Cinclus cinclus), Chevalier guignette (Actitis hypoleucos) et Petit Gravelot (Charadrius dubius), trois espèces associées aux cours d’eau dynamiques, Rousserolle verderolle (Acrocephalus palustris), Gobemouche gris (Muscicapa striata), Pie grièche écorcheur (Lanius collurio), Crave à bec rouge (Pyrrhocorax pyrrhocorax), nicheur remarquable peu fréquent, inféodé aux alpages où il vient s’alimenter situés à proximité de falaises où il niche, Moineau cisalpin (Passer italiae), Bruant fou (Emberiza cia), Bruant ortolan (Emberiza hortulana),Moineau soulcie (Petronia petronia), Alouette lulu (Lullula arborea), Pipit rousseline (Anthus campestris), Monticole de roche (Monticola saxatils, Fauvette grisette (Sylvia communis)). Au rang des Mammifères locaux d’intérêt patrimonial, il convient de noter deux espèces déterminantes, le Bouquetin des Alpes (Capra ibex) et le Loup (Canis lupus) ainsi que la présence d’espèces remarquables aussi intéressantes que le Cerf élaphe (Cervus elaphus), le Petit Rhinolophe (Rhinolophus hipposideros), espèce remarquable en régression marquée, plutôt thermophile et anthropophile et assez rare en montagne, le Grand Rhinolophe (Rhinolophus ferrumequinum), espèce remarquable et menacée, en régression partout en France, la Noctule de Leisler (Nyctalus leisleri), espèce remarquable forestière relativement fréquente, le Vespère de Savi (Hypsugo savii), espèce remarquable rupicole et montagnarde d’affinité méridionale, qui exploite les milieux forestiers surtout riverains de l’eau pour la chasse et les milieux rocheux (falaises) pour les gîtes, le Grand Murin (Myotis myotis), espèce remarquable plutôt commune mais localement en régression. L’herpétofaune locale patrimoniale est représentée par le Triton alpestre (Ichthyosaura alpestris), espèce déterminante d’affinité montagnarde, localement en régression, le Sonneur à ventre jaune (Bombina variegata), espèce déterminante à effectifs faibles et vulnérable, en déclin, d’affinité médio européenne et montagnarde, affectionnant les petits points d’eau peu profonds, dans les endroits restant frais et humides en été, et le Pélodyte ponctué (Pelodytes punctatus).
Les insectes d’intérêt patrimonial sont représentés par de nombreuses espèces déterminantes et remarquables, en particulier chez les papillons de jour (lépidoptères rhopalocères), mieux connus, avec l'Azuré de la sanguisorbe (Maculinea teleius), espèce déterminante, rare et en régression, protégée au niveau européen, strictement inféodée aux prairies humides et bordures marécageuses peuplées par sa plante hôte la Sanguisorbe officinale et ses fourmis hôtes du genre Myrmica (notamment Myrmica scabrinodis), l’Azuré de la croisette (Maculinea alcon), espèce remarquable et protégée en France, liée aux pelouses et prairies des étages montagnards et subalpins où croît sa plante hôte (Gentiane croisette Gentiana cruciata) et vit sa fourmi hôte (surtout Myrmica schencki), le Semi Apollon (Parnassius mnemosyne), espèce déterminante et protégée au niveau européen, d'affinité montagnarde et liée à la présence de corydales, qui fréquente les pelouses et les lisières forestières, surtout entre 1000 et 2000 mètres d’altitude, l’Apollon (Parnassius apollo), espèce remarquable d'affinité montagnarde, protégée au niveau européen, peuplant les rocailles, pelouses et éboulis à Crassulacées et Saxifragacées entre 500 et 2500 m d’altitude, le Grand Sylvain (Limenitis populi), espèce forestière remarquable d’affinité euro sibérienne, des clairières et lisières de forêts humides de feuillus jusqu’à 1700 m. d’altitude, dont la chenille se développe principalement sur le Tremble (Populus tremula), l’Hermite, lépidoptère Nymphalidés Satyrinés en forte régression, lié aux milieux très ouverts et secs où croissent ses plantes hôtes, plusieurs graminées (fétuques et brachypodes), et l'Échiquier de Russie (Melanargia russiae), espèce remarquable d'affinité steppique, localisée et dont la sous espèce cleanthe est endémique des montagnes du nord de l'Espagne et des Alpes du sud.
Les autres espèces patrimoniales d’insectes sont toutes inféodées aux zones humides avec l'Agrion joli (Coenagrion pulchellum), espèce remarquable d'odonate Zygoptères (demoiselles) liée à divers milieux stagnants et en régression en France, le Leste des bois (Lestes dryas), espèce remarquable d'odonate Zygoptères (demoiselles), en limite d'aire méridionale dans les Alpes du sud, localisée et inféodée aux pièces d'eau temporaires, et le Criquet ensanglanté (Stethophyma grossum), espèce remarquable d'orthoptère d'affinité eurosibérienne, en forte régression en dehors des Alpes, strictement liée aux prairies très humides et surfaces marécageuses.

Fonctionnalité/Liens éventuels avec d’autres ZNIEFF

Cette ZNIEFF de type 2 englobe la ZNIEFF de type 1 : «05_114_174   Plateau et zones humides du Laux et de la Sagne».
Elle est en continuité ou en relation avec les ZNIEFF de type 2 n° 05_111_100 « Partie sud ouest du massif et du Parc National des Ecrins   vallée du Valgaudemar   Grun de Saint Maurice   Vallée de la Séveraissette   Le Cuchon   Pic Queyrel   Versant ouest du Vieux Chaillol » et 05_122_100 « Dévoluy septentrional : Massif de la Montagne de Féraud ».
Ce système bocager encore bien conservé, caractérisé par un important maillage de haies, est de grand intérêt écologique, car ils forme des corridors en contact avec les cours des rivières et ruisseaux et les boisements montagnards de bas de versant et ceux du plateau de Bayard. Ceux ci se révèlent indispensables à la circulation et à la diffusion des différentes espèces tant animales que végétales.
Ici ce rôle de corridor prend également toute sa signification, en permettant ou en facilitant les échanges entre deux importants massifs (Ecrins au nord est et Dévoluy à l’ouest), ainsi que par sa situation en limite d’influences bioclimatiques.

Commentaires sur la délimitation

Le site intéresse un vaste système bocager encore bien conservé et son espace connexe interstitiel. Si les motivations de la délimitation sont avant tout d’ordre fonctionnel, le positionnement des limites du site est établi, lorsque c’est possible, sur des repères visuels marqués ou sur des éléments topographiques et géographiques importants : réseaux routiers et de dessertes, lisières, talwegs, ruptures de pentes, etc.