ZNIEFF 930020312
PELOUSES ET COMBES DU FLANC OCCIDENTAL DU MONT VENTOUX

(n° régional : 84102115)

Commentaires généraux

Description de la zone


Cet ensemble englobe une grande partie du flanc sud occidental du massif du mont Ventoux. Il s’étend des rochers de Cachillan, vers 1 500 m, à l’est, aux rochers du Groseau, près de Malaucène, à 400 m, à l’ouest. Il suit la croupe de la Tête de Chauva, se poursuit vers l’ouest par la partie haute de la combe de Malaval, les rochers des Rams, les Têtes du Gros Charne, du Fribouquet, de l’Emine, le Grand Barbeirol. Il comporte également un ensemble de combes situées entre la combe de Malaval et celle de Milan. Enfin, il se termine, en versant nord ouest, par le site des rochers du Groseau.
L’assise géologique se compose de calcaires compacts à faciès urgonien du Bédoulien, entrecoupés, souvent vers 1 000 m, d’une lentille de calcaires subrécifaux. Ils ont entraîné la mise en place d’un modelé karstique à l’origine d’un important réseau hydrographique fossile constitué d’une alternance de combes souvent rupestres, à sec toute l’année, même par temps d’orage, car les eaux s’infiltrent en totalité dans les calcaires fissurés. Il est probable qu’il existe un réseau hydrographique souterrain dont les exutoires seraient la Fontaine de Vaucluse et la source du Groseau. Entre ces combes, des croupes (les chevrons) aux pentes relativement douces sont occupées par un lapiaz, parfois très prononcé.
À l’exception du site du Groseau, au climat déjà frais et humide malgré sa faible altitude, et ce en raison de son exposition en versant nord et au pied de grandes parois rocheuses, l’ensemble de la zone est surtout caractérisé par son aridité et par l’intensité du mistral, en particulier sur toute la croupe, en partie dénudée, qui descend sur Malaucène.
L’amplitude altitudinale importante (environ 1 000 m), entraîne un véritable étagement de la végétation. À la base et en adret, l’étage mésoméditerranéen occupe tout l’espace avec pinède de pin d’Alep, taillis rabougris de chêne vert, matorral à genévrier de Phénicie (que l’on observe également en versant nord, à la base des rochers du Groseau). Dans le bassin de Malaucène, le pin sylvestre remplace le pin d’Alep, car le contexte climatique lui est moins favorable et l’étage mésoméditerranéen laisse progressivement place à l’étage supraméditerranéen. Plus haut en altitude, et en versant sud, ce dernier étage s’insinue principalement dans les fonds de combes étroites et encaissées, mais la chênaie pubescente ou la chênaie à buis se présente toujours sous forme de taillis. On observe donc, à la faveur de ces combes, une inversion des étages de végétation, l’étage supraméditerranéen descendant parfois très bas et se trouve donc à des altitudes inférieures à celui de l’étage mésoméditerranéen. À partir de 1 000 m, la pinède de pin sylvestre apparaît et prend de l’importance sur toute la croupe ouest, et ce jusqu'à 1 400 m, à partir du moment où l’on pénètre dans l’étage montagnard. Mais sur toute la croupe occidentale, cet étage est comprimé par la remontée des étages inférieurs, en raison de l’action dominante et asséchante du mistral. Il est à noter que, dès la base de cette zone, des plantations de pin noir d’Autriche ont été effectuées et qu’elles s’observent encore à 1 400 m.

Flore et habitats naturels


Malgré l’étagement de la végétation et l’importance des formations sylvatiques, la biodiversité s’exprime essentiellement dans les milieux ouverts et les sites rupestres. Vers 1 000 m environ, dans le secteur des Ramayettes, de la Tête de l’Emine et du Collet Rouge, existe un ensemble de crêtes ventées asylvatiques, plus ou moins rocailleuses et rocheuses, qui est l’un des plus importants du massif après celui de la partie sommitale. Malgré leur dégradation actuelle en raison de la progression des fruticées, ces sites permettent encore le maintien de la formation à Genista pulchella subsp. villarsiana  (genêt de Villars). On y observe entre autres Bupleurum ranunculoides subsp. telonense (buplèvre de Toulon) ainsi que Minuartia capillacea (sabline capillaire) qui se retrouve également dans les éboulis du Groseau. On rencontre encore des lambeaux de cette formation en dessus du Collet Rouge, et elle est encore présente, mais de façon relictuelle à la Tête de Chauva à 1 400 m, à la base de l’étage montagnard.
Les formations rupestres prennent ici une grande importance en raison de la configuration géomorphologique de la zone. Elles sont particulièrement bien développées dans les combes méridionales et sur les rochers du Groseau. Ces derniers hébergent la formation à Potentilla caulescens (potentille caulescente). Sur des sites rupestres d’adret, plus xérothermophiles, on rencontre, dans le secteur de la combe Obscure et de la montagne de Piaud, Alyssum serpyllifolium (passerage à feuilles de serpolet) ainsi que Poa flaccidula (pâturin mou). En revanche, Arceuthobium gambyi (gui du genévrier), cité vers 1960 à la combe de Maraguyère n’a jamais été confirmé.

Faune


L’intérêt faunistique relativement marqué de cette zone repose sur la présence de 18 espèces animales patrimoniales qui incluent 4 espèces déterminantes.
Parmi ces espèces, figure la rare et très localisée Vipère d’Orsini, dont le mont Ventoux est le seul site vauclusien de cette espèce plutôt montagnarde et d’affinité steppique orientale, à l’heure actuelle menacée et très vulnérable. Outre ce Reptile prestigieux, cette zone voit la repdroduction de nombreuses espèces d’oiseaux patrimoniales : le Grand duc d’Europe, l’Autour des palombes, le Circaète Jean le blanc, la Bondrée apivore, le Bruant fou et le Venturon montagnard, le Pic noir, l’Alouette lulu. A noter l’installation d’un couple nicheur d’Aigle royal depuis 2010 et l’observation régulière du faucon pèlerin qui permet de suspecter la reproduction d’un couple.
Plusieurs espèces de chiroptères ont été contactées au niveau du rocher du Groseau comme le le Murin à oreilles échancrées (Myotis emarginatus), espèce déterminante glaneuse capturant les mouches et araignées, souvent liée aux milieux rivulaires et très stratifiés, utilisant des gîtes variés en reproduction (bâtiments, cavités, ponts), le Petit Rhinolophe (Rhinolophus hipposideros), espèce remarquable en régression marquée, plutôt thermophile et anthropophile, le Vespère de Savi (Hypsugo savii), espèce remarquable rupicole et montagnarde d’affinité méridionale, qui exploite d’une part les milieux forestiers (surtout ceux riverains de l’eau) pour la chasse et d’autre part les milieux rocheux (falaises) pour les gîtes, jusqu’à 2 400 m d’altitude et la Noctule de Leisler (Nyctalus leisleri), espèce remarquable forestière relativement fréquente. On ignore si ces espèces occupent des gîtes sur le site.
Chez les insectes, il convient de mentionner la présence du Sténobothre cliqueteur (Stenobothrus grammicus), espèce déterminante de criquet, de répartition ibéro provençale, typique des milieux secs, arides et pierreux de l'étage montagnard méditerranéen, de l’Apollon (Parnassius apollo), espèce remarquable de papillon de jour d'affinité montagnarde, protégée au niveau européen, en régression dans le Vaucluse, peuplant les rocailles, pelouses et éboulis à Crassulacées et Saxifragacées entre 500 et 2500 m d’altitude et du Grand fourmilion (Palpares libelluloides), espèce remarquable de neuroptère (ascalaphes et fourmilions), assez commune  mais toujours localisée aux steppes et autres formations herbacées maigres et sèches. Le Moiré de Provence (Erebia epistygne), espèce déterminante de lépidoptère d’affinité méditerranéo-montagnarde dont l’aire de répartition ibéro-provençale est morcelée et restreinte, inféodée aux pelouses sèches à fétuques (surtout Festuca cinerea) est historiquement présent sur la Tête des Mines mais n’a pas été revu depuis 1995.


Intérêt historique


Les baumes bergeries des combes du versant sud.

Commentaires sur la délimitation

Répartition et agencement des habitats : les formations rupestres, les boisements de chêne vert, chêne pubescent, pin d’Alep et pin sylvestre, les milieux ouverts occupent la totalité de cette zone, permettant ainsi de définir les contours de cette ZNIEFF. À quelques rares exceptions près, les sites ayant fait l’objet de reboisements ont été exclus de la zone.

Cette démarche se justifie par le fonctionnement et les relations existant entre ces différents écosystèmes : il existe une complémentarité entre les milieux ouverts, terrain de chasse privilégié pour l’avifaune nichant dans les milieux plus fermés ou les sites rupestres.

La climatologie ainsi que les contraintes du milieu physique et plus particulièrement l’analyse géomorphologique confortent la définition du pourtour de la zone. Celle-ci s’arrête à la base du massif dès que l’on se trouve au contact des secteurs anthropisés. De même, seuls les étages méso- et supraméditerranéen ont été retenus pour la délimitation de la ZNIEFF (la base de l’étage montagnard en étant sa limite supérieure).