Description de la zone
Le vieux Rhône de la Désirade s’étend de la limite avec la Drôme au nord, au Lauzon au sud. Il comprend tout l’ensemble du Tenon de Gilles, des lônes de la Désirade et de l’embouchure du Lauzon. Il s’agit de l’un des quelques sites rhodaniens non artificialisés. En effet, à partir de Donzère, le canal de dérivation dont la réalisation a été rendue nécessaire par la construction de l’usine hydroélectrique A. Blondel de Bollène, utilise la plus grande partie du débit du Rhône moyen. Aussi, le Rhône de la Désirade, non endigué et canalisé, présente un débit très réduit et un aspect naturel prononcé. En particulier, on peut y observer d’importantes grèves de galets en bon état de conservation ainsi que des vestiges de bras morts encore fonctionnels avec lônes et ripisylves. Sur ces dernières, les alluvions fluviatiles sont plus fines, soit limoneuses, soit sableuses, ce qui apporte un élément de diversification pour la flore. Situé sur les marges septentrionales du climat méditerranéen, cet ensemble est soumis à une climatologie qui présente déjà des affinités prononcées avec le climat tempéré. En particulier, les températures y sont plus basses (avec gelées fréquentes en hiver), les précipitations plus élevées, la nébulosité aussi. Certaines espèces médio européennes ou eurasiatiques arrivent à s’y maintenir à la faveur de la présence de milieux qui restent frais, voire froids, même en période estivale.
On y observe une grande partie des groupements des grands fleuves médio européens à l’exception notoire des prairies naturelles (détruites par la pression urbaine) :
les groupements herbacés à hydrophytes (potamots, renoncules aquatiques, etc.) qui se maintiennent très bien dans les lônes,
les groupements à hélophytes,
les groupements des bancs de graviers,
les ripisylves qui occupent le lit majeur et sont constituées de forêts pionnières à bois tendre (saules, peupliers, etc.), et de forêts plus matures de bois dur (avec chêne pédonculé, aulne glutineux, frêne oxyphylle, etc.), particulièrement bien développées sur tout le cours amont (Tenon de Gilles).
Flore et habitats naturels
Bien que situé entièrement en région méditerranéenne, ce site constitue une véritable enclave médio européenne. L’effectif des espèces médio européennes y est important et un bon nombre d’entre elles y sont ici pratiquement en limite méridionale de leur aire de répartition. Le très faible niveau d’artificialisation du site est à l’origine du maintien d’un bel ensemble naturel qui offre une grande diversité d’espèces et d’habitats. C’est ainsi que des hydrophytes existent toujours, avec Vallisneria spiralis (valisnérie en spirale), et Nymphoides peltata (petit nénuphar pelté). Les hélophytes offrent une biodiversité encore plus grande à la faveur de la présence de très nombreuses lônes tant au Tenon de Gilles qu’à la Désirade. Ces dernières ne sont jamais en assec car les eaux du Rhône les alimentent en permanence par percolation, y compris en pleine période estivale. C’est ainsi qu’on peut y observer : Leersia oryzoides (leersie faux riz) qui est ici une constante, Stachys palustris (épiaire des marais), Rorippa amphibia (rorippe amphibie), Butomus umbellatus (jonc fleuri), Cyperus michelianus (souchet de Michel), Schoenoplectus triqueter (scirpe à trois angles), Ranunculus sceleratus (renoncule scélérate. Sur des sites psammophiles situés en arrière des formations à hélophytes, on peut rencontrer Corrigiola littoralis (corrigiole des rivages) et Astragalus cicer (astragale pois chiche), extrêmement rare sur tout le bas Rhône et récemment retrouvée. À Lapalud se maintient sans doute encore Inula britannica (inule britannique).
Des fragments de ripisylves médio européennes âgées sont particulièrement bien représentés au Tenon de Gilles avec des formations à Quercus robur (chêne pédonculé). Elles abritent un contingent important d’espèces rares ou étrangères à la région méditerranéenne, mais qui sont banales plus au nord.
Faune
Cette zone renferme un cortège faunique d’un intérêt assez élevé de dix-sept espèces animales patrimoniales dont trois sont déterminantes.
Ces espèces animales sont pour la plupart liées aux formations de ripisylves. Le Castor d’Europe (Castor fiber) et la Loutre d’Europe (Lutra lutra) dont la présence est certaine depuis 2010, ainsi qu’un cortège d’oiseaux nicheurs intéressant sur le plan patrimonial habitent ce secteur : Bihoreau gris (Nycticorax nycticorax), Aigrette garzette (Egretta garzetta), Faucon hobereau (Falco subbuteo), Petit Gravelot (Charadrius dubius), Sterne pierregarin (Sterna hirundo), Petit duc scops (Otus scops), Martin pêcheur d’Europe (Alcedo atthis), Pic épeichette (Dryobates minor), Gobemouche gris (Muscicapa striata), Bruant proyer (Emberiza calandra ) et la Rousserolle turdoïde (Acrocephalus arundinaceus). Du côté des amphibiens, le Pélodyte ponctué a été signalé en 1998, il est à rechercher actuellement. Concernant l’ichtyofaune, on peut citer trois espèces : la Bouvière (Rhodeus sericeus), le Blageon (Telestes souffia) et le Toxostome (Parachondrostoma toxostoma).
Dans l’intérêt de conserver le continuum de l’hydrosystème, la ZNIEFF intègre l’ensemble de l’écosystème rivulaire : fleuve sensu stricto, lônes, ripisylves (y compris lorsqu’elle en était réduite à un linéaire).
Les limites extérieures de la ZNIEFF correspondent à une anthropisation forte de l’espace (agriculture, urbanisation). C’est ainsi que l’île de la Désirade sensu stricto n’a été retenue que marginalement en raison de sa mise en culture. Il en est de même de l’ensemble des sablières en eau situées sur la limite interdépartementale. Leur destination piscicole actuelle en fait un site trop artificiel pour avoir été retenu.
En général, c’est le réseau des digues qui limite la zone, car il constitue bien souvent la limite entre les écosystèmes rhodaniens et l’espace agricole.
Au niveau de l’aérodrome de Pont-Saint-Esprit/Lamotte-du-Rhône, seules les grèves ont été retenues, car l’emprise de l’aérodrome arrive jusqu’à la partie haute de ces dernières.