Description de la zone
Dans sa partie centrale, le versant méridional des monts de Vaucluse a individualisé deux petits bassins, l’un situé immédiatement au nord du miroir de faille de Lioux, l’autre centré sur la commune de Murs, entre la Sénancole à l’ouest et la combe de la Rouquette à l’est.
Dans ce massif des monts de Vaucluse où dominent les calcaires compacts de l’urgonien, ces deux dépressions font figure d’exception avec un substrat plus propice aux agrosystèmes et composé principalement de marnes ou calcaires marneux de l’Oligocène ou du Gargasien. L’aridité y est ici moindre car l’eau est présente.
Essentiellement agricole et pastoral, cet ensemble comporte des champs de céréales entrecoupés de prairies de fauche (dans les fonds de vallons), de friches, de bosquets et de haies. Quelques parcelles de vergers, vignes et lavandaies viennent compléter ce paysage.
Parmi tous ces agrosystèmes, ce sont ceux à céréales qui présentent le plus d’intérêt. Ils sont les ultimes représentants d’une agriculture traditionnelle de type extensif permettant encore à des plantes liées exclusivement aux céréales, les messicoles, de survivre et de se développer dans de bonnes conditions. Bien des espèces qui se manifestent dans ces milieux ont accompagné l’homme néolithique à partir du bassin méditerranéen et sont de ce fait très attractives et populaires.
Flore et habitats naturels
Dans cet ensemble très composite, les agrosystèmes à céréales constituent l’élément majeur sur le plan patrimonial. Leur maintien a été favorisé par l’utilisation de semences non sélectionnées, par l’emploi très réduit d’engrais chimiques et par l’absence de l’usage de pesticides et d’herbicides dans le but de protéger les troupeaux des agriculteurs éleveurs. Autour du village de Murs, à Bezaure et aux Sarrières à Lioux en particulier, ils hébergent une flore messicole qui doit être considérée ici comme du plus grand intérêt biologique par la rareté, l’importance et la diversité des espèces qui s’y développent, et entre autres, par la présence de très nombreuses espèces menacées comme Adonis annua (adonis annuel), Adonis flammea (adonis rouge feu), Agrostemma githago (nielle des blés), Asperula arvensis (aspérule des champs), Valerianella echinata (valérianelle à piquants), Conringia orientalis (roquette d’Orient), Ceratocephalus falcatus (cératocéphale en faux), Bupleurum rotundifolium (buplèvre à feuilles rondes), Camelina microcarpa (caméline à petits fruits), Delphinium pubescens (pied d’alouette pubescent), Roemeria hybrida (roemérie hybride), Bifora testiculata (bifora à deux coques), Gagea villosa (gagée velue), Androsace maxima (androsace à grand calice), Turgenia latifolia (turgénie à feuilles larges), Vaccaria hispanica (vachère), Galium tricornutum (gaillet à trois pointes), etc. Ces messicoles qui sont souvent très spécialisées par leur écologie et leur biologie s’avèrent très vulnérables aux modifications de leur environnement. La plupart d’entre elles se développent très rapidement au printemps et fleurissent avant la moisson, mais certaines poursuivent leur cycle sur les chaumes (flore post messicole). Si quelques messicoles produisent peu de graines et ont des semenciers à faible durée de vie, d’autres, en revanche, possèdent un pouvoir de germination qui peut rester actif pendant plusieurs années. Le développement optimal de cette flore messicole est lié à des parcelles régulièrement cultivées en céréales d’hiver. Elle peut donc s’effacer et réapparaître au gré des changements de cultures, si on lui en laisse néanmoins la possibilité. Sur les marges de ces champs de céréales et tout près du village de Murs, on arrive encore à observer Bromus japonicus (brome du Japon).
Dans les prairies de fauche de la partie amont de la combe de Véroncle à Murs ainsi que dans la partie marécageuse des Busans se sont installées Anacamptis laxiflora (orchis à fleurs lâches) qui se retrouve près du ruisseau des Moulins, ainsi que Dactylorhiza occitanica (dactylorhize du Midi). Dans des secteurs intermédiaires (friches, talus, etc.) on rencontre souvent Ophrys saratoi (ophrys de la Drôme), endémique provenço dauphinoise, Sideritis montana (crapaudine des montagnes), Alliumrotundum (ail rond) au Puy et aux Plaines, Inula bifrons (inule changeante) aux Beylons et Sclerochloa dura (sclérochloa rude) près du château de Murs.
Faune
Les plaines de Murs et Lioux présentent un intérêt faunistique relativement élevé sur le plan patrimonial. Elles abritent vingt-deux espèces animales patrimoniales. Parmi elles figurent deuxespèces déterminantes.
Le cortège de mammifère est composé du Vespère de Savi (Hypsugo savii), espèce remarquable rupicole et montagnarde d’affinité méridionale, qui exploite d’une part les milieux forestiers (surtout ceux riverains de l’eau) pour la chasse et d’autre part les milieux rocheux (falaises) pour les gîtes, la Noctule de Leisler (Nyctalus leisleri), espèce remarquable forestière migratrice et encore relativement fréquente et le Molosse de Cestoni (Tadarida teniotis), espèce remarquable de haut vol, aux mœurs rupestres pour ses gîtes. Le Petit Rhinolophe (Rhinolophus hipposideros), espèce remarquable en régression marquée, plutôt thermophile et anthropophile était observée en 1994 mais n’a plus été mentionné depuis.
Les espèces aviennes nicheuses comprennent en particulier la Bondrée apivore, le Faucon hobereau (trois couples reproducteurs), la Caille des blés, l’Alouette lulu, le Petit duc scops, la Chevêche d’Athéna ou Chouette Chevêche, le Guêpier d’Europe, la Huppe fasciée, le Torcol fourmilier, la Fauvette orphée et grisette, la Pie grièche écorcheur, la Pie grièche à tête rousse, le Bruant proyer et le Bruant fou puis le Moineau soulcie.. Le Circaète Jean le blanc et le Grand-duc d’Europe ne sont pas nicheurs mais utilisent une partie de la zone comme territoires de chasse.
La faune entomologique d’intérêt patrimonial est représentée par la seule Zygène cendrée (Zygaena rhadamanthus), espèce remarquable de lépidoptère diurne d’affinité ouest méditerranéenne, protégée en France, liée aux friches, garrigues et boisements clairs où croît la principale plante nourricière de sa chenille, la Badasse (Dorycnium pentaphyllum).
Répartition et agencement des habitats : dans cette zone constituée d’une mosaïque d’habitats, ce sont les agrosystèmes qui occupent l’essentiel de l’espace et permettent de définir les limites de la ZNIEFF.
Cette démarche se justifie par le fonctionnement de ces agrosystèmes.
Les grands secteurs rupestres ou boisés ont été exclus car ils ne relèvent pas de la même unité fonctionnelle.