ZNIEFF 930020496
LAC DES SAGNES - VALLON DES GRANGES COMMUNES - VALLON DE PELOUSE

(n° régional : 04117109)

Commentaires généraux

Description
Localisé dans la partie nord est du département des Alpes de Haute Provence, dans la petite région naturelle de l’Ubaye, le site est établi sur la commune de Jausiers.
Il englobe les deux vallons des Granges Communes et de Pelouse qui se rejoignent au niveau du lac des Sagnes.
Le substrat géologique est constitué pour l’essentiel par des grès d’âge Priabonien, en partie recouverts, notamment sur les bas de versants, par des dépôts d’âge Quaternaire associant des éboulis, cônes de déjection, coulées boueuses et moraines glaciaires. Localement apparaissent des calcaires, des schistes et des grès, qui en alternance forment des flyschs. Le site des Sagnes proprement dit se caractérise par d’importantes formations tourbeuses.
Etendu entre 1800 m et 2800 m d'altitude, le site s'inscrit dans les étages de végétation subalpin et alpin.
Positionné dans la zone biogéographique intra alpine, le site est soumis à un climat de haute montagne, aux contrastes thermiques marqués et longuement enneigé.
Un complexe exceptionnel d’habitats humides associant des sources, ruisseaux, torrents, lacs d’altitude, tourbières et bas marais, abritant des espèces à très forte valeur patrimoniale est présent sur ce site.
La zone humide du lac des Sagnes forme un vaste complexe marécageux de très fort intérêt biologique comprenant une très importante diversité de milieux qui associe des prairies humides marécageuses ou tourbeuses, des bas marais alcalins et cariçaies, des massifs arbustifs de saules et des saulaies arborées à Saule à cinq étamines (Salix pentandra), ainsi que des boisements hygrophiles de feuillus. Il est parcouru par un réseau hydrologique important de ruisseaux, résurgences et chenaux aquatiques.

Milieux naturels
Les quatre habitats déterminants que compte le site se rapportent à des milieux humides et des éboulis calcaires. Ce sont : les bas marais cryophiles d’altitude des bords de sources et suintements à Laîche des frimas (Carex frigida) [assoc. phyto. Caricetum frigidae (54.28)], les bas marais pionniers arctico alpins à Laîche bicolore (Carex bicolor) [all. phyto. Caricion incurvae (54.3)], milieux d'une très grande valeur patrimoniale qui apparaissent ponctuellement sur des surfaces généralement localisées et les éboulis calcaires fins représentés notamment par des formations à Liondent des montagnes (Leontodon montanus) et à Bérardie laineuse (Berardia subacaulis) [assoc. phyto. Leontodontetum montani (61.2321) et Berardietum lanuginosi (61.2322)].
Douze autres habitats remarquables sont également présents : les pelouses calcicoles alpines et subalpines à Séslérie bleutée (Sesleria caerulea) et Laîche toujours verte (Carex sempervirens) [all. phyto. Seslerion caeruleae (36.43)], les mégaphorbiaies montagnardes et subalpines, formations opulentes de hautes herbes des combes humides et fraîches [all. phyto. Adenostylion alliariae et Calamagrostion villosae (37.8)], les prairies de fauche d’altitude [all. phyto. Triseto flavescentis Polygonion bistortae (38.3)], les landes à Rhododendron ferrugineux (Rhododendron ferrugineum) et Airelles (Vaccinium myrtillus, Vaccinium uliginosum, Vaccinium vitis idaea) [all. phyto. Rhododendro Vaccinion (31.4)], les mélèzins cembraies ou forêts de Mélèze (Larix decidua) et de Pin cembrot (Pinus cembra) (42.3), les saulaies arctico alpines des bas marais et bords de ruisseaux à Saule arbrisseau (Salix foetida) [all. phyto. Salicion lapponi glaucosericeae (31.6212)], les bas marais alcalins à Laîche de Davall (Carex davalliana) [all. phyto. Caricion davallianae (54.23)], les bas marais acides [all. phyto. Caricion fuscae (54.4)], les éboulis calcaires alpins [all. phyto. Thlaspion rotundifolii (61.2)], les éboulis siliceux alpins [all. phyto. Androsacion alpinae (61.1)] plus localisés que les précédents, les formations végétales des rochers et falaises calcaires [all. phyto. Potentillion caulescentis et Violo biflorae Cystopteridion fragilis (62.15)] et siliceux [all. phyto. Androsacion vandellii (62.2)].
Parmi les autres habitats à fort intérêt biologique, figurent les prairies à Fétuque paniculée (Festuca paniculata) (36.331), milieux couvrant des surfaces importantes sur le site, qui possèdent une très forte diversité floristique et entomologique et sont ici en très bon état de conservation.

Flore
Le site comprend vingt espèces végétales déterminantes, dont neuf sont protégées au niveau national : le Cirse d'Allioni (Cirsium alsophilum), beau chardon dont il s’agit ici de l’une des rares stations départementales, l’Epipogon sans feuille (Epipogium aphyllum), rare orchidée forestière des boisements denses et ombragés, l’Androsace de Suisse (Androsace helvetica), l’Androsace pubescente (Androsace pubescens), la Laîche faux Pied d'oiseau (Carex ornithopoda subsp. ornithopodioides), petite cypéracée affectionnant les rocailles longuement enneigées de l'étage alpin, la Laîche bicolore (Carex bicolor) et la Laîche à petite arête (Carex microglochin), toutes deux caractéristiques des marécages arctico alpins froids d’altitude, l’Ancolie de Bertoloni (Aquilegia reuteri), superbe renonculacée endémique des Alpes du Sud-Ouest, et l’Avoine odorante (Hierochloe odorata), rarissime graminée des pelouses tourbeuses et marécages boréo alpins inscrite au Livre Rouge National des plantes menacées. Quatre sont protégées au niveau régional : le Dactylorhize couleur de sang (Dactylorhiza incarnata subsp. cruenta), la Fritillaire en forme de trompette de Moggridge (Fritillaria moggridgei), le Jonc arctique (Juncus arcticus), plante arctico alpine rare des marécages et bords de ruisselets, et la Joubarbe d'Allioni (Sempervivum globiferum subsp. allionii). Le Cirse faux hélénium (Cirsium heterophyllum), la Passerage de Villars (Lepidium villarsii), la Gentiane asclépiade (Gentiana asclepiadea), l’Oréochlora fausse seslérie (Oreochloa seslerioides), le Scirpe de Hudson (Trichophorum alpinum), rare cypéracée des bas marais arctico alpins, la Renoncule à feuilles de Rue (Callianthemum coriandrifolium), et le Pied d'alouette douteux (Delphinium dubium), spectaculaire renonculacée des mégaphorbiaies subalpines, des aulnaies vertes et des prairies fraiches, constituent les sept autres espèces végétales déterminantes de ce site.
Par ailleurs, il abrite six espèces remarquables dont quatre sont protégées au niveau national : la Bérardie laineuse (Berardia subacaulis), composée archaïque endémique des Alpes sud occidentales typique des éboulis calcaires à éléments fins, la Primevère marginée (Primula marginata), spectaculaire plante des parois calcaires, le Scirpe alpin (Trichophorum pumilum), rare cypéracée circum boréale des bas marais froids d’altitude, et l’Ancolie des Alpes (Aquilegia alpina). Figurent aussi la Minuartie des rochers (Minuartia rupestris subsp. rupestris), protégée au niveau régional, et le Genépi noir (Artemisia genipi) parmi les espèces végétales remarquables du site.

Faune
Le patrimoine faunistique du site compte dix-neuf espèces animales patrimoniales dont cinq sont déterminantes.
En ce qui concerne les mammifères d’intérêt patrimonial, le site abrite notamment le Bouquetin des Alpes (Capra ibex), ongulé alpin déterminant, d’intérêt communautaire, dont les populations locales sont issues de réintroductions, le Cerf élaphe (Cervus elaphus) et le Lièvre variable (Lepus timidus), espèce remarquable en régression, relicte de l’époque glaciaire, fréquentant des milieux assez variés (alpages, éboulis, landes, forêts, pelouses, champs, cultures, friches) entre 1200 et 3100 m d’altitude. L’avifaune nicheuse est représentée par diverses espèces d’intérêt patrimonial telles que l’Aigle royal (Aquila chrysaetos), le Tétras lyre (Tetrao tetrix), espèce remarquable fragile, emblématique des Alpes, le Lagopède alpin (Lagopus mutus), espèce remarquable menacée et en régression, d’origine arctique, relique de l’époque glaciaire dans les Alpes, qui occupe les reliefs de croupes et de crêtes, fréquemment déneigées et balayées par le vent, la Perdrix bartavelle (Alectoris graeca), espèce méridionale de montagne semble-t-il en régression, recherchant les versants montagneux ouverts et ensoleillés avec des barres rocheuses entre 1400 et 2400 m d’altitude, et la Niverolle alpine (Montifringilla nivalis).
Les invertébrés patrimoniaux sont localement présents et concernent premièrement des lépidoptères montagnards, comme le Moiré piémontais (Erebia aethiopella), lépidoptère déterminant endémique franco italien cantonné aux Alpes occidentales, inféodé aux pelouses alpines sèches à Fétuque paniculée (Festuca paniculata), le Petit Apollon (Parnassius sacerdos sacerdos), espèce remarquable et protégée en France, que l’on rencontre au bord des torrents et autres zones humides des étages subalpin et alpin, dont la chenille est inféodée au Saxifrage faux aïzoon (Saxifraga aizoides), et l’Apollon (Parnassius apollo), espèce remarquable relicte de l’ère tertiaire, protégée au niveau européen, habitant les rocailles, pelouses et éboulis à Crassulacées et Saxifragacées entre 500 et 2500 m d’altitude, le Céphalion (Coenonympha darwiniana), espèce remarquable de la sous famille des Satyrinés, endémique du centre et de l’ouest des Alpes, à aire de répartition disjointe, inféodée aux pelouses et fourrés de l’étage subalpin. Pour les coléoptères, notons le Carabe de Solier (Carabus solieri), espèce déterminante et protégée en France, endémique des Préalpes occidentales et de Ligurie, des pelouses subalpines et lisières forestières aux étages montagnards et subalpins, et plus localement à plus basse altitude dans des pinèdes humides dans les collines azuréennes ; le charançon Dichotrachelus alpestris, espèce déterminante endémique des trois départements alpins de la région Provence Alpes Côte d’Azur, où, relativement bien répandue, on la rencontre entre 2000 et 3000 m d’altitude, sous les pierres, dans les mousses ou dans l’humus et enfin le Carabique Laemostenus angustatus, espèce déterminante de Carabidés, d’affinité montagnarde, troglophile et guanobie, en limite d’aire et endémique des Alpes franco-italiennes où elle se rencontre presque toujours à haute altitude dans les terriers de mammifères (marmottes notamment), les bergeries obscures, les anfractuosités profondes des rochers, parfois sous les pierres
S’ajoutent enfin deux orthoptères, le Sténobothre cottien (Stenobothrus cotticus), espèce remarquable de criquet, endémique des Alpes, inféodée aux éboulis, rochers à végétation maigre et pelouses écorchées entre 2000 et 2800 m d’altitude, endémique de l’arc alpin, et le Criquet ensanglanté (Stethophyma grossum), espèce remarquable d'orthoptère d'affinité eurosibérienne, en forte régression en dehors des Alpes, strictement liée aux prairies très humides et surfaces marécageuses.
Chez les mollusques, citons la présence de deux espèces remarquables ; Nesovitrea petronella, espèce localisée dans les zones humides ouvertes d'altitude et Quickella arenaria, espèce remarquable de Succinidés, rare et localisée des bas marais et des suintements de pente.

Fonctionnalité/Liens éventuels avec d’autres ZNIEFF
Cette ZNIEFF de type 1 est incluse dans la ZNIEFF de type 2 «Vallons des Granges Communes, de Pelouse, de Clapouse et des Terres Pleines   massif de l'Empeloutier   montagne de l'Alpe   crêtes et versant du Chevalier, du Chapeau de Gendarme et du Pain de Sucre».

Commentaires sur la délimitation

Le site est délimité par sa topographie, dont les hautes crêtes situées au sud s’appuient sur le pourtour départemental et jouxtent les Alpes Maritimes. Il englobe deux vallons principaux, qui se juxtaposent d’est en ouest et renferment des habitats et populations d’espèces à très forte valeur patrimoniale.