A3-4 - Herbiers à Zostera marina sur sédiments grossiers médiolittoraux

Typologie nationale des habitats marins benthiques de la Manche, de la Mer du Nord et de l'Atlantique (NatHab-Atl)

Source de l'ajout à la typologie

L’habitat A3-4 Herbiers à Zostera marina sur sédiments grossiers médiolittoraux a été ajouté dans la version 3 de la typologie (Michez et al., 2019) sur les recommandations de J.-C. Dauvin et de E. Thiébaut en 2019. Les herbiers de Zostera marina étaient présents dès la première version de la typologie (Michez et al., 2013), sans distinction de substrat ou d’étage, dans la catégorie des habitats particuliers sous le code P01.02 Herbiers à Zostera marina. Cet habitat a par la suite été supprimé dans la version 3 de la typologie et remplacé par quatre habitats distinguant les herbiers de Zostera marina selon leur substrat et leur étage :
- A3-4 Herbiers à Zostera marina sur sédiments grossiers médiolittoraux
- A5-7 Herbiers à Zostera marina sur sables médiolittoraux
- B4-4 Herbiers à Zostera marina sur sédiments hétérogènes infralittoraux
- B5-5 Herbiers à Zostera marina sur sables infralittoraux

Facteurs abiotiques

Etage : Médiolittoral
Nature du substrat : Sables grossiers
Répartition bathymétrique : >0m
Hydrodynamisme : Faible
Salinité : Milieu marin ; [peut tolérer une légère dessalure à l’embouchure des estuaires]
Température : Variable
Lumière : Système phytal
Régime trophique : Mésotrophe

Caractéristiques stationnelles

L’habitat A3-4 constitue des herbiers de taille variable sur les sédiments grossiers (fraction 0,5-2mm dominante) du médiolittoral inférieur. L’herbier est constitué de la zostère marine Zostera marina qui est caractérisée par des feuilles vertes de quelques centimètres à plus d’un mètre de long et de largeur moyenne comprise entre 5 et 12mm (Cabioc’h et al., 2014). Du fait du caractère intertidal de cet habitat, les zostères marines sont soumises à l’alternance de phases d’émersion et d’immersion. En réponse à ce stress environnemental, Zostera marina est présente sous la forme parvozostérique ce qui se traduit par des feuilles un peu plus étroites et un peu plus courtes qu’en milieu subtidal (Den Hartog, 1967 ; Nebout et al., 2002).
L’habitat A3-4 constitue un habitat à forte valeur écologique et patrimoniale qui abrite une faune très riche et très diversifiée.

Variabilité

Plusieurs paramètres concernant l’habitat A3-4 peuvent varier entre deux sites. La densité de pieds de zostères marines au sein de l’herbier peut considérablement varier entre les sites, certains présentant des herbiers très denses (près de 1000 pieds par m²) tandis que d’autres seront caractérisés par des densités plus faibles (entre 100 et 200 pieds par m²). De la même manière, l’emprise spatiale des herbiers varie entre les sites selon les conditions environnementales (dynamique sédimentaire, hydrodynamisme, lumière). La concentration en nutriments influencera la quantité d’épiphytes présentes sur les feuilles de Z. marina. Les herbiers peuvent prendre la forme de larges prairies de superficie importante ou bien à l’inverse de tâches plus ou moins isolées et de taille variable.
Sur des sédiments grossiers c’est le courant qui détermine la présence de l’habitat. La densité est élevée et les feuilles généralement réduites (ex : Archipel des Sept Iles).

Communautés ou espèces caractéristiques

L’espèce caractéristique de cet habitat est la zostère marine Zostera marina.

Espèces associées

Plusieurs centaines d’espèces ont à ce jour été répertoriées au sein des herbiers de zostères marines, y compris sur les herbiers constituant l’habitat A3-4. Par conséquent, la liste d’espèces associées à cette fiche ne constitue pas une liste exhaustive et présente seulement quelques-unes des espèces les plus communément observées dans cet habitat.
La biocénose de cet habitat se compose notamment de gastéropodes (ex : Jujubinus striatus, Rissoa parva, Sterompala cineraria, Bittium reticulatum), de crustacés (ex : Hippolyte varians, Gammarella fucicola, Apseudopsis latreillii, Praunus flexuosus), d’annélides (ex : Notomastus latericeus, Aonides oxycephala) et de siponcles (ex : Golfingia (Golfingia) elongata). Des espèces de syngnathes (ex : Syngnathus acus, Syngnathus typhle) et d’hippocampes (ex : Hippocampus guttulatus) occupent également cet habitat mais leur observation n’est pas systématique.

Dynamique temporelle

La partie inférieure de l’habitat peut parfois être recouverte par des sables mobiles, entraînant ainsi la disparition de l’herbier. Si les conditions hydrodynamiques changent, l’herbier peut néanmoins se rétablir lorsque les conditions lui sont de nouveau favorables. Il peut donc y avoir une forte variabilité interannuelle en terme de surface de l’herbier.
En milieu intertidal, Zostera marina peut se développer sous forme annuelle et perdre ses feuilles en hiver. C’est notamment le cas dans le Golfe du Morbihan (Maheo & Denis, 1987).
Sa position médiolittorale expose cet habitat à des variations journalières importantes de température et d’exposition à la lumière. Lors des marées basses, l’herbier est en contact direct avec l’air et une exposition prolongée à de fortes températures peut impacter de manière significative la survie des pieds de Zostera marina (Davison & Hughes, 1998).
A l’automne, de nombreux débris de macroalgues peuvent être présents dans les herbiers.

Habitats pouvant être associés ou en contact

L’habitat A3-4 peut potentiellement être en contact avec les habitats suivants (liste non exhaustive) :
- A1-2 Roches ou blocs médiolittoraux à dominance algale : contact de même niveau, mosaïque possible.
- A1-8 Champs de blocs médiolittoraux : contact de même niveau, mosaïque possible
- A3-2 Sédiments grossiers propres médiolittoraux : contact de même niveau, mosaïque possible
- A5-2 Sables médiolittoraux mobiles : contact de même niveau, mosaïque possible
- A5-3 Sables fins médiolittoraux : contact de même niveau, mosaïque possible
- A5-4 Sables fins envasés médiolittoraux : contact de même niveau, mosaïque possible
- B1-2 Champs de blocs de la frange infralittorale : continuité bathymétrique, contact inférieur
- B3-2 Sables grossiers et graviers infralittoraux : continuité bathymétrique, contact inférieur

Confusions possibles

L’habitat A3-4 peut potentiellement être confondu avec l’habitat A5-7 Herbiers à Zostera marina sur sables médiolittoraux lorsque la fraction graveleuse est relativement faible mais une analyse granulométrique permettra de distinguer ces deux habitats. L’habitat peut également être confondu avec les herbiers à Zostera noltei sur sables médiolittoraux (A5-6) mais une identification taxonomique précise des pieds de zostère permettra de différencier les deux habitats.

Répartition géographique

De manière générale, les herbiers de zostères, dont Zostera marina sont présents sur les côtes de Manche-Atlantique, du Cotentin au bassin d’Arcachon. Peu d’études décrivent la répartition de l’habitat A3-4 en particulier. Il est présent dans l’ouest Cotentin (archipel de Chausey, Saint-Martin-de-Bréhal, Gouville-sur-Mer), dans les Côtes-d’Armor (archipel des Sept-Iles, Arcouest, Ile Callot) et dans la rade de Brest (Roscanvel). Sur les côtes de la Manche, de nombreux herbiers de faible superficie (quelques centaines de m²) ont été répertoriés en mosaïque avec des champs de blocs, des roches et le sédiment avoisinant (Bajjouk et al., 2015b). Des herbiers semblent être présents sur des sédiments grossiers dans le Golfe du Morbihan (Urien et al., 2015).
Il est possible que cet habitat soit présent dans d’autres sites entre le Cotentin et le bassin d’Arcachon qui ne sont pas cités dans cette fiche par manque de littérature associée.

Fonctions écologiques

Les herbiers de zostères de manière générale et donc l’habitat A3-4 ont un rôle écologique et fonctionnel important. Ils possèdent d’importantes fonctions écologiques et offrent de nombreux services écosystémiques présentés ci-après (Tullrot, 2009 ; Hily, 2010 ; Angst et al., 2014 ; Bajjouk et al., 2015b).
Les herbiers de zostères atténuent l’hydrodynamisme ce qui favorise la sédimentation des particules sédimentaires et diminue la remise en suspension et l’érosion. Couplé à l’important réseau que forment les racines et les rhizomes des zostères, cela permet la stabilisation des sédiments. Les herbiers de zostères ont également un rôle dans la clarification de la colonne d’eau en abritant des organismes filtreurs en abondance. Les pieds de zostères tendent à retenir les débris de macroalgues à la dérive mais également les débris issus des zostères. Cela enrichit les sédiments en matière organique particulaire ce qui stimule l’activité bactérienne. Les herbiers de zostères ont également un rôle dans le cycle biogéochimique de nombreux éléments (azote, phosphore, oxygène, carbone) et agissent comme des puits de carbone très importants (leur part est estimée à près d’un cinquième du captage océanique total de carbone à l’échelle mondiale ; Röhr et al., 2016).
Les zostères, et donc Zostera marina, sont des espèces ingénieures qui structurent la biocénose benthique grâce à leur structure complexe et qui abritent de nombreuses espèces absentes des sédiments non végétalisés à proximité. Cet habitat a également un important rôle de zone de reproduction pour les juvéniles de poissons, de crustacés (ex : l’araignée de mer Maja brachydactyla) et de mollusques et de réservoirs de nourriture pour certains poissons (bars, labridés) et oiseaux hivernant qui se nourrissent de la faune associée.

Statut de conservation

Les herbiers de zostères marines au sens large sont classés parmi les espèces menacées, sont protégés par la Convention de Berne (Méditerranée), par la Loi Littoral (France) et sont listés par la Convention OSPAR comme habitat menacé et/ou en déclin. Au titre de la DHFF (92/43/CEE), cet habitat est inclus dans l’Habitat d’Intérêt Communautaire (HIC) 1140 « Replats boueux ou sableux exondés à marée basse ». Il peut également correspondre à l’HIC 1130 « Estuaires » ou à l’HIC 1150 « Lagunes côtières » sous réserve de respect des critères d'identification géomorphologiques et de délimitation physiographiques de l'HIC.
Par ailleurs, l’habitat A3-4 abrite de nombreuses espèces protégées (liste rouge UICN mondiale, européenne et régionale, Convention de Berne, Convention OSPAR) ainsi qu’un grand nombre d’espèces patrimoniales et déterminantes ZNIEFF (cf. liste d’espèces associées).

Tendance évolutive

Selon les variations des conditions hydrodynamiques, l’herbier peut subir un ensablement ou au contraire un déchaussement (Ifremer, 2005).

Auteur(s)

Tauran A., Grall J.

Date de rédaction

2020

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