8130-18 - Éboulis carbonatés et siliceux subalpins à alpins à Saxifrage inaperçue, des Pyrénées

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Habitat de l’horizon supérieur de l’étage subalpin et de l’étage alpin.
Il colonise les pierriers, blocs et pieds de falaises en cours de désagrégation, de nature essentiellement carbonatée mais également siliceuse. Du point de vue topographique, il est la plupart du temps situé en pied de falaise, dans des concavités situées souvent juste en aval de sourcins ou en amont de cônes d’éboulis. Il se présente souvent en mosaïque avec les communautés de combes à neige.
L’habitat est exposé préférentiellement au nord (ombrée), mais peut également se rencontrer à d’autres expositions dans la partie occidentale de la chaîne. Il est soumis à un très long enneigement (habitat chionophile) persistant jusqu’au début ou parfois jusqu’au milieu de l’été, selon l’altitude ; l’eau de fonte humidifiant le milieu pendant toute la période de végétation.
Les pierriers relativement bien fixés par la végétation sont en général peu mobiles ; la pente dépassant rarement les 30°.
Une terre fine plus ou moins calcaire selon la nature du substrat (pH légèrement basique à acide) constitue dans les creux et sous les blocs une matrice pauvre en humus et constamment humidifiée.

Variabilité

Une variabilité a été décrite en fonction de la nature lithologique des pierriers et de l’acidité de la matrice fine.
L’association à Saxifrage inaperçue [Saxifragetum praetermissae], neutro-basophile, colonise les pierriers carbonatés surtout, mais non exclusivement. Elle est également caractérisée par la présence de : Arabette des Alpes (Arabis alpina), Pritzelago des Alpes (Pritzelago alpina), Renoncule des Alpes (Ranunculus alpestris)…
Outre une sous-association typique à Saxifrage inaperçue [saxifragetosum praetermissae], deux autres sous-associations ont été décrites :
- une sous-association neutrophile à Épilobe à feuilles d’alsine [epilobietosum alsinifoliae], avec : Saxifrage étoilée (Saxifraga stellaris), Aulacomnium des marais (Aulacomnium palustre) ;
- une sous-association basophile à Véronique nummulaire [veronicetosum nummulariae] de la partie occidentale des Pyrénées.
L’association à Luzule marron sous-espèce de de Candolle (Luzula alpinopilosa subsp. candollei) et Saxifrage inaperçue [Luzulo alpinopilosae subsp. candollei-Saxifragetum praeter- missae] propre aux pierriers siliceux.

Physionomie, structure

Végétation pouvant atteindre un recouvrement exceptionnellement élevé (jusqu’à 95 %) pour des pierriers, apparaissant comme un tapis émaillé des nombreuses fleurs, d’épanouissement très tardif, des Saxifrages inaperçues souvent dominantes.
La flore est constituée en majorité d’hémicryptophytes appartenant à des espèces de pierriers stables très longtemps enneigés, associés à des bryophytes hydrophiles (Aulacomnium des marais). On y trouve ainsi surtout plusieurs espèces lithophiles de stratégie sédentaire : à système souterrain stabilisateur [Sabline pourprée (Arenaria purpurascens), Véronique nummulaire], édificatrices à système aérien stabilisateur [Saxifrage inaperçue, Saxifrage à feuilles opposées (Saxifraga oppositifolia), Saxifrage faux aïzoon (Saxifraga aizoides)].

Confusions possibles

Les éboulis calcaires subalpins et alpins de l’Iberidion spathulatae [Code UE : 8130] des Pyrénées.
Les éboulis siliceux subalpins des stations fraîches [Dryopteridion oreadis ; Code UE : 8110] des Pyrénées.
Les communautés de combes à neige [Code Corine : 36.1], des Pyrénées, d’écologie et de composition floristique différentes.

Dynamique

Cet habitat est permanent tant qu’un équilibre s’établit entre les processus géomorphologiques (mobilité, enneigement, érosion par le ruissellement…) remaniant le milieu et la colonisation par les espèces végétales lithophiles spécialisées. Une tendance à une évolution vers les communautés de combes à neige [Code Corine : 36.1] baso-neutrophiles ou acidiphiles est observable.

Habitats associés ou en contact

Végétation chasmophytique des pentes rocheuses calcaires [Code UE : 8210].
Végétation chasmophytique des parois rocheuses siliceuses [Code UE : 8220].
Communautés de combes à neige acidiphiles [Salicion herba- ceae ; Code Corine : 36.11].
Communautés de combes à neige calcicoles [Arabidion caeru- lae ; Code Corine : 36.12].
Communautés des éboulis siliceux des étages montagnard à nival [Code UE : 8110].
Communautés des éboulis calcaires subalpins et alpins [Iberidion spathulatae ; Code UE : 8130] des Pyrénées.

Répartition géographique

L’habitat appartient à un ensemble de communautés végétales d’écologie singulière réunies dans une alliance (Iberidion spathulatae) endémique pyrénéo-cantabrique.
Les deux associations peuvent se rencontrer dans l’ensemble de la chaîne pyrénéenne. Elles possèdent une vicariante dans les Picos de Europa : l’association à Renoncule de Leroy (Ranunculus alpestris subsp. leroyi) et Saxifrage inaperçue [Ranunculo leroyi-

Valeur écologique et biologique

Habitat très original, endémique des Pyrénées, pouvant couvrir d’importantes surfaces. Il présente une grande valeur écologique et biologique par les conditions très particulières du milieu et le nombre d’espèces spécialisées qu’il renferme. Le cortège floristique compte plusieurs espèces endémiques pyrénéo-cantabriques, comme : Saxifrage inaperçue, Véronique nummulaire, Fétuque des glaciers.

États de conservation

États à privilégier :
Stade optimal de l’habitat.

Autres états observables :
Stades appauvris et stades en voie d’évolution vers les communautés de combes à neige

Tendances et menaces

L’habitat n’apparaît pas pour l’instant globalement très menacé dans les Pyrénées. Toutefois des menaces de destruction directe (créations de pistes et routes, aménagement et extension de domaines skiables, piétinement et pâturage intensifs par les troupeaux, piétinement et bouleversement lors de randonnées, érosion…) et indirecte (dynamique naturelle pouvant faire évoluer l’habitat vers des communautés de combes à neige, changement climatique global éventuel…) existent.

Axes de recherche

Affiner la répartition géographique des différents syntaxons et réaliser les inventaires de la faune associée à cet habitat.
Il serait intéressant de faire un suivi à long terme de ces habitats afin de connaître leur évolution éventuelle lors d’un changement climatique global.

Fiche du cahier d'habitats (format pdf)
Bibliographie

 Bensettiti F., Herard-Logereau K., Van Es J. & Balmain C. (coord.), 2004. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 5 - Habitats rocheux. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 381 p. + cédérom. (Source)