8220-3 - Végétation des rochers siliceux des étages subalpin et alpin des Pyrénées

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Communautés pouvant se rencontrer à toutes les expositions, mais trouvant leur optimum en exposition sud (communautés relativement thermophiles), pouvant descendre à près de 1 900 m (étage subalpin) au nord et se trouvant jusqu’à plus de 3 000 m d’altitude (étage alpin) au sud.
L’habitat occupe les fissures en général très étroites des parois verticales à subverticales des rochers siliceux ; la forme optimale, la plus riche, se trouve sur schistes, des formes appauvries floristiquement sont développées sur les parois granitiques et gneissiques.
Ces parois subverticales ne sont pratiquement jamais enneigées, exposant l’habitat à d’importants contrastes mésoclimatiques (température, humidité, vent) journaliers et saisonniers.
Les végétaux formant ces communautés sont ancrés dans la terre fine, noire, granuleuse, mêlée de petits cailloux provenant de la désagrégation de la roche, de pH légèrement acide (6-6,5), occupant les fissures. Souvent, sur les schistes, la libération de calcaire actif permet la présence d’espèces plutôt calcicoles.

Variabilité

Les communautés varient selon leur localisation géographique ; une vicariance géographique est observée de l’est vers l’ouest :
- dans la partie la plus orientale des Pyrénées (Pyrénées-Orientales et Ariège) : groupement à Saxifrage pubescente [Saxifragetum pubescentis] présentant une variation altitudinale :
à l’étage subalpin (altitude inférieure ou égale à 2 300 m) : variante à Achillée à feuilles de camomille (Achillea chamaemelifolium), Asarine couchée (Asarina procumbens), Éperviè- re de Bourgeau (Hieracium bourgaei), Minuartie de Diomède (Minuartia laricifolia subsp. diomedis), Orpin hérissé (Sedum hirsutum),
à l’étage alpin : sous-association à Saxifrage faux bryum [saxifragetosum], avec en plus : Androsace pubescente (Androsace pubescens), Saxifrage d’Irat (Saxifraga pubescens subsp. iratiana), etc. ;
- légèrement vers l’est, en haute Ariège : groupement à Saxifrage enchevêtrée et Androsace de Vandelli [Saxifrago nervosae-Androsacetum vandellii] : cette communauté trouve son optimum sur le versant espagnol et pénètre en France où elle présente la limite septentrionale de son aire ;
- dans les Pyrénées centrales et centro-occidentales (de la Haute- Garonne aux Pyrénées-Atlantiques) : groupement à Saxifrage d’Irat [Saxifragetum iratianae] ; il correspond à une forme appauvrie par rapport aux précédentes, dépourvue notamment des espèces endémiques des Pyrénées orientales.

Physionomie, structure

Habitat dont le recouvrement total de la végétation ne dépasse pas 10 % au niveau des fissures (faible compétition interspécifique).
La végétation est dominée par des hémicryptophytes et des chaméphytes, ces derniers se raréfiant avec l’altitude, et présente des formes biologiques naines (de quelques centimètres à quelques dizaines de centimètres de hauteur), caractérisées par la lenteur de leur croissance, à port essentiellement en coussinet (Androsaces, Primevère, Saxifrages, Draves) et à feuilles densément pubescentes (Androsaces, Saxifrages, Draves, Épervières).

Confusions possibles

Dans les Pyrénées orientales, avec l’association à Saxifrage tronquée (Saxifraga retusa) [Saxifragetum retusae ; Code UE : 8220], moins thermophile, qui occupe des sites en général ventés et exposés au nord de l’étage alpin.
Dans les Pyrénées centrales, avec la communauté à Saxifrage cotylédon et Primevère hérissée [Saxifrago cotyledonis-Primuletum hirsutae ; Code UE : 8220], occupant des rochers siliceux pauvres à riches en bases de l’étage montagnard et de l’étage subalpin.
Dans les Pyrénées centrales et occidentales, avec la communauté à Cardamine à feuilles de réséda et Primevère hérissée [Cardamino resedifoliae-Primuletum hirsutae ; Code UE : 8220] des étages subalpin et alpin et qui présente certaines espèces en commun avec cet habitat.

Dynamique

Cet habitat est pionnier des fissures étroites des rochers siliceux. De caractère permanent, l’habitat se maintient tant que ses conditions stationnelles particulières perdurent.
L’élargissement éventuel des fissures (favorisées en parois schisteuses) peut parfois permettre l’installation d’espèces des pelouses, sans toutefois former de véritables banquettes pelousaires.

Habitats associés ou en contact

À l’étage subalpin :
- pelouses pyrénéennes siliceuses à Gispet (Festuca eskia) [Code UE : 6140] ;
- pelouses acidophiles à Nard raide (Nardus stricta) [Nardion strictae ; Code UE : 6230*] ;
- landes du Juniperion nanae [Code UE : 4060] ;
- landes à Rhododendron ferrugineux (Rhododendron ferrugineum) [Rhododendron ferruginei-Vaccinion myrtilli ; Code UE : 4060] ;
- mégaphorbaies [Adenostylenion pyrenaicae ; Code UE : 6430] ;
- pinède à Pin à crochet (Pinus uncinata) [Code UE : 9430] ;
- communautés végétales de crêtes siliceuses fissurées [Code UE : 8220] ;
- communautés végétales des fissures des parois verticales, parfois en surplomb, des rochers siliceux pauvres à riches en bases, suintants ou humides une bonne partie de l’année [Code UE : 8220] ;
- communautés végétales des surplombs siliceux [Androsacetum pyrenaicae ; Code UE : 8220].

À l’étage alpin, en plus de ces trois derniers habitats :
- combes à neige acidophiles [Code Corine : 36.11] ;
- pelouses siliceuses orophiles [Festucion supinae ; Code Corine : 36.3] ;
- communautés végétales à Armoise des rochers (Artemisia umbelliformis) [Code UE : 8220].

Répartition géographique

Cet habitat est présent dans la presque totalité de la haute chaîne siliceuse des Pyrénées, où les différentes communautés se succèdent d’est en ouest ainsi :
- groupement à Saxifrage pubescente : massifs siliceux des Pyrénées-Orientales et de l’Ariège ;
- groupement à Saxifrage enchevêtrée et Androsace de Vandelli : surtout présente au versant espagnol (Province de Lerida), elle déborde au versant français en haute Ariège ;
- groupement à Saxifrage d’Irat : massifs siliceux de la Haute- Garonne, des Hautes-Pyrénées et des Pyrénées-Atlantiques.

Valeur écologique et biologique

Cet habitat est endémique des Pyrénées et présente plusieurs espèces endémiques :
- des Pyrénées orientales : Achillée à feuilles de camomille, Saxifrage pubescente ;
- des Pyrénées centrales et centro-occidentales : Saxifrage d’Irat ;
- de l’ensemble des Pyrénées : Saxifrage enchevêtrée, Drave des neiges, Androsace des Pyrénées ;
- pyrénéo-ibériques : Saxifrage à cinq doigts, Épervière de Bourgeau ;
- pyrénéo-cévenoles : Minuartie de Diomède.
Il possède plusieurs espèces protégées au niveau national :
- des espèces végétales : Androsace de Vandelli, Androsace pubescente, Androsace des Pyrénées ;
- une espèce animale : Tichodrome échelette (Tichodroma muraria).

États de conservation

États à privilégier :
Stade de l’habitat présentant une composition floristique optimale, essentiellement en exposition sud.

Autres états observables :
Divers états appauvris aux autres expositions.

Tendances et menaces

Globalement non menacé actuellement, cet habitat peut potentiellement faire l’objet de menaces directes de destruction partielle ou totale : pratique de l’escalade non respectueuse de la végétation et des sites de nidification d’oiseaux rupicoles, ouverture de carrières.
Il peut également faire l’objet de menaces indirectes à long terme : cueillettes abusives de certaines espèces, surfréquentation à proximité (randonnée, ski), pollution atmosphérique près des axes de circulation, évolution dans le cadre d’un changement climatique global.

Axes de recherche

Affiner la typologie syntaxonomique des habitats ; préciser leur répartition géographique.
Il serait intéressant de faire un suivi à long terme de ces habitats afin de connaître leur évolution éventuelle lors d’un changement climatique global.

Bibliographie

 Bensettiti F., Herard-Logereau K., Van Es J. & Balmain C. (coord.), 2004. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 5 - Habitats rocheux. MEDD/MAAPAR/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 381 p. + cédérom. (Source)