9140-2 - Hêtraies subalpines à Érable et Oseille à feuilles d'Arum du Jura et des Alpes

Liste hiérarchisée et descriptifs des habitats des Cahiers d'habitats

Caractéristiques stationnelles

Occupe les sommets des reliefs jurassiens et de certains sommets alpins, entre 1 200 et 1 800 m, ou s’intercale entre la partie sommitale des sapinières-hêtraies montagnardes et les pessières du subalpin moyen (ex. Chartreuse) ;
Aire caractérisée par des précipitations élevées (> 1 800 mm) par une neige abondante, un nombre important de jours de gelées ; action du vent importante en situation de crêtes —› courte durée de la période de végétation.
Sols établis sur argiles de décarbonatation, plus ou moins riches en cailloux et plus ou moins épaisses.
Fréquence d’un horizon humifère épais, noir, en surface.

Variabilité

Variations géographiques :
- race du Jura avec la flore ci-contre constituant un cortège de base se retrouvant dans les autres races ;
- race des Préalpes du nord avec le Saxifrage à feuilles rondes (Saxifraga rotundifolia), Achillée à grandes feuilles (Achillea macrophylla), Tozzie des Alpes (Tozzia alpina), Crépide des Pyrénées (Crepis blattarioides) ;
- race des Alpe du sud : sur sols décarbonatés à Calament à grandes fleurs (Calamintha grandiflora), Saxifrage en coin (Saxifraga cuneifolia) ; sur sols carbonatés avec la Seslérie élégante (Sesleria elegantissima).

Occupe différentes situations topographiques : pentes diversement exposées, vallons, plateaux sommitaux…
- peuplements encore élevés en vallons avec un fort recouvre- ment des hautes herbes (persistance de la neige entraînant une humidité élevée à la fonte), sur plateaux à sols profonds : variante à Barbe de bouc (Aruncus dioicus), Pétasite blanc (Petasites albus) ;
- peuplements plus courts sur sols pierreux ;
- arbres tortueux, rabougris (krummholz) en sommet.

Physionomie, structure

Strate arborescente dominée par le Hêtre, accompagné par l’Érable sycomore, fréquent sur sols dérivant de l’altération de roches calcaires ; s’y ajoutent l’Épicéa (Jura, Alpes du nord) et le Sapin (ensemble de l’aire).
Strate arbustive riche en espèces : Églantier des Alpes (Rosa pendulina), Saule à grandes feuilles (Salix grandifolia).
Tapis herbacé recouvrant dominé par les espèces de mégaphorbiaies (Oseille à feuilles de Gouet, Geranium des bois…) ; strate muscinale développée avec diverses espèces banales.

Confusions possibles

Les sapinières-hêtraies voisines du montagnard supérieur ; la hauteur des arbres y dépasse 20 mètres, les espèces indicatrices citées ci-dessus y sont rares et dispersées. Mais il faut souligner qu’au niveau du terrain un continuum parfait existe entre les deux types d’habitats compliquant l’identification des « hêtraies » sommitales.
Les ormaies-érablaies de ravins installées dans une situation topographique particulière (UE : 9180).
Les pessières installées sur lapiaz (UE : 9410).

Dynamique

Spontanée :
Divers types de pelouses :
Point de départ mégaphorbiaies dans les dépressions, les vallons ; —›  stade arbustif à Saule à grandes feuilles, Sorbier des oiseleurs, Érable sycomore ; —›   arrivée éventuelles de l’Épicéa (souvent sous le Sorbier des oiseleurs) ou entrée du Hêtre, puis du Sapin —› évolution lente vers le type mature.
Au niveau des chablis, présence de Framboisier (Rubus idaeus), de Sureau à grappes (Sambucus racemosa) et de Sorbier des oiseleurs.

Liée à la gestion :
Fréquence des taillis furetés où domine le Hêtre accompagné de l’Érable sycomore.
Dans la plupart des sites, les actions anthropiques passées ont fait disparaître, plus ou moins complètement, le Sapin et l’Épicéa.

Habitats associés ou en contact

Pelouses à Seslérie bleue (Sesleria caerulea) (UE : 6170).
Pelouses à Nard raide (Nardus stricta) (UE : 6230*).
Mégaphorbiaies (UE : 6430).
Prairies de fauche d’altitude (UE : 6520).
Ravins (couloirs d’avalanches ou zones d’accumulation de neige) : érablaie à Orme et Campanule à larges feuilles (Campanula latifolia) (UE : 9180*).
Pessières sur lapiaz (UE : 9410).
Érablaies à Alisier blanc (UE : 9180*).
Fruticées à Sorbier des oiseleurs.
Sapinières-hêtraies montagnardes à Dentaire (Cardamine heptaphylla), Orge d’Europe (Hordelymus europaeus).

Répartition géographique

Jura (hautes chaînes) ; Préalpes du nord et du sud où l’aire de l’habitat reste à préciser.

Valeur écologique et biologique

Très grande valeur écologique du fait de la faible surface couverte par cet habitat.
Rôle de protection des pentes fortes contre l’érosion.
Grande richesse floristique compte tenu du cortège complet d’espèces montagnardes auquel s’ajoutent les espèces de mégaphorbiaies.
Intérêt paysager de certains de ces espaces forestiers.

États de conservation

États à privilégier :
Futaies régulières ou irrégulières de Hêtre, Érable, Sapin (Épicéas).
Taillis fureté à base de Hêtre et d’Érable sur les sommets et crêtes sommitales.
Phases pionnières à Sorbiers, Érables. Certaines phases transitoires à Épicéa…

Autres états observables :
Plantations d’Épicéa hors de son aire d’origine.

Tendances et menaces

Surface couverte tendant à augmenter par reconstitution progressive lente dans les zones pastorales abandonnées.
Aménagements divers liés aux sports d’hiver (pistes, remontées mécaniques, bâtiments…).
Quelques plantations par le passé d’Épicéa (espèce ici autochtone participant au cycle de la forêt).
Ces plantations sont maintenant le plus souvent abandonnées (à ne pas confondre avec des prés-bois à Épicéa ou des phases pionnières à Épicéa de cet habitat).

Potentialités intrinsèques de production

Compte tenu des conditions climatiques sévères et de la situation sommitale, les possibilités d’exploitation sont très faibles voire nulles sur les crêtes et sommets (accident avec la neige, arbres bas et coniques, etc.), seule une éventuelle exploitation pour du bois de chauffe est envisageable (taillis fureté).
Sur les parties inférieures, sous les crêtes, les potentialités sont moyennes voire médiocres mais peuvent conduire à l’obtention de grumes commercialisables. L’Épicéa peut donner des produits intéressants.

Axes de recherche

Futaie irrégulière : suivre la dynamique des peuplements (don- nées d’accroissement), définir une méthode de contrôle.
Enrichissement : définition de seuils, proportions entre essences garantissant une conservation de l’habitat.

Bibliographie

 Bensettiti F., Rameau J.-C. & Chevallier H. (coord.), 2001. « Cahiers d’habitats » Natura 2000. Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 1 - Habitats forestiers. Volume 1. MATE/MAP/MNHN. Éd. La Documentation française, Paris, 339 p. + cédérom. (Source)